Les 775 films en DVD d'Isabelle
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Annuaire complet des films


A


A bout de souffle

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1960, France
Acteurs principaux : Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Roger Hanin (1925 - 2015), Jean Seberg (1938 - 1979)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Michel Poiccard est aux abois, traqué par la police. De toute façon, il l'a bien cherché. Dès le début, il a tué un flic et il a préféré la vendeuse du "Hérald Tribune" à celle des "Cahiers du cinéma"... Deux erreurs fatales. Il voudrait ressembler à Bogart, il n'aura droit qu'au destin maudit de ses personnages. Quelques notes jazzy obsédantes rythment ses dernières bravades inutiles. Godard filme le Paris qu'il connaît : les cinémas des Champs Elysées, les cafés et les chambres de bonne. Il y case ce qu'il connaît aussi fort bien : une intrigue à l'américaine sur un vague scénario de série noir. La greffe prend grâce à un jeune inconnu à grandes oreilles qui nous balance en face : "si vous n'aimez pas, allez vous faire foutre !". Une grande vague (nouvelle) d'insolence et de liberté.

A nos amours

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Réalisé par : Maurice Pialat (1925 - 2003)
En : 1983, France
Acteurs principaux : Dominique Besnehard (1954 - ), Sandrine Bonnaire (1967 - ), Maurice Pialat (1925 - 2003)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Suzanne n'aime personne (sauf son papa). Elle couche avec tout le monde (sauf avec celui qu'elle aime peut-être encore). Logique, elle a 15 ans. Sa carrière de collectionneuse commence en colonie de vacances, se poursuit de chambres d'amis en chambres d'hôtel, finit par un mariage qui se dépèche de mal finir. Que cache le lumineux visage de Sandrine Bonnaire ? Comment Pialat réussit-il à rendre si palpitantes ces morceaux de scènes banales, en vrac et comme prises par surprise, à la dérobée ? Mystère... Comme la vie.

Sasom i en spegel - A travers le miroir

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1961, Suède
Acteurs principaux : Harriet Andersson (1932 - ), Gunnar Björnstrand (1909 - 1986), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Depuis les électrochocs, Karin a l'ouïe très fine. D'étranges cris d'oiseaux la réveillent, des cornes de brume sonnent l'appel du large et, surtout, une foule invisible et murmurante attend avec elle le retour de Dieu par une porte du grenier... Son frère, son père et son mari n'y peuvent rien. Déjà qu'entre eux, malgré leur art, leur culture et leur bonne volonté, les mots ont du mal à passer la rampe. Ils ne peuvent que souffrir avec elle, et encore... Elle a traversé le miroir et se voit encore dedans. Incurable. Ce huis clos en plein air avec vue sur la mer est un magnifique et tragique ballet de visages douloureux, de quêtes inassouvies et d'amours impuissantes.

Sweet and Lowdown - Accords et désaccords

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1999, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Samantha Morton (1977 - ), Sean Penn (1960 - ), Uma Thurman (1970 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Le plus grand guitariste du monde, bien sûr, c'est Django Reinhardt. Le deuxième, c'est Emmet Ray. Comme souvent les artistes (surtout chez Woody), Emmet est une perle d'art dans un corps et une tête de brute. A la guitare, certes, un demi-Dieu. Mais pour le reste, peu de centres d'intérêts présentables : la musique des nègres, les rats des décharges, les trains. Avec les femmes, il est tellement beau parleur que seules une muette et une cérébrale-intégrale arrivent à le supporter. Surtout qu'il n'est que le deuxième plus grand guitariste du monde après Django Reinhardt. Alors, il lui reste l'argent, les fringues et les belles voitures. La frime et la belle vie, pendant que, dans ces années-là, tout le monde rame. Il lui reste aussi un rêve d'Hollywood et quelques espoirs décus. Lui qui ne sera jamais que le deuxième plus grand guitariste du monde après Django Reinhardt.

Ashug-Karibi - Achik Kerib, conte d'un poète amoureux

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Réalisé par : Sergei Parajanov (1924 - 1990)
En : 1988, Géorgie
Genre(s) : conte de fées relooké /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /poésie en image
Caractéristiques : 73 mn, couleur

Critique perso :

Un jeune homme tombe amoureux d’une jeune fille mais, le papa de la fille n’étant pas d’accord, il doit faire ses preuves en passant une série d’épreuves initiatiques, avant de la retrouver… Puisque le scénario est intemporel, la forme l’est aussi, en mode vintage, style Europe de l'Est avant Staline. Les décors, les costumes et tout le story board sont donc pompés sur les icônes du coin, la partition est piquée au folklore local et pourtant, bizarrement, on a plus l’impression d’être dans une installation d’art contemporain que dans un musée à l’ancienne. Et par une sorte de charme magique et mystérieux tombé direct sur la caméra, ce conte du Moyen-Age en tableaux vivants devient une espèce de comédie musicale moderne en costumes traditionnels, ou de mythe au présent.

Across the Universe

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Réalisé par : Julie Taymor (1952 - )
En : 2007, USA
Acteurs principaux : Bono (1960 - ), Jim Sturgess (1978 - ), Evan Rachel Wood (1987 - )
Genre(s) : New York - New York /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 133 mn, couleur

Critique perso :

Fin des années 60 : un petit gars de Liverpool à la recherche de son paternel se décide à traverser l'Atlantique pour le retrouver. Personne ne l'attend, lui, à l'arrivée. Mais il tombe sur une bande d'étudiants en plein trip contre la guerre du Vietnam. Ils s'installent à New York et commencent, presque sans bouger, un Magical Mystery Tour (qui ne figure pourtant pas dans la BO) dans l'Amérique flower power, à la rencontre entre autres d'un certain (I am the) Walrus et d'une certaine (Dear) Prudence. Ils sont bourrés d'idées et d'idéaux (comme la mise en scène), en quête de Revolution et en quête d'eux-mêmes. Hey Jude (ben oui, c'est comme ça qu'il s'appelle), faudra quand même patienter un peu avant d'envoyer Lucy (ben oui, c'est comme ça qu'elle s'appelle) in the Sky... La musique de Quatre garçons dans le vent comme mode d'emploi (les sons, les couleurs et le saint esprit) de toute une époque. Un coup à vous faire regretter de ne pas être né au bon moment.

Ba wang bie ji - Adieu ma concubine

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Réalisé par : Chen Kaige (1952 - )
En : 1993, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Leslie Cheung (1956 - 2003), Gong Li (1965 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914) /vers le soleil levant
Caractéristiques : 171 mn, couleur

Critique perso :

A 10 ans, Douzi est abandonné par sa maman dans les coulisses de l'opéra de Pékin. Pour le faire accepter, elle a dû lui couper au couteau un petit doigt surnuméraire. Bientôt, on le force à chanter que (sans contrefaçon) il est une fille. Forcément, faut pas s'étonner après tout ça s'il a des problèmes d'identité sexuelle. Il devient, donc, chanteur d'opéra. Son rôle fétiche, c'est celui de la concubine malheureuse d'un roi. Son acteur fétiche, c'est le roi. Mais lui, hélas (l'acteur), lui préfère une vraie concubine. Bref, le coup classique des comédiens qui prennent le rôle de leur vie un peu trop à coeur. Mais, derrière les sentiments éternels, derrière la tradition immuable de l'opéra chinois, la vie politique de leur pays au XXème siècle connaît quelques rebondissements et coups de théâtre -qu'ils traversent comme des ombres. Fresque intimiste, mélo énorme ; à la largeur de son ambition.

Adjuster (The)

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Réalisé par : Atom Egoyan (1961 - )
En : 1991, Canada
Acteurs principaux : David Hemblen , Arsinée Khanjian (1958 - ), Elias Koteas (1961 - ), Gabrielle Rose (1954 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

Noah est un agent d'assurance. Pas le genre vendeur-arnaqueur à bagout. Non, lui ce serait plutôt le genre sérieux-compatissant. Il n'intervient qu'après les sinistres, pour s'occuper des clients qui avaient souscrit avec lui. Et il s'en occupe bien de ses clients (avec une préférence certaine pour les victimes d’'incendies). Il les soigne, les loge dans le motel du coin, leur rend visite, les bichonne et (souvent) plus si affinités. Il a une jolie femme modèle, aussi, avec un travail tout ce qu'il y a de plus sérieux et officiel : pour le compte du gouvernement, elle passe son temps à visionner des cochonneries (elle fait partie d'une espèce de commission de classification des images pornos). Ils forment une famille modèle, avec enfant et sa soeur à elle, et vivent dans une maison modèle au milieu de nulle part. Un maison qui a l'air d'avoir servi d'exposition pour un lotissement qui ne s'est jamais construit. Bon, l'histoire évidemment ne se réduit pas à ça. Il y a beaucoup d'autres personnages. Des visiteurs, des passants, des figurants, Ou bien des rodeurs, des mystificateurs, des prédateurs, allez savoir… Pas beaucoup de différences entre tout ça, la frontière est mince et poreuse entre la vie et son cauchemar. La vie, ce truc fourni sans garanties et sans assurances, et sans modèle...

5 Fingers - Affaire Cicéron (L')

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Danielle Darrieux (1917 - 2017), James Mason (1909 - 1984)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Ankara (Turquie), pendant la dernière guerre. Le terrain est neutre : les ambassadeurs des deux camps s'observent et cohabitent, tout en prenant grand soin de ne surtout pas se croiser au détour d'un couloir. Une comtesse ruinée cotoie les uns et les autres. Son ex-majordome, désormais valet de chambre de l'ambassadeur anglais, fricotte contre finances avec l'ennemi allemand. Pas d'effets de suspens, ici : nous savons tout de tous, ce qui n'est le cas de personne d'autre. Nous sommes les seuls à pouvoir évaluer le subtil réseau de relations et de dépendances, d'asservissements et de soumissions, qui lie les personnages les uns aux autres. Nous serons aux premières loges de la déconfiture ironique de chacun. Le meilleur film d'espionnage que je connaisse, en forme de grand jeu de dupes à qui perd gagne... et où tout le monde perd, bien sûr...

Thomas Crown Affair (The) - Affaire Thomas Crown (L')

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Réalisé par : Norman Jewison (1926 - )
En : 1968, USA
Acteurs principaux : Faye Dunaway (1941 - ), Steve McQueen (1930 - 1980)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

Quiconque a un peu joué aux échecs (et je ne prétends pas du tout être une spécialiste !) sait que, pour s'assurer le contrôle d'une case adverse et menacer la pièce qui s'y trouve, il faut que plusieurs de ses propres pièces soient en position de prise. Et qu'une partie est une manière de tisser et retisser un complexe réseau de positions de contrôle réciproques. C'est la base du scénario de ce film (et de sa forme, aussi, puisque le split screen y est utilisé pour transformer l'écran en échiquier). Deux grands maîtres s'y affrontent. Ils disposent chacun de pièces maîtresses, des plus belles motivations humaines : l'argent, l'amour, le pouvoir -et partagent la capacité de savoir s'en servir et le goût du risque. Mais ils sont irrémédiablement adversaires. La partie culmine, of course, dans une vraie partie d'échecs torride (la seule chose dont se souviennent ceux qui ont vu le film il y a longtemps). Le plaisir est esthétique, sensuel et cérébral. Réussite et mat !

Brutti sporchi e cattivi - Affreux, sales et méchants

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Réalisé par : Ettore Scola (1931 - 2016)
En : 1976, Italie
Acteurs principaux : Nino Manfredi (1921 - 2004)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Affreux, certes. Sales, incontestablement. Méchants, à coup sûr. Mais d'abord et avant tout : pauvres. Entassés comme des rats dans un bric à brac de fortune, mais avec vue sur le Vatican. Dans les années 70, il y avait encore des bidonvilles à Rome (et ailleurs aussi). Et des pauvres. L'heure n'est plus à la dignité qu'ils manifestaient chez Rosselini, De Sica ou Pasolini. Ici, c'est plutôt Shakespeare dans un tas d'ordures, avec des gens pas sympas dont rien de bon ne sort. Miroir à peine déformant de la société normale, de ceux qui savent y mettre les formes (beaux, propres et gentils) mais qui, au fond, partagent les mêmes valeurs : l'argent, l'argent et l'argent (et le sexe, aussi). Et si l'on est parfois tenté de rire, c'est avec la grossièreté du désespoir.

African Queen (The)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Katharine Hepburn (1907 - 2003)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914) /épique pas toc
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Guerre de 14, en pleine brousse africaine, loin de tout. Une vieille fille anglaise, qui a suivi dans ce trou son frère missionnaire, et un aventurier frustre se retrouvent sur un bateau -le fameux African Queen. Personne ne tombe à l'eau, mais c'est thé à 5h contre gin à la bouteille. Ils échaffaudent pourtant bientôt un projet extravagant : en gros, transformer leur raffiot rafistolé en lanceur de roquettes et attaquer le plus gros navire allemand de la région. En route, ils font connaissance avec l'Afrique et avec eux-mêmes. Ce bizarre mélange d'héroïsme en haillons pour has-been qui ont de beaux restes et de romantisme exotique arrive à nous faire croire à l'aristocratie du coeur. Et à l'improbable magie du cinéma.

Logan's Run - Age de cristal (L')

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Réalisé par : Michael Anderson (1920 - )
En : 1976, USA
Acteurs principaux : Peter Ustinov (1921 - 2004), Michael York (1942 - )
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Quelque part dans le XXIIIème siècle, quelque part sous une bulle étanche, la population humaine continue de se perpétuer. Une société de jeunes gens vit là dans l'insouciance : habillés en collants-paréo à la mode 70, ils n'ont rien d'autre à faire qu'à glander dans le hall-centre commercial-club med qui leur sert de terrain de jeu, et à draguer à domicile via une espèce d'Internet full 3D. Les machines s'occupent du reste. A 30 ans, ils deviennent les héros d'une cérémonie étrange censée leur permettre de renaître après s'être littéralement fait exploser en vol. Ceux qui essaient de partir par d'autres moyens sont nettoyés vite-fait par des "limiers" d'élite. Logan est de ceux-là. Pour lui, tout irait pour le mieux dans le meilleur des enfers possibles jusqu'à ce qu'il reçoive la mission d'infiltrer ses ennemis récalcitrants et à sortir de sa bulle. Sur des ambiances proches, c'est tout de même nettement moins percutant que Soleil vert ou La Planète des signes. Mais il y a plus de minijupes.

Sabotage - Agent secret

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1936, Angleterre
Acteurs principaux : Oskar Homolka (1898 - 1978), John Loder (1898 - 1988), Sylvia Sidney (1910 - 1999)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 76 mn, NB

Critique perso :

A Londres, la nuit, se promènent de drôles d'oiseaux. Ce M. Verloc, par exemple : il fuit tellement la lumière qu'il vient de saboter l'éclairage public ; il fuit tellement la lumière qu'il vit dans un cinéma. M. Verloc a une épouse, aussi, qui ne se doute de rien, et un enquêteur de Scottland Yard aux fesses qui, lui, a les plus noirs soupçons. Derrière l'écran (de son cinéma et de ses nuits blanches), devant un étrange aquarium (qui en anticipe un autre), se trament de sombres complots. Il s'agit cette fois de faire exploser une bombe en plein coeur de Londres (décidément très en avance, les gars). Une histoire à tiroirs et à double fonds, qui permet à Hitchcok d'aiguiser ses meilleurs crayons : le suspense des comptes à rebours, la victime innocente, la surprise du destin qui abolit les surprises... Sans oublier les oiseaux, qui n'y sont pour rien et qui se vengeront.

Agora

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Réalisé par : Alejandro Amenabar (1972 - )
En : 2009, Espagne
Acteurs principaux : Michael Lonsdale (1931 - ), Rachel Weisz (1971 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /à l'antique /épique pas toc
Caractéristiques : 127 mn, couleur

Critique perso :

Alexandrie, quelques siècles après J.C., un millénaire et demi avant Marie Curie et Simone de Beauvoir : une grande bibliothèque, pas mal de petits hommes. Pour les guider, ils ont un phare et ils ont Hypathie, la prof de physique-philo dont rêvent tous les adolescents (et tous ses étudiants). Elle est belle et elle s'en fiche, il n'y a que le ciel qui l'attire, le vrai, celui sans Dieu mais avec des étoiles dedans. Quand une petite secte obscure et sournoise (chrétiens, qu'ils se disent) prend violemment le pouvoir en mettant le feu à la bibliothèque, elle ne pense qu'à sauver quelques antiques parchemins (et son papa). Aux révolutions de palais, elle préfère celles des astres et quand les statues tombent, elle ne s'intéresse qu'à la chute des corps. Et qu'importe si Amenabar, plein de bonne volonté, lui fait plagier par anticipation (avec une douzaine de siècles d'avance) les expériences de Galilée, les résultats de Kepler et la pensée de Descartes : il a inventé le peplum laïc féministe niveau bac S, je ne le remercierai jamais assez !

Aguirre, der Zorn Gottes - Aguirre, la colère de Dieu

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Réalisé par : Werner Herzog (1942 - )
En : 1972, Allemagne
Acteurs principaux : Klaus Kinski (1926 - 1991)
Genre(s) : carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Une patrouille perdue de conquistadors en armures, lancée dans une expédition en Amazonie. Objectif : l'Eldorado, territoire de la richesse absolue caché dans la forêt vierge des fantasmes. Penché, tordu, toujours une tête de moins que ses interlocuteurs, Aguirre est l'âme damnée du groupe, celui dont le regard halluciné est le seul à voir la direction à prendre. Quand le fleuve et les indigènes hostiles leur en laissent le temps, ces égarés se proclament solennement empereur des lieux, représentants légitimes de Dieu au pays des rêves. Ils reconstituent une parodie de cour royale avec les moyens du bord. Et vogue le radeau, vers l'inéluctable naufrage des grandeurs illusoires. Beau comme une catastrophe tranquille.

Himmel über Berlin (Der) - Ailes du désir (Les)

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Réalisé par : Wim Wenders (1945 - )
En : 1987, Allemagne
Acteurs principaux : Solveig Dommartin (1961 - 2007), Peter Falk (1927 - 2011), Bruno Ganz (1941 - ), Otto Sander (1941 - 2013)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914) /poésie en image
Caractéristiques : 127 mn, NB/couleur

Critique perso :

Les anges sont parmi nous. Invisibles (sauf aux enfants), ils voient tout, entendent toutes nos pensées, traversent les murs (même celui de Berlin, alors bien debout !) et ne peuvent (presque) rien pour influencer le cours du monde et le destin des hommes -commes les artistes, peut-être. Ils nous plaignent et nous envient parfois, nous pauvres mortels, d'avoir des sens et des émotions. Alors certains franchissent la barrière (des espèces) pour apprendre à vivre vraiment... Ce magnifique poème visuel, ode incantatoire à l'humanité, à l'amour et à ceux qui en témoignent dans leur art, est là pour nous rappeler encore et encore la dureté et la beauté du monde.

Aleksandr Nevskiy - Alexandre Nevski

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1938, Russie
Acteurs principaux : Nikolai Cherkasov (1903 - 1966)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /épique pas toc
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

La Russie en 42 : les tatars menacent à l'est, les teuton grondent à l'ouest. Au fait : c'est le XIIIème siècle. Pour faire face aux redoutables envahisseurs germaniques, cachés derrière leurs casques extravagants et leurs capes blanches à croix noire, un héros-pêcheur est appelé à la rescousse. Il a fait ses preuves face aux suédois, il s'appelle Alexandre, ça rassure. Le peuple russe, la terre russe, les chants russes : tout le monde (russe) est avec lui. L'hymne patriotique est décliné suivant une succession de tableaux animés éblouissants, pleins de trognes, de lances et de ciel, qui culminent lors d'une méga-baston de près d'1/2h sur un lac gelé, qui vaut bien celle du Seigneur des anneaux (épisode 3). Genre propagande épique, mais où l'art terrasse à plate couture les intentions politiques.

Alice

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1990, USA
Acteurs principaux : Judy Davis (1955 - ), Mia Farrow (1945 - ), William Hurt (1950 - ), Jo Mantegna (1947 - )
Genre(s) : New York - New York /conte de fées relooké /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

Alice est une grande petite fille pas bien dans sa vie : son appart est trop grand, son mari trop gentil, ses enfants trop polis. Trop heureuse pour être heureuse. Le sourire d'un saxophoniste de passage et les étranges herbes du mystérieux Dr. Yang sauront-ils la faire passer de l'autre côté du miroir ? Possible, mais faudra beaucoup de zen et pas mal de magie pour décoincer la grande bourgeoise, et la faire devenir ce qu'elle est. Dire qu'elle a failli ne jamais ressembler à Mia Farrow, quel gâchi ça aurait été ! Période où Woody se passionnait pour les états fluctuants et les métamorphoses des femmes -et surtout de la sienne. Période où son génie, c'était de révéler le sien.

Germania anno zero - Allemagne année zéro

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Réalisé par : Roberto Rossellini (1906 - 1977)
En : 1948, Italie
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 78 mn, NB

Critique perso :

Edmund est un ange blond d'une douzaine d'années. Edmund est né du mauvais côté -côté allemand- à une mauvaise période -les années 30. Dans les ruines post-apocalyptiques de Berlin dévastée, il cherche de quoi aider ce qui lui reste de famille à subsister : troc, marché noir et combines, dont il est plus souvent la victime que l'instigateur. Comme tous les enfants, c'est une éponge. Et le climat délétère de l'époque n'est pas très bon pour une poitrine d'enfant. Le chantre de la résistance italienne montre qu'il aime aussi ses ennemis : les nazis -du moins, qu'il n'a rien contre leurs rejetons. Parce que les premières victimes des guerres, ce sont les enfants. Ca rappelle vaguement quelque chose : l'éternelle histoire de l'innocent qui expie la faute de ses pères.

I Was a Male War Bride - Allez coucher ailleurs

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1949, USA
Acteurs principaux : Cary Grant (1904 - 1986), Ann Sheridan (1915 - 1967)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 103 mn, NB

Critique perso :

Dans l'Allemagne convalescente, les forces alliées occupantes sont multinationales... et mixtes. Le French Capitaine Rochard est ainsi amené à faire équipe avec la Lieutenante yankee Gates. Leur mission confidentielle tourne aussitôt à la guerre des nerfs et des sexes, puis à la scène de ménage pré-nuptiale. Ils signent l'armistice devant un maire, un curé et un pasteur, mais un ordre d'évacuation interrompt la nuit de noce. D'ailleurs, Cary Grant n'arrive pas à passer une seule nuit complète dans un lit, pendant tout le film (ce qui, vu par les américains, doit être le comble de ce qui peut arriver à un français). Comme ses mains ont parfois de drôles d'envies, il préfère mettre des gants. En fait, il découvre progressivement sa vraie nature, qui n'éclate que dans la dernière partie du film : celle d'épouse de guerre frustré(e). Comme quoi, une fois de plus, c'est en déguisant la réalité qu'on la découvre le mieux.

Father's Little Dividend - Allons donc, papa !

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Réalisé par : Vincente Minnelli (1903 - 1986)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Joan Bennett (1910 - 1990), Elizabeth Taylor (1932 - 2011), Spencer Tracy (1900 - 1967)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 82 mn, NB

Critique perso :

Stanley, la cinquantaine pimpante, est un parfait chef de famille responsable, époux d'une ménagère modèle comblée, et père de trois merveilleux grands enfants. Alors qu'il commence à envisager un repos bien mérité, il apprend qu'il est enceint de son premier petit-fils. Et comme il ne semble pas prévu dans son contrat que Liz Taylor (qui joue la future heureuse maman) prenne un gramme, la grossesse par procuration s'annonce nerveuse. Bon, avec un tel scénario, pas de quoi faire le film d'action du siècle. Juste assez pour lancer un petit coup de sonde dans les profondeurs de l'Amérique, et d'en tirer un petit sourire de surface. Les desperate housewives ont sûrement eu des parents et des grands-parents qui ressemblaient à ceux-là.

Alphaville

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1965, France
Acteurs principaux : Eddie Constantine (1917 - 1993), Anna Karina (1940 - ), Akim Tamiroff (1899 - 1972)
Genre(s) : Paris /c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /poésie en image
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

Lemmy Caution, il vient d'une autre galaxie et il parle comme les livres. Une nuit, il débarque à Alphaville, cette ville d'ombres et de lumières qui ressemble à Paris mais qui n'est pas Paris, avec une osbcure mission d'espionnage poétique. A Alphaville, tout est régi par un grand ordinateur, alpha60. Mais à quoi bon un alpha qui ne tend pas vers l'oméga de l'amour ? Pendant qu'alpha60 donne des cours de sémantique générale (pompés à Borgès), Lemmy Caution, toujours filmé à hauteur d'ascenceur, tente d'enseigner la littérature (celle d'Eluard, entre autres) et l'amour aux séductrices de niveaux 1 à n qui tiennent lieu de jeunes filles. Cette uchronie de science-politique-fiction-polar plagie par anticipation 2001, Brazil et Playtime, tout en annonçant de façon visionnaire Metropolis et 1984.

Amadeus

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Réalisé par : Milos Forman (1932 - 2018)
En : 1984, USA
Acteurs principaux : Tom Hulce (1953 - ), Jeffrey Jones (1946 - ), F. Murray Abraham (1939 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /en avant la musique /entre Berlin et Moscou
Caractéristiques : 160 mn, couleur

Critique perso :

Biopic d'un certain Mozart, par le petit bout de la lorgnette (mal embouchée) d'un de ses rivaux, un certain Salieri. Salieri, c'est le roi des médiocres, le génie des nazes. Il veut mettre son (petit) talent musical au service de Dieu, en échange d'1/4h (voire plus si possible) de gloire. Mais Dieu s'en fout. Mozart, lui, n'a rien demandé et il a tout reçu -même le droit d'être vulgaire. Alors, à défaut d'être aimé de Dieu (comme Ama-deus), Salieri devient le devil-ex-machina de la vie de l'autre. Tout en l'admirant secrêtement, il le harcèle, le torture, l'assassine au petit feu du travail. Il venge ainsi tous ses frères humains qui ne naissent pas, quoi qu'ils en disent, libres et égaux en dons. Après un tel film, le silence est encore du Mozart, mais le malaise est encore du Salieri.

Ossessione - Amants diaboliques (Les)

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Réalisé par : Luchino Visconti (1906 - 1976)
En : 1943, Italie
Acteurs principaux : Massimo Girotti (1918 - 2003)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 140 mn, NB

Critique perso :

Passager clandestin d'un camion, il débarque dans une station service. En tablier dans la cuisine, elle se vernit les ongles. Un regard suffit : début de l'histoire. Entre eux : un mari gras et vulgaire, une passion dévorante. Et la misère, comme une menace. Ils sont trop pauvres pour être honnêtes, mais trop petits pour leur destin. Il prendra des chemins détournés, le destin, mais il est le plus fort et il fait mal. Et l'éternel malentendu entre les hommes et les femmes ne tarde pas à se manifester. C'est une tragédie grecque tombée dans la boue : un film noir (un bon). Une date dans le cinéma italien, qui préfigure à la fois Rosselini (mais moins lyrique et compassionnel) et Visconti (avant ses coquetteries d'esthète).

Under Capricorn - Amants du Capricorne (Les)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1949, USA
Acteurs principaux : Ingrid Bergman (1915 - 1982), Joseph Cotten (1905 - 1994)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

Ca sent le piège : les amants sont en fait des époux, et apparemment plus tellement si épris que ça. Ils vivent en Australie, début XIXème. Pour se retrouver là-bas à ce moment-là, faut soit porter un uniforme, soit avoir eu des choses à se reprocher, et à fuir. On sait assez vite à quelle catégorie appartient chacun des personnages : tous enfermés dans leur rôle, leur histoire, leur héritage social, leurs petites prisons portatives. Pour zigzaguer à l'aise dans cette geôle, Hitchcock met des ailes à sa caméra. Il la fait virevolter dans les pièces, fureter entre ses acteurs, capter en douce la moindre esquisse de geste, la moindre ébauche de sentiment. L'histoire rappelle un peu celle de Rebecca : c'est du lourd, mais filmé par un papillon. Là sans doute est le piège... le gros monsieur cacherait-il donc une âme de midinette ?

Amarcord

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1973, Italie
Acteurs principaux : Magali Noël (1932 - 2015)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 127 mn, couleur

Critique perso :

Fellini plonge dans sa mémoire d'enfant. Il se souvient de ses profs fatigués, de ses camarades de classe et de leurs complots de pissotières. Il se souvient de son confesseur enrhumé. Il se souvient de tout ce qui tombe du ciel : les aigrettes du printemps, la neige des mauvais jours, les premiers désirs. Il se souvient de types en chemises noires à la gachette chatouilleuse. Il se souvient d'une dame en rouge qui attirait tous les regards. Il se souvient de Fred Astaire et de Gary Cooper. Il se souvient d'un prince arabe et de ses 40 sirènes. Il se souvient d'une buraliste généreuse. Il se souvient de sa famille : son père maçon, sa mère dévouée et leurs engueulades qui mettaient du sel dans le potage. Il se souvient d'un grand père encore vert. Il se souvient d'un oncle trop grand pour son âge, qui jouait à tonton perché en réclamant "una dona" pour passer l'été. Il se souvient de ses souvenirs et il invente un film au présent de la mémoire (Kusturica lui a tout piqué), grand et fou comme l'enfance.

Quiet American (The) - Américain bien tranquille (Un)

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1958, USA
Acteurs principaux : Claude Dauphin (1903 - 1978), Michael Redgrave (1908 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

Comme dans La Comtesse aux pieds nus, le film commence par une mort violente dont on apprend la cause en flash-back. Par exemple, que l'arme du crime est une citation de Shakespeare... Le mort est un jeune américain, débarqué quelques mois auparavant de son plein gré au Vietnam, du temps où il s'appelait encore l'Indochine. La guerre gronde au Nord. Pour l'instant, elle ne concerne que les communistes et les Français. L'américain boy scout sympathise avec un journaliste britanique revenu de tout. Ils se donnent mutuellement des leçons de démocratie et de savoir-vivre et, bientôt, aiment la même femme (ça promet). Les fils de la tragédie domestique s'emmêlent bientôt avec ceux de la politique. Les tireurs de ficelles, eux, restent dans l'ombre. Elégant et complexe, comme seul Mankiewicz en était capable.

American in Paris (An) - Américain à Paris (Un)

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Réalisé par : Vincente Minnelli (1903 - 1986)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Leslie Caron (1931 - ), Gene Kelly (1912 - 1996), Oscar Levant (1906 - 1972)
Genre(s) : Paris /en avant la musique
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

Vue d'Amérique, Paris est un rêve, un mirage, un pays merveilleux, un Brigadoon sur Seine. En fait, Paris n'existe pas, ce sont les peintres qui l'ont inventée rien que pour la peindre (même les décorateurs du film se sont fait avoir : on aperçoit la Tour Eiffel, dans le fond, qui repose sur un socle...). Prenez un peintre américain misérable, par exemple, qui vit sous les toits et tente laborieusement de vendre ses tableaux aux pieds de Montmartre, hé bien, il chante et il danse comme un Dieu (c'est-à-dire comme Gene Kelly), il fait des rencontres fabuleuses à chaque coin de rue, il n'a pas un sou et il est heureux (c'est vraiment n'importe quoi). Un film carte-postale, donc, de celles qu'on s'envoie à soi-même pour se dire qu'on pourrait être heureux.

Blaue Engel (Der) - Ange bleu (L')

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Réalisé par : Josef von Sternberg (1894 - 1969)
En : 1930, Allemagne
Acteurs principaux : Marlene Dietrich (1901 - 1992), Emil Jannings (1884 - 1950)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /en avant la musique /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

A l'Ange bleu, cabaret mal famé, il y a une fille sur un tonneau qui chante qu'elle est "faite pour l'amour de la tête aux pieds". Il suffit de la voir pour y croire. Débarqué là-dedans pour y traquer ses élèves les plus dissipés, un vieux et sévère professeur de collège se met soudain à y croire -à l'amour. Avec la fille sur le tonneau. Mais l'ange l'entraine en enfer, la poule le transforme en coq de (très) basse cour. Et le mauvais théatre où il s'était égaré sera aussi le témoin cruel de sa lamentable déchéance. Première victime identifiée de Marlène Dietrich (ce sera pas la dernière), le vieux prof est pitoyable est touchant. On se régale de son piteux spectacle, parce qu'il y a des moments où il vaut mieux être dans la salle que sur la scène.

Angel at My Table (An) - Ange à ma table (Un)

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Réalisé par : Jane Campion (1954 - )
En : 1990, Nouvelle-Zélande
Acteurs principaux : Kerry Fox (1966 - )
Genre(s) : pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 158 mn, couleur

Critique perso :

Forcément, avec son gros corps maladroit, ses frusques usées et sa grosse tignasse rousse sur les verts patûrages néo-zélandais, elle fait un peu tache. Et puis, ça vit dans un trou à rats et ça voudrait faire des études littéraires ? Janet Frame -c'est son nom- est pourtant paraît-il une des plus grandes écrivaines de son pays. Mais, toute sa vie, elle s'est sentie de trop, pas à la bonne place, pas à sa place du tout. La bonne société de son temps pensait visiblement la même chose, puisqu'elle l'a envoyée des années entières chez les fous, avec doses réglementaires d'électrochocs. Le plus dingue, c'est qu'elle s'en soit sortie. En scènes brèves et quotidiennes, défile la vie très ordinaire d'un très banal génie terriblement timide. Et ça donne le seul biopic supportable que je connaisse, parce que son héroïne n'est pas une star, que sa vie est le contraire du glamour et qu'elle n'a jamais eu aucun destin à accomplir, à part celui de faire tache. Une vraie artiste, quoi.

Angels with Dirty Faces - Anges aux figures sales (Les)

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Réalisé par : Michael Curtiz (1886 - 1962)
En : 1938, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), James Cagney (1899 - 1986), Pat O'Brien (1899 - 1983), Ann Sheridan (1915 - 1967)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Au début, c'est comme dans l'Ennemi public : deux gamins des rues mettent au point un mauvais petit coup de plus. C'est raté. Celui qui court le plus vite réussit à sauver sa peau (des gendarmes) et son âme (il deviendra prêtre). Pour l'autre, c'est vraiment raté : maisons de redressement, prisons, mauvais petits coups qui deviennent des gros mauvais coups. Libéré, il roule des épaules et des mécaniques et revient habiter dans son ancien quartier, narguer son premier complice et montrer le (mauvais) chemin aux nouveaux gamins de son ex-rue. Conte moral(isant), heureusement pas trop gnangnan grâce au charme canaille de Cagney, à son énergie explosive (il a toujours l'air d'être à l'étroit dans ses costumes et entre 4 murs). Même la rédemption finale par le jeu (de basket ou de théâtre) se permet d'être ambigüe, c'est dire l'audace.

Duo luo tian shi - Anges déchus (Les)

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 1995, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Takeshi Kaneshiro (1973 - ), Leon Lai (1966 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 92 mn, NB/couleur

Critique perso :

Les anges, comme les vampires, sortent plutôt la nuit et ne causent pas beaucoup. Ils remplissent avec beaucoup de sérieux des boulots étranges : auto-employé clandestin de magasin pendant les heures de fermeture, nettoyeuse d'appartement de fonction pour tueur à gages, emmerdeuse professionnelle. Ils ont des partenaires de travail -voire plus si affinités- qu'ils mettent beaucoup de soin à ne jamais rencontrer. La plupart du temps (qui, au pays de Wong, ne s'écoule jamais tout à fait comme ailleurs), ce sont des oiseaux de nuit au regard las, des marginaux qui ne se promènent jamais très loin d'une balle perdue. A moins que ce ne soient des hommes perdus, jamais très loin des balles gagnées. Cette histoire était prévue pour être la troisième de Chunking Express. La solitude, comme à ses personnages, lui sied bien.

Annie Hall

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1977, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Jeff Goldblum (1952 - ), Diane Keaton (1946 - ), Tony Roberts (1939 - )
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 93 mn, couleur

Critique perso :

Woody Allen joue Alvie Singer, un comique dépressif qui habite Manhattan (rien de bien surprenant, donc) ; Diane Keaton joue Annie Hall, une apprentie chanteuse aux goûts vestimentaires très personnels. Le temps d'une partie de tennis et d'une mémorable chasse à l'écrevisse dans une cuisine, ils deviennent amants. Elle a peur des araignées et fume des joints pendant l'amour. Il aime Bergman, est lâche et inconstant, mais aussi capable de grands sacrifices (comme d'aller se perdre quelque temps en Californie pour la retrouver !). Le film est une chronique constamment inventive, drôle, ironique et émouvante, de leur relation : ses hauts, ses bas, ses à côté... et surtout, ce qu'il en reste, après : des lieux à jamais marqués, des situations qu'on essait de reproduire (les écrevisses...), l'envie d'en parler et de la reconstruire en écrivant une pièce de théâtre. Comme presque tous ceux de son auteur, ce film raconte à sa manière sa propre génèse. Comme presque tous ceux de son auteur, il est excellent.

Année dernière à Marienbad (L')

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1961, France
Acteurs principaux : Delphine Seyrig (1932 - 1990)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Au jeu de Marienbad, quand on connaît le truc et qu'on joue en premier, on est sûr de gagner. Mais les humains, on ne sait jamais trop à quel jeu ils jouent. Ces pingouins en cage dans un chateau, par exemple, qu'est-ce qu'ils font à ne jamais rien faire ? Et ce type, là, toujours en train d'essayer de parler à cette statue de chair en forme de Delphine Seyring, qu'est-ce qu'il cherche ? A la faire descendre de son piedestal ? A l'emmener dans les limbes ? A la piéger dans sa toile d'araignée de mots ? A l'hypnotiser pour qu'elle retrouve la mémoire ? A réveiller la somnambule qui sommeille en elle ? Petit jeu de cache-cache en labyrinthe mental. Petite leçon de jubilation gelée.

Dragao da Maldade contra o Santo Guerreiro (O) - Antonio das Mortes

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Réalisé par : Glauber Rocha (1939 - 1981)
En : 1969, Bresil
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique /en avant la musique /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Ecoutez, bonnes gens, la balade de l'infortuné Antonio (normalement, c'est en portugais du Brésil, traduction approximative). Mercenaire des puissants, démon exterminateur, c'est Antonio de la Mort qui tue. Mais, après avoir trucidé un sous-sous-commandant Marcos de carnaval de plus et croisé le regard absent d'une sainte, Antonio change son fusil de cible. Antonio vire mystique, bloc de volonté butée, tueur à rage au service des pauvres. Un objet filmique non identifiable et non assimilable, comme une forte tête qui aurait le regard dans les nuages. Une chanson de gestes poétique deguisée en sud-western folklorique -et inversement-.

Apocalypse Now

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Réalisé par : Francis Ford Coppola (1939 - )
En : 1979, USA
Acteurs principaux : Marlon Brando (1924 - 2004), Robert Duvall (1931 - ), Laurence Fishburne (1961 - ), Harrison Ford (1942 - ), Dennis Hopper (1936 - 2010), Christian Marquand (1927 - 2000), Martin Sheen (1940 - )
Genre(s) : pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 202 mn, couleur

Critique perso :

Au Vietnam, dans les années 70 (et à plein d'autres endroits et plein d'autres époques), des hommes ont eu le sentiment de vivre la fin du monde. On appelle ça la guerre. Ca provoque généralement un mélange d'horreur et de fascination, de dégoût et de jouissance. Ca exacerbe tout : la connerie et le sublime -deux formes de folie qui finissent, dans ces conditions, par se ressembler. Au Vietnam, donc, dans les années 70, les Américains ont tenté d'acclimater les fleurons de leur culture (le surf, les playmettes de Play Boy et le rock'n roll) dans le bourbier des rizières. Ca n'a pas très bien marché. Ils ont tenté le napalm, aussi... Evidemment, ce film plein de bruit et de fureur ne fait pas dans la demi-mesure. Il relève plutôt de l'expérience sensorielle extrême, en évoquant un retour aux sources de la barbarie, et mène sur une révélation (le vrai sens d'"apocalypse" en grec) obscure qu'on n'est pas près d'oublier.

Aprile

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 1998, Italie
Acteurs principaux : Nanni Moretti (1953 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 78 mn, couleur

Critique perso :

En Italie comme ailleurs, il est de mauvais avrils -celui de 94, qui a vu l'élection d'un certain Berlusconi- et il en est de plus joyeux -la naissance de Pietro Moretti 1er, deux ans plus tard. Moretti-le père fait du cinéma. Pendant cette période, il hésite entre le documentaire sur l'état de son pays où l'appelle son devoir, et cette comédie musicale sur un pâtissier trotskiste des années 50, dont il rêve depuis Journal intime. Filmer les foules en manif ou son bébé en couches culottes ? Quella è la questiona ! Mais son art poétique, lui, est fixe -comme sa caméra- comme sa capacité intacte à s'énerver devant la lâcheté, le mensonge et les mauvais films américains. Autoportrait narquois en papa névrosé, journal à ciel ouvert, succulente gâterie "de gauche" d'un artisan-expert.

Argent (L')

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Réalisé par : Marcel L'Herbier (1890 - 1979)
En : 1928, France
Acteurs principaux : Alfred Abel (1879 - 1937), Pierre Alcover (1893 - 1957), Antonin Artaud (1896 - 1948), Jules Berry (1883 - 1951), Yvette Guilbert (1865 - 1944), Brigitte Helm (1908 - 1996), Henry Victor (1892 - 1945)
Genre(s) : Paris /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 164 mn, NB

Critique perso :

Le Deus ex-Machina de cette histoire est invisible et immortel, et c'est le maître du monde. Il a son temple (la Bourse), son clergé (les banquiers) et ses adorateurs (les boursicotteurs et les cocottes). Il y a bien quelques bizarres excentriques qui prétendent ignorer son culte : cet aviateur Hamelin, par exemple. Mais, même lui, il lui doit quelques courbettes pour espérer réaliser sa traversée de l'Atlantique. Saccard est de ceux qui ont le pouvoir de réaliser ce genre de rêve. Quand sa banque prend l'eau, il spécule sur la vie des hommes et sur la corruptibilité des femmes. Le film est comme un grand monopoly grandeur nature (superbe plateau !) où les plus fidèles du Maître ont toujours un coup d'avance. Vous croyiez encore qu'il a fallu une bonne crise pour soupçonner que les dés du capitalisme sont peut-être un peu pipés ? Que la mondialisation du fric a attendu la fin du XXème siècle ? Les bonnes blagues...

Armoire volante (L')

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Réalisé par : Carlo Rim (1905 - 1989)
En : 1948, France
Acteurs principaux : Fernandel (1903 - 1971)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 90 mn, NB

Critique perso :

De l'humour noir et de l'absurde à l'anglaise (à la mode Frenchy façon Drôle de drame), un Fernandel en mode parano persécuté : attention perle méconnue ! Le cadavre (d'une vieille tante insupportable) est dans le placard, ou plutôt au fond d'une armoire insaisissable. Elle est passée par les déménageurs, elle repassera par le bordel, les truands et l'armée du salut... Les démarches les plus compliquées pour la récupérer n'arrivent qu'à compliquer l'affaire - ou à la faire filer encore plus entre les doigts comme une poignée de sable fin. Le film, plein de rimes et de paradoxes, se prend à merveille à son propre contre-pied, comme un acte manqué qui durerait 1h30. Une espèce de comédie macabre (ou de cauchemar drôle) pas du tout manquée.

Twelve Monkeys - Armée des 12 singes (L')

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Réalisé par : Terry Gilliam (1940 - )
En : 1995, USA
Acteurs principaux : Brad Pitt (1963 - ), Christopher Plummer (1927 - ), Madeleine Stowe (1958 - ), Bruce Willis (1955 - )
Genre(s) : c'était demain /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 125 mn, couleur

Critique perso :

Cette science fiction-là, avec sa technologie de bric et de broc détraquée au service d'un pouvoir monstrueux, on la reconnaît vite : c'est celle de Terry Gilliam. Effectivement, le début de L'Armée des 12 singes pourrait être la suite post-apocalyptique de Brazil, où le rêve (ici un souvenir d'enfance récurrent) est encore la seule échappée possible de l'enfer. Mais bien vite, on suit Bruce Willis qui expérimente le Vertigo et les délices du voyage dans le temps avant d'en comprendre les inquiétants paradoxes. Il découvrira que la pire prison est celle de sa tête et de son destin et, pour une fois, malgré son beau corps musclé, ne parviendra pas à sauver le monde. Pour lui et pour l'ambiance déglinguée à souhait, ce film supporte tous les paradoxes temporels de la revoyure...

Armée des ombres (L')

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Réalisé par : Jean-Pierre Melville (1917 - 1973)
En : 1969, France
Acteurs principaux : Jean-Pierre Cassel (1932 - 2007), Claude Mann (1940 - ), Paul Meurisse (1912 - 1979), Simone Signoret (1921 - 1985), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /la parole est d'or /pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 136 mn, couleur

Critique perso :

C'était pendant la guerre -la dernière, jusqu'à nouvel ordre. Ils étaient français et engagés dans la seule armée digne de ce nom -celle de l'ombre. Ce sont des héros mutiques, pas causants, pas tendres, pas gentils. Des héros, quoi. Clandestins dans leur propre pays, dans leur propre vie. Leur grand chef est un grand mathématicien-épistémologue (ce qui n'est pas pour me déplaire). On le voit faire un tour à Londres, le temps de prendre les conseils et la médaille d'un grand type à petite moustache, et d'aller voir Autant en emporte le vent. Le reste du temps, c'est la guerre. Des nerfs, surtout, parce que c'est le nerf de la guerre. Il y a des morts -beaucoup- et presqu'aucune larme. Le film est sec et glacé, à son image. Chaleureux aussi, à la leur.

Hustler (The) - Arnaqueur (L')

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Réalisé par : Robert Rossen (1908 - 1966)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : Piper Laurie (1932 - ), Paul Newman (1925 - 2008), George C. Scott (1927 - 1999)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 134 mn, NB

Critique perso :

Dans le jargon local, un arnaqueur est un type qui fait mine de mal jouer au billard pour faire monter les paris, et envoie finalement tout le monde au tapis en empochant la mise. C'est un sport dangereux, qui ne marche qu'une fois. C'est le métier de Fast Eddie : beau comme Brando, sorti de nulle part, pas d'avenir très clair. Mental fragile quand il joue pour de vrai. A priori, donc : une histoire de boules et de queues, une histoire de mecs. Heureusement, il y a aussi Sarah, séduite par Eddie -et par les alcools forts : belle comme Liz, sortie de nulle part, pas d'avenir très clair. Mental fragile quand elle aime pour de vrai. Une histoire de fuites et de combats, une histoire d'anges déchus.

Arrête ton char... bidasse !

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Réalisé par : Michel Gérard (1933 - )
En : 1977, France
Acteurs principaux : Robert Castel (1933 - ), Darry Cowl (1925 - 2006), Pierre Tornade (1930 - 2012)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /nanar pur sucre
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Inutile de dire que ce titre inconnu au bataillon art et essai fait un peu tache sur mes étagères, et que c'est plutôt un cadeau empoisonné dont je tairai pudiquement l'auteur (merci frangin !). Allez savoir pourquoi, je suis assez insensible à la nostalgie des copains de régiment, au comique trouffion, aux charmes de la caserne-colonie de vacances, aux plans drague foireux. Heureusement que le colonel Darry Cool, esthète des potirons, fait quelques apparitions - sinon, il faut bien reconnaître qu'aucun des jeunes acteurs du contingent n'a, depuis, donné de signe de vie artistique. Même pas assez gros et gras pour postuler à la rubrique burlesque émoustillant. Tout juste bon pour une soirée M6 (enfn, c'est peut-être encore trop bon pour eux, j'en sais rien, je n'ai pas la télé !).

Blood and Sand - Arènes sanglantes

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Réalisé par : Rouben Mamoulian (1897 - 1987)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : John Carradine (1906 - 1988), Linda Darnell (1923 - 1965), Rita Hayworth (1918 - 1987), Tyrone Power (1914 - 1958), Antony Quinn (1915 - 2001)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 125 mn, couleur

Critique perso :

C'est le genre de films qui fait un genre à lui tout seul : le genre film de corrida hollywoodien. Le cahier des charges inclut du folklore, des filles sexys et des méchants taureaux. Et un p'tit gars qui part de rien et qui n'en veut. Qui veut devenir un mec, un vrai. Il rêve sans doute secrètement d'emballer les taureaux et de massacrer les filles, Mais, cet idiot, il fait exactement le contraire. Débuts difficiles, mais il s'accroche. Quelques aller-retour Seville-Madrid et quelques tours d'arènes plus tard, le gars commence à maîtriser sa géométrie (des cercles et des droites, donc) et son art. Maîtriser sa vie, c'est moins facile. Mais bon, c'est aussi le genre de films dont le titre donne le programme. Et de toute façon, on verrait mal l'intérêt d'un film hollywoodien avec un torero qui meurt de vieillesse dans son lit. Bref, tout est prévisible, sauf la beauté et la grâce du spectacle. Parfois.

Wong gok ka moon - As Tears Go By

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 1988, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Maggie Cheung (1964 - ), Andy Lau (1961 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /vers le soleil levant
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

Une histoire d'amour entre deux petits gansgters encore en apprentissage, une autre histoire d'amour entre l'un d'eux et sa gentille cousine. Le gars est en short-tongs-tee shirt, la fille est jolie. C'est à peu près tout. Des bastons au ralenti, des cigarettes en gros plan qui ne sont pas pressées de brûler. Des couteaux, des dominos et des pistolets, qui finissent bien par se rencontrer. C'est à peu près tout. Un Mean Street du pauvre en idéogrammes très déchiffrables, parce qu'écrit dans la langue d'un poète de l'image. Encore en apprentissage, mais déjà ceinture noire de mélancolie. Chez lui, le temps a toujours plein de bonnes raisons de s'arrêter, et il s'arrête souvent. C'est à peu près tout, c'est déjà suffisant pour qu'on ne l'oublie jamais.

Assassin habite au 21 (L')

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Réalisé par : Henri-Georges Clouzot (1907 - 1977)
En : 1942, France
Acteurs principaux : Suzy Delair (1917 - ), Pierre Fresnay (1897 - 1975), Pierre Larquey (1884 - 1962), Noël Roquevert (1892 - 1973)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 84 mn, NB

Critique perso :

Ca a brièvement l'apparence d'un film noir à l'anglo-saxonne mais en fait, c'est une comédie à la française, sorte de Drôle de drame parisien. Un murder case (whodunit, comme dirait Agatha) en vase clos, vu que l'assassin -un serial killer à cartes de visites (avec meurtres en caméra subjective, s'il vous plait !)- a eu le bon goût de laisser les traîner (ses cartes) à son adresse. Au 21 (3 puissance 3), donc, il y a une pension de (sans-)familles excentriques : la vieille fille qui écrit des romans policiers, le magicien qui ne se produit plus nulle part, l'ex-boxeur aveugle (et son infirmière), le militaire en retraite d'on ne sait où (même pas lui) -j'en passe et des pires, tous le genre potentiel suspect, comme dans Le Corbeau, mais en plus drôle. Déguisé en pasteur, l'inspecteur Vorobechik -bientôt rejoint par son exubérante fiancée- n'est pas le moins pittoresque de la bande. Ils ne seront d'ailleurs pas trop de deux pour affronter un aussi ubiquitaire assassin... Un bon divertissement qui date d'une époque où ça en manquait un peu (de divertissement pas de serial killers...).

Double Indemnity - Assurance sur la mort

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1944, USA
Acteurs principaux : Fred MacMurray (1908 - 1991), Edward G. Robinson (1893 - 1973), Barbara Stanwyck (1907 - 1990)
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 107 mn, NB

Critique perso :

Walter Neff est le genre de type qui se balade toujours avec des allumettes dans les poches -le genre qui s'enflamment toutes seules, en les grattant avec le pouce. Phyllis Drietrichson est le genre de nana qui se balade toujours avec pas grand chose sur le dos et une chaîne en or à la cheville. Il s'y connaît en assurances -il en vend-, elles s'y connaît en emberlificotage d'hommes -elle a déjà un mari. Entre eux, ça s'enflamme tout seul, presque sans gratter. Logiquement, la prochaine étape obligée consiste à zigouiller le mari, et à toucher l'assurance qu'il ne sait même pas qu'il vient de signer. Si possible en faisant jouer la clause de "double indemnité", qui optimise les profits. Et les emmerdes. Parce que, faut dire, c'est Walter qui nous raconte tout ça, une balle et pas mal d'amertume près du coeur, comme le fera aussi son cousin Joe du fond de sa piscine de Sunset Blvd. Encore un grand couillon avec un faible pour les pétasses perruquées. Le genre de films qui invente un genre nouveau. Le genre qui rend grandioses les criminels amateurs minables, genre grands couillons et pétasses perruquées.

Atalante (L')

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Réalisé par : Jean Vigo (1905 - 1934)
En : 1934, France
Acteurs principaux : Jean Dasté (1904 - 1994), Dita Parlo (1906 - 1971), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /poésie en image
Caractéristiques : 89 mn, NB

Critique perso :

Au cinéma, il est souvent sorti des eaux des choses intéressantes : un cuirassé nommé Potemkine, un Boudu... L'Atalante, elle, glisse : c'est une péniche. Le patron s'appelle Jean, la patronne (qui vient de se marier avec le patron, mais n'a encore jamais vu la ville) Juliette et le marinier (qui, lui, est allé partout et a tout vu) père Jules. Il y a aussi un gamin et des chats, mais on ne sait pas comment ils s'appellent. Trois fois rien, mais en liberté, une espèce de famille re/dé-composée dans une ambiance de fête foraine. Ca n'avance pas vite, une péniche, et pourtant le monde entier les attend aux 4 nations (le bistrot du coin), dans la mémoire et sur la peau du père Jules, au détour d'un canal. Pourtant la petite croisière vaudra bien l'expérience de toute une vie. Un film comme une pépite mal dégrossie sortie des flots calmes. Vigo, c'est le Rimbaud -ou l'Evariste Galois- du cinéma : un éclair, puis la nuit. Toute sa vie dans un film.

Atame ! - Attache-moi !

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Réalisé par : Pedro Almodovar (1949 - )
En : 1990, Espagne
Acteurs principaux : Victoria Abril (1959 - ), Antonio Banderas (1960 - ), Francisco Rabal (1926 - 2001)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Au désespoir de tout le personnel féminin de l'établissement, Ricki est enfin autorisé à quitter l'institution psychiatrique où il a passé sa jeunesse. Il n'a qu'une idée en tête : épouser Marina, la belle actrice porno qu'il a déjà croisée (et même un peu plus) une fois. Pour lui démontrer ses qualités de mari idéal, il la traque, lui offre des chocolats puis finalement la sequestre chez elle et l'attache sur son lit, tout en la pourvoyant à volonté en psychotropes divers. Jaloux, possessif, attentionné : pas de doute, il a la vocation d'époux modèle à la mode espagnole de l'époque. Le mariage comme syndrôme de Stockholm librement consenti (bien plus horrible que les films d'horreur que tournait Marina avant de connaître Ricki) : la pilule est tellement colorée qu'on l'avale sans s'en rendre compte.

Dead of Night - Au coeur de la nuit

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Réalisé par : film à sketchs
En : 1945, Angleterre
Acteurs principaux : Michael Redgrave (1908 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 102 mn, NB

Critique perso :

Un petit architecte débarque dans un cottage anglais où on l'appelle pour réaménager les plans du domaine. Officiellement, c'est la première fois qu'il vient là. Mais le lieu et les gens qu'il y croise, il les connaît par coeur : il n'arrête pas de les voir en rêve. Un rêve qui, apparemment, se termine très mal... Pour conjurer le mauvais sort (et à défaut de jouer au Cluedo), tout le monde se met à raconter une histoire qui fait peur. Des histoires d'objets, de maisons ou de gens hantés, à votre guise. Des histoires (l'une d'elle est dûe à M. Hamer) de prémonitions, de possessions et de perditions. Des histoires à dormir debout et à crier couché, tellement saisissantes que, des fois, on a l'impression de les avoir déjà vues en rêve. Le petit architecte arrivera-t-il à mettre un peu d'ordre dans ce chaos ? Rien n'est moins sûr...

Hori, ma panenko - Au feu, les pompiers

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Réalisé par : Milos Forman (1932 - 2018)
En : 1967, Tchécoslovaquie
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 71 mn, couleur

Critique perso :

C'est un bal des pompiers au fin fond d'un trou tchèque, vu comme par un petit trou dans le rideau de fer. Le doyen doit être honoré pour ses 86 ans, ses loyaux services et son cancer. Les jeunes viennent pour draguer, les vieux pour piller discrétos les lots de la tombola. Un commando de ringards s'improvise jury sélectionneur d'un concours de Miss qui ne semble pas tenir toutes ses promesses. Un empoté trouve même le moyen de mettre le feu à sa maison alors que l'orchestre s'essayait à une version fanfare d'un tube des Beatles, c'est dire comment tout fout le camp. En fait, tout le monde veut bien un peu de solidarité, à condition que ce soit les autres qui soient solidaires. C'était en Tchécoslovaquie, quand elle s'estimait encore avoir le droit de se moquer des apparatchiks en casquette.

In nome del popolo italiano - Au nom du peuple italien

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Réalisé par : Dino Risi (1916 - 2008)
En : 1971, Italie
Acteurs principaux : Yvonne Furneaux (1928 - ), Vittorio Gassman (1922 - 2000), Ugo Tognazzi (1922 - 1990)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Un petit juge italien intègre et barbu doit enquêter sur la mort d'une jeune fille. La jeune fille fréquentait des vieux messieurs, pour le plus grand profit de ses braves parents provinciaux. Parmi les fréquentations, le petit juge repère Lorenzo Santenocito, un industriel multicarte, pollueur-escroc-magouilleur multirécidiviste, le tout-Rome corrompu à lui tout tout seul. Tout ce qu'il adore. Il prend donc l'enquête à coeur et Lorenzo en grippe, et se lance dans une partie de cache-cache qui n'amuse que lui (et les spectateurs). Le combat entre les deux grands monstres se joue à armes inégales, voiture de luxe contre vespa. Il y a décidément quelque chose de pourri dans l'empire romain de l'après-guerre. Heureusement, au même moment, l'Italie gagne la coupe du monde de foot. L'honneur est donc sauf.

Sunrise: A Song of Two Humans - Aurore (L')

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Réalisé par : F. W. Murnau (1888 - 1931)
En : 1927, USA
Acteurs principaux : Janet Gaynor (1906 - 1984), George O'Brien (1899 - 1985)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

C'est l'histoire d'un mec qui hésite entre sa maîtresse et sa femme, entre la ville et la campagne, entre l'ombre et la lumière. C'est l'histoire d'un type pour lequel tout semble difficile, qui doit se battre sans arrêt contre les autres, contre la nature et surtout contre la sienne propre. C'est l'histoire d'un homme qui est toujours un peu largué, dépassé, lourd, étranger à lui-même et au monde. Est-ce ainsi que les hommes vivent ? C'est l'histoire d'un acteur qui a toujours l'air de s'être trompé de plateau, de ne pas être dans le bon décor. C'est l'histoire d'un cinéaste qui a inventé l'art de faire du sens avec des images, et des images avec du sens.

Gone with the Wind - Autant en emporte le vent

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Réalisé par : Victor Fleming (1883 - 1949)
En : 1939, USA
Acteurs principaux : Clarck Gable (1901 - 1960), Leslie Howard (1893 - 1943), Vivien Leigh (1913 - 1967), Olivia de Havilland (1916 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /épique pas toc
Caractéristiques : 238 mn, couleur

Critique perso :

A 16 ans, Scarlett est la reine des pique-nique. Son papa lui donne la recette de la potion magique du Sud, à base de terre rouge de Tara, la propriété familiale. Elle commence sa longue carrière de peste professionnelle en dragant le copain de sa cousine -une sainte. En 4h, elle réussira tout juste à l'embrasser 2 fois, tout en se permettant d'ignorer superbement le superbe Rhett Butler. Lui, elle mettra 10 ans à l'épouser (le temps de liquider 2 maris falots) et 20 ans à se rendre compte qu'elle l'aime peut-être, finalement. Cette histoire est un peu le remake en son et couleurs de la Naissance d'une nation. La 1ère partie, en rouge, est une longue succession de scènes de dépit amoureux sur fond de guerre de sécession. La 2ème partie est un long mélo. Des fois, on se dit que Fleming, qui venait tout juste de finir Le Magicien d'Oz, s'est un peu embrouillé dans les scénarios et qu'il a recasé les mêmes répliques (sur le thème : "there is no place like home") dans les deux. Attention monument ! Mais à part quelques scènes, pas sûr qu'il tienne si bien au vent...

Anatomy of a Murder - Autopsie d'un meurtre

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1959, USA
Acteurs principaux : Ben Gazzara (1930 - 2012), Lee Remick (1935 - 1991), George C. Scott (1927 - 1999), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 160 mn, NB

Critique perso :

Paul Biegler est un pêcheur à la ligne assez performant -et un avocat occasionnel pas mauvais non plus. Alors, quand une certaine Laura vient lui demander très gentiment de défendre son cher assassin de mari, il flaire le gros poisson. Le mari est coupable, personne (même pas lui) ne le conteste, mais était-il responsable au moment des faits ? Ca, ça se discute. Et les américains ne discutent jamais aussi bien que dans une cour d'assise. Paul est assez bon pour diriger les projecteurs de la procédure là où il faut, pour coacher son casting de témoins et pauffiner leur texte sans avoir l'air d'y toucher (la clé de l'affaire, c'était à prévoir, est dans la culotte de Laura). Preminger aussi.

Avanti !

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1972, USA
Acteurs principaux : Jack Lemmon (1925 - 2001)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 140 mn, couleur

Critique perso :

Cours d'italien élémentaire à usage de businessman américain (stressé, cela va sans dire). Au programme : ethnologie des rites funéraires des îles du sud, bain de soleil et dîner forcé en amoureux... Rossellini avait pourtant prévenu : on croit faire un Voyage en Italie pour régler une affaire d'héritage, et on se retrouve face à l'éternité. Billy Wilder, lui, a plus de 2h devant lui et c'est un coquin. Il se perd dans les couloirs d'un hôtel géré par les descendants méditerranéens de Feydeau, infiltré d'autochtones trop typiques pour ne pas être vrais... Malgré de mauvaises dispositions initiales, le businessman apprend vite. Par exemple, que la traduction approximative mais correcte de "Avanti !", ça pourrait être "vas-y coco", ou encore "cours-y vite (il va filer...)".

Adventures of Robin Hood (The) - Aventures de Robin des Bois (Les)

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Réalisé par : Michael Curtiz (1886 - 1962)
En : 1938, USA
Acteurs principaux : Errol Flynn (1909 - 1959), Eugene Pallette (1889 - 1954), Claude Rains (1889 - 1967), Olivia de Havilland (1916 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

Alors que le roi Richard (coeur de lion) revient des croisades par le chemin des écolier, son frère Jean (langue de vipère) prend les choses (du pouvoir) en main. Sa trésorerie irait pour le mieux s'il n'y avait pas ce Robin (oeil de biche, sourire d'ange) pour contester son autorité. Robin est officiellement un noble, mais il est un peu mal élevé. A quelques années près, on aurait pu l'appeler un résistant. Au lieu de vivre dans un chateau, comme tout le monde, il préfère les camps scouts itinérants en pleine forêt, en compagnie d'hommes en collants qui passent leur temps à se bagarrer à coups de bâtons, ou à festoyer façon banquet de fin d'album d'Astérix. Marianne est apparemment la seule femme de la région. Elle s'habille en nonne et ne quitte pas sa forteresse, mais ne résiste tout de même pas longtemps à la meilleure flèche du Royaume. Le scénario est celui de tous les jeux d'enfants turbulents depuis 70 ans. Les costumes sont du kitsch qui ne se démode pas. Le film est de l'étoffe dont on fait les mythes.

Aviator (The)

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Réalisé par : Martin Scorsese (1942 - )
En : 2004, USA
Acteurs principaux : Alan Alda (1936 - ), Kate Beckinsale (1973 - ), Cate Blanchett (1969 - ), Willem Dafoe (1955 - ), Leonardo DiCaprio (1974 - ), Ian Holm (1931 - ), Jude Law (1972 - ), John C. Reilly (1965 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /portrait d'époque (après 1914) /épique pas toc
Caractéristiques : 170 mn, couleur

Critique perso :

20 ans dans la vie d'un homme et dans l'histoire d'Hollywood. Le type s'appelle Howard Hughes, et il a deux passions qui ont à peu près le même âge que lui : les avions et le cinéma. Et les femmes, mais pas n'importe lesquelles : Jean, Kate, Ava... entre (beaucoup) d'autres. Ca doit être too much pour un seul homme : Howard est un cinglé en surcis. Comme dans tous les films américains, il prend ses décisions debout, en parlant très vite et en fronçant à peine le sourcil. Comme dans tous les films de son auteur, il est aussi un ange déchu qui dégringole (deux fois) du ciel (la deuxième fois, son coeur passe à droite, ce qui est très mauvais signe). Scorsese, lui a une seule passion : le cinéma. Et les femmes. Dans ce miroir par procuration, plein de guest stars rêvées, il se cherche une famille et trouve surtout toutes les névroses qui vont avec.

Avventura (L')

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Réalisé par : Michelangelo Antonioni (1912 - 2007)
En : 1960, Italie
Acteurs principaux : Lea Massari (1933 - ), Monica Vitti (1931 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 145 mn, NB

Critique perso :

Anna aime sandro qui aime Anna, tout en ayant l'air de s'ennuyer à mourir. Anna s'éclipse en douce, Sandro la cherche un peu, mais il a déjà trouvé Claudia qui était l'amie d'Anna. Claudia aussi cherche Anna et finit par trouver Sandro pas si mal. Ce film, c'est comme un brouillon qu'on raturerait devant nous, pour en ajouter ou en retirer un personnage. Pour les envoyer d'un côté, et puis finalement de l'autre. C'est aussi l'histoire d'un crime parfait : l'assassinat en direct d'un amour, et la naissance d'un autre qui ne vaut guère mieux. C'est un peu Stromboli et Voyage en Italie remontés à l'envers, comme en roue libre, en ayant l'air de s'en fiche mais avec la trouille (de ne pas être à la hauteur de sa vacuité) au ventre. Les paysages naturels et les couloirs des résidences sont d'une profondeur vertigineuse. L'abîme vide des êtres qui y déambulent aussi.

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B


Baie des anges (La)

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1963, France
Acteurs principaux : Claude Mann (1940 - ), Jeanne Moreau (1928 - 2017)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 82 mn, NB

Critique perso :

Entraîné par un collègue un peu plus audacieux que lui, Jean, jeune banquier comme il faut, entre pour la première fois dans un casino à Enghein. Il a commis son péché originel, son grand horloger de père le chasse de chez lui. Mais il a gagné de quoi s'offrir des vacances sur la côte d'azur, avec pour viatique sa veine de débutant. Son nombre fétiche, c'est 17 (impair et manque), comme dans Pension Mimosas. C'est comme ça qu'il croise Jackie, blonde platine simili-Marilyn, imprévisible petite boule blanche poussée par on ne sait quoi à errer sans fin vers une case toujours provisoire. Jackie, évidemment, mise tout sur la roulette. Elle a un grain auquel Jean n'est pas si étranger qu'il le voudrait bien -grain que Demy a malicieusement mis sur leur deux joues, au même endroit (d'ailleurs, Jean ne l'aurait-il pas refilé, par hasard et sans le faire exprès, à des demoiselles qui l'ont au creux des reins -c'est fou !- ?). Ils se coltinent ensemble les montagnes russes de la passion et du jeu. Qu'ils gagnent ou qu'ils perdent, le film, lui, sec et impitoyable, raffle toujours la mise.

Baisers volés

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1968, France
Acteurs principaux : Daniel Ceccaldi (1927 - 2003), Claude Jade (1948 - 2006), Michael Lonsdale (1931 - ), Jean-Pierre Léaud (1944 - ), Delphine Seyrig (1932 - 1990)
Genre(s) : Paris /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

1968. Antoine Doinel, l'ado turbulent des 400 coups est devenu un jeune homme romantique. Enthousiaste et maladroit, éternel étonné doutant de tout. De belles mains qui bougent beaucoup, et inventent des gestes qui n'appartiennent qu'à elles. Toujours amateur de littérature -surtout Balzac, Stendhal et Flaubert- et de jolies femmes -surtout celles chez qui on mange du fromage, et qui ont des parents sympas. Il essaie tous les métiers, tous les lits, toutes les humeurs. Instable mais pas révolté -sa mèche est ce qu'il a de plus rebelle. L'adolescence grave a fait place à une jeunesse étourdie et pétillante : le plus léger de la série des Antoine Doinel, le plus drôle et le plus euphorisant. Un personnage qui a bien vieilli, regardé avec indulgence, comme en arrière, avec la nostalgie de ce qu'il n'a pas encore vécu.

Narayama bushiko - Ballade de Narayama (la)

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Réalisé par : Shohei Imamura (1926 - 2006)
En : 1983, Japon
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 130 mn, couleur

Critique perso :

4 saisons près de Narayama, en un temps indéterminé mais certainement lointain. Quelques familles sur 3 ou 4 générations, les travaux des champs, les pulsions des corps, le riz et la neige. Une petite société coupée de tout, sauf de ses besoins essentiels et de la nature. Pauvre, impitoyable, vivante. Trucculente, puisqu'il faut bien continuer à exister. Cruelle, par souci d'auto-préservation. Soucieuse de son honneur -même sans samouraïs- et panthéiste -même sans prêtres. L'éternelle histoire de la trahison des anciens, de la trahison des plus jeunes et de la fidélité au monde.

Man Who Wasn't There (The) - Barber (The)

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Réalisé par : frères Coen
En : 2001, USA
Acteurs principaux : Frances McDormand (1957 - ), Billy Bob Thornton (1955 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 116 mn, NB

Critique perso :

Le coiffeur, dans les films, c'est au mieux un second rôle. Ed, lui, rêve d'une Place au soleil. Il n'est pas causant, notre coiffeur. Il écoute, il observe. Il regarde les cheveux pousser, s'émerveille que ça continue même après la mort. D'ailleurs, il est peut-être déjà mort. Ou alors, ce sont les autres qui le sont. Le monde selon Ed est un peu étrange. Pour changer de vie, il tente bien une ou deux choses. Mais alors, invariablement, des hommes très sérieux en costume 3 pièces viennent lui annoncer des trucs horribles : la prison, la mort. Un remake prolétaire et somnambulique de Noblesse oblige qui est aussi la meilleure adaptation que je connaisse de l'Etranger de Camus, à la sauce noir(e).

Barry Lyndon

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1975, Angleterre
Acteurs principaux : Marisa Berenson (1946 - ), Ryan O'Neal (1941 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 184 mn, couleur

Critique perso :

Il semble que Kubrick n'aimait pas beaucoup son époque (cf. Lolita, Dr Folamour) et mettait peu d'espoir dans l'avenir (cf. Orange mécanique). Avec ce film, nous voilà rassuré : il n'avait pas non plus beaucoup d'estime pour le passé ! Pas même dans le XVIIIème siècle, où sembla culminer pourtant le sens du raffinement et de la maîtrise de soi. Pour preuve, on suit l'éducation -pas sentimentale du tout- d'un jeune bourgeois-paysan-pauvre de cette époque. Sorti d'Irlande, il devient, via l'armée, la feinte et le cynisme, un parfait bourgeois-homme du monde-riche. Puis un rien du tout. Les images de ce film éclairé à la bougie, on ne les avait jamais vues avant. La cruauté des hommes, hélas, est de toutes les époques...

Barton Fink

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Réalisé par : frères Coen
En : 1991, USA
Acteurs principaux : Steve Buscemi (1957 - ), Judy Davis (1955 - ), John Goodman (1952 - ), John Turturro (1957 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 116 mn, couleur

Critique perso :

Barton, dramaturge qui en a sous la tignasse, vient de triompher sur les planches de New-York avec sa pièce : une histoire de vrais gens. Hollywood, en plein âge d'or, l'appelle. Sur place, sans doute pour ne pas perdre le contact avec les vrais gens, il prend un hôtel hors du temps. Un nabab lui passe commande d'un scénario de film de catch - c'est dans ses cordes, ça le catch, avec des vrais gens... Barton retourne à ses p(l)ages blanches et au papier peint de sa chambre. Hors le monde, hors la vie -sauf celle de son encombrant et bavard voisin de pallier. Quand, enfin, il arrive à attirer dans son lit la muse d'un grand-écrivain-du-sud-alcoolo (toute ressemblance avec un auteur dont le nom commence par Faulk...), la mécanique dramatique folle démarrre enfin. Barton se laisse alors un peu déborder par son encombrant et bavard voisin de synapse... Méfiez-vous des réalisateurs à tignasse : ils sont capables de faire de grands films avec des tocards.

Deadline - U.S.A - Bas les masques

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Réalisé par : Richard Brooks (1912 - 1992)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Ethel Barrymore (1879 - 1959), Humphrey Bogart (1899 - 1957), Kim Hunter (1922 - 2002)
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Le compte à rebours a commencé pour Ed, rédacteur en chef super-compétent du « Day », quotidien new yorkais sous pression. Avec ses journalistes, il a des plusieurs affaires sur le feu, Ed : une sombre histoire de politicien véreux, celle d’une jeune fille retrouvée nue et noyée dans son manteau de fourrure. Et quelques autres, comme d’hab. Il a aussi une ex-femme désabusée, sur le point de refaire sa vie sans lui. Et là-dessus, les filles indignes du fondateur du journal veulent revendre le titre à la concurrence pour le liquider. Un vrai emploi du temps de super-héros. Un vrai film de super héros de la démocratie avec des vrais gens dedans.

Batman

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Réalisé par : Tim Burton (1958 - )
En : 1989, USA
Acteurs principaux : Kim Basinger (1953 - ), Michael Keaton (1951 - ), Jack Nicholson (1937 - ), Jack Palance (1919 - 2006)
Genre(s) : New York - New York /c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké
Caractéristiques : 126 mn, couleur

Critique perso :

Une drôle de chauve-souris s'est installée à Gotham City, cette Metropolis du passé qui se serait inventée un futur. Elle s'appelle Batman, et se déguise occasionnellement en homme ordinaire, très riche et très chiant. Un héros aux deux visages, donc, qui ne serait à l'aise qu'avec les affaires à tiroir et les personnalités doubles (voire plus si affinités). Le Joker, comme son nom l'indique, est assez doué dans ce domaine : l'homme qui rit (de se voir si laid en son miroir) serait-il enfin un adversaire à la mesure de Batman..? Des personnages de cartoon camouflés en acteurs, jouant aux petites voitures vernies dans un New-York en légos sculptés.

Beau mariage (Le)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1982, France
Acteurs principaux : Féodor Atkine (1948 - ), Arielle Dombasle (1958 - ), André Dussolier (1946 - ), Pascal Greggory (1954 - ), Béatrice Romand (1952 - )
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 97 mn, couleur

Critique perso :

Sabine a un amant, mais elle n'a plus l'air bien accro. Elle a décidé de se marier, mais surtout pas avec lui. En fait, elle ne sait pas encore du tout avec qui. Mais elle a une copine qui, elle, a l'air d'avoir un avis sur la question. La copine lui lance presqu'habilement son gentil cousin entre les pattes. Ca ne se passe exactement comme prévu, mais pas forcément pour les raisons prévues. En fait, les postulants-tourtereaux ont tout pour se plaire, et c'est ce qui les sépare le plus. Ils ne se fréquentent guère, parce qu'ils se comprennent peut-être trop bien. Bref, il ne se passe quasiment rien et pourtant c'est comme si on venait d'assister à une grande aventure. Rohmer plagie par anticipation son futur Conte d'automne. Ca, encore, c'est compréhensible. Mais comment donc fait-il pour inventer ce qui se passera plus tard dans la tête de filles comme moi qui n'en ont pas encore la moindre idée ? Ca, c'est le vrai mystère.

Much Ado About Nothing - Beaucoup de bruit pour rien

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Réalisé par : Kenneth Branagh (1960 - )
En : 1993, Angleterre
Acteurs principaux : Kate Beckinsale (1973 - ), Kenneth Branagh (1960 - ), Michael Keaton (1951 - ), Keanu Reeves (1964 - ), Emma Thompson (1959 - ), Denzel Washington (1954 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Ca ressemble à la Toscane -ou au Paradis, ce qui est à peu près pareil. Mais c'est trop tard : les humains ont déjà appris à parler, pour s'aimer ou pour se tromper. Les hommes reviennent de guerre, de la gloire plein les poches. Les femmes les attendent -plus ou moins-, des fleurs plein les bras. Ils se parlent, ils jouent à jouer, à s'aimer et à se tromper. Ils en font toute une histoire, ils n'ont que ça à faire. Les acteurs, eux, jouent à jouer à jouer et à se faire prendre au jeu avec délices. "Shakespeare, Shakespeare..." c'était pas le nom d'un scénariste de Howard Hawks, ça ? Ah non ! Plutôt de Mankiewicz et de Wise -entre autres. Une espèce d'ancêtre commun, de nègre universel à tous les peintres de la tragédie de l'existence, et de la comédie du bonheur.

Beauté du diable (La)

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Réalisé par : René Clair (1898 - 1981)
En : 1950, France
Acteurs principaux : Gérard Philipe (1922 - 1959), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

Le vénérable Docteur Faust se voit remettre une médaille pour l'ensemble de son oeuvre. Autant dire qu'il a raté sa vie et qu'il n'en a plus pour longtemps. A peine le temps de remercier toute l'équipe qu'il n'eut jamais et voilà Méfisto, démon de second plan mais bien cabotin quand même, qui lui montre le miroir de ce qu'il aurait pu être. Et voici qu'apparaît sur un écran magique (sans doute fabriqué à Hollywood) : beauté, gloire et fortune. L'amour est aussi disponible en option, mais pas forcément compatible avec le reste du scénario. Le mythe est donc revisité en version vaguement post-atomique et néo-poétique, mais en conservant princesse, bohémienne et sacs d'or. De la bonne vieille ouvrage qualité française, donc, avec les meilleurs cabotins du moment, mais qui a tout de même un peu de mal à croire à sa jeunesse éternelle. Et qui sera bientôt bien perturbé par un truc nouveau venant de la mer...

Private Affairs of Bel Ami (The) - Bel Ami

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Réalisé par : Albert Lewin (1894 - 1968)
En : 1947, USA
Acteurs principaux : John Carradine (1906 - 1988), Angela Lansbury (1925 - ), George Sanders (1906 - 1972)
Genre(s) : Paris /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

Bel(le) tronche et (faux) ami, George Duroy est un provincial sans le sou, arriviste et pique-assiette, promis à une belle carrière mondaine dans le Paris de la fin du XIXème. Son principal atout : il a l’air d’un gentleman distingué et il plait aux femmes. Son principal fardeau : la même chose. Grâce à un copain de régiment (et surtout à la femme du copain), il devient journaliste : couverture idéale pour aller partout et être au courant de tout. La politique, l’économie… rien ne lui échappe, surtout pas la rubrique people, qu’il invente au passage. Pour le reste, il préfère évidemment rater sa vie (amoureuse) que la gâcher (socialement). Les femmes -ses femmes- sont largement aussi intelligentes que lui -et nettement plus sympas-, mais ce sont des femmes. Il arrivera brillamment à tout foirer. Avec élégance. Le film est tout aussi élégant, et ne foire rien.

Belle de jour

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Réalisé par : Luis Bunuel (1900 - 1983)
En : 1967, France
Acteurs principaux : Francis Blanche (1919 - 1974), Catherine Deneuve (1943 - ), Françoise Fabian (1932 - ), Bernard Fresson (1931 - 2002), Michel Piccoli (1925 - ), Jean Sorel (1934 - )
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 101 mn, couleur

Critique perso :

Madame rêve. Elle rêve de traverser en calèche une forêt obscure avec son gentil mari. Elle rêve de se faire humilier, attacher, fouetter, violer. Avec la complicité du gentil mari. Elle rêve qu'il lui arrive quelque chose. Madame vit dans un joli appartement. Elle ne fréquente que des gens raisonnables. A part peut-être ce Husson, passeur pervers vers d'autres mondes. Un jour, cédant à de douces suggestions, Madame va se décider. Elle va s'adonner à un très respectable petit artisanat local. Madame va faire la pute. Mais en maison bourgeoise. A mi-temps, dans ses heures creuses, avant 5h. Pendant le turbin de son gentil mari. Là, c'est comme si elle pénétrait enfin dans les coulisses du monde. Et dans les siennes. Comme si elle vivait une autre vie, enfin. Madame rêve, madame vit ses rêves, carambolage garanti. Et malaise assuré chez tous les spectateurs, dont la vocation est de se contenter de rêver.

Belle et la bête (La)

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Réalisé par : Jean Cocteau (1889 - 1963)
En : 1946, France
Acteurs principaux : Michel Auclair (1922 - 1988), Josette Day (1914 - 1978), Jean Marais (1913 - 1998)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /pour petits et grands enfants /poésie en image
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

La Belle est contrainte de faire la bonne chez ses horribles soeurs. Elle adore son papa. La Bêêête vit dans un chateau fantastique au coeur de la forêt. Le papa s'y égare, fait une gaffe. Pour avoir le droit de rentrer chez lui, il devra laisser sa fille en otage au maître des lieux. Cette Bêêête au visage de lion, aux manières de prince et aux instincts d'animal est un concentré de douleurs et de contradictions. Son domaine est une prison végétale où les murs s'animent de membres et de figures humaines qu'il n'a pas. La magie et l'inquiétude naissent des objets les plus quotidiens. Rythme majestueux, images sublimes, profusion de symboles : le sortilège opère toujours.

Belles de nuit (Les)

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Réalisé par : René Clair (1898 - 1981)
En : 1952, France
Acteurs principaux : Martine Carol (1920 - 1967), Gina Lollobrigida (1927 - ), Jean Parédès (1914 - 1998), Gérard Philipe (1922 - 1959)
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Claude a deux vies : le jour, c'est un professeur de musique rêveur -et chahuté-, le soir c'est un compositeur d'opéra, rêveur aussi -et bien sûr complètement ignoré. Un ange musicien égaré dans un monde de cacophonie. Comme aucune de ces vies n'a l'air satisfaisante, il en a même une troisième : en fait, la bonne, c'est quand il dort. Gérard Philippe, à peine sorti du pays des merveilles de Juliette, replonge. Accro aux rêves dont il est le héros, encore. Ici, ils sont plus variés dans le temps et l'espace (la Révolution, les colonies, la Belle Epoque..), on sent qu'il est plus allé au cinéma. On dirait même qu'il a vu le Minuit in Paris de Woody Allen, tellement qu'on s'y croirait (Hemingway et Gertrud Stein en moins). Les réalisateurs vieillissants des années 50 n'aimaient décidément pas leur époque, ils espéraient encore que le cinéma les en sauvent.

Ben-Hur

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Réalisé par : William Wyler (1902 - 1981)
En : 1959, USA
Acteurs principaux : Stephen Boyd (1931 - 1977), Charlton Heston (1924 - 2008), Sam Jaffe (1891 - 1984)
Genre(s) : à l'antique /épique pas toc
Caractéristiques : 212 mn, couleur

Critique perso :

Judas Ben-Hur, prince de Judée, retrouve son amant d'enfance (cf. Celluloid Closet) Massala, qui prend le commandement des troupes romaines à Jérusalem. Mais ils ne s'entendent plus aussi bien qu'avant. Judas, accusé d'en vouloir aux romains, est bientôt envoyé aux galères. Heureusement, il tape dans l'oeil d'un consul romain qui l'adopte. Requinqué à Rome, il retourne conquérir Esther (son ancienne esclave) et la Judée. Et se venger de Massala (puisque rien n'arrête son char). Le contexte historique, c'est le début de l'ère chrétienne. Ce qui explique que l'on croise le roi Balthazar, Ponce Pilate et un type aux cheveux longs qu'on ne voit que de dos mais qu'on parierait barbu, et qui a l'air de faire un drôle d'effet sur tous ceux qu'il regarde dans les yeux. On s'attend aussi, parfois, à voir surgir Lawrence d'Arabie au coin d'un palmier. Le contexte théologique, c'est que les caprices du destin n'ont rien d'arbitraires et que, si on y croit, la vie a vraiment un sens. Le contexte cinématographique, c'est le péplum qui en met plein la vue. Kitch mais encore très regardable.

Bianca

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 1984, Italie
Acteurs principaux : Laura Morante (1956 - ), Nanni Moretti (1953 - ), Remo Remotti (1924 - 2015)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 96 mn, couleur

Critique perso :

Michele Apicella (cf. épisodes précédents) est nommé prof de maths dans un collège romain modèle (juke box dans les salles de classe et psy à demeure pour les enseignants), et il continue à faire la tronche. Le monde tel qu'il est, ou devrait être, c’est toujours trop pour lui. Il serait peut-être un peu rigide sur les bords, d’ailleurs il n’aime que le chocolat et les chaussures des femmes. Même Bianca, la prof de français plus que modèle (d’ailleurs elle a de très jolies chaussures) qu’il arrive à draguer, elle est trop pour lui. Le couple, l’amour, c’est vraiment des trucs qui l’obsèdent et le dépassent. D'ailleurs, c’est jamais comme il faut, toujours trop ou pas assez bien. Eternel inadapté, rigide sur les bords, l'esprit pas très bianco. Débordé de partout, le Michele.

Biches (Les)

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Réalisé par : Claude Chabrol (1930 - 2010)
En : 1968, France
Acteurs principaux : Stéphane Audran (1932 - 2018), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Sur le Pont des Arts, une riche snobinarde drague une artiste des rues fauchée et l'emmène glander dans sa villa de St Trop'. Bord de mer, marchés pittoresques, soirées chics et tocs, pétanques et trophés de chasse. Luxe, calme et décoltés, à peine troublés par les blagues minables de deux pique-assiettes navrants, jusqu'à ce que débarque Paul, architecte et homme idéal. Là, les sentiments se gâtent et les relations se compliquent. Les personnages deviennent plus opaques : ils s'imitent les uns les autres, échangent leur rôle, s'épient, s'envient, se dupent. L'atmosphère s'alourdit. La patte de Chabrol sort ses griffes : un de ses films dont il ne cesse, depuis, de faire le remake.

Bidone (Il)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1955, Italie
Acteurs principaux : Richard Basehart (1914 - 1984), Broderick Crawford (1911 - 1986), Franco Fabrizi (1926 - 1995), Giulietta Masina (1920 - 1994)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 109 mn, NB

Critique perso :

Ils opèrent en groupe et en province. Leur spécialité (bien avant l'invention d'Internet, des spams et des hoax), c'est l'arnaque à la nigérianne : extorquer quelques sous à ceux qui n'en n'ont déjà pas assez pour vivre, en faisant miroiter des histoires mirobolantes et des trésors extravagants. En costumes respectables, pour mieux faire passer leurs pilules amères, ils jouent des sketchs qu'ils sont les seuls à apprécier. Ce sont des acteurs largués de leur vraie vie, cyniques par profession, minables et touchants, des Misifits avec du bagout, des Vitelloni qui ont mal tourné. Ils ont déjà grillé pas mal de leurs cartouches, ils sont unis comme les doigts de mains différentes. Ils ne touchent à la Dolce vita qu'avec les yeux. Et à leur nullité avec le ventre. Et nous avec le coeur.

Being There - Bienvenue Mr. Chance

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Réalisé par : Hal Ashby (1929 - 1988)
En : 1979, USA
Acteurs principaux : Melvyn Douglas (1901 - 1981), Shirley MacLaine (1934 - ), Peter Sellers (1925 - 1980)
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 130 mn, couleur

Critique perso :

Le "vieil homme" meurt. Son jardinier, un certain Mr. chance (il en aura bien besoin), se retrouve à la rue avec pour seul héritage un beau costume et des bonnes manières. Un grand amour des plantes, aussi. Etant donnés ses capacités intellectuelles, son capital culturel et ses compétences relationnelles proches de celles du hamster, on ne lui donnerait pas deux jours de survie en milieu urbain normal. Mais Mr. Chance (il en a) ne vit pas en milieu urbain normal : il habite Washington, où il tombe le plus naturellement du monde dans le haut du gratin du panier du ghotta politicien mondial. Et là, miracle, ses maximes botaniques d'almanach passent pour de la divination à triple fond. L'habit ferait-il le crac ? Rien n'aurait changé depuis Le Magicien d'Oz ? En tous cas, les américains y croient toujours.

Big Fish

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Réalisé par : Tim Burton (1958 - )
En : 2003, USA
Acteurs principaux : Steve Buscemi (1957 - ), Marion Cotillard (1975 - ), Albert Finney (1936 - ), Jessica Lange (1949 - ), Ewan McGregor (1971 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 125 mn, couleur

Critique perso :

Quand un pêcheur mythomane raconte sa dernière pêche, et qu'il est meilleur mythomane que pêcheur, ça peut devenir une épopée fantastique, une aventure fabuleuse. Edward est comme ça : il n'a pas de mains d'argents (il en a pourtant vendues) mais sa parole est d'or. Son don à lui, c'est de transformer en mythe le moindre épisode de sa petite vie tranquille - et d'énerver son matérialiste de fils. Edward est très malade, le fils et sa femme enceinte sont à son chevet, ils ont enfin le temps de se refiler le seul héritage familial qui vaille : des histoires, encore des histoires. Des histoires en images, parce que c'est ce que son pays a inventé de mieux. Quand un cinéaste mythomane, aussi bon cinéaste que mythomane, raconte à quel point il aime les histoires (de cinéma), ça peut devenir un film fantastique, une oeuvre fabuleuse.

Big Lebowski (The)

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Réalisé par : frères Coen
En : 1998, USA
Acteurs principaux : Jeff Bridges (1949 - ), Steve Buscemi (1957 - ), Ben Gazzara (1930 - 2012), John Goodman (1952 - ), Julianne Moore (1960 - ), Philip Seymour Hoffman (1967 - 2014), John Turturro (1957 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /du rire aux larmes (et retour)
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

Dans la famille Lebowski, il y a le vrai (patriarche self-made man façon Duel au soleil, riche, apparemment), le faux (fauché, à coup sûr), l'épouse actuelle (voir Lolita) et la fille (artiste trash-bobo : Julianne Moore, reprise là où Short Cuts l'avait laisée). Il y a aussi quelques comparses, partenaires de bowling ou kidnappeurs d'opérettes, tous plus nazes les uns que les autres. Dans Miller's Crossing, le héros était trop fort pour nous (et pour lui-même aussi, d'ailleurs). Ici, c'est plutôt le défilé des rase-mottes : des personnages prétextes à un réjouissant carnaval de mythes, symboles et archétypes (tous les westerns et toutes les comédies musicales d'Hollywood y passent, et on passe même une nuit avec Maude). On aime (les nuls), on ne compte pas.

Bigamist (The) - Bigamie

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Réalisé par : Ida Lupino (1918 - 1995)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Joan Fontaine (1917 - 2013), Ida Lupino (1918 - 1995), Edmond O'Brien (1915 - 1985)
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

Harry Graham est le parfait mari d’Eve. Ils vivent à San Francisco. Tout irait pour le mieux dans le meilleur des amours possibles s’ils pouvaient avoir un enfant. Procédure d’adoption en cours. C’est l’agent chargé à cette occasion de se renseigner sur la vie des époux qui découvre le pot aux roses. En fait, à Los Angeles, où il va souvent pour son travail, Harry est aussi le parfait époux de Phyllis, avec qui il vient d’avoir un bébé. Pas de suspens, donc, on comprend vite la situation. L’enjeu du film c’est : comment il en est arrivé là, le pauvre chou ? Parce qu’attention : un bigame, c’est pas du tout quelqu’un qui méprise le mariage. Au contraire, il aime et respecte tellement ça qu’il préfère en contracter plusieurs que prendre une maîtresse. Admirable comportement. Et habileté suprême, c’est la quasi-seule réalisatrice répertoriée de l'époque qui se coltine avec empathie cette émouvante confession en l’honneur du traitre le plus sincère qu’on ait imaginé. Impressionnant dévouement de part et d’autre.

Blade Runner

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Réalisé par : Ridley Scott (1937 - )
En : 1982, USA
Acteurs principaux : Harrison Ford (1942 - )
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

C'est en 2019 que les "répliquants" (créatures artificielles créées à l'image de l'homme) les plus évolués commencent à se poser des questions métaphysiques. A cette époque-là, ils passent haut la main le test de Turing, mais ont encore un peu de mal avec celui de Voight-Kampff : un truc qui, apparemment, a à voir avec la dilatation de leur pupille sous l'effet d'une émotion (ce qui ne les empêche pas de bosser comme des brutes dans des colonies lointaines). Ca les pousse à venir demander une augmentation (de durée de vie) à leur patron, à L.A. (devenu un souk asiatique brumeux). Deckard, lui, a la pupille exercée à repérer les répliquants (peut-être bien qu'il leur ressemble un peu trop, d'ailleurs) : il est chargé d'intercepter l'ambassade. Du coup, il commence à se poser des questions métaphysiques... Un must, à voir les pupilles (et les questions métaphysiques) bien ouvertes.

Blanche

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Réalisé par : Walerian Borowczyk (1923 - 2006)
En : 1971, France
Acteurs principaux : Ligia Branice (1932 - ), Jacques Perrin (1941 - ), Michel Simon (1895 - 1975), Georges Wilson (1921 - 2010)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 92 mn, couleur

Critique perso :

Blanche est très belle et très convoitée. Elle est mariée à un respectable (mais pas très jeune ni très beau, pardon Michel) Seigneur, elle attire le regard du Roi himself, en visite, ainsi que du page fort joli garçon qui l’accompagne. Et même de son beau beau-fils. On l’aura (peut être) compris, ça se passe au Moyen-Âge. Sans frou frou et sans chichi, mais avec armes et bagages, dans une ambiance minérale austère de chateau fort à conquérir et de belle sauver (et le contraire). Conte cruel, drame pervers, histoire éternelle d’hommes qui doivent élire parmi eux le mâle dominant. Enfin, comme on est au Moyen âge, c’est pas vraiment une élection et le résultat est connu d’avance : à la fin, c’est le Roi qui gagne. Et le cinéma y a aussi un peu gagné.

Blonde Venus

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Réalisé par : Josef von Sternberg (1894 - 1969)
En : 1932, USA
Acteurs principaux : Marlene Dietrich (1901 - 1992), Cary Grant (1904 - 1986), Herbert Marshall (1890 - 1966)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

En bonne Vénus qui se respecte, elle est née des eaux, Hélène. Se baignant nue dans un lac de la Forêt Noire, elle a rencontré un américain (un certain Faraday) et l'a suivi dans sa cage dorée new-yorkaise. Leur histoire est devenue le conte préfére qu'ils rejouent à leur fiston, le soir au coin du lit. Mais Marlène, on la connaît : c'est quand elle est en tablier dans sa cuisine qu'elle a l'air déguisée. Bientôt, le gentil mari scientifique est victime de ses radiations, il doit aller se faire soigner en Allemagne. Pour sauver les meubles, Hélène remonte sur les planches. Succès immédiat, conquête immédiate du dandy local, compromis et états d'âme. Allemande et Américaine, Hélène incarne les contradictions de son époque : elle est à la fois la belle et la bête, l'étoile et le ver de terre, la maman et la putain. Une statue de chair, avec un chapeau. Toutes les femmes à la fois, mais en mieux.

Blowup

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Réalisé par : Michelangelo Antonioni (1912 - 2007)
En : 1966, Angleterre
Acteurs principaux : Jane Birkin (1946 - ), David Hemmings (1941 - ), Vanessa Redgrave (1937 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Vive le DVD (et la touche "Pause") ! Après 2 tentatives sur grand écran, j'ai enfin vu quelque chose dans les clichés du photographe... Reprenons au début. Un photographe très fashion, donc, et ses trois vies : celle du peuple et des ouvriers, auxquels il se mèle pour faire de l'art. Celle des postulantes top-models court-vêtues du swinging London années 60, auxquelles il se mèle aussi, pour faire de la pub. Et une 3ème, où il se mèle de ce qui ne le regarde pas. C'est celle qu'il imagine derrière les images, prises à la dérobée, d'un couple bourgeois dans un parc tranquille. Où, peut-être, se cache un meurtrier. Et un cadavre. Si le monde est un leurre et si la nature, comme dans L'Eclipse et le Désert rouge, ressemble à une peinture abstraite, dans quel sens faut-il regarder le tableau, quel est le bon angle ? Un labyrinthe avec plein de coins, un inquiétant vertige en couleur, un étrange malaise pop,

Rokudenashi - Bon à rien

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Réalisé par : Kiju Yoshida (1933 - )
En : 1960, Japon
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vers le soleil levant
Caractéristiques : 88 mn, NB

Critique perso :

Ce sont des vitelloni de capitale. Il y a un fils à papa (patron, le papa), qui entretient un peu les autres en ralant. Il y a l'étudiant éternel, le bidouilleur-magouilleur et l'acteur raté. Gueules d'anges, inquiétudes métaphysiques et comportements de gougeats. Il y a la secrétaire du papa du fils à papa, aussi, réputée pas commode parce qu'elle ne rêve pas de devenir bobonne et qu'elle est la seule qui leur tient tête. Ils s'ennuient beaucoup, ne savent pas quoi faire de l'énergie qu'ils n'ont pas, mais sauraient très bien quoi faire avec l'argent qu'ils n'ont pas non plus. Ils sont déjà las de la vie qu'ils n'ont pas encore vécue, à bout de souffle à force de glander. Ils jouent avec le feu, l'amour et le fric, jamais raccords avec leurs désirs, que d'ailleurs ils ignorent. Ils sont jeunes, quoi.

Bonheur (Le)

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 1965, France
Acteurs principaux : Jean-Claude Drouot (1938 - )
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 79 mn, NB

Critique perso :

Il s'appelle François Chevalier. Il est charpentier, elle est couturière. Ils se sont mariés, ils sont heureux et ont deux beaux enfants. Ils vivent au paradis des pique-nique et de la banlieue parisienne paisible. Un jour pourtant, M. (preux) Chevalier rencontre dans la rue du chateau (de Vincennes) une postière tentante -et se laisse tenter. Un anti-vaudeville commence, tout en provocations calmes, en couleurs vives et en douceur. L'utopie d'un monde sans drame et sans crise, où l'amour s'ajoute à l'amour et le bonheur au bonheur. Le rêve-malaise d'une humanité harmonieuse et sans culpabilité, qui serait enfin douée pour ce qu'elle prétend aimer.

From Russia with Love - Bons baisers de Russie

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Réalisé par : Terence Young (1915 - 1994)
En : 1963, Angleterre
Acteurs principaux : Sean Connery (1930 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /entre Berlin et Moscou
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Après s'être fait tuer dans un obscur jardin, James 007 est envoyé pour une mission tout aussi obscure à Istanbul, d'où il envoie ses baisers de Russie (mais ses points forts ne sont pas la géographie). Le drôle d'ange blond qui l'a tué (et qui ressemble terriblement à l'incarnation de Bond version 2006) le suit comme son ombre... Comme un successeur qui s'impatiente déjà ? Et si le SPECTRE n'était qu'une marionnette ? (de Moscou, of course). Et laquelle des deux miss Monde qui s'arrachent les chignons (et le reste) en costumes de bohémiennes James préfère-t-il ? Nous n'en saurons rien. Un film d'espionnage old school, à base de stratégie échiquéenne plus que de gadgets tonitruants. Le plus hitchcockien des Bond, le génie en moins mais Sean en plus.

Boucher (Le)

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Réalisé par : Claude Chabrol (1930 - 2010)
En : 1970, France
Acteurs principaux : Stéphane Audran (1932 - 2018), Jean Yanne (1933 - 2003)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 93 mn, couleur

Critique perso :

Au début, l'homme vivait dans des grottes. Un peu plus tard, il s'est mis un costume de marquis et a appris à danser le menuet -puis la valse- sans jamais cesser d'aimer la viande. Certains specimen en ont même fait leur métier : ils sont devenus bouchers. Et puis, est apparue la blonde hitchcockienne : belle, froide, inacessible. Quand elle débarque dans le Périgord, elle ne passe pas inaperçue. Et cinéphile, avec ça. Comme elle a vu Rio Bravo, elle sait qu'il faut se méfier des gouttes de sang qui tombent du ciel. Comme elle a vu L'Inconnu du Nord-Express, elle sait qu'il faut aussi se méfier des histoires de trains et de briquets qui trainent. Mais son propre film à elle restait à faire (merci M. Chabrol !). Cette transposition de M le maudit dans la province des années 60 n'a rien perdu de son tranchant.

Boudu sauvé des eaux

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1932, France
Acteurs principaux : Charles Granval (1882 - 1943), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 81 mn, NB

Critique perso :

Boudu, clodo un rien dépressif depuis que son chien l'a laché, a la bonne idée de se jeter dans la Seine juste sous les yeux de M. Lestingois, brave bougeois progressiste (c'est-à-dire qui aime les livres et trompe sa femme avec la bonne). Sauvé des eaux, l'anar pratiquant rencontre donc son théoricien : l'humaniste compatissant. Il s'incruste, fait preuve de bonne volonté pour s'adapter aux usages de la maison, et de désirs pressants auprès des dames qui y vivent. Sur une chanson populaire, la douce contagion du plaisir gagne du terrain. Avec lui, tout peut arriver. Mais, au bout du compte, Boudu sera le seul fidèle à lui-même : prophète hédoniste, inculte incurrable, bon à rien professionnel. Insaisissable, comme l'eau d'où il vient et où il retourne. D'ailleurs, il se réincarnera bientôt en marinier insubmersible. Mais c'est une autre histoire.

Sunset Blvd. - Boulevard du Crépuscule

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1950, USA
Acteurs principaux : Cecil B. DeMille (1881 - 1959), William Holden (1918 - 1981), Buster Keaton (1895 - 1966), Gloria Swanson (1897 - 1983), Erich von Stroheim (1885 - 1957)
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Voix off d'outre-tombe pour le premier flash-back post-mortem de l'histoire du cinéma : Joe, donc, est mort. Noyé dans l'objet de son désir : une piscine sur Sunset Blvd., Hollywood. Et avec trois balles dans la peau. Un peu avant, Joe se contentait d'être comme la moitié des habitants de L.A. : un scénariste raté. Jusqu'au jour où sa voiture crève devant chez Norma, richissime ex-star du muet, en pleine préparation ultra-secrète de son come-back. Il devient courtisan, puis courtisé. Complice, compromis, corrompu. Condamné... Victime, comme Norma, de l'illusion à laquelle il a consacré sa vie. Billy Wilder, coté obscur. Derrière l'hommage aux pionniers du cinéma, aux Griffith, DeMille et Stroheim (et au fantôme de Buster Keaton qui joue aux cartes), se profile une féroce satire et une vision fulgurante, qui désigne la rubrique people et les faits divers comme avenir possible de son art.

Hangmen Also Die - Bourreaux meurent aussi (Les)

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1943, USA
Acteurs principaux : Walter Brennan (1894 - 1974)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /entre Berlin et Moscou /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 140 mn, NB

Critique perso :

Pour les Praguois de 1940, les bourreaux avaient un nom : Heydrich, représentant d'Hitler. Ca n'a pas dû chagriner grand monde quand il a été assassiné. Mais le film va plus loin : il raconte comment un peuple entier en arrive à prendre sur lui le crime d'un seul -tel un messie à l'envers. Et comment, une fois n'est pas coutume, ses héros s'inventent un prétexte amoureux pour cacher une cause politique. Le grand Brecht est au scénario. Pour l'image, on peut faire confiance à Lang. Il a prouvé dans M qu'il savait regarder une histoire avec ses deux yeux (un pointé sur la police, un dans les bas-fonds). Il refait le coup ici, en laissant traîner sa caméra aussi bien au siège de la Gestapo que chez les résistants. Je ne sais pas si le récit contient une quelconque once de vérité, mais il le mérite.

Brazil

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Réalisé par : Terry Gilliam (1940 - )
En : 1985, Angleterre
Acteurs principaux : Robert De Niro (1943 - ), Ian Holm (1931 - ), Jonathan Pryce (1947 - )
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 131 mn, couleur

Critique perso :

Je ne sais pas si Terry Gilliam avait entendu parler de l'effet papillon. Lui, en tout cas, a inventé l'effet moustique. C'est un stupide moustique écrasé tombé sur un listing qui est le point de départ cataclysmique de ce film. Fatal engrenage parce que, dans le monde de Brazil, les papiers, les machines et les tuyaux sont bien plus importants que les hommes : un moustique, et tout peut dérailler. D'ailleurs, tout déraille. Au fait, où et quand ça se passe ? Bonne question ! Il y a des gens qui travaillent (plus ou moins), des riches qui se pavanent et des pauvres qui rament, des faux-culs, des clandestins et des fonctionnaires. Donc c'est à peu près comme ici et maintenant et toujours -mais en pire. Ce monde-là, on ne l'a jamais vu nulle part mais on a l'impression de le reconnaître tout de suite. C'est par où la sortie ? Alors là, pas de bonne réponse. Essayer la musique et le rêve, à tout hasard.

Bread and Roses

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Réalisé par : Ken Loach (1936 - )
En : 2000, Angleterre
Acteurs principaux : Adrien Brody (1973 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Los Angeles : ses stars, ses buildings... et, de l'autre côté des vitres, ses passagers clandestins venus du Mexique. Ils travaillent de nuit, balaient, nettoient et se taisent, en parfaits hommes invisibles qu'on leur demande d'être. Rosa et sa soeur Maya sont de ceux-là. Trop heureuses d'être là pour oser, en plus, réclamer quoi que ce soit (congés payés, sécu et paiement des heures sup). Heureusement, Ken Loach veille et leur dépèche un syndicaliste comme il les aime, débrouillard et insolent, pour donner une leçon de politique à ses grands frères d'outre Atlantique. Ils les auront, ces exclus, leurs roses -épines comprises, qu'ils s'empresseront de planter dans le talon du géant américain.

Breaking the Waves

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Réalisé par : Lars von Trier (1956 - )
En : 1996, Danemark
Acteurs principaux : Jean-Marc Barr (1960 - ), Katrin Cartlidge (1961 - 2002), Stellan Skarsgard (1951 - ), Emily Watson (1967 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 159 mn, couleur

Critique perso :

Les grands pervers et les grands saints sont faits pour s'entendre (pour racheter les uns, il faut bien que quelques-uns des autres se dévouent...). Jan descend du ciel dans un hélicoptère ; attention, c'est un piège, c'est lui le grand pervers. D'ailleurs sa santé -en fait : son salut, bien sûr- ne tarde pas à se déteriorer. Coup de bol : il a juste eu le temps, avant, de se marier avec Bess, esprit fragile mais coeur en or massif et une foi en béton, prête à tout pour sauver son homme. Il y en a qui ont commencé à lacher Lars von Trier avec ce film : moi, c'est plutôt après que j'ai commencé à trouver ses intentions un peu douteuses. Ici, j'ai marché comme à ma première communion !

Broadway Danny Rose

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1984, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Mia Farrow (1945 - )
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 84 mn, NB

Critique perso :

Danny n'a peut-être jamais existé, ce sont les autres qui en parlent le mieux. Les autres, ce sont tous les tocards du show-biz dont il s'est occupé -et à New York, ça fait du monde. Danny est l'impressario des nazes et des (futurs et déjà) has-been, le genre doué pour tous les ratages, le genre dont on se sépare dès que le moindre succès pointe. Pour se consoler, il a en stock une tripotée d'oncles philosophes (qui n'ont peut-être jamais existé) qu'il cite à tout propos. Un jour, il doit accompagner une poupée Barbie au spectacle d'un de ses crooners... En sous texte, je crois que Woody raconte sur le mode burlesque mineur son incrédulité et son émerveillement d'avoir réussi à séduire l'ancienne femme de Frank Sinatra, et de ses supposés dangereux soutiens mafieux. Un récit dans le récit qui finit les yeux dans les yeux.

Bête humaine (La)

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1938, France
Acteurs principaux : Blanchette Brunoy (1918 - 2005), Julien Carette (1897 - 1966), Jean Gabin (1904 - 1976), Fernand Ledoux (1897 - 1993), Jean Renoir (1894 - 1979), Simone Simon (1910 - 2005)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Le roman de Zola proposait un vaste panorama du meurtre sous toutes ses formes. Renoir a tranché dans le vif (deux morts seulement !). Il a conservé le prétexte de la théorie un peu lourdingue de l'atavisme alcoolique, tout en se concentrant sur le trouble entrelacement du désir et de la pulsion de mort. Et il a exploité à fond la poésie visuelle des trains : le destin est sur les rails et il roule à toute vitesse. C'est l'enfer au fond de la chaudière. Quant au cheminot, lui, il sonne toujours deux fois (chez la femme du sous-chef de gare). Et Gabin, on dirait qu'il a fait ça toute sa vie.

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C


It Happened Tomorrow - C'est arrivé demain

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Réalisé par : René Clair (1898 - 1981)
En : 1944, USA
Acteurs principaux : Linda Darnell (1923 - 1965), Dick Powell (1904 - 1963)
Genre(s) : c'était demain /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 85 mn, NB

Critique perso :

Un rêve de journaliste : disposer du journal du lendemain avant même qu'il ne soit écrit. Un cauchemar d'être humain : connaître avant tout le monde les méfaits qui se commettront bientôt au coin de la rue et la date de sa propre mort, sans rien pouvoir y changer... Eternelle ambivalence de toutes les pulsions et de tous les fantasmes. Voici donc l'un des fleurons du fantastique tranquille de René Clair, où l'imagination remplace les effets spéciaux et la fantaisie l'angoisse. On est plus proche de La Vie est belle que des films de Murnau, Whale et autres effrayeurs en chefs comme Cooper et Schoedsack. C'est qu'ils ne sont pas si nombreux, ceux qui ont tenté d'attaquer l'inconscient par la face sud (celle qui est éclairée par le soleil...).

Cabaret

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Réalisé par : Bob Fosse (1927 - 1987)
En : 1972, USA
Acteurs principaux : Marisa Berenson (1946 - ), Liza Minnelli (1946 - ), Michael York (1942 - )
Genre(s) : en avant la musique /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 124 mn, couleur

Critique perso :

Les chansons, ça peut aider à consoler les chagrins d'amour. Ca permet de ne pas craindre la pluie, d'espérer aller au-delà des arcs-en-ciel. Mais de là à se confronter avec l'Allemagne nazie, c'est une autre paire de manchettes... C'est pourtant ce que tente ce film, à travers la petite histoire de Sally, chanteuse de cabaret et de son collocataire Brian, étudiant anglais, et de quelques autres. Evidemment, depuis l' Ange bleu plus personne ne s'étonne de trouver, dans les cabarets allemands, des dames avec des jambes interminables. Mais les parenthèses musicales très désenchantées qui ponctuent le récit n'ont plus à offrir que leurs sarcasmes ironiques et grinçants. Les derniers petits ilôts d'innocences sont menacés par une grande vague brune. Chantons sous le 3ème Reich, pendant qu'il en est encore temps...

Stage Door Canteen - Cabaret des étoiles (Le)

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Réalisé par : Frank Borzage (1894 - 1962)
En : 1943, USA
Acteurs principaux : Ralph Bellamy (1904 - 1991), Katharine Hepburn (1907 - 2003)
Genre(s) : New York - New York /en avant la musique /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 132 mn, NB

Critique perso :

Soit disant que, pendant World War II, le monde du spectacle a contribué à l’effort de guerre en s’occupant d’une cantine-salle de spectacle réservée aux GI en plein New York. Soit disant qu’on pouvait y croiser plein de people du théâtre ou du cinéma : les vaguement connus faisaient le service, les has been le ménage, les stars le spectacle ou le management en coulisse. Gros régiment de jeunes filles pour faire -heu…- la conversation. Enfin, quand on dit gens « connus » ou « stars » dans le personnel, c’est avec les critères des bobos américains de l’époque : au regard d’un(e) français(e) même extrêmement cinéphile d’aujourd’hui (au hasard : moi), c’est tout juste si on en reconnait deux ou trois. On a plutôt l’impression d’assister à une interminable soirée « Maritie et Gilbert Carpentier » (désolée, ça en dit long sur mon âge : disons Drucker pour les plus jeunes) avec vagues intrigues pour faire patienter entre deux shows. Réservé aux historiens du music hall, ou aux masos de la cinéphilie.

Kabinett des Doktor Caligari (Das) - Cabinet du docteur Caligari (Le)

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Réalisé par : Robert Wiene (1880 - 1938)
En : 1920, Allemagne
Acteurs principaux : Conrad Veidt (1893 - 1943)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro /poésie en image
Caractéristiques : 78 mn, NB

Critique perso :

Le cinéma a deux ancêtres : M. Lumière, qui filme la sortie de son usine, et M. Méliès, qui filme un voyage dans la lune. Là, c'est sûr, on est plutôt dans la lune -côté face cachée. Là où les hommes penchent, où le monde est de traviole. Le monde, de toute façon, n'est qu'un décor de toile peinte aux lignes fuyantes et aux angles aigus, un drôle de village où la vie et le cauchemar sont indiscernables. Pour raconter une histoire de somnambule à dormir debout, una cosa peut-être entièrement mentale, tout est bon : les images teintées, les récits à tiroir et à cercueil, les fantasmagories de savant fou. Comme dans une fête foraine -encore un autre ancêtre du cinéma- passez de l'autre côté de la toile...

Steamboat Bill, Jr. - Cadet d'eau douce

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Réalisé par : Charles Reisner (1887 - 1962)
En : 1928, USA
Acteurs principaux : Buster Keaton (1895 - 1966)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 71 mn, NB

Critique perso :

Roméo et Juliette sur le Mississipi : Bill, le fils du capitaine bourru du dernier steamer à l'ancienne, aime Marion, la fille du patron capitaliste satisfait du paquebot new style tout confort. Ca se présente mal, les enfants sont à peine les demi-portions de leur papa respectif, et les papas ne sont pas commodes. Et puis, Bill semble éprouver quelques difficultés avec la technique et avec la pesanteur. Quand les éléments naturels se déchainent, pourtant, il plie mais ne romp pas, affrontant arbres déracinés et maisons volantes avec un courage exemplaire. Grandeur et misère de l'acrobate au milieu de la boue et du vent. Misère et grandeur du poète funambule au pays de la Gravité.

Capitan (le)

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Réalisé par : André Hunebelle (1896 - 1985)
En : 1960, France
Acteurs principaux : Bourvil (1917 - 1970), Lise Delamare (1913 - 2006), Jean Marais (1913 - 1998), Maurice Schutz (1866 - 1955)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /en France profonde /pour petits et grands enfants /épique pas toc
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

En ouverture, M. de Capestan -noblesse petite mais bonne- s'engage dans un assaut contre des félons. Blessé, il est sauvé puis soigné par une belle brune -puis une belle blonde (bon, on n'est pas pour autant dans Vertigo). Il va se plaindre chez le Premier Ministre -chef des félons- qui le renomme Capitan (ce qui, venant d'un italien, n'est apparemment pas très sympa). En fait, il est la réincarnation blonde de Robin des Bois, en brushing et collants rouges, comme lui impeccable à l'escrime, à l'escalade, à l'équitation et au saut à la perche. Le jeune roi Louis XIII, entouré de félons, est lui incarné par un sosie de Nicolas Sarkozy en culottes courtes. Et Bourvil, égaré là-dedans, joue avec des accents gaulliens pour parler de la grandeur de la France, et des accents gaulois pour parler aux femmes. Avec le Capitan, qui l'a engagé comme secrétaire-poète, cernés de félons, ils doivent se réfugier dans la maison de Blanche-Neige dans la forêt -pas assez loin toutefois pour éviter que le jeune roi mal entouré ne s'y égare. Je passe les détails mais je vous rassure : la République -pardon, le Roi- sera sauvé(e)...

Big Sky (The) - Captive aux yeux clairs (La)

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Kirk Douglas (1916 - )
Genre(s) : carrément à l'ouest /épique pas toc
Caractéristiques : 122 mn, NB

Critique perso :

La conquête de l'ouest passe aussi par le nord -et par le chemin des fleuves. Deux cow-boys en rade, bons camarades mais prompts à la bagarre, se retrouvent embarqués dans une expédition au long cours : l'un a un long fusil, l'autre devra se faire amputer le doigt. Je ne dirai pas lequel la fille -une otage indienne- choisira, mais ça peut se deviner. Un western pour marins d'eau douce qui suit le rythme nonchalent de l'eau et qui, malgré quelques coups de feu, nous repose des tueries pétaradantes.

Cardinal (The) - Cardinal (Le)

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1963, USA
Acteurs principaux : John Huston (1906 - 1987), Romy Schneider (1938 - 1982), Tom Tryon (1926 - 1991), Raf Vallone (1916 - 2002)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 175 mn, couleur

Critique perso :

Le générique est très beau : un homme en noir avance, seul, dans le magnifique décor tout en pavés, escaliers et colonnades de l'architecture vaticane. Une fourmi traverse l'éternité. Stephen Fermoyle, donc, est prêtre. Formé à Rome mais américain de coeur et irlandais d'origine, carrure d'athlète, intelligence de compétition. C'est un spécialiste de l'histoire de la réforme. Ca tombe bien, le monde bouge : on le voit au turbin des âmes en divers points du monde occidental, entre les deux guerres mondiales. On suit ses problèmes de conscience et ses intéractions avec le monde des hommes. Sérieux comme un pape (qu'il n'est pas), un peu trop poli et honnête (pour le devenir), il croise la route de beaucoup de puissants et de gros cons, de femmes idéales et de filles perdues. Il résiste à la tentation d'épouser Romy Schneider, ce qui prouve la force de sa vocation. Une grande fresque en rouge et noir, plus politique (façon Tempête à Washington) que spirituelle (façon Dix commandements). Assez impressionnante au bout du compte.

Carmen

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Réalisé par : Francesco Rosi (1922 - 2015)
En : 1984, France
Acteurs principaux : Placido Domingo (1941 - ), Julia Miguenes-Johnson (1949 - ), Ruggero Raimondi (1941 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 152 mn, couleur

Critique perso :

C'est, paraît-il, l'opéra le plus joué au monde, le top 50 du lyrique à l'ancienne. Là-dessus, Francesco Rosi n'a pas cherché à faire le malin : les décors naturels (bien astiqués) sont splendides, les costumes d'époque (bien repassés) sont parfaits et le livret est scrupuleusement respecté (pour les voix, je n'y connais rien, mais je crois qu'ils chantent juste). L'Espagne, ses fleurs et ses taureaux, ressemblent aux souvenirs qu'on en avait avant d'y être allé -mais personne ne va à l'opéra pour prendre des leçons de réalisme. D'ailleurs, les sentiments des hommes devant Julia Miguenes-Johnson en plein numéro de Cabaret sont, eux, parfaitement crédibles. C'est comme un souvenir d'enfance : le plaisir ne vient pas de la surprise, mais du déjà-vu et déjà-entendu, du ressassement d'une mémoire rêvée. Comme un beau livre d'images en musique.

Carmen Jones

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : Harry Belafonte (1927 - ), Dorothy Dandridge (1922 - 1965)
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

C'est la même histoire, la même musique et c'est tout différent. C'est pendant World War II, Carmen tricotte des parachutes pour les GI, (Don) Jo(s)e est un postulant-aviateur qui a du mal à décoller et l'Escamillo de service est un taureau des rings. Les chansons ont été un peu reliftées, mais pas trop jazzy pour autant malgré la distribution all blacks. C'est tout différent mais, ici comme ailleurs, dès que Carmen passe, il y a de l'électricité -et du beat- dans l'air. C'est presque étonnant à quel point on jurerait que l'original est un plagiat par anticipation. La passion serait-elle l'ultime liberté des déclassés..? C'est tout différent mais c'est la même histoire.

Carnet de bal (Un)

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Réalisé par : Julien Duvivier (1896 - 1967)
En : 1937, France
Acteurs principaux : Pierre Alcover (1893 - 1957), Harry Baur (1880 - 1943), Marie Bell (1900 - 1985), Fernandel (1903 - 1971), Louis Jouvet (1887 - 1951), Raimu (1883 - 1946), Françoise Rosay (1891 - 1974)
Genre(s) : en France profonde /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 144 mn, NB

Critique perso :

Mme Surgère vient de perdre son mari. Elle est riche, mais visiblement pas hyper satisfaite de sa situation. Elle retombe sur son carnet de bal de débutante (autrement dit la liste de ses prétendants de jeune fille) et se décide à aller vérifier, 20 ans plus tard, s'il n'y en aurait pas dans le stock qui lui aurait fait une meilleure vie... L'échantillonnage est soigné et varié : il y a un prêtre et un truand, un guide de haute montagne et un maire de province, quelques fantômes ou ombres d'eux-mêmes, aussi... Chaque visite est l'occasion d'une espèce de sketch, et prétexte à un petit film de genre -préciosités filmiques comprises. Il y en a de plus réussis que d'autres, comme les hommes qu'ils montrent. Mélancolie, mélancolie. Mais on n'est pas non plus hyper convaincus que la femme que l'on suit valait la peine qu'ils se fassent, eux, une autre vie. Et le film, du coup, aurait sans doute pu être meilleur s'il avait, lui, suivi d'autres voies. Mélancolie, mélancolie...

Appunti per un'Orestiade africana - Carnet de notes pour une Orestie africaine

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Réalisé par : Pier Paolo Pasolini (1922 - 1975)
En : 1970, Italie
Genre(s) : culte ou my(s)tique /docu (plus ou moins fiction) /jeu dans le jeu /à l'antique
Caractéristiques : 65 mn, NB

Critique perso :

Ce serait comme le projet d'un film rêvé, imaginé, conceptualisé. Un brouillon, le making off des repérages, des vagues velléités de casting. Ca adapterait l'Orestie d'Eschyle en Afrique. Parce que l'Orestie ça raconterait, en fait, la fin de la vengeance tribale et l'avènement de la justice des hommes, le début de la modernité (c'est la version Pasolini de l'histoire, il venait de traduire le texte pour le théâtre). Et parce que les pays d'Afrique, 10 ans avant, avaient presque partout acquis leur indépendance. On a la thèse, donc, la problématique et le plan. En guise d'illustration, quelques images d'archives de guerres locales bien barbares. On a aussi le débat d'après projection, avec des étudiants africains de Rome, et même un happening jazz qui fait intermède. Avant, pendant et après, le docu sur une fiction qui n'existe pas, tout ce qui entoure un film sans en faire vraiment partie, tout en en inventant un quand même. Assez fort quand même, en fait.

Casablanca

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Réalisé par : Michael Curtiz (1886 - 1962)
En : 1942, USA
Acteurs principaux : Ingrid Bergman (1915 - 1982), Humphrey Bogart (1899 - 1957), Marcel Dalio (1900 - 1983), Sydney Greenstreet (1879 - 1954), Peter Lorre (1904 - 1964), Claude Rains (1889 - 1967), Conrad Veidt (1893 - 1943)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 102 mn, NB

Critique perso :

Le Maroc, dernier refuge avant le désespoir (cf. Morocco). C'est un film qui en est plusieurs. Peut-être une fresque politique sur l'Amérique qui décide, en 1942, d'entrer en guerre pour libérer l'Europe, au nom des liens anciens entre les deux continents. Ou alors, un mélo tragique sur l'amour impossible entre un tenancier de bistrot et son ancienne maîtresse, retrouvée par hasard. Ensemble, ils auraient inventé la résistance glamour -celle dont le principal titre de gloire est de réussir à finir les bouteilles de champagne français avant que les allemands ne s'en emparent. Ou alors, c'est le drame de la lutte clandestine contre le nazisme, traquée jusque dans les colonies... Bref, de toute façon un film aussi généreux en intrigues, personnages, scènes d'anthologie et niveaux de lecture n'est sûrement pas devenu mythique pour rien. Play it again (and again...).

Casino Royale

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1967, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Ursula Andress (1936 - ), Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Jacqueline Bisset (1944 - ), Charles Boyer (1899 - 1978), William Holden (1918 - 1981), John Huston (1906 - 1987), Deborah Kerr (1921 - 2007), David Niven (1909 - 1983), Peter Sellers (1925 - 1980), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 131 mn, couleur

Critique perso :

Patchwork parodique improbable et décousu (Huston n'est pas le seul responsable de la mise en scène, mais c'est le plus connu), cette James-Bonderie de pacotille pompe allègrement dans les séries anglo-saxonnes de l'époque, le cinéma allemand (au moins Caligari et Fritz Lang) et, sans doute aussi, les vrais "James Bond" -mais je n'en ai pas vu assez pour les reconnaître. La moitié du casting joue James Bond (d'où une certaine discontinuité dans l'intrigue), l'autre moitié joue aux guests stars qu'ils sont. Plein de jolies jambes, de poursuites et de bagarres, évidemment. On n'y comprend pas grand chose, mais ça fait partie du jeu. A égale distance entre le nanard et l'art abstrait post-moderne.

Casque d'or

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Réalisé par : Jacques Becker (1906 - 1960)
En : 1952, France
Acteurs principaux : Claude Dauphin (1903 - 1978), Roland Lesaffre (1927 - 2009), Serge Reggiani (1922 - 2004), Simone Signoret (1921 - 1985)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

Ils sont jeunes, ils sont beaux, ils dansent bien ensemble. Elle s'appelle Marie, il est charpentier. Pour cela et pour leur bonne bouille, on leur donnerait volontiers le bonheur sans confession. Mais elle est maquée, il est fiancé. Ils sont pauvres, le monde est contre eux. Le monde, c'est ceux de la bande à Félix, des loulous d'arrière-boutique et de ruelles sombres. Paris : ses pavés, ses guinguettes et sa belle époque, réinventés pour nous. Noir comme ses rues noires, clair comme le soleil sur la Seine, comme notre mémoire l'imaginera à jamais. En prime, un mélo intense sur la seule chose qui compte : le prix du bonheur.

Cave se rebiffe (Le)

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Réalisé par : Gilles Grangier (1911 - 1996)
En : 1961, France
Acteurs principaux : Maurice Biraud (1922 - 1982), Bernard Blier (1916 - 1989), Jean Gabin (1904 - 1976), Françoise Rosay (1891 - 1974)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or
Caractéristiques : 98 mn, NB

Critique perso :

Le titre est devenu quasi-incompréhensible aux oreilles contemporaines. En traduction d'aujourd'hui, ça donnerait à peu près "Revenge of the gros naze". Le milieu, c'est celui des arnaqueurs d'opérette à prétentions aristocratiques. Le naze, c'est le brave artisan consciencieux qui fera le boulot pour leur poche. La combine, c'est une affaire de fausse monnaie un peu trop grosse pour eux... Alors, pour tenir le choc, ils font appel à l'ex-pape du domaine, un certain "Dabe", que seule une revanche perso parvient à faire sortir de son paradis fiscal. Le reste importe bien moins que les tronches enfarinés de la bande, et que les mots qu'Audiard leur fait dire. Ce qui est bien, dans ce genre de ciné à l'ancienne, c'est que les vrais cons et les faux culs sont faciles à distinguer des honnêtes crapules compétentes. Et la fausse subversion finale ne surprendra personne : "in the baba" qu'ils l'auront, les tontons monnayeurs !

Caimano (Il) - Caïman (Le)

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 2006, Italie
Acteurs principaux : Margherita Buy (1962 - ), Nanni Moretti (1953 - ), Silvio Orlando (1957 - ), Jasmine Trinca (1981 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

C'est le film où Nanni fait le tour de ses meilleurs ennemis. D'abord, il se déguise en son contraire : un ex-producteur de nanars anticommunistes, un has been névrosé, incompétent, fauché et en retard d'une ou deux époque(s). Aussi papa en instance de divorce, mais ça, ça le rendrait plutôt sympathique, c'est par là que Nanni pourrait bien ne pas être si différent. Pour brouiller les pistes, il se regarde aussi dans le miroir d'une jeune postulante cinéaste aussi motivée que stressée par sa propre ambition. Le genre citoyenne concernée, altère egotte en plus jeune et moins blasée. Enfin, il affronte sa bête noire, l'espèce d'hydre bronzé à la tête d'à peu près tout en Italie. Il lui pique son texte, le dé-joue et le dé-sincarne en lui otant tout folklore. Et là, ça ne fait plus rire du tout. Autoportrait en négatif, en creux et en décalé. C'est en s'éloignant de lui-même que Moretti s'en rapproche le mieux.

Celluloid Closet (The)

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Réalisé par : Epstein & Friedman
En : 1995, USA
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /docu (plus ou moins fiction) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 102 mn, NB/couleur

Critique perso :

Petite leçon d'histoire du cinéma et de décryptage d'images -petit sermon militant de la cause gay, aussi. Tout, nous saurons donc (presque) tout sur les homos vus par Hollywood : des inoffensives tapettes des débuts du cinéma aux inquiétants criminels névrosés des années 60, en passant par les vampires lesbiennes et autres amitiés viriles cachées sous les jupettes des péplums et les colts des westerns. Bon, le film ne balance pas tant que ça (il reste sûrement plein d'affaires dans le placard), mais permet d'apprendre un peu à voir derrière les images, et à entendre derrière les paroles. Pour, par exemple, ne plus jamais regarder Rebecca et Ben-Hur de la même façon.

Dayereh - Cercle (Le)

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Réalisé par : Jafar Panahi (1960 - )
En : 2000, Iran
Genre(s) : pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Le cercle, hélàs, est souvent vicieux. C'est, dans ce film, le lieu symbolique de l'enfermement perpétuel des femmes en Iran, comme cette roue verticale où s'épuisent les souris en cage. Maudites dès leur naissance, voilées, battues, encadrées comme d'éternelles mineures, traquées et surveillées en permanence par des barbus en tenue militaire (sans doute les sinistres "gardiens de la révolution"), coupables, forcément coupables de tout, condamnées à perpet' à attendre le bon vouloir des hommes... Clandestines de leur propre vie, elles sont réduites, au mieux, à la précaire solidarités des humiliées. Dans ce Yol au féminin, on en suit 3, 5, 6, formant une Ronde sans fin : uniques dans leur personnalité, identiques dans leur soumission, toutes infiniment belles et terriblement malheureuses. Haletant comme un documentaire, accablant comme un pamphlet, vrai comme une fiction.

Some Like It Hot - Certains l'aiment chaud

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1959, USA
Acteurs principaux : Joe E. Brown (1892 - 1973), Tony Curtis (1925 - 2010), Jack Lemmon (1925 - 2001), Marilyn Monroe (1926 - 1962), Pat O'Brien (1899 - 1983)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

Deux musiciens traqués et fauchés (qui ne trouvent rien de mieux que de se produire dans les tripots de Chicago en pleine Prohibition) se voient proposer, en dernier recours, un contrat à Miami... dans un orchestre féminin. Travestis incognito, ils font la connaissance de la joueuse de yukulélé de la bande, une fondante Sugar... On dirait des gamins dans une patisserie, déguisés en grandes personnes. Après, la mécanique des intrigues, déguisements, embrouilles et quiproquos s'emballe, d'autant que la sweet Sugar ne ménage pas ses efforts pour réchauffer l'atmosphère ("poo poo pee dou..."). Humour farfelu, situations et répliques d'anthologie : une comédie presque (parce que personne ne l'est vraiment, n'est-ce pas) parfaite.

Cet obscur objet du désir

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Réalisé par : Luis Bunuel (1900 - 1983)
En : 1977, France
Acteurs principaux : Carole Bouquet (1957 - ), Angela Molina (1955 - ), Fernando Rey (1917 - 1994)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

Dans le compartiment d’un train, Mathieu raconte à ses compagnons de voyage (qui, bizarrement, se connaissent tous : le monde est décidément petit), comment il en est arrivé à adorer et à détester une femme. En fait, vu qu’elle l’encourageait et se dérobait sans cesse, l’objet de son désir à lui n’est pas difficile à deviner. Il attrape très bien les souris et les mouches mais, avec elle, il a plus de mal. Il a l’esprit tellement obscurci qu’il ne voit même pas que cette femme aux deux visages a aussi, littéralement, deux incarnations (deux actrices se partagent le rôle, en alternance, sans logique claire). A vrai dire, vu que Fernando Rey est doublé par Michel Piccoli, on a un peu l’impression que Matthieu est double, lui aussi. Quant au monde autour, dont tout le monde se fiche, il est obscurci d’étranges attentats terroristes. L’obscurité, c’est comme la lumière : dans l’oeil de tous les spectateurs.

Chagrin et la pitié (Le)

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Réalisé par : Marcel Ophüls (1927 - )
En : 1969, France
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /en France profonde
Caractéristiques : 251 mn, NB

Critique perso :

En 69, Clermont-Ferrand devint (brièvement) la capitale du cinéma français : pendant que Rohmer y passait une nuit chez Maud, Ophüls-fils, lui, y enquêtait pour essayer d'y voir plus clair sur la nuit de 39-45. Il paraît qu'au réveil, à l'époque, la France était persuadée d'avoir été unanimement résistante. Il paraît qu'à l'époque, elle était gouvernée par un Général qui avait joué un rôle dans cette histoire. Il paraît qu'à l'époque, il y avait eu de la censure dans l'air. Pourtant, la 2ème guerre mondiale a bien eu lieu, et ce film la montre comme on la voit aujourd'hui : complexe, ambiguë, violente, injuste. Et il le montre avec ses seules armes possibles : des images, des paroles et des visages : ceux de héros, ceux de lâches, ceux de traitres -et tout ça, ça a fait d'excellents français.

Stanza del figlio (La) - Chambre du fils (La)

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 2001, Italie
Acteurs principaux : Laura Morante (1956 - ), Nanni Moretti (1953 - ), Silvio Orlando (1957 - ), Jasmine Trinca (1981 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 99 mn, couleur

Critique perso :

Tout va pour le mieux dans la meilleure des familles possibles. Maman dans la transmission de l'art, papa dans la guérison des âmes, fifille et fiston ados mais gentils quand même... Ils sont beaux et sains, ils font du sport et prennent leurs repas ensemble. Jusqu'au jour où le fiston a la bien mauvaise idée de ne pas remonter de sa dernière plongée sous-marine. Là, c'est tout le monde qui plonge. Maman ne transmet plus rien, sauf sa détresse, papa ne guérit plus personne, surtout pas lui-même. Fifille reste gentille mais elle souffre quand même. Le temps s'arrête quelque temps. Il en faudra pas mal pour remettre en route la clepsydre. Petit voyage en apnée, sans pathos et sans mélo -sans grande surprise non plus, mais beau et digne quand même.

Chambre en ville (Une)

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1982, France
Acteurs principaux : Richard Berry (1950 - ), Danielle Darrieux (1917 - 2017), Michel Piccoli (1925 - ), Dominique Sanda (1948 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /en France profonde /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 92 mn, NB/couleur

Critique perso :

Nantes, quelques années avant Lola. Grève d'ouvriers dans les chantiers navals, rififi domestique chez les bourgeois. Tout converge vers l'appartement de Mme Langlois, un antre purpurin rongé par l'ombre, à mi-chemin entre la cathédrale et la préfecture. La dame est une ex-baronne qui a perdu sa particule et ses illusions en épousant un colonel, mort depuis en Indochine. Pour éponger ses dettes et son gros-plant, elle loue une chambre à un ouvrier (en grève) et tente de rabibocher le tout récent mariage de sa garce de fille Edith. Le beau métallo se bat pour défendre ses droits (au bonheur), Edith aussi, Ils sont faits l'un pour l'autre, aussi à poil l'un que l'autre, avec ou sans fourrure. Ce film, c'est comme une pierre de volcan : dense, sombre, dure et rapeuse, très longuement cuite et recuite dans les entrailles de la terre (et du réalisateur), et qui vient exploser à la figure des tièdes. Du Demy en musique, mais sans voiles.

Penny Serenade - Chanson du passé (La)

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Réalisé par : George Stevens (1904 - 1975)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Irene Dunne (1898 - 1990), Cary Grant (1904 - 1986)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 119 mn, NB

Critique perso :

Désolée : c'est pire qu'une erreur de casting, ça frise la faute professionnelle cinéphilique d'avoir ça dans sa collection. Non, je n'aime pas ce film, je l'ai commandé par hasard, je ne le connais pas, je ne l'ai jamais vu. Ce roublard de Stevens a sans doute voulu faire la crème des mélos, mais il appuie vraiment trop sur le champignon. Non je n'ai aucune sympathie pour Julie, dont la seule ambition professionnelle est de devenir une mère de famille parfaite. Rien ne m'énerve plus que de la voir en tablier avec un fichu sur la tête, tentant de passer son certificat de bonne ménagère apte à adopter un petit ange. La seule chose dont je lui suis reconnaissante, finalement, c'est d'avoir donné à Cary Grant le goût des voyages en train.

Chansons d'amour (Les)

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Réalisé par : Christophe Honoré (1970 - )
En : 2007, France
Acteurs principaux : Louis Garrel (1983 - ), Clotilde Hesme (1979 - ), Chiara Mastroianni (1972 - ), Brigitte Roüan (1946 - ), Ludivine Sagnier (1979 - )
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Ils sont jeunes et beaux, ils s'aiment (à deux et plus) de toutes les façons possibles, sans jamais en faire un drame. Ils ont des amis, une famille sympa, bossent dans le créatif, vivent à Paris dans un monde en-chanté qui ressemble (beaucoup) à ceux de Demy et de Truffaut -en version légèrement upgradée... Qu'est-ce qu'il va bien pouvoir leur arriver d'un peu intéressant ? Un drame-un vrai : la mort brutale et inattendue, le deuil. Et la reconstruction quand même, par l'amour toujours plus -légèrement upgradé encore. Et toujours en musique et en chansons, s'il vous plaît, douces et mélancoliques si possible. L'air et la couleur du temps (d'un temps où les seules vraies crises étaient intimes), en douce. Un film sur la porosité des désirs, la fluidité des sentiments, la tragédie de l'existence et la comédie du bonheur. La vie en version légèrement upgradée.

Meet Me in St. Louis - Chant du Missouri (Le)

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Réalisé par : Vincente Minnelli (1903 - 1986)
En : 1944, USA
Acteurs principaux : Mary Astor (1906 - 1987), Lucille Bremer (1917 - 1996), Judy Garland (1922 - 1969), Margaret O'Brien (1937 - )
Genre(s) : en avant la musique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

J'ai enfin retrouvé les ancêtres de mes Demoiselles préférées : elles habitaient St. Louis (Missouri), chantaient déjà pas mal et lorgnaient déjà sur les boys next door en attendant avec impatience leur expo universelle de 1904. C'était le bon temps. L'époque d'Autant en emporte le vent était déjà loin, et pourtant les filles se serraient encore le corset, et avaient encore l'air de faire leurs robes avec des rideaux. Les hommes, eux, ne quittaient jamais leur cravatte pour manger, ni leur smoking pour danser. Tout ça pour quoi ? Presque rien. Une morale nostalgique convenue (le "there is no place like home" du Magicien d'Oz), un hymne à la famille tout ce qu'il y a de plus tradi. Et pourtant, la douce euphorie du "musical" n'y a jamais été aussi douce, ni aussi euphorisante.

Singin' in the Rain - Chantons sous la pluie

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Réalisé par : Stanley Donen (1924 - )
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Cyd Charisse (1921 - 2008), Jean Hagen (1923 - 1977), Gene Kelly (1912 - 1996), Debbie Reynolds (1932 - 2016)
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

La grâce, comme la pluie, tombe du ciel, et ce film-là a été copieusement arrosé. Normal, en fait, parce qu'il ne parle que d'une chose : comment échapper à la pesanteur ? Recensement des réponses possible : la danse, la musique, le rire, l'amour, l'enfance et l'art (ou plutôt l'enfance de l'art -du cinéma en l'occurrence). Et la synthèse de tout ça s'appelle Gene Kelly (crédité aussi du statut de co-réalisateur). Il n'a jamais été aussi jeune et aussi beau qu'ici, et personne n'a plus jamais aussi bien que lui barbotté dans une flaque en hurlant son bonheur.

Chaos

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Réalisé par : Coline Serreau (1947 - )
En : 2001, France
Acteurs principaux : Rachida Brakni (1977 - ), Catherine Frot (1956 - ), Vincent Lindon (1959 - ), Line Renaud (1928 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 109 mn, couleur

Critique perso :

Une petite prostituée maghrebine tabassée dans la rue par ses proxénètes : un fait divers banal et tragique dont Hélène est l'involontaire complice. Alors, elle va la rechercher dans les hopitaux, rester à son chevet, accompagner son rétablissement. Et elle récupère vite, la petite prostituée : c'est bientôt une boule de rage et d'énergie qui, avec la complicité (active, cette fois !) d'Hélène, va faire exploser tous les cadres qu'elle rencontre : sa propre famille qui l'a reniée, celle d'Hélène, déjà bien perturbée, le réseau de prostitution qui l'a "dressée" et qui la recherche. Ca bouge beaucoup, dans toute l'Europe et tous les milieux sociaux, c'est drôle, émouvant, décapant, terrible tour à tour et en même temps, ça décoiffe et ça bouscule. Merci du voyage !

Charade

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Réalisé par : Stanley Donen (1924 - )
En : 1963, USA
Acteurs principaux : Cary Grant (1904 - 1986), Audrey Hepburn (1929 - 1993), Jacques Marin (1919 - 2001), Walter Matthau (1920 - 2000)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

Mon premier est une jolie veuve. Mon second un séduisant divorcé qui n'a jamais été marié. Mon troisième une bande de Pieds Nickelés menaçants. Le Mc Guffin : un mystérieux magot introuvable... Indices : le générique rappelle Vertigo, et certaines scènes ressemblent furieusement à celles de Les Enchaînés. Mais non, ce n'est pas du Hitchcock. On se croirait parfois dans Un Américain à Paris, les chansons en moins. Et mon tout aurait pu finir comme dans Les 39 marches ou La Dame de Shanghai, avec un poil de démesure en plus. De toute façon, l'art de brouiller les pistes aura rarement été porté aussi loin. Et l'éloge du mensonge rarement été aussi élégamment illustré.

Charulata

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Réalisé par : Satyajit Ray (1921 - 1992)
En : 1964, Inde
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 117 mn, NB

Critique perso :

C'est une Mme Bovary bengali, qui aurait du talent, Charulata. Son mari la trompe avec la revue politique dont il est le directeur, le rédacteur en chef, l'imprimeur et peut-être bien le seul lecteur. "The Sentinel", ça s'appelle. Dans la maison vide, dans la chambre vide, elle attend. Elle attend qu'on l'entende. Qu'on la révèle. Qu'on la regarde comme elle sait regarder, qu'on la lise comme elle sait lire. Qu'on l'aime comme elle sait... Alors, le premier cousin poète, chanteur et rêveur venu sera évidemment le bienvenu. Alors, le dernier frangin aux poches vides aura évidemment tout loisir de vider un peu plus les coffres de la maison vide. La sentinelle a des absences. Peut-on imaginer Mme Bovary heureuse ?

Most Dangerous Game (The) - Chasses du comte Zaroff (Les)

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Réalisé par : Cooper & Schoedsack
En : 1932, USA
Acteurs principaux : Leslie Banks (1890 - 1952), Joel McCrea (1905 - 1990), Fay Wray (1907 - 2004)
Genre(s) : les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 63 mn, NB

Critique perso :

Qu'est-ce qui sépare un chasseur d'un assassin ? Un esthète d'un barbare ? Presque rien, à peine une petite cicatrice sur le crâne... Le comte Zaroff, en génial précurseur de Chasse, Pêche, Nature et Tradition (et en prophète visionnaire des années à venir) a fait de son île un terrain de jeu un peu particulier. Y échoue, pas tout à fait par hasard, un autre chasseur, mais américain, lui -donc qui a le droit de bravement défendre la civilisation. Et n'a pas peur de partir à la recherche des frontières de l'humain. Quant à Fay Wray, c'était juste avant que les mêmes producteurs sadiques (en fait, les réalisateurs sont plutôt, eux, Pichel et Schoedsack) la balancent entre les gros doigts du roi Kong. Elle portait déjà à ravir les robes de soirée déchirées par la forêt vierge, et elle criait déjà très bien.

Sceicco bianco (Lo) - Cheik blanc (Le)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1952, Italie
Acteurs principaux : Giulietta Masina (1920 - 1994), Alberto Sordi (1920 - 2003), Leopoldo Trieste (1907 - 2003)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Ils sont provinciaux, ils débarquent pour leur voyage de noces à Roma la Grande. Monsieur a fait le planning : retrouvailles avec un vieil oncle, marathon touristique et audience papale. Mais Madame a des plans cachés : elle ne songe qu'à rencontrer le héros de son coeur, un Cheik blanc de pacotille (non, ce n'est pas le pape) qui parade dans les romans-photos qu'elle dévore en cachette. Alors qu'elle voulait simplement lui offrir un petit cadeau perso, son fantasme le plus secret se réalise : elle se fait kidnapper par (l'équipe technique de) son Cheik. Pendant ce temps, Monsieur se bat avec l'énergie de son désespoir pour sauver la face de son honneur baffoué. Le Maestro a déjà toutes ses cordes à sa lyre : les yeux exorbités d'un provincial monté à la capitale, un coeur de midinette, une verve de cartooniste, une patte d'artiste pour qui les rêves sont les meilleurs miroirs.

Room at the Top - Chemins de la haute ville (Les)

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Réalisé par : Jack Clayton (1921 - 1995)
En : 1959, Angleterre
Acteurs principaux : Simone Signoret (1921 - 1985)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 115 mn, NB

Critique perso :

C'est l'histoire d'un petit mec qui voudrait bien devenir grand. Attention, le décor a de l'importance : Angleterre, province laborieuse, au sortir de la guerre. Joe, le petit mec, vient du fond du trou du prolétariat. Même pas héros de guerre, mais belle gueule bien remplie, de l'ambition et une haute opinion de lui-même. Il vient de grimper comptable respectable, mais ne compte pas en rester là. D'autant que le boss upper class du coin à une fille à marier. Pour Joe, ce serait presque du gâteau s'il ne contactait un déplorable attachement contre-productif pour l'épouse française délaissée du gougeat local -Simone, dans le rôle qui lui vaudra son Oscar. L'art de gagner sa Place au soleil tout en perdant à peu près tout le reste a rarement été servi avec autant de rage et d'énergie noires.

Chicago

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Réalisé par : Rob Marshall (1960 - )
En : 2002, USA
Acteurs principaux : Richard Gere (1949 - ), John C. Reilly (1965 - ), Renée Zellweger (1969 - ), Catherine Zeta-Jones (1969 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en avant la musique /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

And now, ladies and gentlemen : le show ! C'est-à-dire le film, c'est-à-dire la vie en mieux. En Amérique, c'est là la mesure de toutes choses : de la justice, de la presse, du bizness. Brillante illustration dans le Chicago des années 20, sous le signe du Magicien d'Oz, de Cukor et de Minnelli, qui nous ont appris à faire chanter nos rêves. Chiche, donc : fantasmes à gogo sous forme de montage parrallèle généralisé, pour illustrer les rêves de starlette de Roxy Hart, la jolie meurtrière emprisonnée. Un peu des Hommes préfèrent les blondes, beaucoup de Cabaret (hommage à Bob Fosse, créateur du spectacle, oblige), une tonne de paillettes. Et le pire arrive forcément : le show (c'est-à-dire le rêve) devient réalité. Must go on...

Chicken run

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Réalisé par : studios Aardman
En : 2000, Angleterre
Genre(s) : animation /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 81 mn, couleur

Critique perso :

Ca y est, les poules ont des dents ! Et en plus, elles parlent... On dirait même qu'elles ont été nourries au grain du cinéma américain (genre "Grande évasion", E.T. et autres Indiana Jones). Pourtant, tout ce qu'on attend d'elles, c'est qu'elles pondent des oeufs. Et, au grand désespoir de certaines, ça ne vole pas très haut, dans le poulailler. Mais tout espoir n'est pas perdu : voici justement le coq Rocky (un américain, un vrai) qui leur tombe du ciel pour leur apprendre à prendre de l'altitude. Juste au moment où la triste réalité du monde extérieur commence à se faire jour : les hommes (enfin, surtout les anglais, il faut bien le dire) sont de grands amateurs de tourtes au poulet... Avant que les créateurs de Wallace & Gromit s'en mêlent, on n'aurait jamais cru que des êtres de pâte à modeler pouvaient être aussi bons comédiens.

Chienne (La)

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1931, France
Acteurs principaux : Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Guignol nous avertit : ce n'est pas un "drame social" ni une "comédie morale", et il ne faudra y chercher aucune leçon. On y verra juste, en effet, les méfaits de l'argent sur l'amour -et de l'amour sur l'argent. On y compatira aux malheurs d'un petit monsieur nommé Legrand, au coeur trop grand pour le portefeuille. On y croisera une poule dans une peau de vache, une chienne déguisée en fleur. On y rencontrera Dédé, batteur de pavé innocent aux mains sales. Pas un qui n'ait bradé son coeur dans le grand bazar des sentiments illusoires. Et Renoir qui crée quasiment le genre noir (un certain Fritz Lang s'en souviendra dans La Rue Rouge...).

Straw Dogs - Chiens de paille (Les)

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Réalisé par : Sam Peckinpah (1925 - 1984)
En : 1971, Angleterre
Acteurs principaux : Susan George (1950 - ), Dustin Hoffman (1937 - ), David Warner (1941 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 118 mn, couleur

Critique perso :

Un gentil astro-mathématicien américain, marié à une jolie paire de jambes anglaises, en congé sabbatique dans le trou à bouseux où est née madame. Au milieu d'écluseurs de bouteilles, c'est le seul à porter un pantalon blanc et des lunettes. Pendant qu'il analyse la structure de l'univers dans son bureau, sa femme montre sa jolie paire de jambes aux ouvriers bouseux qui travaillent sur le toit de leur grange. Une souris et des hommes. Si au moins ils avaient vu Orange mécanique ou Délivrance, ils se seraient peut-être méfié, les jeunes mariés. Mais non, ils ne savent pas jusqu'où ne pas aller trop loin. Si bien qu'ils y vont. A la fin, ils ne seront plus capables de faire la différence entre ce qui fait plaisir et ce qui fait mal. A la fin, le gentil mathématicien aura un peu sali son pantalon et cassé ses lunettes.

Chinoise (La)

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1967, France
Acteurs principaux : Juliette Berto (1947 - 1990), Jean-Pierre Léaud (1944 - ), Anne Wiazemsky (1947 - 2017)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914) /poésie en image /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 96 mn, couleur

Critique perso :

Ils sont cinq, ils vivent ensemble confortablement dans un grand appart bourgeois mais attention, ce sont des révolutionnaires -tendance Mao foncé. Des vrais, des pros, à peine camouflés derrière des activités officielles (étudiants, artistes…). Leur occupation principale est de se former et de s’entretenir dans la connaissance approfondie d’un inépuisable petit livre (rouge). Ils causent beaucoup, font un peu d’atelier artistique, n’ont pas l’air de beaucoup baiser. Des espèces de moines modernes, en fait. A vrai dire, on ne comprend pas grand chose à leurs débats, et c’est pas sûr qu’eux mêmes y comprennent quelque chose. Qu’ils répondent à un interviewer invisible (le maître du logis et du film, bien sûr) ou se coupent la parole, ils frôlent souvent le ridicule d’assez près, et ne donnent pas des masse envie de les suivre. Le film-tract-collage qui annonce mai 68 mais aussi les attentats terroristes, le pop-art, les communautés foireuses, l’activisme, les gueules de bois qui suivent et le naufrage de Godard. Respect (mais en rigolant en coin).

Chung Hing sam Iam - Chungking Express

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 1994, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Takeshi Kaneshiro (1973 - ), Tony Leung Chiu Wai (1962 - ), Faye Wong (1969 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Portrait de la moderne ultrasolitude en son palais : Hong-Kong. Ici, tout va très vite. Ici, c'est la Grande Braderie des choses et des gens, tout s'achète et tout se vend. Et tout (objets, identités et sentiments) est périssable et interchangeable. Deux histoires, quatre ou cinq personnages dont deux flics. Ils sont mignons, les flics de Honk-Kong (cf. déjà celui de Nos années sauvages). Ils ne sortent jamais leur flingue, sont surtout préoccupés par leurs peines de coeur. Dans ce cas-là, leur horloge interne ne marche plus tout à fait à la même vitesse que celle de la ville. Ils noient leur chagrin dans la foule, dans la bouffe et dans la nuit. Deux histoires, quatre ou cinq personnages qui se croisent mais se reconnaissent rarement. Qui se cachent, se déguisent, s'observent de loin, s'ignorent, se ratent. Deux doux policiers rêveurs au pays de la l'ultramoderne mélancolitude.

Dragonwyck - Château du Dragon (Le)

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : Walter Huston (1884 - 1950), Vincent Price (1911 - 1993), Gene Tierney (1920 - 1991)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 103 mn, NB

Critique perso :

Elle aurait pu s'appeler Jane Eyre, le film aurait pu s'appeler Rebecca. Mais là, c'est Miranda. Au début, elle vit dans une petite maison dans la prairie. Un brillant destin de paysanne dévotte lui est promis. Mais un vague cousin très riche l'invite à venir jouer la dame de compagnie dans son antre, Dragonwyck, et sa vie bascule. Le cousin s'avère un irrésistible monstre, la maison se révèle gothique et hantée. Miranda est ravie, dès que possible elle épouse les deux. Il ne lui restera plus qu'à survivre le plus longtemps possible aux charmes vénéneux du lieu, et plus qu'à explorer les recoins obscurs du maître de maison. Il y a des gens comme ça qui ont l'air d'être faits pour s'épanouir à l'ombre, qui sont amoureux de leur prison, et de leur geôlier. La mise en bouche d'une grande oeuvre, en forme de curiosité gothique.

Cid (El) - Cid (Le)

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Réalisé par : Anthony Mann (1906 - 1967)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : Hurd Hatfield (1917 - 1998), Charlton Heston (1924 - 2008), Sophia Loren (1934 - ), Raf Vallone (1916 - 2002)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /épique pas toc
Caractéristiques : 182 mn, couleur

Critique perso :

Le Cid, quand on est français, on connaît : on sait qu'il cause l'alexandrin couramment, qu'il souffre de cruels dilemmes incurables et on se souvient vaguement d'une querelle avec trois unités. C'était qui, celles-là, déjà ? Bizarre, il n'en est pas question ici. Pourtant il a du coeur, aussi, ce Rodrigue. Il aime aussi une Chimène, et tout irait pour le mieux si les beaux-pères ne s'avisaient de gâcher la fête. Le tout est traité en peplum tardif, dans un Moyen-âge ibérique pré-jihadique sous influence shakespearienne. Pas sûr que Gérard Philippe y retrouve son pourpoint. La morale est claire : ô rage, ô désespoir, le pouvoir et l'héroïsme vont rarement ensemble. Le Cid a choisi son camp, mais il n'aura droit qu'à une victoire post-mortem. Mais aux âmes bien nées, la gloire peut bien attendre le nombre des années.

Saboteur - Cinquième colonne (La)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1942, USA
Acteurs principaux : Robert Cummings (1908 - 1990)
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Les japonais viennent de s'en prendre à Pearl Harbour. Hitch, passé à l'ouest (de l'Atlantique) depuis Rebecca, veut participer à l'effort de guerre. Alors, il s'en prend aux ennemis du dedans, aux combattants de la Liberté planqués derrière les américains bon teint, aux saboteurs du politiquement correct. Il choisit ses alliés parmi les prolos anars et les aristocrates du coeur, les artistes et les freaks. L'histoire a un goût de déjà vu et un parfum de à revoir : c'est une marche forcée à l'intérieur de la démocratie, east by south east. Le gentil rencontrera la fille des rêves américains. Le méchant sera perdu parce qu'il n'a pas de tailleur anglais. Tout est pour le mieux dans le meilleur des films de propagande possible.

Circus (The) - Cirque (Le)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1928, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 71 mn, NB

Critique perso :

Un vagabond à la silhouette familière erre dans une fête foraine. Pas très loin derrière, d'autres silhouettes familières en uniforme et casquette. Maître de l'esquive, notre Guignol préféré se réfugie dans un palais des glaces (comme le fera plus tard une certaine Dame de Shanghai), puis dans un cirque (auquel ressemblera celui de Freaks). Là, il est accueilli (entre autres) par une charmante écuyère maltraitée par son papa, par une troupe de Calvero qui ne font plus rire personne et par un gentil lion qu'il vaut tout de même mieux ne pas réveiller. Il y apprend à mettre en scène quelques unes de ses géniales impro inspirées par les silhouettes en uniforme et casquette. Puis, d'autres inspirations le poussent à jouer au funambule, et l'entrainent jusqu'à un strip-tease de haut vol. Tenté par le ménage à trois, il finit par sortir du cercle après avoir, décidément, inventé tout le cinéma.

Man on a Tightrope - Cirque en révolte

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Réalisé par : Elia Kazan (1909 - 2003)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Gloria Grahame (1923 - 1981), Frederic March (1897 - 1975), Adolphe Menjou (1890 - 1963)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

En 1952, il s’est passé un truc embêtant dans la vie d’Elia Kazan. C’est à ce moment-là qu’il a évoqué quelques noms de potes communistes devant une certaine commission. C’est aussi à partir de là qu’il a commencé à faire des films intéressants, des films où il est question d’agents doubles et de légitimes trahisons. Ici, c’est carrément une troupe entière de cirque (dompteur de lions, clowns, acrobates et musiciens, familles comprises), qui, manque de bol, opère en Tchécoslovaquie, du mauvais côté du rideau de fer. Et rêve de passer de l’autre côté, en bloc et en musique, si possible. Pour éviter d’avoir à faire rire sur les prolétaires méritants et les méchants capitalistes. Si c’est pas de la belle justification a posteriori, ça y ressemble beaucoup. Apparemment, en tout cas, c’est pas le collectivisme qui le rebutait, Kazan, surtout pas celui d’une troupe soudée par le spectacle. Et coup de bol ou pas, il savait décidément faire du très bon cinéma avec (suspense, héros et traitres compris).

Citizen Kane

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Réalisé par : Orson Welles (1915 - 1985)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Joseph Cotten (1905 - 1994), Agnes Moorehead (1900 - 1974), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 119 mn, NB

Critique perso :

En 1941, Orson Welles a tout juste 25 ans. Il a déjà 10 ans de théâtre (et quelques coups d'éclat) derrière lui, tout le monde le traite comme un génie. Il est plein d'ambition, Hollywood lui fait un pont d'or. Et voilà que, pour son premier film, il imagine ce que pourrait être sa vie si, en plus, il était riche et con. Il fait la bio de son ennemi intime : un petit jeune naïf et sincère qui nait avec une mine d'or entre les mains et pas grand chose d'autre à se mettre dans le coeur. Qui s'achete (la rédaction d') un journal le jour de ses 25 ans. Puis apprend à devenir, progressivement, un capitaliste arrogant et manipulateur d'opinion, à l'aise dans les eaux troubles de la presse et de la politique. Opportuniste en politique, tête de mule en tout. Qui mourra seul et incompris de tous, en emportant dans sa tombe le secret dérisoire de son innocence perdue. Il y en a qui se sont reconnus... Pour tenter l'impossible inventaire d'une vie, Welles invente les nouvelles règles du jeu du cinéma. Impose une nouvelle construction du récit, tourne des plans impossibles. Ce petit blanc-bec a donné des leçons à tout le monde.

clowns (I) - Clowns (Les)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1970, Italie
Acteurs principaux : Anita Ekberg (1931 - 2015), Federico Fellini (1920 - 1993)
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 92 mn, couleur

Critique perso :

Un matin, un petit garçon qui s'appelle Federico assiste émerveillé à l'émergence d'un chapiteau géant sous ses fenêtres. Le cirque a aussi dans ses bagages des Hercule de foire, une panthère au milieu des tigres... et des clowns. Depuis ce jour-là, le petit garçon se rend compte que son village est une piste grandeur nature. Depuis ce jour-là, il passe son temps à essayer de reproduire indéfiniment cette scène primitive. D'abord, il s'y prend façon "clown blanc", c'est-à-dire sérieux, rationnel, autoritaire -et un peu foireux. Mais où sont les clowns d'antant ? Enquête, interviews, témoignages. Ratages. Et puis, à bout d'infos exploitables, il lâche le "clown Auguste" qui est en lui au milieu d'une piste et il imagine son grandiose enterrement, dans un chaos génial qui n'appartient qu'à ses mises en scène. Intro, thèse, antithèse (la synthèse, c'est lui !) : ce type-là est vraiment le meilleur docteur possible en sciences clowneriestiques.

Cléo de 5 à 7

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 1962, France
Acteurs principaux : Jean-Luc Godard (1930 - ), Anna Karina (1940 - ), Corinne Marchand (1937 - )
Genre(s) : Paris /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 86 mn, NB/couleur

Critique perso :

Dans la première partie, elle s'appelle Cléo Victoire. C'est une chanteuse à la mode et à robe à pois, une poupée un brin capricieuse et superficielle vers laquelle les regards d'hommes se tournent avec un brin d'insistance. Le problème, c'est qu'elle pourrait bien être très malade. Mademoiselle Victoire sent le boulet de la mort lui défaire le brushing. Alors, dans la deuxième partie, elle fait sa mue. Elle s'appelle Florence, elle s'habille en noir comme déjà en deuil d'elle-même, et elle se met à regarder les autres, avec un brin d'insistance bienveillante. Les artistes, les garçons de café et les soldats en permission, même ceux qui ne savent pas qu'elle chante dans les juke-box. En 1h30 de vie et de film, elle réussit à parcourir quelques kilomètres de pavés parisiens : quelques petits pas pour une femme, un grand bond dans son humanité.

Cleopatra - Cléopâtre

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1963, USA
Acteurs principaux : Richard Burton (1925 - 1984), Rex Harrison (1908 - 1990), Martin Landau (1931 - 2017), Elizabeth Taylor (1932 - 2011)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /à l'antique /épique pas toc
Caractéristiques : 243 mn, couleur

Critique perso :

La fresque au budget pharaonique qui sonna le déclin de l'empire Fox : 4h de démêlées politico-amoureuses entre quelques hommes qui prétendent, en toute simplicité, aux titres de rois, empereurs et Dieux, et une petite femme qui ose leur tenir tête -et quelle tête ! Cléopâtre, donc, mélange de Margaret Thatcher et de meneuse de Crazy Horse, change de robe et de coiffure à chaque scène. Les hommes, eux, causent beaucoup -et plutôt bien, puisque Shakespeare et Mankiewicz se sont occupés de leur texte. Et puis, Richard Burton porte très bien la minijupe. Mais la patronne, c'est elle. Maîtresse de cérémonie (en plus de César et d'Antoine) hors pair, elle a compris que le pouvoir, c'est avant tout la pompe. Hollywood, qui a pris le relai en la matière, lui devait bien un aussi grandiose hommage.

Lady Eve (The) - Coeur pris au piège (Un)

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Réalisé par : Preston Sturges (1898 - 1959)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Eric Blore (1887 - 1959), Charles Coburn (1877 - 1961), Henry Fonda (1905 - 1982), Eugene Pallette (1889 - 1954), Barbara Stanwyck (1907 - 1990)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Voici l'homme. Il vient de passer un an dans la jungle. Naïf, timide, maladroit. Papa dans la bière, très riche. Voici la femme. Elle passe sa vie à plumer des gogos. Perfide, tricheuse, aguicheuse. Papa dans les jeux de cartes, très malin. Il élève des serpents. Elle lui fait avaler des couleuvres. Il ne rate pas une seule peau de banane qui traîne. Elle ne rate pas une seule occasion de les laisser trainer. Ils sont forcément faits pour éviter de ne pas s'entendre -et plutôt deux fois qu'une. Au pays de la comédie romantique loufoque, tout est toujours pareil et prévisible -sauf quand ça n'a rien à voir. Dans les couples, c'est pareil.

Morocco - Coeurs brûlés

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Réalisé par : Josef von Sternberg (1894 - 1969)
En : 1930, USA
Acteurs principaux : Gary Cooper (1901 - 1961), Marlene Dietrich (1901 - 1992), Adolphe Menjou (1890 - 1963)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Le Maroc, dernier refuge avant le désespoir (cf. plus tard Casablanca). Evidemment, c'est plein d'occidentaux désoeuvrés. On peut faire confiance à Sternberg : c'est un des cinéastes qui parvient à mettre le plus de monde, d'accessoires et de barres d'ombres dans ses plans. Et pourtant, ils sont seuls. Elle, danseuse de cabaret bi, chargée d'agrémenter le séjour des légionnaires de passage. Lui, légionnaire de passage sentant bon le sable chaud. Elle trimballe des poupées exotiques dans sa valise. Lui les préfère dans son lit. Ils sont là pour oublier leur passé, et on voit bien qu'ils ne pensent qu'à ça. Ils se draguent par habitude, se séduisent par surprise, se séparent par force. Ils se retrouveront au-delà du cynisme, là où ceux qui ont déjà tout perdu découvrent qu'ils ont encore tout à donner. La beauté des extrêmes.

Collectionneuse (La)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1967, France
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 89 mn, couleur

Critique perso :

Un dandy XIXème, un esthète XVIIIème et une pétasse XXème siècle passent l'été ensemble dans une villa du sud qui appartient à un vague ami commun. Comme ils n'ont rien d'autres à glander, nos squatters de luxe s'inventent des intrigues à la hauteur de l'opinion qu'ils ont d'eux-mêmes. A l'image : rien, ou presque. De la lumière et des jeunes gens en maillot de bain. En voix off : Adrien l'esthète commente les courses, avec une préciosité et une finesse dignes de son maître en mauvaise foi : Rousseau. Evidemment, Haydé, la fille, coupe Louise Brooks, focalise son attention. Où l'on mesure l'impuissance des mots d'homme face un corps de femme. Où l'on mesure que le cinéma, ça peut être aussi beau et subtil que la littérature Grand Siècle.

Some Came Running - Comme un torrent

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Réalisé par : Vincente Minnelli (1903 - 1986)
En : 1958, USA
Acteurs principaux : Arthur Kennedy (1914 - 1990), Shirley MacLaine (1934 - ), Dean Martin (1917 - 1995), Frank Sinatra (1915 - 1998)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 137 mn, couleur

Critique perso :

Dans le bus, il a encore son uniforme de soldat. Il revient de la guerre avec pas mal d'amertume dans ses bagages, et une fille collée à ses basques depuis la nuit d'avant. Il revient « chez lui » mais il a pris de la bouteille, toutes sortes de bouteilles. Son frangin n'a jamais bougé. Il devait être un peu planqué, maintenant il tient la banque. Lui, il a déjà publié un livre et il voudrait faire écrivain, encore. En fait, il veut tout : la respectabilité et l'encanaillement. Il drague la prof de littérature locale, tout en sympathisant avec les joueurs de poker. C'est le genre de ville un peu perdue mais pas trop, où tout est possible et tout est coincé en même temps. Où tout change mais où tout le monde fait comme si rien n'avait changé. Où on peut tout réussir et (encore plus facilement) tout rater. L'Amérique, en un tout petit peu plus petit. Qui suis-je, qui j'aime, quoi faire de ma vie ? that is the question, that is the big question... And this is a big film.

Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle)

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Réalisé par : Arnaud Desplechin (1960 - )
En : 1996, France
Acteurs principaux : Mathieu Amalric (1965 - ), Jeanne Balibar (1968 - ), Marion Cotillard (1975 - ), Marianne Denicourt (1966 - ), Emmanuelle Devos (1964 - ), Chiara Mastroianni (1972 - ), Denis Podalydès (1963 - ), Emmanuel Salinger (1964 - ), Thibauld de Montalembert (1962 - )
Genre(s) : Paris /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 178 mn, couleur

Critique perso :

Dans mon album de famille de cinéma, mes grands-parents habitaient le village de Jour de fête. Mes parents ont bien connu Vincent, François, Paul et les autres. Et moi, j'ai fait mes études avec les zigottos de ce film, du genre à se nourrir de mots et à ne jamais s'arrêter de penser. On a fréquenté les mêmes librairies, discuté des heures dans les mêmes cafés, arpenté les mêmes rues et les mêmes allées des mêmes parcs parisiens. Et nul doute que si j'avais croisé Mathieu Amalric, normalien philosophe "nul avec les filles", je l'aurais trouvé craquant (comme 3 des filles du film). Le montage, brillant, multiplie les effets de mémoire. Et une voix off très littéraire (on la croirait sortie de chez Mme de la Fayette - ou de chez La Collectionneuse) parvient à donner une dimension épique et romanesque au quotidien de ces jeunes gens. Notre vie était donc si passionnante et on ne le savait pas !

Barefoot Contessa (The) - Comtesse aux pieds nus (La)

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Ava Gardner (1922 - 1990), Edmond O'Brien (1915 - 1985)
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /la parole est d'or /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 125 mn, couleur

Critique perso :

Comme toujours avec Mankiewicz, c'est un film sur la duplicité. Mais la duplicité sincère, la duplicité comme fidélité à ses origines. Ava Gardner, au top de sa beauté, y est une danseuse de cabaret espagnole devenue star hollywoodienne. Elle parvient sans mal à nous faire croire à cette histoire de Cendrillon qui ne renonce pas totalement à ses haillons, et poussera le paradoxe jusqu'à tromper son mari par amour pour lui. Son histoire nous est racontée en flash-back par plusieurs personnes qui assistent à son enterrement (on se doute donc que ça ne finira pas très bien). Un conte de fées spéculaire et désenchanté avec Bogart dans le rôle de la marraine, ça ne se refuse pas !

Comédia de Deus (A) - Comédie de Dieu (La)

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Réalisé par : Joao César Monteiro (1934 - 2003)
En : 1995, Portugal
Acteurs principaux : Joao César Monteiro (1934 - 2003)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 170 mn, couleur

Critique perso :

Jean de Dieu, vieillard digne (enfin, pas toujours) règne sur le Paradis des crèmes glacées, une boutique à l'ancienne qui regorge de trésors pour le palais. C'est un patron qui n'emploie que des jeunes filles stylées à qui il n'a pas grand chose à apprendre mais qu'il drague très consciencieusement, avec une patience infinie et un sens de la réplique inimitable. Derrière sa tête de vautour et son profil d'esthète ascète, cet artisan-créateur de parfums mystérieux et sublimes cache un fétichiste libidineux. Chez lui, il vénère sa plus préciseuse relique : un herbier de poils pubiens. C'est un maître en cristallisation des liquides de toutes sortes, un capteur d'effluves hors pair. Certes, Antoine Doinel n'aime pas sa dernière création, mais c'est un faux jeton. La dernière demi-heure dévoilera le secret de fabrication de son ultime chef-d'oeuvre. Comme le dit un des personnages à propos de ses glaces (mais ça marche aussi avec le film) : quel dommage que cela ne soit pas un péché !

Conte d'automne

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1998, France
Acteurs principaux : Marie Rivière (1956 - ), Béatrice Romand (1952 - ), Didier Sandre (1946 - )
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

Opération : remarions la vigneronne (Magali, 45 a., veuve, 2gds. enfants, etc.). Deux anges-coquines s'y collent : Rosine, la copine du fils et Isabelle, l'amie d'enfance. Pas de concurrence -elles prennent l'initiative chacune de leur côté- mais quelques arrières-pensées qui trainent peut-être (elles seraient pas un peu agents doubles, des fois ?). Machinations, complots, intrigues : tous les moyens sont bons et surtout, comme toujours chez Rohmer, tout est matière à commentaires et analyses en direct, dans un flux continu de paroles. Les vendanges sont bonnes et le cru vieillit très bien.

Conte d'hiver

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1992, France
Genre(s) : culte ou my(s)tique /la parole est d'or
Caractéristiques : 114 mn, couleur

Critique perso :

Convoquer la réminiscence selon Platon, la révélation chrétienne, Shakespeare et le pari de Pascal (à la manière de Ma nuit chez Maud) pour parler des amours d'une coiffeuse : gonflé le Rohmer ! En prime : son plus beau portrait de femme modeste depuis Le Rayon vert. Ce conte-là est celui que je préfère ; parce que derrière une réalité un peu triviale, il traque le mythe antique universel : la nostalgie du paradis perdu et l'espérance en un avenir qui réconcilierait avec ses souvenirs. La grâce embusquée derrière le pilier des églises n'attend pas seulement les coiffeuses et les poètes : des fois, elle touche des films entiers.

Conte d'été

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1996, France
Acteurs principaux : Amanda Langlet (1967 - ), Melvil Poupaud (1973 - )
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

Quelques jours de vacances en Bretagne avec Gaspard -et sa guitare. Gaspard est seul, Gaspard mange à la crêperie du "clair de lune", Gaspard cherche sa copine-en-quelque-sorte sur la plage de St Lunaire (faut-il y voir une clé ?). Il fait la connaissance d'une crêpière-ethnologue, puis d'une flibustière court-vêtue (mais avec des principes), avant de retrouver sa copine-en-quelque-sorte, une blonde soi-disant surdouée (pas au volet, en tout cas). Son problème, à Gaspard, c'est qu'il ne sait pas dire non aux filles, et qu'il adore se faire balader. Un indécis professionnel qui va où le conduit le hasard. La mer efface sur le sable les pas des jeunes gens désunis, mais pas la mémoire de leurs conversations.

Conte de printemps

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1990, France
Acteurs principaux : Hugues Quester (1948 - )
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 108 mn, couleur

Critique perso :

Tiens, une femme qui pense. Parler, ça, oui, elles ont toujours su faire, chez Rohmer. Mais penser comme une philosophe qu'elle est, en citant Kant et Hegel, c'est plus rare. En plus, Jeanne est jeune et jolie, momentanément éloignée de chez elle et de son copain officiel. Libre quoi, à tout point de vue. A une soirée emmerdante, elle sympathise avec une autre égarée qui tient beacoup à lui faire rencontrer son père. Il faut attendre pas mal pour voir venir le climax du film : le temps de compter jusqu'à trois, Jeanne va vivre un petit, tout petit moment d'égarement. Il y a une histoire de collier, aussi, dont on ne sait pas ce qu'il est devenu. Perdu, volé ou caché, c'est les trois options possibles. Et c'est à peu près tout. Trois fois rien. Ca ne fait pas un pitch très sexy mais ça sufit à faire un film. Jeune et joli, éloigné de tout. Libre quoi.

Tales of Hoffmann (The) - Contes d'Hoffmann (Les)

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Réalisé par : Powell (& Pressburger) (1905 - 1990)
En : 1951, Angleterre
Acteurs principaux : Moira Shearer (1926 - 2006)
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu /poésie en image
Caractéristiques : 128 mn, couleur

Critique perso :

Dans l'arrière salle des coulisses d'un théâtre de cinéma, l'acteur d'un personnage de romancier se met à nous raconter l'histoire d'une histoire -ou plutôt de trois histoires, en fait. Pour entrer dans ce genre de films en forme de livre d'images qui bougent, il vaut mieux ne pas avoit oublié ses yeux d'enfant au vestiaire, et ne pas craindre de plonger la tête la première dans tous les pays des merveilles du monde. Les trois histoires, d'ailleurs, ne parlent que de ça : des abîmes de l'âme, des ballets des sentiments, des bords vertigineux du réel. Des chausse-trapes et des doubles-fonds de l'esprit humain, ce théâtre de marionnettes dont chacun serait le propre manipulateur. Et le tout, bien sûr, en chansons, en danses, en cartons pâte et en maléfices. C'est complètement surfait et absolument sublime, comme de l'opéra à la puissance cinéma. Comme si on tirait un feu d'artifices flamboyant dans la caverne de Platon.

Ugetsu monogatari - Contes de la lune vague après la pluie (Les)

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Réalisé par : Kenji Mizoguchi (1898 - 1956)
En : 1953, Japon
Acteurs principaux : Machiko Kyô (1924 - ), Masayuki Mori (1911 - 1973), Kinuyo Tanaka (1910 - 1977)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /vers le soleil levant
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

En temps de guerre, les affaires marchent fort, c'est bien connu -même dans le Japon médiéval le plus reculé. Genjuro, honnête potier de son état, en profite pour mettre les bouchées doubles. Avec son beau-frère, ils constituent un stock qu'ils vont vendre à la ville. Mais l'appétit du gain vient en mangeant : au lieu, fortune faite, de retourner vivre dans leur foyer le reste de leur âge, les voilà qui se prennent à rêver de grandeur miliaire ou d'amours aristocratiques. Sans prendre garde aux signes inquiétants qui rodent, ni aux menaces qui pèsent sur leur femme. Sans prendre garde à l'infinie séduction des leurres, ni à la délicate porosité des mondes flottants. En fait, à force de plans sur la chimère et de courses aux comètes, ils courent droit à leur perte. En fait, à force de vouloir ne pas être à leur place, ils nous permettent de prendre la leur.

Contes immoraux

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Réalisé par : Walerian Borowczyk (1923 - 2006)
En : 1973, France
Acteurs principaux : Fabrice Luchini (1951 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, couleur


Moonfleet - Contrebandiers de Moonfleet (Les)

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1955, USA
Acteurs principaux : Stewart Granger (1913 - 1993), Joan Greenwood (1921 - 1987), George Sanders (1906 - 1972)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pour petits et grands enfants /épique pas toc
Caractéristiques : 87 mn, couleur

Critique perso :

Angleterre, XVIIIème siècle. John Mohune, pas plus de 7-8 ans au compteur mais le coeur noble déjà bien accroché, est à la recherche du père de substitution que lui a recommandé sa défunte maman. Il tombe sur un chef de bande douteux, l'adopte, lui apprend les bonnes manières et déniche avec lui un trésor. Pour eux deux, "the exercice was profitable". C'est un peu une fable sur les aventures d'un mouton au milieu des loups. Une histoire de pirates à pieds secs, un récit d'apprentissage et de rédemption, quelque part entre les "Liaisons dangereuses" et "L'île au trésor" (les livres). Une aventure humaine, passée en contrebande d'un récit d'aventure clasique. Un bon plan pour apprendre à trouver son chemin dans le grand labyrinthe du monde.

Is the Man Who Is Tall Happy ? - Conversation animée avec Noam Chomsky

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Réalisé par : Michel Gondry (1963 - )
En : 2013, USA
Genre(s) : animation /docu (plus ou moins fiction) /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Un cinéaste-bricolo-geek interviewe une star intello-linguiste, en fait un film avec quelques crayons feutres, et crée un genre à lui tout seul : quelque chose comme le docu-essai d’animation. La bouille vieillissante de Chomsky est bien là, parfois, derrière, mais devant ce sont des idées, des concepts, des objets, des exemples, tout un théâtre de la pensée qui s’anime pour nous. Ils (les concepts) débattent, se confrontent, se mélangent, font la farandole et saluent à la fin, comme les vrais personnages d'un film qu'ils sont ici, Il est question des langues et du langage, de syntaxe (la spécialité du bonhomme), de sémantique, de cognition, d’épistémologie, d’histoire des sciences, de méthodologie de la recherche, des difficultés de l’interaction (ça, c’est plutôt la contribution spécifique de Gondry), bref, c'est exactement tout ce que j’adore et c'est passionnant ! En mots (écrits), en paroles (dites), en images (vues), un vrai feu d’artifices de l’esprit pour l’esprit.

Corbeau (Le)

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Réalisé par : Henri-Georges Clouzot (1907 - 1977)
En : 1943, France
Acteurs principaux : Pierre Fresnay (1897 - 1975), Pierre Larquey (1884 - 1962), Ginette Leclerc (1912 - 1992), Noël Roquevert (1892 - 1973), Louis Seigner (1903 - 1991)
Genre(s) : en France profonde /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 92 mn, NB

Critique perso :

Un corbeau, maintenant, tout le monde sait ce que c'est. Normal, c'est grâce à ce film (avant, c'était plutôt les écrivains qui inventaient de nouveaux mots). Un corbeau, donc, inonde de lettres anonymes et fielleuses les habitants d'un petit village en racontant plein d'horreurs. En plus, elles sont presque toutes vraies. Atmosphère, atmosphère (enfin, non, ça c'est dans un autre film). Sauf que, derrière les horreurs, il y a aussi pas mal de bonne volonté et beaucoup de souffrances. Mélange de portait collectif, de comédie de moeurs et d'intrigue policière, ce film a marqué son époque et valu quelques ennuis à Clouzot à la Libération. Il n'y a que la vérité humaine qui blesse...

Rope - Corde (La)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1948, USA
Acteurs principaux : Farley Granger (1925 - 2011), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

Vue sur une rue de New-York très calme. Un cri. La caméra se tourne vers l'intérieur de l'appart. Contrechamp de l'autre côté des rideaux, où deux élégants jeunes hommes en étranglent un troisième. On ne quittera plus ni l'appart (3 pièces-cuisine, mais on ne voit jamais la chambre) ni le plan (8 bobines de 10mn chacune, mais on voit à peine les transitions) -enfin, il m'a bien semblé apercevoir une coupe et un contrechamp, mais ils font sans doute partie du jeu. Et pour raconter quoi, ce simili plan-séance traficoté ? Le buffet froid donné par les deux dandys-assassins sur le cadavre encore tout chaud de leur victime. Le lien qui les attache ne se réduit sans doute pas à la corde qui leur a servi d'arme. Pour les démasquer, on ne pourra guère compter sur la vieille excentrique de service : elle a vu Les Enchaînés mais ne vaut pas Miss Marple. Mais leur prof en toutes choses, lui, a le regard bien affuté. Comme quoi il ne faut jamais croire avoir dépassé son maître.

Corniaud (Le)

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Réalisé par : Gérard Oury (1919 - 2006)
En : 1965, France
Acteurs principaux : Bourvil (1917 - 1970), Louis de Funès (1914 - 1983)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

La petite madeleine des Noëls de mon enfance, le youkounkoun de mes 7 ans mérite-t-elle une revoyure ? Pourquoi pas ! Parce que c'est tout à la fois un thriller (plus Tontons flingueurs que Vertigo), un road movie (plus "guide Michelin" que Easy Rider), une satire sociale (plus The Party que Le Voleur de bicyclette) et un film de vacances (tout ce que vous voulez) et que ça tient encore très bien la route. Parce que la mayonnaise prend, grâce aux ingrédients (acteurs) de luxe qui y jouent et au rythme auquel ils sont secoués. Bon, sinon, c'est dommage, je me souviens toujours où est caché le youkounkoun, ce qui gâche tout de même un peu le suspens...

Sayat Nova - Couleur de la grenade (La)

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Réalisé par : Sergei Parajanov (1924 - 1990)
En : 1968, Géorgie
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /jeu dans le jeu /poésie en image
Caractéristiques : 79 mn, couleur

Critique perso :

Officiellement, c'est le biopic d'un (obscur) poète arménien du XVIIIème siècle, le genre dont, visiblement, même les spécialistes ne savent pas grand chose. En vrai, c'est une installation d'art contemporain réalisée en matériaux de récup' (tendance marché aux puces et fripes folkloriques) et en tableaux vivants, pleins de silence et de symboles. Le poète y est "joué" - visualisé serait plus adapté - par différents acteurs (dont une femme) - Todd Haynes et sa version spéculaire de Bob Dilan n'a rien inventé ! Tout passe facile parce que c'est surtout son oeuvre, et en fait sans doute plutôt son âme, qui tient le premier rôle. Elle s'est réincarnée en objets : en livres, en tapis et en instruments de musique. Elle est curieuse, sensuelle, passionnée, mystique. Belle, amoureuse de la beauté et de l'amour, de Dieu et de l'art. Biographie de l'art, plus que d'un artiste. D'un homme, un beau. Nous sommes tous d'obscurs poètes arméniens du XVIIIème siècle...

Bride & Prejudice - Coup de foudre à Bollywod

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Réalisé par : Gurinder Chadha (1960 - )
En : 2004, Angleterre
Acteurs principaux : Anupam Kher (1955 - ), Aishwarya Rai (1973 - )
Genre(s) : Bollywooderie /en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

Bollywood pour les nuls occidentaux, 1ère leçon. On prendra une (ou plusieurs) histoire(s) d'amour(s) contrariée(s). On a le droit de recycler pour cela le bon vieux fond romanesque occidental (Jane Austen, par exemple, ça collera parfaitement). On y mettra des filles superbes, des chansons et plein de confettis. De la culture locale (l'Inde éternelle) et du high tech (l'Inde moderne). Tisser tout ça avec les liens de la famille (très important, ça, les liens de la famille). Attention : pas le droit pour les indiens de s'embrasser en public. Faudra se débrouiller autrement -mais les jeunes gens ne manquent pas d'imagination. Happy-end obligatoire. Mais pas obligatoire de s'en tenir à la 1ère leçon d'exotisme kitch pour occidentaux.

Crabe-tambour (Le)

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Réalisé par : Pierre Schoendoerffer (1928 - 2012)
En : 1977, France
Acteurs principaux : Jacques Dufilho (1914 - 2005), Jacques Perrin (1941 - ), Claude Rich (1929 - 2017), Jean Rochefort (1930 - 2017)
Genre(s) : pauvre espèce humaine /épique pas toc
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Surnom impossible pour un personnage impossible : un officier français passé par l'Indochine, l'Algérie et la prison, reconverti dans le chalutier au large de Terre Neuve. Un saint et un traitre à la fois. Mais pour le voir, on n'aura droit qu'à des flash-back. En fait, ce sont les autres qui en parlent le mieux : trois hommes qui ont croisé sa route et qui se croisent à leur tour, presque par hasard, sur un bateau de la Marine Nationale en route vers le chalutier. Ils s'y connaissent en matière d'armée, vu qu'ils y sont encore. Et en matière de sainteté, vu qu'ils ont toujours une Bible à portée de main ou de lèvres. Et en matière de ratages, aussi... Parfois, le vent sur la mer arrive à nous faire croire au destin. Parfois, leurs histoires arrivent à donner à l'Histoire de France, et à la leur, un souffle de grandeur.

Kung fu - Crazy Kung-Fu

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Réalisé par : Stephen Chow (1962 - )
En : 2004, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Stephen Chow (1962 - )
Genre(s) : animation /conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants /vers le soleil levant
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

La petite cour chinoise ressemble à toutes les petites cours chinoises. Elle a ses artisans qui bossent, ses gamins qui trainent, son linge qui sèche. Sa proprio pas commode. Mais quand des yakuzas plus ou moins authentiques pointent le bout de leur tatouage, des grands maîtres du kung-fu sortent de leur arrière-boutique sans prévenir. Derrière chaque glandu, il y a peut-être un grand sage de la main de Bouddha qui sommeille. Le film est une sorte de Matrix à la puissance cartoon, une fête de la baston à l'asiatique revisitée par la comédie musicale, un conte à la Sergio pour de rire, à la surrenchère irrésistible. Derrière chaque plan, il y a peut-être une trouvaille comique et acrobatique qui sommeille.

Dial M for Murder - Crime était presque parfait (Le)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : Robert Cummings (1908 - 1990), Grace Kelly (1929 - 1982), Ray Milland (1905 - 1986), Audrey Totter (1918 - 2013)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Un décor de théâtre, un sombre complot en vase clos, un scénario à la Colombo, avec mondains pervers et objets fétiches dans les rôles principaux : c'est tout ce qu'il faut à Hitch. Fidèle à son dicton qui veut que meilleur est le méchant, meilleur est le film, il case là une des pires crapules les mieux habillées de son cinéma : un ambitieux opportuniste, faux-cul et manipulateur : bref, un vrai metteur en scène. Il est marié à quelqu'un à sa hauteur : une dame très élégante bien qu'un peu garce et hypocrite sur les bords -capable de tuer un homme avec ses jolies petits bras et ses ciseaux de couture, tout de même. L'un veut tuer l'autre, mais l'autre a l'art de tout gacher. Que le fin mot de l'histoire dépende d'une clé volée dans le porte-monnaie de la dame n'étonnera que ceux qui ignorent tout de la psychanalyse.

Crimes and Misdemeanors - Crimes et délits

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1989, USA
Acteurs principaux : Alan Alda (1936 - ), Woody Allen (1935 - ), Claire Bloom (1931 - ), Mia Farrow (1945 - ), Angelica Huston (1951 - ), Martin Landau (1931 - 2017)
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour)
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

C'était au temps où Woody Allen n'avait aucun mal à nous faire croire à son désarroi de voir Mia Farrow lui échapper. Et où il faisait des rêves (c'est-à-dire des films) graves et douloureux, pleins de couloirs sombres, de crimes impunis et d'imposteurs adulés, sous l'oeil absent du Dieu de son enfance. Faux semblants et illusions d'optiques (tout est dans le regard, évidemment). Singin' in the Rain contre Une Place au soleil. Pour bien enfoncer le clou, la construction du film est "binoclaire" : deux histoires parrallèles qui ne se rejoignent qu'à peine, à la fin -sauf que l'une pourrait être un film réalisé par le personnage de l'autre. Des éclats de rire (éblouissants !) dans un joyau de mélancolie.

Viskningar och rop - Cris et chuchotements

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1972, Suède
Acteurs principaux : Harriet Andersson (1932 - ), Erland Josephson (1923 - 2012), Ingrid Thulin (1926 - 2004), Liv Ullmann (1939 - )
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 106 mn, couleur

Critique perso :

Trois soeurs, une servante. Plus la douleur, omniprésente. Celle qu'on subit (une des soeurs agonise, dans les râles et les grimaces), celle qu'on s'inflige à soi-même (une autre soeur a l'air d'aimer ça, dans les râles et les grimaces). La douleur de ne pas être aimé, celle de ne pas réussir à aimer (là, ça concerne tout le monde, sauf la servante peut-être). La douleur de ne compter pour rien dans le jeu social (et v'la la servante servie). La peur de la mort. La palette : sanguine à souhait. Purpurine. A se demander comment les robes de chambre immaculées résistent aux fondus au rouge. Film à éviter lors d'humeurs suicidaires. A admirer sans modération le reste du temps.

Bronenosets Potyomkin - Cuirassé Potemkine (Le)

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1925, Russie
Genre(s) : culte ou my(s)tique /entre Berlin et Moscou /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 75 mn, NB

Critique perso :

Sur le cuirassé Potemkine, la viande est pourrie, les gradés sont perfides et les marins courageux. Mutinerie ! Sur les quais d'Odessa, attendent de braves prolétaires solidaires. Une révolte ? Non, Tsar, une révolution !.. Mais les soldats d'Odessa, aussi, sont perfides (d'ailleurs, on ne voit jamais leur visage). Le monde, filmé par Eisenstein, est un tableau abstrait aux lignes pures, peuplé de visages intenses. Rares sont ceux qui mèlent, comme lui, aussi bien les portraits individuels aux mouvements de foule, et les paysages naturels au monde des machines. Titanic lui a piqué tous ses plans de turbines et de pistons et innombrables sont les films qui rejoueront pour de rire le coup du landau dans l'escalier (cf. Brazil par exemple). Une révolution...

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D


Daguerréotypes

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 1976, France
Genre(s) : Paris /docu (plus ou moins fiction)
Caractéristiques : 75 mn, couleur

Critique perso :

Assignée à résidence par son accouchement (ça, c'est ce qui n'est pas raconté dans le film, mais c'est dans les boni), Agnès décide de consacrer un petit docu à ses voisins, les types et typesses de tous types de la rue Daguerre où elle habite. Il y a là des boulangers, des bouchers, des coiffeurs et divers épiciers, dans leurs propres rôles. Elle se planque dans leur boutique, les regarde accueillir leurs clients, refaire chaque jour les mêmes gestes du travail et leur pose finalement des questions bizarres sur leur province natale ou sur leurs rêves. Elle les invite aussi au café du coin à la représentation d'un magicien-médium un peu étrange, qui fait les mêmes gestes qu'eux sauf que lui en fait un spectacle. Comme elle, en fait, avec d'autres moyens mais pas moins de magie.

Lady from Shanghai (The) - Dame de Shanghai (La)

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Réalisé par : Orson Welles (1915 - 1985)
En : 1947, USA
Acteurs principaux : Rita Hayworth (1918 - 1987), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Un polar, oui, mais d'Orson Welles. Donc : tarabiscoté, désabusé, grandiose. La rousse la plus explosive de l'époque -Rita Hayworth, qui ne pouvait rien lui refuser-, il lui coupe les cheveux et la teint en blonde - mais elle reste plus garce que jamais. Les mecs autour sont des ordures cyniques -mais riches. Il se réserve le rôle du baroudeur naïf sacrifié, tough guy mais pas tant que ça. Les décors sont géniaux (surtout dans quelques scènes mythiques : l'aquarium, le palai des glaces), l'atmosphère lourde, les intentions de chacun tordues à souhait. Ca ne contribue pas beaucoup à faire aimer le monde, mais beaucoup à faire aimer le cinéma !

Lady in the Lake - Dame du lac (La)

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Réalisé par : Robert Montgomery (1904 - 1981)
En : 1947, USA
Acteurs principaux : Robert Montgomery (1904 - 1981), Audrey Totter (1918 - 2013)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

Dans la peau de Philip Marlowe ! C'est ce que promet clairement ce film, (presque) entièrement tourné en caméra subjective. Ca commence, en fait, quand Marlowe essaie de caser la nouvelle qu'il a écrite à l'éditrice d'une revue. "Au cas où il y aurait une vie avant la mort", que ça s'appelle (ou peut-être le contraire). Peut-être bien un traité sur l'histoire du cinéma... En fait, l'éditrice se fout pas mal de sa prose, mais pas de son métier de détective privé. Elle a une affaire à lui soumettre, concernant une certaine Chrystal Kingsby. Marlowe rechigne, mais pas longtemps. Comme c'est un homme-un vrai, il fume beaucoup (effet "fumée blanche" en bord de cadre), reçoit et donne pas mal de gnons (effet caméra qui tremble), se retourne sur les filles (panoramique), en embrasse une (jusqu'à l'écran noir, mais pas le carré blanc). Mais la vie en plans séquences, en fait, c'est surtout un peu chiant, on connaît déjà trop bien. Quant à Chrystal Kingsby, il suffit de lire le générique : Ellay Mort... On pensait entrer dans la peau du seul vrai Marlowe, et on se retrouve surtout dans l'oeil (un peu éteint) de Robert Montgomery (effet déception garanti).

His Girl Friday - Dame du vendredi (La)

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1940, USA
Acteurs principaux : Ralph Bellamy (1904 - 1991), Cary Grant (1904 - 1986), Rosalind Russell (1907 - 1976)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 92 mn, NB

Critique perso :

Hildegaard -Hildy, pour tout le monde- a été une excellente journaliste, et l'épouse d'un grand patron de presse. Le divorce à peine consommé, elle vient présenter à son ex, dans les bureaux de son journal, son nouveau fiancé (qui ressemble à Ralph Bellamy). Officiellement, elle envisage désormais avec lui une brillante carrière de femme au foyer. Mais l'au-revoir à sa vie d'avant dure plus longtemps que prévu. L'ex, pas très fair-play, essaie de la faire replonger dans la dope du scoop. Il met les ficelles de son grand art (bidonnage et coups fourrés) au service de sa cause. Et, pour réveiller les plus bas instincts (journalistiques) d'Hildy, il la pousse à parler comme une machine à écrire, exercice où elle bat tout le monde. Jeu virtuose sur le pouvoir des mots et des regards.

Dames du Bois de Boulogne (Les)

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Réalisé par : Robert Bresson (1901 - 1999)
En : 1945, France
Acteurs principaux : Paul Bernard (1898 - 1958), Maria Casares (1922 - 1996), Elina Labourdette (1919 - 2014)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

On n'a pas été introduits dans les formes mais, visiblement, ils sont amants (il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour...). Ils font aussi partie du grand monde -celui dans lequel ça ne se fait pas de se plaindre. Alors, quand elle sent qu'il s'éloigne, elle le quitte. C'est son genre. En fait, elle enrage et ne veut que sa perte. Mais il faudra y mettre les formes. Son atout, c'est qu'elle a l'art de bien parler, c'est-à-dire de ne rien dire qui la compromette tout en incitant les autres à agir dans le sens contraire à ce qu'elle semble dire -trop forte, quoi. Elle a quelques marionnettes en réserve, elle s'en sert. Mais dans le coeur des marionnettes, il se passe parfois des choses imprévisibles -et invisible. Et la grâce descend parfois par les fils les plus embrouillés, comme une flamme brûlante qui prendrait, pour tromper son (grand) monde, les formes les plus hiératiques et les plus épurées. Il n'y a pas de grâce, il n'y a que des preuves de grâce.

Dancer in the dark

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Réalisé par : Lars von Trier (1956 - )
En : 2000, Danemark
Acteurs principaux : Jean-Marc Barr (1960 - ), Björk (1965 - ), Catherine Deneuve (1943 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 125 mn, NB

Critique perso :

C'est l'histoire de deux stars top glamour qui essaient de nous faire croire qu'elles sont OS dans une usine américaine pourrie, habillées en guenilles, à s'échiner de nuit pour gagner des clopinettes dans un trou perdu où, en plus, des nazes prétendent leur donner des leçons de chant et de danse pour monter une comédie musicale amateur. On rêve. C'est surtout l'histoire d'un cinéaste sadique qui a l'air de prendre plaisir à inventer les pires malheurs possibles qui puissent accabler les meilleurs braves gens possibles. Et faudrait que ça nous plaise, en plus, et qu'il passe pour un humaniste. Non, trop c'est trop, too much for me. C'est l'un des très rares films qui m'ait donné envie d'étrangler son auteur à plusieurs reprises. Sur ce coup là, je lui suis juste reconnaissante de m'avoir parlé d'Oldrich Novy, sinon, je ne lui dis pas merci.

Being John Malkovich - Dans la peau de John Malkovich

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Réalisé par : Spike Jonze (1969 - )
En : 1999, USA
Acteurs principaux : John Cuzack (1966 - ), Cameron Diaz (1972 - ), Catherine Keener (1959 - ), John Malkovich (1953 - )
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

De l'art de la marionnette, considérée comme une métaphore de la manipulation, considérée comme une métaphore de l'amour, considéré comme une métaphore du jeu de l'acteur, considéré comme une métaphore de la transmigration des âmes, considérée comme une métaphore de la condition humaine, considérée comme une métaphore de la succession des générations, considérée comme une métaphore de l'art de la marionnette. John Malkovich est le parfait caméléon de cet incroyable embrouillamini à la logique implacable. On entre et on sort de sa tête comme dans un moulin, et on a même droit à une visite guidée de son inconscient (au pas de charge, mais vaut mieux pas s'attarder dans ces endroits-là). Tellement brillant qu'on en sort tout ébloui.

Top Hat - Danseur du dessus (Le)

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Réalisé par : Mark Sandrich (1900 - 1945)
En : 1935, USA
Acteurs principaux : Fred Astaire (1899 - 1987), Eric Blore (1887 - 1959), Edward Everett Horton (1886 - 1970), Ginger Rogers (1911 - 1995)
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 101 mn, NB

Critique perso :

Le danseur du dessus est un Américain à London. Le danseur du dessus fait du bruit -enfin, de la musique- avec ses pieds. En fait, justement, il connaît le secret de la transmutation de l'un en l'autre. Même, il sait transformer les pas en danse, en pas de danse. En plus, il est plutôt mignon. Dommage qu'il soit marié avec son producteur -enfin, avec la femme de son producteur -enfin, apparemment. Sa voisine du dessous est une amazone, aussi à l'aise sur un cheval que dans un costume de plumes. Dommage qu'elle soit mariée avec la femme du producteur du danseur du dessus -ou avec son couturier -enfin, apparemment. Ce vaudeville sautillant est un hymne aux plaisirs de l'artifice, qui ne sont pas des plaisirs pour de faux.

De Mayerling à Sarajevo

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Réalisé par : Max Ophüls (1902 - 1957)
En : 1940, France
Acteurs principaux : Edwige Feuillère (1907 - 1998), John Lodge (1903 - 1985)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

Le titre sonne comme un compte à rebours -et c'en est un, puisque personne n'est censé ignorer quand et comment finit la vie de l'Archiduc François-Ferdinand d'Autriche. Bon, mais avant, en général, on sait moins. C'est donc une montre qui servira de fil conducteur à toute l'histoire -d'amour, bien sûr, puisqu'il n'y a que ça qui intéresse les spectateurs, quand il est question de têtes avec des couronnes dessus. Et ce futur Archiduc-là a en plus eu le bon goût romanesque d'épouser par amour une moins-bien-née que lui, ce qui permettra à tout le monde d'apprendre ce qu'est un mariage morganatique. Dans le rôle du méchant : le protocole, bien sûr. Et, en guise d'épilogue qui tombe du ciel, une petite morale sur la 2ème guerre mondiale. La patte du grand Max est discrète, dans cette affaire. Il préfère les drames intimes qui reflètent l'écroulement d'un monde, il est moins doué pour le bonheur -même quand il est le prélude à l'écroulement d'un monde.

Demoiselles de Rochefort (Les)

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1967, France
Acteurs principaux : George Chakiris (1934 - ), Henri Crémieux (1896 - 1980), Danielle Darrieux (1917 - 2017), Catherine Deneuve (1943 - ), Françoise Dorléac (1942 - 1967), Gene Kelly (1912 - 1996), Jacques Perrin (1941 - ), Michel Piccoli (1925 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /en avant la musique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Alors là, c'est ma drogue douce préférée, du bonheur en cube concentré ! Nourrie à bonne école (celle du Chant du Missouri, d'un Jour à New-York et de West Side Story), c'est l'histoire (entre autres) de deux soeurs jumelles (nées sous le signe que vous savez) qui rêvent de gloire, d'amour et de Paris. Il paraît que Les Hommes préfèrent les blondes mais la rousse est pas mal non plus. Il y a aussi leur mère qui (pour faire d'elles des érudites) vend des frites, leur grand-père qui retrouve un copain de régiment, des camionneurs forains, quelques artistes et quelques marchands d'art. Il y a foule à Rochefort, le temps d'un week-end éternel. Apparemment, tout est léger, aérien, coloré. On s'aime au premier regard... mais on se quitte aussi pour des broutilles. Et à y regarder de plus près, les journaux ne parlent que de guerre, un crime sadique est commis et même l'art échoue la plupart du temps à rapprocher les êtres. Heureusement, vouloir le bonheur, c'est déjà le bohneur, comme l'a fait dire Jacquot à un autre de ses personnages, quelques années avant. Et il en veut !

Demoiselles ont eu 25 ans (Les)

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 1993, France
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 64 mn, NB/couleur

Critique perso :

Quelle est donc la recette de la potion magique du bonheur (celle concoctée le temps d'un été à Rochefort, dans les années 60) ? De la musique, des couleurs, des stars. Du Cinéma. Et, au centre : l'oeil d'un magicien, impassible mais résolu, qui a décidé un jour de réinventer le monde à son image. Un monde tel qu'il existe déjà, mais repeint avec de la musique. Avec des vrais gens, mais habillés de lumière. Varda, elle aime les gens, aussi, même sans lumière et sans musique. Elle a filmé les coulisses du tournage, elle était là aussi au pot de retrouvailles, 25 ans et quelques morts plus tard. C'est sûr, elle s'y connaît en secret de fabrication du cake d'amour. Le making off du bonheur, c'est encore du bonheur en bonus.

Letzte Mann (Der) - Dernier des hommes (Le)

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Réalisé par : F. W. Murnau (1888 - 1931)
En : 1924, Allemagne
Acteurs principaux : Emil Jannings (1884 - 1950)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 77 mn, NB

Critique perso :

En matière de portes, il s'y connaît, le bonhomme : il est portier à "l'Atlantik", le plus bel hôtel de la ville. Serviteur servile des riches, mais roi arrogant chez les gueux, avec son rutilant costume à boutons dorés. Sauf que les portes, elles sont faîtes pour être tournées : quand il est muté préposé aux lavabos, c'est la cata. La blouse blanche remplace les boutons dorés. Le ciel, la ville et les voisins (et même le happy-end) lui tombent sur la tête. Pas besoin d'un seul mot pour suivre, en toute subjectivité, la déchéance d'un homme. Pas besoin d'un seul intertitre pour en être ému.

Ultimo tango a Parigi - Dernier tango à Paris

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Réalisé par : Bernardo Bertolucci (1940 - )
En : 1972, Italie
Acteurs principaux : Marlon Brando (1924 - 2004), Jean-Pierre Léaud (1944 - ), Maria Schneider (1952 - 2011)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 136 mn, couleur

Critique perso :

1, rue Jules Verne. C'était au temps béni où on trouvait, à Paris, des apparts vides de 120 m2 avec Marlon Brando dedans en cadeau Bonux. Jeanne passe par là, visite (l'appart), essaie (le bonhomme). Emballée, elle revient régulièrement. Dans leur île déserte, la petite française pimpante et le mâle américain vieillissant explorent leurs mystères. Lui en a gros sur la patate depuis le suicide de sa femme. Il est pas mauvais en français, le bougre, mais c'est son vocabulaire anglais qui impressionne ("God" et plein d'insanités qui ne sont même pas dans mon Harrap's). Chair triste, etc. Elle, on se demande comment elle supporte son fiancé-cinéaste exalté qui espère refaire l'histoire du cinéma rien qu'en la regardant. Le film qui inventa le genre psycho-mélo-érotico-intello-dépressif.

Last Temptation of Christ (The) - Dernière tentation du Christ (La)

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Réalisé par : Martin Scorsese (1942 - )
En : 1988, USA
Acteurs principaux : Willem Dafoe (1955 - ), Barbara Hershey (1948 - ), Harvey Keitel (1939 - ), John Lurie (1952 - ), Harry Dean Stanton (1926 - 2017)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /à l'antique
Caractéristiques : 164 mn, couleur

Critique perso :

Beaucoup de bruits (à sa sortie) pour pas grand chose... Pas facile de faire un film de plus avec cette histoire-là. Avec cet homme-là. Scorcese s'y colle. Ses héros sont souvent des Christ, mais son Christ n'est pas un héros. Un peu de provoc facile (Jésus potentiellement adultère), quelques belles idées (Judas l'ami fidèle, comme chez Borgès, les romains descendant l'escalier d'Odessa en plein souk de Jérusalem), quelques fautes de goût aussi (Jean-Baptiste en gourou beatnik, Jésus qui s'arrache le coeur à main nue au milieu du ventre). Mais surtout, un message ambigu : ce Christ est un marginal épileptique, qui passe des paroles d'amour aux actes de guerre sans jamais cesser de répéter qu'il n'est sûr de rien, qu'il ne sait pas ce que Dieu attend de lui. C'est le doute fait chair, et l'Histoire n'a pas besoin de lui. Là est le vrai scandale, plus que ce rêve fait, le temps d'un envoutement sur la croix, de ne pas être Lui. Mélange, étrange parfois, de réalisme post-Persona et de conte oriental qui finit mal -mais on s'en doutait un peu.

Last Wave (The) - Dernière vague (La)

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Réalisé par : Peter Weir (1944 - )
En : 1977, Australie
Acteurs principaux : Richard Chamberlain (1934 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 106 mn, couleur

Critique perso :

Australie, dernière gare avant la fin du monde. Il pleut des ballons de grêle dans le désert et des grenouilles sur les trottoirs. Y'a plus de saisons, c'est le monde à l'envers. Des bushmen taciturnes, restes de tribus aborigènes rescapés dans le désert des villes, en profitent pour règler leurs derniers comptes. On pressent une apocalypse liquide, on comprend qu'ils sont les seuls à savoir nager. David, avocat bien propre sur lui, en est tout éclaboussé. Alors que toute sa vie prend l'eau, il essaie, avec quelques initiés, de sauver sa mémoire du naufrage. Australie, 2h-1/4 avant le déluge. Juste le temps de réconcilier quelques barbares blancs avec le Temps du Rêve oublié.

Bigger Than Life - Derrière le miroir

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Réalisé par : Nicholas Ray (1911 - 1979)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : James Mason (1909 - 1984), Walter Matthau (1920 - 2000)
Genre(s) : les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Devant le miroir : la parfaite image de la parfaite famille américaine. Papa au boulot, maman à la cuisine et le fiston devant la télé. Il fait même du zèle, le papa : double boulot (instit et employé d'une compagnie de taxis) pour que maman cuisine encore mieux. Mais il est malade -très. Diagnostic fatal, un seul espoir en stock : un nouveau traitement expérimental. Derrière le miroir, donc (dans l'armoire à pharmacie) : des pilules miracle de cortisone. La molécule le soulage, le guérit, l'exalte. Flate son côté schizo qui ne sommeillait qu'à moitié et, surtout, lui permet de devenir enfin ce qu'il est : supérieur - infiniment supérieur. Elle lui donne des ailes de géant qui l'empêchent de marcher dans les clous. Et la middle class américaine frustrée montre son vrai visage : la parfaite image de la parfaite horreur domestique.

Detour

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Réalisé par : Edgar G. Ulmer (1904 - 1972)
En : 1945, USA
Acteurs principaux : Tom Neal (1914 - 1972)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 67 mn, NB

Critique perso :

Al est le genre de gars parti de rien pour arriver nulle part. Il a joué du piano dans des bars pour des mecs qui s'en foutaient. Il a laissé filer sa girlfriend à Hollywood. Il a tenté, pour la retrouver, de refaire le chemin des pionniers -de NY à LA. Mais avec quelques siècles de retard, comme tout le reste. Et pas assez de dollars au fond des poches. Al est le genre de type qui, à l'en croire (mais faut-il l'en croire ?) a la poisse collée aux talons comme un chewing-gum. Le genre à se prendre dans l'oeil l'aiguille planquée dans la botte de foin. A attirer les garces et les escrocs avec sa gueule de papier tue-mouche. Filmé en six jours pour le prix d'une nuit au camping, tourné dans un garage avec deux décors, quelques transparences et pas mal d'opacité : le genre de films qui résument un genre à eux tout seul, un petit concentré de perle noire.

Deux anglaises et le continent (Les)

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1971, France
Acteurs principaux : Jean-Pierre Léaud (1944 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 130 mn, couleur

Critique perso :

Truffaut disait lui-même que ce film raconte Proust tombant amoureux des soeurs Brontë. Ca donne une bonne idée de l'époque, de l'ambiance et de l'importance de la littérature dans cette histoire. Autant dire que les longues robes, les voilettes, les missives enflammées, les sifflets de trains et les balades à bicyclette y joueront un grand rôle, comme dans Jules et Jim (c'est adapté du même auteur), en plus calme mais avec la même voix off racontant la même exquise délicatesse anachronique des sentiments. La femme est artiste de sa vie, l'homme court après l'art. Mais ce sont toujours les mêmes choses qui font peur et envie, qui procurent joie et douleurs. Proust tombant amoureux des soeurs Brontë -mais filmés par Truffaut.

Deux ans après

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 2002, France
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /en France profonde
Caractéristiques : 64 mn, couleur

Critique perso :

C'est un film fait après et d'après un autre, un film sur les conséquences de faire des films, sur l'étrange relation qui se noue entre un(e) cinéaste et ses spectateurs, via cet objet étrange qui appartient à sa manière à eux tous. A l'occasion du tournage des Glaneurs, Agnès avait rencontré des gens. Elle les retrouve et nous donne de leurs nouvelles. D'autres gens lui ont écrit, en général pour lui dire combien ils aimaient son film. Elle les rencontre aussi, et nous donne de leurs nouvelles. Ils s'échangent des mots et des images, leurs échanges créent d'autres mots et d'autres images, qui finissent pas faire un autre film. Ce n'est pas un making of, c'est un after of, fait comme en roue libre et à l'air libre. Humour intact, curiosité intacte, capacité à s'émerveiller intacte. La vie crée du cinéma qui crée de la vie, et réciproquement.

Deuxième souffle (Le)

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Réalisé par : Jean-Pierre Melville (1917 - 1973)
En : 1966, France
Acteurs principaux : Michel Constantin (1924 - 2003), Paul Meurisse (1912 - 1979), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 144 mn, NB

Critique perso :

Il sort de prison (par les toits), prend un train (sans billet) et emménage dans un petit pavillon de banlieue (sans signer de bail). A l'autre bout du pays, une fusillade fait plusieurs morts dans un restaurant. En fait, les deux événements ont un certain lien de parenté... Bien sûr, le gentleman tueur fraîchement sorti de l'ombre a rapidement besoin de se remettre à flots. Pour cela, il va s'associer aux aristocrates cambrioleurs impliqués dans l'autre histoire. Bien sûr, il y a une femme perspicace et un flic fatal aussi sur le coup. Bien sûr, tout ne se passera pas exactement comme prévu. Mais la racaille de l'époque avait tout de même de la classe. Ils ont le geste précis, la parole économe. Avec leurs costumes-cravates, ils ont tous l'air de sortir d'une grande école. Ils sont ingénieurs en casses millimétrés, docteurs en loyauté au milieu du désastre. Droits dans leurs bottes, même quand elles sont embourbées jusqu'au cou.

Breakfast at Tiffany's - Diamants sur canapé

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Réalisé par : Blake Edwards (1922 - 2010)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : Audrey Hepburn (1929 - 1993), George Peppard (1928 - 1994), Mickey Rooney (1920 - 2014)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 115 mn, NB

Critique perso :

Holly et Paul habitent à la même adresse new-yorkaise, mais pas le même appartement -enfin, la plupart du temps. Il est gigolo d'occasion, elle est postulante croqueuse de diamants. Elle a un chat qui ne doit pas non plus en être à sa première vie. Parce qu'ils ne sont pas vieux, Holly et Paul, mais ils trimballent déjà pas mal de casseroles. Ils ont raté quelques virages, ont changé de route plusieurs fois et ne savent plus où ils en sont. Ils n'arrêtent pas de perdre leurs clés. Ils trainent leur mélancolie d'enfants gâtés abandonnés dans l'anonymat de la ville, dans la solitude de leurs Partys surpeuplées. Mais la surprise de l'amour atteint parfois les coeurs les plus blasés et les jeunes gens les plus vieux.

Great Dictator (The) - Dictateur (Le)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1940, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977), Paulette Goddard (1911 - 1990)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 124 mn, NB

Critique perso :

Duel à mort entre les deux plus célèbres moustaches du XXème siècle : à ma droite l'infâme Hynkel, dictateur de la Tomania ; à ma gauche un petit barbier juif, amnésique et maladroit. Ils synthétisent à eux deux tous les degrés de l'(in)humanité et leur lutte s'annonce un brin déséquilibrée. Atouts du premier : sa virilité débordante. Chances du second : sa connaissance du ghetto, sa propention à la fuite. Mais, comme ils se ressemblent comme deux gouttes de vitriol, ce sont les autres qui vont y perdre leur latin. Ils auront droit à un discours chacun. Heureusement, maintenant, on sait depuis longtemps lequel a gagné la guerre...

Ten Commandments (The) - Dix commandements (Les)

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Réalisé par : Cecil B. DeMille (1881 - 1959)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : Judith Anderson (1897 - 1992), Anne Baxter (1923 - 1985), Yul Brynner (1915 - 1985), John Carradine (1906 - 1988), Charlton Heston (1924 - 2008), Vincent Price (1911 - 1993), Edward G. Robinson (1893 - 1973)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /à l'antique /épique pas toc
Caractéristiques : 220 mn, couleur

Critique perso :

Entre le moment où Moïse a été retrouvé flottant sur le Nil dans son berceau et celui où il a conduit les Hébreux à travers la Mer Rouge et le désert, il a bien dû se passer des choses. Hollywood, auquel aucun secret des Dieux n'échappe, s'est chargé de combler les ellipses bibliques -en pompant largement, tout de même, sur le Nouveau Testament (que, du coup, l'Ancien semble annoncer) mais en y ajoutant quelques starlettes affriolantes. Ca donne 2h de peplum romanesque très correct.
Et puis, Moïse rencontre Dieu déguisé en buisson phosphorescent et ça se gâte terriblement, côté scénario. Le film se transforme en livre d'images déconseillé aux plus de 12 ans, plein d'effets spéciaux très kitchs. Les hommes deviennent des marionnettes et on ne croit plus à rien : Charlton Heston a le regard ailleurs, il fait de grands gestes majestueux en répétant "let my people go" au méchant pharaon. Parler à Dieu face à face, forcément, ça vous change un homme. Mais dans la Bible (chapitre 19 du 1er livre des Rois), il est aussi dit que Dieu n'est pas dans les tremblements de terre, ni dans le feu du ciel. Il n'est donc pas dans les trucages hollywoodiens. Allez le chercher plutôt dans les angoisses métaphysiques d'un mécréant polonais.

Do the Right Thing

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Réalisé par : Spike Lee (1957 - )
En : 1989, USA
Acteurs principaux : Danny Aiello (1933 - ), Spike Lee (1957 - ), John Turturro (1957 - )
Genre(s) : New York - New York /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

A Brooklyn comme ailleurs, des fois, il fait trop chaud pour travailler. Mais, à Brooklyn, y'a juste un peu plus de noirs qu'ailleurs en Amérique. Et un peu d'italo-américains, aussi. Entre autres. Un beau melting pot dans une cocotte-minute. Y'en a quelques uns qui travaillent, quand même, dans la pizzeria du coin ou dans la rue. Y'en a beaucoup qui causent, aussi. Ou alors qui se contentent de regarder. Ou qui écoutent de la musique. Un peu trop fort, parce qu'il fait trop chaud, dans la pizzeria du coin ou dans la rue. Ou alors, c'est la pizza qui était un peu trop épicée. En tout cas, c'est sûr, il faisait trop trop chaud dans cette cocotte-minute. Fallait que ça sorte, dans la pizzeria du coin ou dans la rue. Des fois, à Brooklyn ou ailleurs, il fait trop chaud pour vivre.

Dolce vita (La)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1960, Italie
Acteurs principaux : Anouk Aimée (1932 - ), Alain Cuny (1908 - 1994), Anita Ekberg (1931 - 2015), Yvonne Furneaux (1928 - ), Marcello Mastroianni (1924 - 1996), Magali Noël (1932 - 2015)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 167 mn, NB

Critique perso :

Marcello, chroniqueur people de la Via Veneto, pratique avec son sujet la technique de l'observation participante : toujours là où il se passe quelque chose, au milieu des princes et des starlettes, dans leurs cafés préférés ou leur villa décrépite. Il connaît tous les moyens de ne pas passer la nuit chez lui, que ce soit en faisant trempette dans la fontaine de Trevi (cultissimo !) avec une simili Marilyn-Ingrid-Bardot, ou en causant poésie avec une clone de Gertrud Stein. Parfois, il lui faut aussi cotoyer le peuple, le vrai, qui n'arrive à attirer l'attention que parce qu'il croit encore aux miracles. Mais son vrai créneau, c'est le mondain désabusé, las de ses propres transgressions, qui n'est sans doute qu'une variante polie de Freaks de foire. Dieu est mort et l'aube est un supplice sans cesse recommencé.

Dolls

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Réalisé par : Takeshi Kitano (1947 - )
En : 2002, Japon
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pas drôle mais beau /vers le soleil levant
Caractéristiques : 114 mn, couleur

Critique perso :

Il serait une fois une troupe de Bunraku (des marionnettes tradis japonaises) qui nous raconterait une histoire. Ou plutôt trois histoires. Plus celle de la troupe, c'est-à-dire celle du réalisateur, c'est-à-dire celle du lien entre les histoires. Ca ferait donc un triptique aux formes épurées : des couleurs fortes, des saisons franches, des costumes de gala. Des personnages de Dieux vivants, mais errants, comme en deuil de leur grâce perdue. Des gestes héroïques, des sentiments de grand chemin. Quasiment aucun mot mais une plainte infinie au fond de la gorge. Un abîme de tristesse au fond du regard où ils manquent (mais pas toujours) de se noyer. Des pantins en quête de liens, et qui n'arrivent qu'à s'emberlificoter dans leurs ficelles (un peu grosses, d'ailleurs). Des poupées de chair, quoi.

Domicile conjugal

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1970, France
Acteurs principaux : Daniel Ceccaldi (1927 - 2003), Claude Jade (1948 - 2006), Jean-Pierre Léaud (1944 - )
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Y a-t-il une vie après le mariage ? Telle est la question pour Antoine Doinel -celui des 400 coups et Christine -celle des Baisers volés. Christine donne des leçons de violon. Antoine, lui, teint des fleurs pour le marchand du coin, dans sa cour avec vue sur fenêtres. Mais, après avoir échoué dans sa tentative d'atteindre le "rouge absolu", il doit se reconvertir dans la manipulation d'Atalantes miniatures pour une compagnie américaine. Il devient papa, veut écrire un roman, s'intéresse aux femmes japonaises. Il pratique toujours la mauvaise foi et la dérobade avec grand art. Il a vieilli mais pas beaucoup grandi, comme le M. Hulot qu'il croise dans le métro. Comme une chronique du temps qui ne passe pas tant que ça.

Mr. Arkadin - Dossier secret

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Réalisé par : Orson Welles (1915 - 1985)
En : 1955, USA
Acteurs principaux : Michael Redgrave (1908 - 1985), Akim Tamiroff (1899 - 1972), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

Quelques années après Citizen Kane, un autre portrait sous forme d'enquête labyrinthique sur un autre magna riche comme un pape et seul comme un chien. Citizen Arkadin, donc, vit de suites en palaces dans une ambiance de fête perpétuelle, en s'amusant à raconter des fables cyniques (cf. la grenouille et le scorpion) à sa clique de parasites. Mais il ne sait plus de quel pays il est originaire ni, d'ailleurs, comment il s'appelle et d'où vient son argent. Officiellement, c'est pour cela qu'il paie Guy. Officieusement, ça l'arrange bien. L'enquête fait voyager autour du monde, pénétrer dans des repères louches où est passé un certain Mr. M, sur un étrange rythme à contretemps, et dans un climat d'insécurité croissant. Le mystère d'un homme plus grand que lui-même, caché sous des couches de secrets et de paroles. Naughty by nature ? Non, just human...

Double vie de Véronique (La)

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1991, France
Acteurs principaux : Irène Jacob (1966 - ), Philippe Volter (1959 - 2005)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

C'est l'automne, on a l'impression de tout voir en vert, comme de derrière une bouteille. En Pologne, vit une jeune femme à la voix d'ange prénommée Weronica. Douce, aimée, mais fragile du coeur. Si fragile... A Paris, vit une jeune femme à la voix d'ange prénommée Véronique. Un soir, elle se sent bizarre, comme en deuil d'elle-même. Pour comprendre ce qui lui arrive, il lui faudra suivre la piste d'un tireur de ficelles qui lui envoie des signes, pour pouvoir écrire le roman de sa (double) vie. La métaphore, comme tout le reste, est double : politique (l'est et l'ouest, pays frères), ou psychanalitico-théologique. C'est un peu lourd et appuyé mais (en même temps, évidemment) sauvé par une multitude de détails subtils.

Doulos (Le)

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Réalisé par : Jean-Pierre Melville (1917 - 1973)
En : 1962, France
Acteurs principaux : Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Jean Dessailly (1920 - 2008), Michel Piccoli (1925 - ), Serge Reggiani (1922 - 2004)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Une gueule d'ange qui cache peut-être un salaud qui cache peut-être un vrai ange. Allez savoir ce qu'il mijotte sous son chapeau, le doulos ! En tous cas, là où il surpasse tout le monde, c'est dans la mise en scène. Les autres -les truands qu'il fréquente-, on retrouve toujours leur piste. Mais avec lui, la Police -qu'il fréquente aussi- n'y voit que du (coup de) feu. Et nous, pauvres spectateurs, itou (c'est souvent bon signe, au cinéma, de ne pas tout comprendre). Un bon petit noir qui en rappelle pas mal d'autres, bien serré, corsé et savoureux.

Down by Law

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Réalisé par : Jim Jarmusch (1953 - )
En : 1986, USA
Acteurs principaux : Roberto Benigni (1952 - ), John Lurie (1952 - ), Tom Waits (1949 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 107 mn, NB

Critique perso :

C'est l'histoire de trois mecs. Une belle bande de d'innocents vauriens qui, au bout d'1/4h de film, partagent la même cellule merdique d'une prison de la Nouvelle Orléans. Trois mecs, trois genres. Y'en a un qui sait écouter les filles sans rien dire (il est maquereau). Un autre, il sait très bien si besoin parler pour ne rien dire (il est DJ dans une station de radio) mais en général, il ne la ramène pas trop non plus. D'ailleurs, ces deux-là, c'est un peu les deux côtés d'une même médaille, celle des vrais mecs merdiques qui énervent les filles. Le vrai autre, c'est le troisième : un étrange étranger, un petit mec pas viril et rigolard qui apprend la langue et, du même coup, remet les compteurs sémantiques de tout le monde à zéro. Il ne sait rien faire (ni nager, ni chasser, ni parler correctement), et c'est lui qui fait tout mieux que tout le monde, même chopper les filles. Mais en fait c'est normal, c'est le seul qui sait les écouter. Trois mecs et un oeil de femme pour finir : pas assez pour passer le test de Bechdel, mais on n'arrive pas à lui en vouloir.

Dr. Strangelove or: How I Learned to Stop Worrying and Love the Bomb - Dr Folamour

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1964, USA
Acteurs principaux : Sterling Hayden (1916 - 1986), George C. Scott (1927 - 1999), Peter Sellers (1925 - 1980)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

C'était au temps où la guerre froide risquait bien de ne pas le rester très longtemps. Une petite étincelle (un gradé parano, par exemple - Sterling Hayden, encore plus gun-crazy que dans Johnny Guitar) pouvait à tout moment mettre le feu (atomique) aux poudres. Mais, ce que Kubrick filme mieux que tout et tous, c'est comment la proximité de la catastrophe émoustille les instincts guerriers les plus sauvages de l'homme (au sens purement masculin, pour une fois !), leur bêtise virile et suicidaire. Ils atteignent sans mal le fond du ridicule, pour notre plus grande jubilation, ces mâles frustrés. Le fin mot de l'histoire, laissé au sinistre Dr Folamour (génial Peter Sellers), en dit long sur le peu d'espoir qui nous est laissé...

Dracula

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Réalisé par : Tod Browning (1882 - 1962)
En : 1931, USA
Acteurs principaux : Bela Lugosi (1882 - 1956)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 75 mn, NB

Critique perso :

Une calèche qui zigzague sur un chemin de Transylvanie dessiné par Gustave Doré. Malgré l'avis unanime des autochtones, un étranger, agent immobilier londonnien de son état, insiste pour honorer son RDV à minuit avec le comte Dracula -aussi connu sous le pseudo de Nosferatu. Le comte, grand seigneur, vit dans une demeure sompteuse, mais il n'a pas dû passer le balai depuis au moins 250 ans. Il compte bien, lui, profiter de son bail éternel pour une cave angaise. L'Angleterre, à cette époque, est décidément pleine de spécimen exotiques. C'est LA qu'il faut être. C'est LA qu'il se passe des choses intéressantes. Les langues, les âmes et les sangs s'y cotoient, s'y échangent, s'y mélangent -y compris avec la ménagerie du coin. C'est le pays des nantis, des filles perdues et des savants fous. De la chair à vampire 1er choix. De l'excellente chair à cauchemar.

Drôle de drame

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1937, France
Acteurs principaux : Pierre Alcover (1893 - 1957), Jean-Pierre Aumont (1911 - 2001), Jean-Louis Barrault (1910 - 1994), Louis Jouvet (1887 - 1951), Françoise Rosay (1891 - 1974), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Drôle de drame, bazar bizarre (si si, cousin, vous l'avez dit !), craquante confiserie classique... Dans un drôle de pays qui prétend être l'Angleterre (mais sans cette langue barbare qui s'y pratique) évoluent de drôles de gens qui prétendent ne pas être ce qu'ils sont (ou le contraire). Qu'ils s'affichent comme pasteur, scientifique excentrique, policier ou serial-(butchers)-killer, ils ont toujours une identité de rechange en cas de besoin. Le meilleur alibi des tordus est la bienséance sociale -surtout en Angleterre, vraie ou fausse. Une seule chose est sûre : tous coupables ! A un petit détail près tout de même : pas moyen de dénicher le moindre cadavre -mais ce n'est pas faute d'essayer, ni d'y penser. A force de se cacher dans le double-fond de leurs arrières-pensées, ces pantins pas malins finissent par ne plus trop savoir où ils en sont. L'intrigue est donc impossible à résumer, tant mieux !

Funny Face - Drôle de frimousse

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Réalisé par : Stanley Donen (1924 - )
En : 1957, USA
Acteurs principaux : Fred Astaire (1899 - 1987), Michel Auclair (1922 - 1988), Audrey Hepburn (1929 - 1993)
Genre(s) : Paris /conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Sous l'influence survoltée de sa patronne, un photographe de mode se pique de dénicher un nouveau top model top QI (pour changer). Ils squattent une librairie à l'ancienne (décor exotique garanti) et tombent sur leur perle rare : une adepte charmante de l'empathologie (sorte de version dégénérée de l'existentialisme rive gauche, vue de Hollywood). Le développement des photos (et de l'histoire) repose ensuite sur le rapprochement de la culture livresque savante et de la haute couture fashion : le poids des mots contre (tout contre) le choc des photos -à Paris bien sûr, capitale des deux pôles. Drôle de film (sorte de version dégénérée de la comédie musicale à l'ancienne, vue de Paris) qui, comme Fred, semble pourtant avoir encore des jambes de 20 ans.

Duel in the Sun - Duel au soleil

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Réalisé par : King Vidor (1894 - 1982)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : Lionel Barrymore (1878 - 1954), Joseph Cotten (1905 - 1994), Lillian Gish (1893 - 1993), Walter Huston (1884 - 1950), Jennifer Jones (1919 - 2009), Herbert Marshall (1890 - 1966), Gregory Peck (1916 - 2003)
Genre(s) : carrément à l'ouest /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 138 mn, couleur

Critique perso :

Dans un riche ranch du Sud -façon Autant en emporte le vent, quelques années avant-, vivent un vieux sénateur réac et impotent, sa femme qui a tout le temps l'air de pleurer en silence, et leurs deux fils : le gentil progressiste et le séduisant vilain garçon. On leur met dans les pattes une jolie métisse -lointaine cousine à secourir. Et plein de beufs et de chevaux à déplacer, surveiller et dresser. Avec de telles bases, il ne faut pas s'attendre à beaucoup de nuances : de la passion et des coups de feu. Comme dans l'incroyable duel final, qui conjugue l'amour et la mort dans un bain de poussière et de soleil. Un joyau de sang dans un monde de brutes.

Dumbo

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Réalisé par : studios Disney
En : 1941, USA
Genre(s) : animation /conte de fées relooké /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 64 mn, couleur

Critique perso :

Passent les cigognes... Leurs livraisons de saison sont très attendues, surtout chez Mme Jumbo, artiste de cirque (spécialité pachiderme au coeur tendre). Il arrive, donc, il est tout mignon -mais petit avec des grandes oreilles. On l'appelera Dumbo (en English, c'est pas très sympa), il ne dira pas un mot. Les paroles, il laissera ça à Timothée, grand parleur rusé de 5cm, museau frémissant, et longue queue. Son truc, à Dumbo, c'est beaucoup mieux : il rêve (la séquence avec des éléphants roses -même sans DSK- est étonnante), et même : il vole... Il se pourrait (mais je suis pas sûre) que je doive à cette histoire de vilain petit canard transposée chez les éléphants mes premières larmes égarées dans une salle obscure. Il se pourrait (mais je suis pas sûre) que ce film soit la première plume magique qui m'ait fait décoller.

Dune

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Réalisé par : David Lynch (1946 - )
En : 1984, USA
Acteurs principaux : José Ferrer (1909 - 1992), Freddie Jones (1927 - ), Kyle MacLachlan (1959 - ), Silvana Mangano (1930 - 1989), Sting (1951 - ), Dean Stockwell (1936 - ), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique /épique pas toc
Caractéristiques : 137 mn, couleur

Critique perso :

En 10 000 et quelques. Paul, héritier de la famille Atr(e)ide, -Usul pour les intimes- devient parmi les Fre(e)men un rebelle connu sous le nom de Muad'Dib avant de se révéler être le Kwisatch Haderach que l'ordre des Bene Guesserit attend... Hem, pour suivre, il vaut mieux avoir révisé ses classiques. Enfin, des fois quand même, on arrive à s'y retrouver : un peu de Jules Verne dans les décors, d'Angleterre victorienne dans les costumes. On comprend aussi l'importance de l'épice, substance qui étend le champ de la conscience, fait voyager sans bouger et met de la couleur dans les yeux (hem...). On comprend que sur la planète Dune, pour être un homme, il faut apprendre à maîtriser et chevaucher un ver des sables d'au moins 400m de long (hem hem...). On comprend que le gros lard flottant qui a toujours les mains dans le sang est un méchant, tout comme l'espèce de foetus mutant qui replie l'espace par la pensée. On comprend surtout que c'est dur dur de se réveiller de l'enfance pour devenir un homme...

Nachalo - Début (Le)

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Réalisé par : Gleb Panfilov (1934 - )
En : 1970, Russie
Acteurs principaux : Inna Churikova (1943 - )
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Pasha est une provinciale complexée, une jeune femme persuadée quelle n'a pas grand chose pour elle, dans une petite ville qui n'a pas non plus grand chose à vendre. Doublement has been donc, avant même d'avoir commencé à vivre. Le film la prend quand il commence à lui arriver des choses. D’abord, un homme la remarque. Bon, OK, il est marié, velléitaire et pas très élégant, mais c’est un début. Pour la première fois, elle est choisie. Le meilleur reste à venir. Elle fait du théâtre amateur (le rôle de la sorcière !) et là, c'est carrément un metteur en scène de cinéma qui la repère. Cette fois, c'est pour jouer Jeanne d'Arc, une débutante idéaliste assez prometteuse, elle aussi. Ce film est l'histoire d'une transformation, donc, du moment où une chenille des champs se mue en papillon des villes. Du moment où un cinéaste découvre et invente sa muse qui s'ignore encore. Un film qui remonte à sa propre source, en douceur et en délicatesse.

Dekalog - Décalogue (Le)

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1988, Pologne
Acteurs principaux : Daniel Olbrychski (1945 - ), Zbigniew Zamachowski (1961 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /entre Berlin et Moscou /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 550 mn, couleur

Critique perso :

Le Décalogue, c'est ce truc en 10 leçons pour apprendre à compter sur ses doigts, qui date d'au moins 3000 ans avant Jean-Paul II, que Charlton Heston a descendu du Mont Sinaï avec de la poussière dans la barbe et des étoiles dans les yeux... En plus, au Trivial Pursuit, on en oublie toujours un ou deux. Le Décalogue, c'est aussi le pari fou d'un cinéaste génial, réalisé pour la télé polonaise, à une époque où son pays roulait en pots de yaourt derrière le rideau de fer.
Dix films, donc : environ 1h chacun, quelques dizaines de personnages. Ils habitent presque tous le même bloc d'immeubles tristes de Varsovie. De multiples liens les relient entre eux, à leurs voisins de palier et au reste du monde. Ils sont profs, artistes, médecins ou chauffeurs de taxi : des pros de la condition humaine, donc. Le co-scénariste, lui, est avocat : un pro, lui aussi. Il plaide ici la cause de ses semblables, ces bonshommes maladroits qui rêvent de contrôle et de maîtrise. Ces dix histoires ne donnent aucune leçon. Elles ne mettent pas en scène des cas de conscience ; elles évoquent juste ces moments où le sort d'une vie se joue sur le fil d'un rasoir. Où l'âme est au bord du précipice, où un regard muet peut tout changer. Elles montrent que chaque homme est le miroir de ses semblables. Dans ces films, on croise le vertige métaphysique au coin d'un bloc de béton. Les acteurs nous sont inconnus mais ils sont nos proches, nos tout proches. Quant à la nature, aux décors et aux objets, ils n'ont jamais joué aussi bien dans aucun autre film...

Déclin de l'empire américain (Le)

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Réalisé par : Denys Arcand (1941 - )
En : 1986, Canada
Acteurs principaux : Dorothée Berryman (1948 - ), Pierre Curzi (1946 - ), Rémy Girard (1950 - ), Yves Jacques (1956 - ), Dominique Michel (1932 - ), Louise Portal (1950 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 101 mn, couleur

Critique perso :

Quand un universitaire rencontre un autre universitaire, ils se racontent des histoires... de cul (d'ailleurs, c'est clair, ils ne pensent qu'à ça). Il y a 4 hommes (côté cuisine) et 4 femmes (côté salle de gym). Quand ils se rejoignent, ça ne fait pas exactement 4 couples : les histoires d'amour, c'est toujours beaucoup plus compliqué. Ils ont tout vu, tout pensé, tout vécu. Ils jouissent beaucoup de l'art de la parole, même s'il leur arrive parfois de se rappeler que c'est aussi une arme avec laquelle on peut faire mal. Le film est comme eux : brillant, drôle et amer, plein de la mélancolie de ceux qui ont lu tous les livres. Rendez-vous dans 15 ans pour voir comment on peut vieillir avec de tels bagages.

Dédée d'Anvers

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Réalisé par : Yves Allégret (1907 - 1987)
En : 1948, France
Acteurs principaux : Bernard Blier (1916 - 1989), Marcello Pagliero (1907 - 1980), Simone Signoret (1921 - 1985)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Ils ont pas mal bourlingué, ils ont un lourd passé derrière eux. Ils n'auraient jamais dû se rencontrer, mais l'amour leur tombe dessus. Puis leur passé les rattrape... Non, ce n'est pas Pépé le Moko (mais le scénario est du même auteur), ni Quai des brumes ni Remorques, et pourtant on est bien dans un port. On est dans le pur cinéma qualité française à l'ancienne -très bonne qualité, SVP ! Et puis, finalement, ce n'est pas tous les jours qu'on est convié au petit dej' de la troupe de filles à soldats du Big Moon. Pas tous les jours que la jeune première presque débutante s'appelle Simone Signoret, casque encore brun. Pas tous les jours que la violence de ces histoires de bas-fonds est aussi noire et explicite. Pas tous les jours qu'on découvre un très bon film oublié.

Misfits (The) - Désaxés (Les)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : Montgomery Clift (1920 - 1966), Clarck Gable (1901 - 1960), Marilyn Monroe (1926 - 1962), Eli Wallach (1915 - 2014)
Genre(s) : carrément à l'ouest /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 124 mn, NB

Critique perso :

Un chant du cygne qui porte malheur, un très beau film... Un jeune veuf et un (encore) jeune retraité à moustaches rencontrent une toute jeune divorcée douce comme un ange et belle comme Marilyn. Ils s'installent dans une baraque à moitié en chantier, éclusent quelques bières puis décident de recruter un mercenaire de rodéos pour aller chasser avec eux le mustang sauvage. Ce sont de grands enfants qui essaient de jouer aux cow-boys (sans indiens), des éclopés de partout à la recherche de paradis impossibles. Des petits points perdus dans l'immensité d'un écran de cinéma. Tristes à pleurer, bêtes et méchants, beaux comme des hommes.

Deserto rosso (Il) - Désert rouge (Le)

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Réalisé par : Michelangelo Antonioni (1912 - 2007)
En : 1964, Italie
Acteurs principaux : Richard Harris (1930 - 2002), Monica Vitti (1931 - )
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Dès le générique, le monde est flou. On n'est pas à la bonne distance. Trop loin, trop froid, trop poisseux, trop bruyant : c'est le monde de Giuliana. Ou plutôt, c'est le monde où Giuliana n'arrive pas à être. Pour la draguer, Corrado, le collègue de son mari, n'arrête pas de lui dire qu'il ressent la même chose. Mais personne ne se rend compte qu'il a les tripes à l'air, le monde. Sa nature est grise, pleine d'humus et d'humeurs. Ses boyaux sont en ferraille rouge, il crache de la fumée comme un dragon. L'espèce humaine n'est qu'un vulgaire parasite de ce biotope hostile qu'il a contribué à inventer. Le film se passe à Ravenne, la capitale italienne des mosaïques. La capitale de la couleur. La capitale de la douleur d'être.

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E


E.T.: The Extra-Terrestrial - E.T. : L'Extra-Terrestre

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Réalisé par : Steven Spielberg (1946 - )
En : 1982, USA
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Eliott, parfait petit américain névrosé, rencontre E.T., son double en concentré qui vient de l'espace : un parfait petit alien névrosé à tête de vieille grenouille (ou de foeutus avorté), son semblable son frère, son jouet. Ici, c'est un peu le Magicien d'Oz à l'envers : c'est l'autre, celui qui vient de la même planète que Yoda (ou de U-anus ?), qui veut rentrer at home. Au home d'Eliott, en revanche, il y a des pizzas qui trainent et de la bière dans le frigo, mais pas de père à l'horizon. Heureusement, il ne manque pas de pairs-potes, prêts à pédaler secs pour ré-expédier l'alien à l'envoyeur. On n'a jamais trouvé mieux pour dire en revoir à son enfance que de l'envoyer dans l'espace en soucoupe volante.

EXistenZ

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Réalisé par : David Cronenberg (1943 - )
En : 1999, Canada
Acteurs principaux : Willem Dafoe (1955 - ), Ian Holm (1931 - ), Jennifer Jason Leigh (1962 - ), Jude Law (1972 - )
Genre(s) : c'était demain /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 97 mn, couleur

Critique perso :

EXistenZ, c'est un jeu à plusieurs, genre réalité virtuelle en immersion totale : cherchez vos alliés et vos ennemis, cherchez le but du jeu. Mais on est bien loin du virtuel glacé et métallique : ici, ça gicle, ça grouille, c'est mou et gluant -et bien plus inquiétant, du coup. L'organique est l'avenir du numérique, on le sait au moins depuis Videodrome. Ce film a été l'un des premiers à multiplier les jeux dans le jeu, en casant le réel comme un niveau parmi d'autres. Si parfois le scénar est un peu laborieux, c'est la faute au manque d'inspiration des joueurs. Et si on perd à eXistenZ, on peut toujours attendre TranscendanZ pour se consoler, qu'y disent dans la pub.

Easy Rider

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Réalisé par : Dennis Hopper (1936 - 2010)
En : 1969, USA
Acteurs principaux : Karen Black (1939 - 2013), Peter Fonda (1940 - ), Dennis Hopper (1936 - 2010), Jack Nicholson (1937 - )
Genre(s) : carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Le film qui a mis a bat le « système des studios » hollywoodien et à 50 ans de style et d’élégance de mise en scène ressemble à du travail d’amateur. D’ailleurs, ça l’est. Il montre la chevauchée pas très fantastique de deux bikers -un pas beau et un taiseux- à travers le pays. Ils viennent de se renflouer en traficotant avec le Mexique, ils ont décidé de rouler de Los Angeles à la Nouvelle Orléans -pour arriver si possible au moment du carnaval. En fait, le carnaval, il est sur la route. C’est l’Amérique la vraie qu’ils rencontrent : ses paysages majestueux, ses fermiers héroïques, ses communautés de hippies utopistes et, surtout, ses hordes de gros bouseux collés à leur patelin paumé. C’est eux les plus nombreux, en fait, et à la fin c’est eux qui gagnent. End of the dream, à peine qu’il commençait à naître. D’où, sans doute, ce goût d’inachevé, qui passe des personnages aux spectateurs. La moitié du budget a dû passer en essence, l’autre en ravitaillement weed (les acteurs ont-ils été payés autrement ?). Quand à la fin l’un des héros reconnaît que « We blew it » (on a tout foiré), on se demande s’il ne parle pas de l’ensemble du film…

Ecce bombo

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 1978, Italie
Acteurs principaux : Nanni Moretti (1953 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Michele Apicella, le filmeur en super 8 de Je suis un autarcique (qui ressemble toujours terriblement à Nanni Moretti) vit encore chez ses parents (avec sa soeur). Il doit avoir un peu plus de sous, il tourne avec une meilleure caméra. Mais il se prend de plus en plus pour le metteur en scène de sa propre vie, et de celle des gens qui l'entourent. Il leur demande de rejouer certaines scènes, invente leurs répliques quand elles ne lui plaisent pas, accessoirement visite le tournage d'autres (ou officie sa copine) ou une espèce de festival rock en plein air dont il semble être le seul participant. Il choisit toujours avec goût les filles avec qui il joue (même quand elles sont mariées à un copain). Et c'est sans doute pour alimenter le making of de sa petite existence qu'il invente avec sa bande de potes un groupe « d'autoconscience » pas excessivement productif. En fait, c'est comme s'il se faisait passer des bouts d'essais à lui-même, comme s'il préparait le casting de son propre biopic. C'est sa manière à lui de faire de la radio libre, comme elles commencent à apparaître à l'époque. Un autoportrait en Vitelloni cinéphile de capitale, un petit film libre.

Eclisse (L') - Eclipse (L')

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Réalisé par : Michelangelo Antonioni (1912 - 2007)
En : 1962, Italie
Acteurs principaux : Alain Delon (1935 - ), Francisco Rabal (1926 - 2001), Louis Seigner (1903 - 1991), Monica Vitti (1931 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /poésie en image
Caractéristiques : 118 mn, NB

Critique perso :

Elle met à peine 20mn à dire au revoir à son ex -qui s'accroche un peu- et à quitter sa maison pleine de murs, de miroirs et de silence. Ca va mal pour les solitaires. Elle erre un peu dans les rues. Dans un temple grec où l'on adore un Dieu étrange, elle retrouve sa maman ; c'est la Bourse, au moins là, il y a un peu plus d'ambiance. Elle rencontre un golden-boy sans parachute. Ils traversent presque sans changer de visage le crac de leur vie. Ca va mal pour les petits porteurs. Ils errent un peu, mais ensemble cette fois. Il l'emmène dans son appartement plein de portes, de vitres et de silence. Ils s'amusent un peu. Mais ça va mal dans le monde, ce truc plein à ras-bord de signifiants qui ont égaré leur signifié. On étouffe en plein air. Total eclipse of the heart, comme chantait l'autre... (ai-je assez fait comprendre que c'était génial ?).

Ed Wood

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Réalisé par : Tim Burton (1958 - )
En : 1994, USA
Acteurs principaux : Patricia Arquette (1968 - ), Johnny Depp (1963 - ), Jeffrey Jones (1946 - ), Martin Landau (1931 - 2017), Bill Murray (1950 - ), Sarah Jessica Parker (1965 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 127 mn, NB

Critique perso :

Le plus mauvais réalisateur du monde -vu par l'un des meilleurs de son temps- était un spécialiste ès mauvais genres et mauvais goût, dans sa vie comme dans son oeuvre. Il choisissait ses copines en fonction des fringues qu'il pouvait leur piquer, ses sujets et ses collaborateurs pour produire le maximum d'effets avec le minimum de moyens. Il était gentil, naïf, enthousiaste et incompétent. Il rêvait d'égaler Citizen Kane, il réussit tout de même à réaliser Plan 9 from Outer Space, c'est pas donné à tout le monde. Tim Burton le montre, en pleine crise, enfiler une jupe moulante et un pull angora pour aller recevoir la bénédiction de son Dieu Orson. Paradoxal et jubilatoire hommage d'un perfectionniste au dilettante qu'il ne sera jamais.

Edward Scissorhands - Edward aux mains d'argent

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Réalisé par : Tim Burton (1958 - )
En : 1990, USA
Acteurs principaux : Johnny Depp (1963 - ), Vincent Price (1911 - 1993), Winona Ryder (1971 - ), Dianne Wiest (1948 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

D'un côté, l'Amérique tranquille des banlieues cossues : parcelles identiques, façades pastel, grosses voitures et jardinets bien entretenus. L'endroit est habité par une peuplade de desperate housewises expertes en cosmétiques, entre qui la moindre info circule à la vitesse du téléphone. De l'autre côté, l'imaginaire tourmenté des cauchemars gothiques : un chateau mystérieux, un inventeur fou, sa créature inachevée qui se cache dans le grenier... (elle s'appelle Edward, c'est un Pinocchio de cuir et de fer, un éternel enfant blessé). Comment ces deux enfances-là pourraient-elles bien s'entendre et s'apprivoiser ? Laquelle, d'ailleurs, a le plus besoin de l'autre ? Invention en direct d'une nouvelle poésie, d'un nouveau mythe.

El

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Réalisé par : Luis Bunuel (1900 - 1983)
En : 1952, Mexique
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

El, comme son nom l'indique, est un homme un vrai. Il vit au Mexique dans les années 50, autant dire qu'il n'a de leçons de machisme à recevoir de personne. Bon bourgeois et bon catholique, autant dire (on est chez Bunuel) qu'il est un parfait psychopathe... Avec sa toute jeune épouse, la lune de miel tourne rapidement au cauchemar domestique. Bunuel s'insinue dans la logique délirante de cet homme avec une délectation ironique. Avec lui, la façade respectable peut cacher l'horreur, les valeurs les plus traditionnelles dissimulent la folie.

Forbrydelsens element - Element of Crime (The)

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Réalisé par : Lars von Trier (1956 - )
En : 1984, Danemark
Acteurs principaux : Preben Lerdorff Rye (1917 - 1995)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 104 mn, couleur

Critique perso :

Fisher est un drôle de pêcheur en eaux troubles. Celles de sa mémoire, surtout, qui a l'air un peu perturbée. On y pêche quelques cadavres et un vieux prof, auteur d'un manuel pour enquêteurs (Element of Crime). Fisher, c'est celui qui passe de la théorie à la pratique. Il se lance donc sur les traces d'un certain Harry Gray, tueur en série potentiel, en prenant soin de faire tout comme lui, et de ne jamais voir la lumière du jour. C'est risqué mais ça marche -au cinéma, en tout cas. Le film entier, d'ailleurs, est en noir et mordoré -surtout en noir, en fait, et très beau. L'enquête, elle, est aussi fumeuse que celle d'Alphaville, et sous influence Borgès et Troisième homme. Le jeune homme qui a commis ça a visiblement lu tous les bons manuels de cinéma, il n'a peur ni de la théorie ni de la pratique, ni des plongées en eaux troubles -ça lui resservira !

Elephant

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Réalisé par : Gus Van Sant (1952 - )
En : 2003, USA
Acteurs principaux : Timothy Bottoms (1951 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 81 mn, couleur

Critique perso :

Un ado à tête de taureau (sur son tee-shirt) erre dans son labyrinthe de lycée. Non, ce n'est pas lui le minautore. Un autre, avec le sigle de la croix rouge (sur le dos de son jogging), le croise. Non, ce n'est pas lui qui donnera les premiers secours. Un troisième les prend en photos. C'est peut-être lui le cinéaste. Ne pas se fier aux apparences, aux visages, aux peaux. Ces ados sont comme tous les ados du monde. Des fois même, ils s'occupent assez bien de leurs parents. Mais les Rebels Wihout a Cause d'hier sont passés par la case Shining. Ils sont nés avec des jeux vidéos dans les mains, et savent commander ce qu'ils veulent sur Internet. Même de quoi transformer leur univers quotidien en limbes. Un sublime avant goût de l'étrange douceur qui reigne dans l'antichambre des enfers.

Elephant man

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Réalisé par : David Lynch (1946 - )
En : 1980, Angleterre
Acteurs principaux : John Gielgud (1904 - 2000), Antony Hopkins (1937 - ), John Hurt (1940 - 2017), Freddie Jones (1927 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 124 mn, NB

Critique perso :

L'angleterre victorienne a tout inventé de notre monde moderne : l'exploitation de l'homme par l'homme (enfin, ça c'était déjà pas nouveau) et par la machine, et la mise en spectacle de ses marges, pour mieux les apprivoiser. John Merrick, le Freak qui n'est pas un monstre, en est un exemplaire révélateur. D'abord, il suscite les bas instincts des spectateurs de foire, leur voyeurisme et leur intolérance -et le nôtre aussi, par la même occasion. Sauf que, rapidement, c'est la monstruosité des autres qui nous saute au visage. La bonne société le traite apparemment mieux, surtout quand il consent à devenir l'alibi idéal de sa bonne conscience. Mais, comme un éléphant dans un jeu de dupes, il n'a évidemment de place nulle part... Dès ses premiers films, David Lynch faisait déjà de drôles de rêves.

Eléphant, ça trompe énormément (Un)

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Réalisé par : Yves Robert (1920 - 2002)
En : 1976, France
Acteurs principaux : Guy Bedos (1934 - ), Claude Brasseur (1936 - ), Danièle Delorme (1926 - 2015), Victor Lanoux (1936 - 2017), Jean Rochefort (1930 - 2017)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Etienne est en peignoir sur une terrasse, en face de l'Arc de Triomphe. Flash-back : 6 semaines plus tôt, dans un parking souterrain, Etienne surprend une dame en rouge rejouer le coup de la jupe de Marilyn dans Sept ans de réflexion. Il se sent illico le coeur en vacances. Ce qu'il se garde bien de dire à sa famille et à ses potes de tennis et de toujours : Simon, le docteur hypocondriaque et son encombrante maman, Bouly et ses femmes, Daniel et son secret. Etienne, donc, voudrait bien revoir sa dame en rouge. Il la drague à l'ancienne : en forêt, sur sa jument Belle de jour, lors de RDV clandestins et anonymes. La voix off distanciée, une fois de plus, fait merveille. Vaudeville relooké, film de potes, chronique sociologique. Tournage est un peu sans surprises mais comédiens impecs et répliques qui tuent. Qu'on ne s'y trompe pas : on apprécie énormémement.

Kiss Me, Stupid - Embrasse-moi, idiot

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1964, USA
Acteurs principaux : Dean Martin (1917 - 1995), Kim Novak (1933 - ), Ray Walston (1914 - 2001)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 125 mn, NB

Critique perso :

A Climax, Nevada (nulle part entre Las Vegas et Hollywood), il ne se passe jamais rien. Comme quoi : se méfier de la pub... Mais il suffit d'y parachuter, sous un prétexte mécanique quelconque, un crooner très célèbre et très libidineux pour que la population locale atteigne la température d'ébullition. Enfin, pas n'importe qui tout de même mais, pour Orville J. Sponner, natif névrosé aspirant à son 1/4h d'heure de gloire, artiste aussi inspiré que frustré, cette présence est la chance de sa vie. Et le pire risque aussi pour sa charmante épouse, fan de la première heure du crooner libidineux. Pour optimiser ses chances (c'est-à-dire garantir ses gains tout en limitant ses risques), Orville se lance dans le plan le plus foireux de sa vie qui, apparemment, n'en manque pas. Beethoven, le nombril de Polly et le pamplemousse de L'Ennemi public : tout est bon pour arriver à ses fins. Mais Climax est si petit que tourner le dos au pire est le plus sûr moyen d'y arriver. Comme quoi : se méfier de tout, de tout le monde, et surtout de soi-même.

Star Wars: Episode V, The Empire Strikes Back - Empire contre-attaque (L')

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Réalisé par : Irvin Kershner (1923 - 2010)
En : 1980, USA
Acteurs principaux : Carrie Fisher (1956 - 2016), Harrison Ford (1942 - ), Mark Hamill (1951 - )
Genre(s) : c'était demain /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /pour petits et grands enfants /épique pas toc
Caractéristiques : 127 mn, couleur

Critique perso :

De mon avis unanime : le meilleur de la série. Celui de la découverte et de l'exploration de soi-même, cet univers perdu dans la galaxie... Comme il se doit depuis Freud, en 3 tableaux. D'abord, le désert enneigé de Hoth, où il faut affronter un monstre à longues dents et des tanks à 4 pattes. Puis les marécages de Dagobah où Luke plonge, à la recherche de la sagesse. Un maître à longues oreilles échappé du Muppet Show il rencontrera. Pendant ce temps, Han Solo explore les mystères des organismes intersidéraux et, dans un gag récurrent, échoue à passer à la vitesse supérieure en présence de la Princesse Leia. Finalement, tout le monde se retrouve presque miraculeusement à la Citée des Nuages (c'est fou comme l'univers est petit), paradis où le Maître n'est pas forcément celui qu'on croit. Perturbations dans la Force, côté obscur. Conversions massives aussi côté salles (tout aussi obscures).

Heremakono - En attendant le bonheur

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Réalisé par : Abderrahmane Sissako (1961 - )
En : 2002, Mauritanie
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Ca se passe dans la grande salle d'attente en plein air du monde. Quelque part en Afrique, quelque part entre deux infinis : les sables du désert et l'horizon de la mer. Un jeune homme et sa mère viennent d'arriver là. Ils sont coincés entre leur passé dont nous ne saurons rien, et un avenir dont nous ignorerons tout. En attendant, ils font du sur-place. Ils ne parlent pas la bonne langue et ne connaissent personne. Ils ne sont pas les seuls. Là-bas, tout le monde est en transit, en attente de correspondance. Les jeunes attendent de partir vers le Nord, les vieux ne sont pas pressés de s'en aller pour de bon. Ce ne sont pas toujours les bons qui arrivent au bon endroit. Ceux qui restent essaient de transmettre le peu qu'ils n'ont presque plus à ceux qui n'ont pas toujours envie de les écouter. Ils sont tous encore dans la grande salle d'attente de la vie. Comme tout le monde.

Carne trémula - En chair et en os

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Réalisé par : Pedro Almodovar (1949 - )
En : 1997, Espagne
Acteurs principaux : Javier Bardem (1969 - ), Angela Molina (1955 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Victor est né sous une bonne étoile -en néon- et dans un bus désert. Pourtant, sa vie de jeune jomme ne démarre pas très fort : il a 20 ans quand une jolie fille, un flic jaloux et une balle pedue l'envoient en prison sous le signe d'Archibald de la Cruz. Au bout de 10mn, on a compris que cette histoire allait se coltiner avec le désir, les fantasmes et la violence -et ne pas lésiner sur les symbôles. Victor, qui a appris la pédagogie en prison, apprend à faire l'amour avec Clara. Il ne lui restera plus qu'à apprendre la vie avec Helena. C'est l'histoire du passage de la théorie à la pratique, donc, et de l'incarnation des sentiments. Un des plus beaux films d'Almodovar.

Notorious - Enchaînés (Les)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : Ingrid Bergman (1915 - 1982), Louis Calhern (1895 - 1956), Cary Grant (1904 - 1986), Claude Rains (1889 - 1967)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 101 mn, NB

Critique perso :

Imaginons que le personnage de La Mort aux trousses soit un vrai espion, et que l'héroïne de Casablanca doive donner des gages de bonne conduite patriotique : le monde à l'envers ! A l'image du film entier, où tout le monde ment et joue la comédie. Sous prétexte de raison d'Etat, bien sûr. Parce que l'amour, il faut bien sûr faire mine, dans ce monde-là, de ne pas y croire. Pour y croire, le spectateur, lui, a droit au plus long baiser en pointillé de l'histoire du cinéma (entrecoupé de dialogues sur le poulet dans le frigo, pour détourner le code Hays). Mais ce n'est que le début : le reste du film est une longue jouissance retardée où la tension monte, se cristallise sur des objets fétiches (clé, bouteille, tasse) avant la délivrance finale. Difficile de ne pas adorer.

Enfant sauvage (L')

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1969, France
Acteurs principaux : Jean Dasté (1904 - 1994), François Truffaut (1932 - 1984)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 83 mn, NB

Critique perso :

En 1798, dans l'Aveyron, une étrange découverte : un enfant nu et sauvage, 10 ans de survie en solitaire dans la forêt. Dommage, il a raté la Révolution Française. Face au sauvageon, mieux qu'un prof : Itard, un savant tout aussi solitaire mais qui, lui, a parfaitement assimilé les idéaux humanistes de 1789. Et espère ramener l'enfant parmi les humains, l'initier au langage. A ce luxe dont, avant d'y avoir touché, on ne sait pas qu'il est indispensable : la culture. Hommage aux pédagaogues, donc. Truffaut joue lui-même ce père patient et attentif qu'il n'eut jamais, tout en détachement consciencieux, en retenue et en pudeur. C'est le contraire d'un film historique. Pourtant, l'éducation de Victor a le charme rétro d'une belle leçon au tableau noir.

Enfants du paradis (Les)

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1945, France
Acteurs principaux : Arletty (1898 - 1992), Jean-Louis Barrault (1910 - 1994), Pierre Brasseur (1905 - 1972), Maria Casares (1922 - 1996), Marcel Herrand (1897 - 1953), Pierre Renoir (1885 - 1952), Maurice Schutz (1866 - 1955)
Genre(s) : Paris /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /la parole est d'or /poésie en image
Caractéristiques : 190 mn, NB

Critique perso :

Au siècle avant-dernier, quand la télé n'existait pas encore, les artistes de théâtre et de cabaret étaient les rois des Boulevards parisiens. Voici une femme et trois hommes qui sortent de la foule anonyme : un acteur sûr de lui, un aristocrate sûr de sa fortune, un mime-poète sûr de rien. Elle préfère le poète, bien sûr. Mais Paris (réinventé par Prévert) s'en mèle et la vie sépare ceux qui s'aiment. Car l'amour des uns fait le malheur des autres. Pour de mystérieuses raisons (c'était un de mes sujets de dissert' au lycée), les histoires d'amour impossible sont celles qui nous touchent le plus... A force d'art et de poésie, ce film envoie direct ceux qui le regardent au paradis des spectateurs.

Enfants terribles (Les)

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Réalisé par : Jean-Pierre Melville (1917 - 1973)
En : 1950, France
Acteurs principaux : Nicole Stéphane (1923 - 2007)
Genre(s) : poésie en image
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

Hem, un de mes très rares regrets dans la constitution de ma DVDthèque. A priori pourtant, Cocteau et Melville sont plutôt dignes de confiance et d'estime, quand ils s'attaquent aux mythes. Mais ici, ils prétendent s'attaquer (un peu) à la réalité et ça colle nettement moins bien. La voix off tente désespérément d'introduire un peu de poésie en douce, dans la chambre de ces deux soit disant enfants un peu trop grands pour leur âge. Ils essaient de rejouer ingénuement Mme de La fayette ou "les liaisons dangereuses", on ne sait pas trop et d'ailleurs on s'en fiche. C'est prévisible et interminable. Parfois, les ailes de géant empêchent de bien faire.

White Heat - Enfer est à lui (L')

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Réalisé par : Raoul Walsh (1887 - 1980)
En : 1949, USA
Acteurs principaux : James Cagney (1899 - 1986), Virginia Mayo (1920 - 2005), Edmond O'Brien (1915 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 114 mn, NB

Critique perso :

Cody Jarrett est un drôle de zig. Avec sa bande de truands-objets, il joue à l'attaque des trains en marche. Il s'en met plein les poches mais ne dépense rien. Avec sa femme-objet, il joue à la poupée (ou le contraire). Avec les gendarmes, il joue au chat et à la souris. Le seul être vivant avec qui il ne rigole pas, c'est sa môman. Cinglé, migraineux, aiguisé comme un couteau, il ne devra sa chute qu'à un Cheval de Troie dissimulé dans un autre Cheval de Troie. Et encore, ce grand bébé a l'art de transformer sa chute en son plus beau triomphe. L'archétype du film noir tardif : redoutablement efficace, dégénéré, plein de fulgurances -comme son héros. "Put the blame on mame", comme disait l'autre.

Jeder für sich und Gott gegen alle - Enigme de Kaspar Hauser (L')

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Réalisé par : Werner Herzog (1942 - )
En : 1974, Allemagne
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

C'est le jour de Pentecôte de l'an de grâce 1828 que Kaspar est tombé du ciel, pile sur la place de Nuremberg. Pas tout à fait un bébé-loup ou un Enfant sauvage (il a dépassé les 20 ans). Pas non plus un idiot (il aime la musique et écrit son nom). Non, plutôt un homme-bébé qui n'a jamais vécu avec d'autres hommes -autrement dit un rien du tout, une marionnette entre les mains d'un démiurge sadique. Quelques bonnes âmes tentent de lui apprendre le métier de grande personne, de lui trouver une place dans le monde ailleurs qu'au magasin des accessoires exotiques. Il devient une sorte de philosophe-artiste brut, riche de ses seuls yeux intranquilles où on lit la stupeur et le désespoir d'être au monde. Des fois, la vérité est bien inspirée.

Narrow Margin (The) - Enigme du Chicago Express (L')

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Réalisé par : Richard Fleischer (1916 - 2006)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Marie Windsor (1919 - 2000)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 71 mn, NB

Critique perso :

Partie de cache-cache avec flingues, dans le dernier train pour L.A. C'est drôles, les trains, pour se cacher : c'est plein de coins, de portes et de vitres, ça s'arrête presque jamais. Participent à la partie quelques policiers qui protègent un ou deux mouchards, un ou deux mouchards pas rassurés par les mauvaises fréquentations des wagons, et des mauvaises fréquentations un peu fachées avec les policiers. Chacun est le chat et la souris de quelqu'un d'autre, mais pas toujours de ceux qu'on croit. D'ailleurs, ce n'est pas très facile de jouer à la ronde dans un alignement de compartiments. Chapeau au réalisateur qui, lui, a l'air aussi à l'aise sur cette poutre étroite que dans un décor confortable. Et puis, les trains, c'est pas parce que ça file droit que ce n'est pas propice aux bons films, et aux retournements de situations.

Public Enemy (The) - Ennemi public (L')

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Réalisé par : William A. Wellman (1896 - 1975)
En : 1931, USA
Acteurs principaux : James Cagney (1899 - 1986), Jean Harlow (1911 - 1937)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 83 mn, NB

Critique perso :

Un petit docu sur la vie à Chicago au début du XXème siècle nous met dans le ton : les rues regorgent de petites cailleras à casquettes, toujours prêtes pour un mauvais (petit) coup. Mais les enfants grandissent et leurs coups aussi. Tom Powers est de ceux-là. Il a, comme son nom l'indique, une pile électrique dans le ventre et le poing baladeur. Il apprend vite à manier la gachette (et le demi-pamplemousse), à se rendre indispensable aux uns et encombrant aux autres. Dans ces cas-là, ce sont souvent les autres qui gagnent. Avec ce film et Little Caesar, sorti quasiment en même temps, le crime a trouvé son visage, son sourire malin et son énergie.

Entrée des artistes

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Réalisé par : Marc Allégret (1900 - 1973)
En : 1938, France
Acteurs principaux : Bernard Blier (1916 - 1989), Julien Carette (1897 - 1966), Marcel Dalio (1900 - 1983), Claude Dauphin (1903 - 1978), Louis Jouvet (1887 - 1951), Odette Joyeux (1914 - 2000), Noël Roquevert (1892 - 1973)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

C'est l'effervescence dans les couloirs du conservatoire d'art dramatique : aujourd'hui, on recrute les p'tits jeunes de la prochaine promotion. Se presse donc là une bande de postulants cabotins, tous plus insupportables les uns que les autres. Comme on pouvait le craindre, ce sont les pires qui sont pris -enfin, non, les pires, ce sont ceux qui ont été pris l'année d'avant. Ils sont tous jeunes, bêtes et beaux, c'est-à-dire, vus par ceux qui ne le sont plus (voir aussi Les Tricheurs), du genre à jouer avec leurs coeurs qu'ils pensent avoir déjà blasés, du genre à faire des paris stupides sur les sentiments auxquels ils pensent échapper. Mais qui n'hésitent jamais pour autant à en faire des tonnes avec leur peu (de talent) qu'ils ont. Pour paraphraser leur maître (à l'envers), ils mettent un peu trop de jeu dans leur (pseudo) vie, et pas assez de vie dans leur (imitation de) jeu. Ah, le maître... C'est bien simple, ses 10mn de présence à l'écran sont les seules dont on se souvienne. Y'a encore du boulot, les p'tits jeunes...

Espiritu de la colmena (El) - Esprit de la ruche (L')

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Réalisé par : Victor Erice (1940 - )
En : 1973, Espagne
Acteurs principaux : Ana Torrent (1966 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /jeu dans le jeu /poésie en image
Caractéristiques : 97 mn, couleur

Critique perso :

C'est dans un petit village perdu de la campagne espagnole, c'est dans les années 40, c'est loin de la guerre civile, quoique. Un soir, le plus grand monstre de l'histoire du cinéma débarque dans les yeux et les oreilles des villageois, et dans ceux d'Ana et d'Isabel, et le monde ne sera plus jamais comme avant. Bien sûr il existe, ce monstre, bien sûr il habite dans la grange abandonnée d'à côté. Bien sûr, c'est que dans leurs têtes, quoique. Quand on n'a même pas 7 ans, tout est vrai, tout est grand et mystérieux, tout fait peur, quoique. Papa, maman, l'école, rien que des endroits envahis par des esprits, des fantômes. A cet âge-là, le cinéma, c'est comme un mode d'emploi de la vie des grands. Et après aussi. Et même les censeurs de Franco, ils sont pas fichus de voir ce qu'on pourrait y trouver à redire, tellement c'est subtil. Tellement c'est peut-être bien le plus beau film du monde...

Esquive (L')

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Réalisé par : Abdellatif Kechiche (1960 - )
En : 2003, France
Acteurs principaux : Sara Forestier (1986 - )
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

Des têtes d'ados dans un décor de barres d'immeubles : une banlieue anonyme, ailleurs, à côté (où sont les voitures qui brûlent ?). Les têtes parlent, beaucoup, très vite, toutes en même temps, avec de drôles de mots. Elles ont toujours quelque chose à négocier, des intrigues compliquées à mener. Lydia, Rachid et Frida, eux, utilisent comme ils peuvent les mots de Marivaux : ils répètent Les jeux du kif et du hasard (un truc de ouf qui embrouille grave). Krimo voudrait bien faire partie de la bande, changer de costume, toucher la main de Lydia. Mais sa prof de français n'est pas très encourageante. Dans le langage de sa tribu, elle lui dit qu'il devrait sortir de lui-même, que le bonheur, ça se travaille. Il est long, le chemin jusqu'à lui-même. Le mode d'emploi, il est peut-être bien écrit dans la langue de Marivaux. Pas sûr que tout le monde arrive à le décoder.

E la nave va - Et vogue le navire

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1983, Italie
Acteurs principaux : Freddie Jones (1927 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /en avant la musique /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 132 mn, NB/couleur

Critique perso :

Au commencement était le cinéma. Il était muet, en noir et blanc et plein d'innocence. Et puis tout le reste est arrivé. Le son, la couleur, les officiels et les officiers, et l'innocence a dû mettre les voiles, avant de se faire rattraper par le monde en haute mer. C'est à peu près ça que le film raconte et aussi, sans doute, beaucoup d'autres choses. Autant que de spectateurs. Par exemple, une autre version pourrait être : quelque part avant la première guerre mondiale, un prince étranger (et sa cour), quelques fils à papa/maman, des jeunes premièr(e)s ingénu(e)s, des génies incompris et incompréhensibles, un journaliste, un rhinocéros gris et les cendres d'une célèbre cantatrice sont sur un bateau. Toute la civilisation, quoi, plus quelques passagers clandestins. A la fin, tout le monde tombe à l'eau, sauf le cinéma. Insubmersible comme le jouet de grand enfant génial.

Topaz - Etau (L')

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1969, USA
Acteurs principaux : Claude Jade (1948 - 2006), Philippe Noiret (1930 - 2006), Michel Piccoli (1925 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 127 mn, couleur

Critique perso :

Guerre froide : un dignitaire russe lache son camp, les cubains ne sont pas contents, ce qui inquiète les américains. Pour démèler l'affaire, on fait intervenir un contact neutre, le genre qui se fait une certaine idée de sa mission. Comme il est français, il est autorisé à tromper sa femme avec une charmante agent double cubaine. Mais comme il n'est pas britannique, il n'a pas droit pour autant au glamour de James Bond (lui, son code, ce serait plutôt 0SS 117, c'est dire). Une histoire d'espions de 2ème division, donc, où les décors ont l'air plus réels que les personnages -sauf Fidel et le Che, qui font de la figuration. Pour le reste, plutôt du Hitch de 2ème division.

Eternal Sunshine of the Spotless Mind

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Réalisé par : Michel Gondry (1963 - )
En : 2004, USA
Acteurs principaux : Jim Carrey (1962 - ), Kirsten Dunst (1982 - ), Kate Winslet (1975 - )
Genre(s) : c'était demain /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, couleur

Critique perso :

Après nous avoir plongé en apné Dans la peau de John Malkovich, un scénariste fou récidiviste nous embarque pour un voyage au centre de la tête. La tête appartient à un certain Joel, elle dort et en même temps elle est en panique, parce qu'on s'attaque, avec son consentement officiel, à tous les souvenirs qu'elle a engrangés de Clementine, l'ex de Joel. Vous suivez ? Normal, ça va plus vite que dans Solaris. Pas facile tous les jours de voyager sur les voies de l'association libre, à la vitesse des synapses. Pour éviter le syndrôme de la surcharge cognitive et profiter des trouvailles et inventions visuelles qui se cachent dans les coins, on conseille la télécommande (touches "pause" et "replay"). RDV dans 10 ans pour voir ce qu'il en restera quand on aura tout oublié.

Star Is Born (A) - Etoile est née (Une)

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Réalisé par : George Cukor (1899 - 1983)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : Judy Garland (1922 - 1969), James Mason (1909 - 1984)
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 181 mn, couleur

Critique perso :

Déjà plus si jeune et une étoile qui jusqu'à présent n'a ébloui personne : c'est l'apprentie chanteuse Esther Blodgett (en plus, impossible de caser un nom pareil en tête d'affiche). Dommage, la Star Ac n'existe pas encore. Mais elle tombe, en la personne de Norman Maine, sur un protecteur qui eut, un siècle avant, son heure de gloire à Hollywood. Maintenant, il a quelques beaux restes mais fréquente surtout les bouteilles de whisky. Il est un peu passé de l'autre côté de la pente... A eux deux, il vont pourtant trouver la formule magique du succès -à défaut de celle du bonheur. Un peu mélo et longuet à mon goût, mais avec quelques morceaux fulgurants et savoureux (le tour du monde dans le salon est mon préféré).

The Nightmare Before Christmas - Etrange Noël de Monsieur Jack (L')

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Réalisé par : Tim Burton (1958 - )
En : 1993, USA
Genre(s) : animation /conte de fées relooké /en avant la musique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 76 mn, couleur

Critique perso :

Au pays d'Halloween, Jack est le roi. C'est lui le meilleur organisateur de réjouissances macabres, de défilés cauchemardesques et de fiestas lugubres. Au pays d'Halloween, aucun fantôme et aucun monstre ne peut se passer de lui. Mais Jack s'ennuie un peu, et il tombe un jour sur un rêve auquel il n'avait jamais pensé : le pays de Noël, ses guilandes, ses bonbons, ses cadeaux, et son petit papa tout rouge. Noël, voilà enfin un boulot à sa hauteur ! Jack étudie scientifiquement la question et se met au turbin de devenir un autre, entrainant tout le village d'Halloween dans son sillage. Bon, évidemment, ça swingue mieux chez les freaks que chez les enfants sages. Et évidemment, (proverbe burtonnien), le choc des cultures fait souvent des pots cassés.

Eureka

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Réalisé par : Shinji Aoyama (1964 - )
En : 2000, Japon
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 210 mn, NB/couleur

Critique perso :

Premier 1/4h : prise d'otages sanglante dans un bus. Des morts, 3 rescapés : le chauffeur et 2 écoliers (un frère, une soeur). 2 ans plus tard : le chauffeur, après avoir fait la route de-ci de-là, revient à son point de départ. Les enfants, laissés à eux-mêmes, sont devenus mutiques. Il leur reste plus de 3h pour tenter de reconstituer, avec un cousin de passage, une espèce de communauté utopique. Pour remonter dans un bus, aussi. Les plus inquiétants sont les enfants : leur regard est vide. Ils ont franchi une ligne, perdu leur innocence. Un film revenu de l'au-delà de la souffrance, un univers sonore qui ressemble au nôtre mais en moins coloré.

Eva

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Réalisé par : Joseph Losey (1909 - 1984)
En : 1962, France
Acteurs principaux : Stanley Baker (1928 - 1976), Virna Lisi (1937 - 2014), Jeanne Moreau (1928 - 2017)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 116 mn, NB

Critique perso :

Eva est une garce, les hommes le savent depuis un bon bout de temps. Elle est libre et elle n'aime personne, même Tyvian devrait s'en douter. Mais bon, vous voyez ce que c'est : elle s'incruste chez lui par hasard, squatte son tourne-dique et sa baignoire, et l'homme ne se sent plus de joie. Pourtant, il a déjà tout ce qu'il faut : une petite Dolce vita, de brillantes fréquentations, une jolie fiancée. Il s'est même fait une réputation (totalement usurpée) d'écrivain à la mode. Eva, rien, mais au moins elle ne triche pas avec sa réputation. Le jazz remplit sa vie, grâce à l'argent des hommes. Mais l'homme en veut toujours plus, vous voyez ce que c'est. Jamais content, toujours frustré. Une femme qui se vend sans céder à son charme irrésistible, non mais vous imaginez ça possible, vous ? Le ver est dans le fruit de la bourgeoisie depuis un bon bout de temps.

Vangelo secondo Matteo (Il) - Evangile selon St Matthieu (L')

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Réalisé par : Pier Paolo Pasolini (1922 - 1975)
En : 1964, Italie
Genre(s) : culte ou my(s)tique /poésie en image /à l'antique
Caractéristiques : 133 mn, NB

Critique perso :

Un film dont les visages et les paroles sont la matière première. Des visages d'hommes, des visages de femmes, des visages d'enfants. Des visages magnifiques de paysans miséreux, de vrais gens pas beaux. Tout un peuple, aussi grand que celui des armées d'Alexandre Nevski. Son visage à Lui, c'est une force douce, un roc gracieux et un regard pointu. L'énergie d'un homme qui marche. Les riches et les puissants se reconnaissent, eux, à ce qu'ils ne bougent pas, et aux chapeaux démesurés qui rétrécissent leur visage. L'Homme parle, aussi. Ces paroles entendues mille fois, toujours fraîches. Sur un script éventé depuis 2000 ans, un film brut de dé-embaumage, plus vivant que toutes les hollywooderies sur le sujet. De l'eau de roche.

All about Eve - Eve

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1950, USA
Acteurs principaux : Anne Baxter (1923 - 1985), Bette Davis (1908 - 1989), Marilyn Monroe (1926 - 1962), George Sanders (1906 - 1972)
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 138 mn, NB

Critique perso :

Eve, jeune et charmante actrice, reçoit un prix d'interprétation au milieu de VIP en pingouins. Applaudissements, remerciements. Flash-back : moins d'un an avant, Eve (la même), dans le rôle de la fan anonyme faisant (pour de vrai) le pied de grue à la sortie des théâtres. Que s'est-il passé entre les deux ? Bette Davis, dans le rôle d'une célèbre actrice vieillissante et capricieuse (qui, bizarrement, lui va comme ses gants), arrivera dans l'intervalle à se rendre plus sympathique que l'onctueuse Eve, c'est dire. Mankiewicz prouve par l'exemple que manipulations, faux-semblants et mises en scènes sont les clés d'un spectacle réussi. Impeccable leçon de misanthropie (voire de misogynie) et de cynisme, pour ne plus jamais regarder les cérémonies des Oscar, César, Molière et patapon de la même façon.

Evénement le plus important depuis que l'homme a marché sur la lune (L')

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1973, France
Acteurs principaux : Maurice Biraud (1922 - 1982), Catherine Deneuve (1943 - ), Marcello Mastroianni (1924 - 1996)
Genre(s) : Paris /conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 94 mn, couleur

Critique perso :

Au commencement était la pochade : Agnès et Catherine, enceintes toutes les deux, auraient involontairement suggéré le sujet à Jacquot jaloux : et si l'homme pouvait tomber enceint, lui aussi !? Aussitôt dit, aussitôt fait, Demy ne fait pas les choses à moitié (quoique). Le couple le plus glamour du moment, au lieu de glander dans son Olympe, se retrouve avec plus ou moins les occupations de ses parents (papa dans les autos, maman dans les shampoings), et l'aîné blondinet qu'il fut, c'est le fils de Michel Legrand qui l'incarne. Voilà déjà pas mal de perturbations en vue dans la Sainte Famille. Pour ajouter à la confusion des genres, il multiplie les seconds couteaux à l'identité trouble -mais c'est pour de rire. Le tract féministe déconnant et un peu désinvolte aurait pu être explosif, mais il fait un peu pchitt. Tout n'est pas, hélas, accompli pour les siècles des siècles. Mais pour le début des années 70, c'est déjà pas si mal.

Excalibur

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Réalisé par : John Boorman (1933 - )
En : 1981, Angleterre
Acteurs principaux : Helen Mirren (1945 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /du Moyen-Age à 1914 /épique pas toc
Caractéristiques : 140 mn, couleur

Critique perso :

Elle est née de l'eau et elle retournera à l'eau. Elle a bien connu Merlin, Arthur, Lancelot, Perceval et quelques autres. Elle désigne les rois et adoube les chevaliers. Elle s'appelle Excalibur ; c'est une épée. Son destin, c'est le fer des armures et le feu des combats. Le sang, l'ardeur des hommes et les tôles froissées. L'honneur et la passion. Un peu de Shakespeare pour le texte, pas mal de Zardoz recyclé pour les décors et les costumes. L'épée est très bien mais les autres acteurs (à part quelques seconds rôles prometteurs : essayez de reconnaître Gabriel Byrne et Liam Neeson !) ressemblent beaucoup à des surfeurs californiens. Dommage, ça sent le kitsch. Peut-être la magie qui n'est pas assez réaliste, ou le réel qui n'est pas assez magique. Le Seigneur des anneaux lui a fait prendre un sacré coup de vieux.

Exotica

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Réalisé par : Atom Egoyan (1961 - )
En : 1994, Canada
Acteurs principaux : David Hemblen , Arsinée Khanjian (1958 - ), Elias Koteas (1961 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Les personnages d'Egoyan sont des passeurs de frontières et des inventeurs de rituels -les deux sont liés, sans doute. Ils ont franchi quelques bornes, tutoyé des gouffres, perdu quelque chose d'irremplaçable. Alors, pour soigner leurs obscures blessures, ils s'inventent des conjurations tout aussi obscures. Leur cérémonie favorite consiste à répéter inlassablement certains gestes fétiches, certaines actions qui sont leur madeleine à eux. Ils vivent dans des bulles, inacessibles les uns aux autres et la métaphore de l'aquarium, de l'oeuf ou de la pièce truffée de miroirs sans tain (ce qui revient au même) matérialise leur condition. Dur dur d'être heureux dans ce monde-là, baigné d'ambiance lourde et capiteuse. Et impossible d'oublier le strip-tease d'une fausse écolière quand Léonard Cohen chante "Everybody knows"...

Animal Crackers - Explorateur en folie (L')

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Réalisé par : Victor Heerman (1893 - 1977)
En : 1930, USA
Acteurs principaux : Margaret Dumont (1889 - 1965), Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961), Zeppo Marx (1901 - 1979)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Réception chez Mrs Rittenhouse, tenue de (non) rigueur exigée. Il y a là un grand professeur qui ne dit jamais rien, un petit escroc qui démasque les imposteurs et un grand explorateur qui n'arrête pas de dire le contraire de ce qu'il dit. Il prétend entre autres revenir d'Afrique, où il a croisé des ours polaires et débusqué un éléphant dans son pyjama... Il y a là aussi un tableau pompier représentant un cavalier "après la chasse" : apparemment un chef d'oeuvre insurpassable, dont deux des invités ont réalisé une copie supérieure à l'original, qui passent tous entre pas mal de mains. Bref, c'est du théâtre de l'absurde en concentré énergétique, du délire acoustico-visuel en décors de carton pâte, de la plongée en apnée dans les vertiges de l'artifice. Supérieur à l'original qu'il est, sans aucun doute.

Mr. Deeds Goes to Town - Extravagant Mr. Deeds (L')

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Réalisé par : Frank Capra (1897 - 1991)
En : 1936, USA
Acteurs principaux : Jean Arthur (1900 - 1991), Gary Cooper (1901 - 1961)
Genre(s) : New York - New York /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 115 mn, NB

Critique perso :

C'est le conte de fée que les américains adorent se raconter à eux-mêmes : l'histoire d'un homme simple et bon, un average man sorti de sa cambrousse qui, par son bon sens terrien et boy scout, donne des leçons de savoir-vivre à la bonne société blasée et satisfaite de New York. Faut dire qu'il n'est pas mu par l'argent (louche, ça, à se demander s'il est vraiment américain), qu'il écrit des poèmes pour cartes de voeux (et on veut nous faire croire que c'est comme ça qu'il gagne sa vie !) et qu'il n'a même pas de petite amie (ce serait dommage de ne pas avoir l'occasion de sauver au moins une newyorkaise -la pire, si possible !- du marasme). Faut dire aussi qu'il a la tête de Gary Cooper, alors tout passe comme une lettre à la mailbox. C'est comme ça que les américain ont réussi à faire avaler leurs contes de fée au monde entier.

Eyes Wide Shut

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1999, USA
Acteurs principaux : Tom Cruise (1962 - ), Nicole Kidman (1967 - ), Sydney Pollack (1934 - 2008)
Genre(s) : conte de fées relooké /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 159 mn, couleur

Critique perso :

Certes, c'est l'histoire de la crise d'un couple. Mais c'est aussi un remake du Magicien d'Oz pour adultes, autrement dit un voyage au pays des rêves et des fantasmes des grandes personnes, ce monde des apparences aux valeurs inversées, peut-être plus vrai que le monde réel. Tom Cruise joue (plutôt bien) un bon docteur un peu benêt, manipulé par ses désirs -et perpétuellement frustré. Sa femme de l'époque joue (encore mieux) sa femme de l'époque. Quels dangers court-il exactement dans cette aventure ? A-t-il fallu que quelqu'un meurt pour que lui vive ? Pour peindre cette superposition des mondes réels et mentaux, Kubrick utilise des contrastes de couleur étonnants et une construction en miroir. Vertiges et confort, malaise du banal.

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F


Fabuleux destin d'Amélie Poulain (Le)

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Réalisé par : Jean-Pierre Jeunet (1953 - )
En : 2001, France
Acteurs principaux : Mathieu Kassovitz (1967 - ), Claire Maurier (1929 - ), Yolande Moreau (1953 - ), Isabelle Nanty (1962 - ), Audrey Tautou (1978 - )
Genre(s) : Paris /conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour)
Caractéristiques : 129 mn, couleur

Critique perso :

Voyage à l'intérieur d'une carte postale de Paris. En compagnie d'Amélie, ange gardienne postulante au statut de jeune fille, et de Nino, jeune homme postulant au statut d'ange gardien d'Amélie. Elle a toujours le nez en l'air, il passe son temps à fouiller par terre. Le scénariste a beaucoup ramé pour retarder de 2h leur rencontre. Il a pour cela compilé tous ses carnets de notes, ses blagues de potaches et ses élans d'ado. Il a joué à Marabout-bout de péloch'. Réalisé par un perfectionniste, poncé au cliché, poli au chromo, verni au numérique. Mais beaucoup de petites choses en font-elles une grande ? On verrait mieux la grâce, si elle avait besoin de moins de pigeons. Ca me serait plus sympathique, si ça cherchait un peu moins à l'être sans arrêt.

Falstaff

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Réalisé par : Orson Welles (1915 - 1985)
En : 1965, France
Acteurs principaux : John Gielgud (1904 - 2000), Jeanne Moreau (1928 - 2017), Fernando Rey (1917 - 1994), Marina Vlady (1938 - ), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /épique pas toc
Caractéristiques : 119 mn, NB

Critique perso :

Enorme. Il est énorme, en poids du corps et en poids des mots. Il gagne sa vie en déchargeant les bourses de quelques uns de ses semblables, et surtout en régalant les autres des récits de ses énormes exploits. En les exagérant ou en les inventant, si besoin. Il paie en mots ce qu'il ne peut pas payer en monnaie sonnante, c'est le plus généreux des bavards. En plus, il a d'excellentes fréquentations qui font de lui, aussi, un potentiel poids lourd politique. Le fils du Roi himself l'accompagne dans ses chasses, et lui prête des oreilles qui valent l'or de la couronne qu'il ne porte pas encore. Le Prince apprend avec Falstaff la seule chose que son père est incapable de lui payer ou de lui transmettre : jouer, et rire. Mais rien n'échappe à la raison d'Etat, surtout pas la bonne humeur de sang royal... Le budget fut sans doute modeste mais les mots sont de l'énorme Shakespeare, et les comédiens font le poids. Sans aucune lourdeur, et comme à la vitesse d'un cheval au galop.

Kabhi Khushi Kabhie Gham... - Famille indienne (La)

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Réalisé par : Karan Johar (1972 - )
En : 2001, Inde
Acteurs principaux : Amitabh Bachchan (1942 - ), Jaya Bhaduri (1948 - ), Kajol (1974 - ), Shahrukh Khan (1965 - ), Rani Mukherjee (1978 - ), Hrithik Roshan (1974 - )
Genre(s) : Bollywooderie /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique
Caractéristiques : 210 mn, NB/couleur

Critique perso :

1ère partie : comment défaire une famille indienne idéale. Ils sont très riches et très beaux, ils vivent dans une espèce de chateau de Versailles. Maman est très proche de son aîné : elle sent sa présence avant même qu'il soit descendu de son hélico. Mais il a le mauvais goût de tomber amoureux sans prévenir papa (et de la fille de la bonne, en plus). Banissement.
2ème partie : comment réconcilier une famille indienne idéale. Toujours très riche et très beau, l'aîné s'est installé à Londres. On avait quitté le benjamin en bouboule de canapé. Entre temps, il s'est fait poussé les muscles et s'est entraîné avec Michaël Jackson. Il débarque aussi à Londres. Comme en plus il a changé la couleur de ses yeux, on ne le reconnaît pas (enfin, pas tout de suite). Les jeunes ont le mal du pays, les vieux le mal de leurs enfants. On les croit parce qu'ils ont tous du vent dans les cheveux aux moments importants. On soupçonne que ça doit pouvoir s'arranger.
Pour s'initier à Bollywood, ce n'est pas nécessairement la meilleure porte d'entrée. Ou alors, juste pour apprendre à fixer le niveau de son propre seuil de tolérance au kitch.

Family Viewing

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Réalisé par : Atom Egoyan (1961 - )
En : 1988, Canada
Acteurs principaux : David Hemblen , Arsinée Khanjian (1958 - ), Gabrielle Rose (1954 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 86 mn, couleur

Critique perso :

Aline, jeune femme esseulée et Van, jeune garçon perturbé, se rencontrent dans un hospice, aux chevets respectifs de leur mère vs. grand-mère, toutes deux aussi mal en point. La jeune femme vie en faisant semblant d'aimer des hommes au téléphone. Le jeune garçon a une gentille famille recomposée qui a l'air de sortir d'un mauvais sitcom. Mais, dans leur chambre, son père et sa belle-mère se fabriquent d'autres feuilletons amateurs, plus personnels, en effaçant sur des vieilles cassettes vidéos les images de la mère, qui s'est tirée, et de la grand-mère malade. Des fois, avec l'aide de la voix d'Aline. Les images effacent les images, les gens remplacent les gens, la vie est une grande aventure par procuration. Egoyan, qui n'en est qu'à son deuxième film, se préoccupait déjà pas mal des trous de mémoire de l'histoire personnelle, et des traces qui se supperposent.

Sorpasso (Il) - Fanfaron (Le)

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Réalisé par : Dino Risi (1916 - 2008)
En : 1962, Italie
Acteurs principaux : Vittorio Gassman (1922 - 2000), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

C'est une journée de 15 août dans Rome déserte. Il fait trop beau et trop chaud pour travailler, pourtant Roberto travaille son droit (romain, sans doute). Il fait trop beau et trop chaud pour ne rien faire, c'est un temps à attirer les mouches. Justement, voilà Bruno qui débarque dans la vie de Roberto. Et qui l'embarque illico pour un voyage vers nulle part dans sa voiture de frimeur, pédale au plancher et klaxon au vent. Bruno, c'est la fine fleur de la connerie locale. Sympa, rigolo et dupe de rien. Taxeur, glandeur et refileur de pots cassés. Roberto, c'est la fine fleur de la civilisation inutile. Poli, timide et réservé. Faible, aveugle et impuissant. Un pot de fer (en toc) et un vase de Chine. Le genre de types faits pour s'entendre à merveille tant qu'ils ne se connaissent pas. Une des premières strada pellicula (road movie en italien) du cinéma (un genre qui ira loin), mais qu'il est déjà bien dur de sorpasser (dépasser, en italien).

Roaring Twenties (The) - Fantastiques années 20 (Les)

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Réalisé par : Raoul Walsh (1887 - 1980)
En : 1939, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), James Cagney (1899 - 1986)
Genre(s) : portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 104 mn, NB

Critique perso :

Les années 20 dans le rétroviseur, commentées par une voix off habituée des discours officiels. En fait, les années 20 commencent dans les tranchées de France, entre 1914 et 1918. C'est là que se rencontrent Eddie, George, et Lloyd (comme le scénario est bien fichu, ils se retrouveront bien sûr plus tard). Le retour au civil est rude. Heureusement, vient la Prohibition. Eddie, qui ne fait rien comme tout le monde, fournit ses contemporains en bibine frelatée, tout en buvant du petit lait. Sa petite entreprise fleurit, ses amours piétinent. Quand vient la Crise, comme il ne fait toujours rien comme tout le monde, il se met à boire autre chose. Chronique douce-amère d'un temps où le monde semblait tourner sur la tête. Regard nostalgique et effaré sur une époque pas si lointaine (et pourtant tellement exotique), où personne ne faisait comme tout le monde. Portrait de l'adolescence turbulente de la modernité schizofrène.

Phantom of the Opera (The) - Fantôme de l'Opéra (Le)

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Réalisé par : Rupert Julian (1879 - 1943)
En : 1925, USA
Acteurs principaux : Lon Chaney (1883 - 1930)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 92 mn, NB

Critique perso :

Dans les caves de l'Opéra de Paris, parfois, une ombre sort de l'ombre. Elle terrorise les danseuses en tutu, trucide quelques machinos et hypnotise la belle Catherine, doublure de diva, de derrière le mur de sa loge. Une fois, pour montrer qu'elle n'est pas contente, elle fait tomber le lustre de la grande salle sur les spectateurs. En fait, l'ombre s'appelle Eric. La plupart du temps, il vit au 6ème dessous, mais il ne dédaigne pas hanter les toits, si besoin. Des fois, il se déguise en Mort - pas besoin de se forcer beaucoup, d'ailleurs. En ce moment, on joue Faust, ça doit être son opéra préféré. N'y tenant plus, il kidnappe la belle Catherine pour lui donner des leçons de solfège (au 6ème dessous). Le reste appartient à la légende gothique du lieu, et du cinéma.

Fargo

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Réalisé par : frères Coen
En : 1996, USA
Acteurs principaux : Steve Buscemi (1957 - ), William H. Macy (1950 - ), Frances McDormand (1957 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

Au commencement était l'écran blanc. Puis surgit la voiture, la télé et le hamburger. Bienvenue à Fargo enneigé, nombril du non-monde. Dans ce trou, quelques non-vivants essaient de patauger comme ils peuvent. Ce mari aux abois, par exemple, et les deux complices aussi nazes que lui qu'il s'est trouvé : un grand taiseux et une petite teigne bavarde -ce serait beaucoup dire qu'il est le cerveau de la bande. Quelques cadavres plus tard, entre dans l'histoire une espèce de Colombo féminin, enceinte jusqu'aux yeux -la seule qui a l'air dans son élément dans la nullité ambiante. Avec ce grand film sur la frustration des nuls, les Coen Brothers inventent l'humour blanc : le contraire de l'humour noir, en pire. Et dire que le réchauffement climatique risque de nous priver de ce genre d'horreurs réfrigérées.

Farinelli

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Réalisé par : Gérard Corbiau (1941 - )
En : 1994, France
Acteurs principaux : Caroline Cellier (1945 - ), Stefano Dionisi (1966 - ), Enrico Lo Verso (1964 - ), Elsa Zylberstein (1968 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /en avant la musique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Farinelli fut le plus célèbre castrat du XVIIIème siècle. Tout petit déjà, il avait une très jolie voix, alors sa famille s’est dit qu’il ferait mieux de la garder, par tous les moyens... Si on en croit ce film, un castrat adulte, c’est beau comme un enfant et fort comme un homme. Farinelli peut ainsi donner du plaisir aux femmes très longtemps sans jamais perdre son flegme ni risquer de les mettre enceintes : le partenaire idéal ! C’est aussi un frangin idéal pour son frère, médiocre amant qui s’occupe de la finition de ses conquêtes, et médiocre compositeur qui ne peaufine pas trop, en revanche, les oeuvres qu’il lui donne à chanter. Bref, si on en croit ce film (mais vaudrait mieux pas trop), Farinelli, brave type et pauvre chou, est un peu traumatisé (c'est la moindre des choses), se fait exploiter par tout le monde et peine à s’attirer la reconnaissance qu’il mérite (de maître Haendel, notamment). Le film est romanesque et fort soigné, il ne lui manque pas une note ni un costume, mais peut-être quand même un petit quelque chose d'autre.

Maltese Falcon (The) - Faucon maltais (Le)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Mary Astor (1906 - 1987), Humphrey Bogart (1899 - 1957), Elisha Cook Jr. (1903 - 1995), Sydney Greenstreet (1879 - 1954), Walter Huston (1884 - 1950), Peter Lorre (1904 - 1964)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 101 mn, NB

Critique perso :

Avant d'être Philip Marlow, Bogart a été un Sam Spade très crédible. Qui, bien sûr, est assailli de belles dames à son bureau dès qu'il arrive le matin. Et, évidemment, envoie son associé au casse-pipe le soir même. A la suite de quoi, naturellement, il est embarqué dans une sombre affaire passablement emberlificotée, plein de de faux jetons et de gros dégueulasses. Ce qui le sauve, c'est qu'il est un parfait metteur en scène de lui-même et qu'il a toujours l'air d'en savoir plus qu'il n'en a l'air. Ce qui nous accroche, of course, c'est la même chose.

Faust

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Réalisé par : F. W. Murnau (1888 - 1931)
En : 1926, Allemagne
Acteurs principaux : Emil Jannings (1884 - 1950)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 116 mn, NB

Critique perso :

Faust, respectable savant à l'ancienne (barbe blanche, grimoires et fioles) est tenté par une reconversion expresse en dandy à la mode (pourpoing, belle gueule et belles paroles) par le diablotin Méphisto. Le pouvoir de séduire vaut bien une petite damnation. Bataille dans les âmes, bataille dans le ciel : la lumière affronte les vapeurs malines ; l'homme affronte la fragmentation de son désir. Avec une invention visuelle constante, Murnau truffe ses plans de split-screen naturels et invente le cinéma-kaléidoscope : les miroirs y reflètent l'imaginaire, les fenêtres s'y ouvrent sur le rêve. Et Faust, enfin, découvre sa vraie nature, que le grotesque Méphisto ne réussit qu'à singer : l'amour vaut bien une petite damnation.

Faute à Voltaire (La)

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Réalisé par : Abdellatif Kechiche (1960 - )
En : 2000, France
Acteurs principaux : Sami Bouajila (1966 - ), Elodie Bouchez (1973 - )
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 130 mn, couleur

Critique perso :

Jallel est un étranger sans papiers à Paris. Un passager clandestin de la vie. Au début, il fait mine. D'être quelqu'un d'autre. Petits boulots, gros sacrifices. Il touche presque du doigt l'objet de son désir : une femme, un statut, des papiers, le gros lot. Presque. En fait, c'est là qu'il perd tout. Détour par la case hôpital psy, tout à refaire. Il n'a plus envie de rien mais ce sont les autres (surtout une autre) qui vont avoir envie de lui. Alors, c'est son corps qui va le reconquérir. Lui permettre de retrouver son équilibre au milieu du déséquilibre. De réapprendre à marcher, quoi. Jusqu'à ce qu'un jour, à la station de métro Nation on lui fasse comprendre qu'il n'est toujours pas le bienvenu... C'est un film du genre râpeux, pas cool, pas sympa, pas marrant. Pas feelgood du tout. Avec des scènes trop longues et quelques éclairs de fraternité cabossée. Un film de passager clandestin de la vie, comme tout le monde.

Roma - Fellini Roma

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1972, Italie
Acteurs principaux : Federico Fellini (1920 - 1993), Anna Magnani (1908 - 1973)
Genre(s) : jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 128 mn, couleur

Critique perso :

Pour faire le portrait d'une ville -surtout d'une capitale éternelle !- il faut commencer par la regarder de loin : de la province et de l'enfance. Après, on peut commencer à s'approcher, mais tout doucement et par des chemins détournés. En donnant des coups de sonde historiques (l'antiquité, la guerre, maintenant) et géographiques, verticalement (les sous-sols, les rues, les escaliers et les ascenceurs) et horizontalement (à pied, à cheval, en voiture... en métro et en moto, aussi). Ne pas oublier de montrer, surtout, que cette ville est en perpétuelle représentation d'elle-même, que le goût du spectacle traverse les époques et contamine aussi bien ses filles de joie que ses hommes de Dieu (ils sont fous ces romains !). Si tout y est, le résultat pourrait bien être génial.

Femme d'à côté (La)

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1981, France
Acteurs principaux : Fanny Ardant (1949 - ), Gérard Depardieu (1948 - )
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 106 mn, couleur

Critique perso :

"C'est une joie et une souffrance" qu'il disait dans "Le dernier métro". Des fois, c'est même pire... L'amour qui crame tout sur son passage, qui rend fou de joie et malade de jalousie, raide dingue et raide mort, en même temps, fatalement : c'est ce qu'a voulu filmer Truffaut, ici et ailleurs (mais encore plus ici). L'histoire : ils se sont connus, terriblement aimés et fuis il y a huit ans. Ils se sont mariés chacun de leur côté, ont retrouvé ce qui ressemblait à de la paix. Ils redeviennent voisins par hasard. Quand ils se croisent dans le parking souterrain d'un supermarché (ce qui sera aussi l'enfer selon Demy), ça repart direct, c'est too much. Les corps ont gagné, ils sont trop faibles. En Dieux de l'Olympe fréquentant les hôtels douteux, Gégé et Fanny sont plus que crédibles. Leur cadre de vie terriblement banal (la campagne de province) ne colle décidément pas avec l'exceptionnelle intensité de leurs sentiments. Leurs dialogues récapitulent toutes les étapes et tous les détails d'une passion : exceptionnelle à vivre, terriblement banale à dire. Tout sauf de la paix, mais qui a envie de paix (à part les grands cramés)...

Lady Vanishes (The) - Femme disparaît (Une)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1938, Angleterre
Acteurs principaux : Michael Redgrave (1908 - 1985), Googie Withers (1917 - 2011)
Genre(s) : les chocottes à zéro
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Ca commence du côté des Carpates, au pays des contes de fées qui font peur, dans un hôtel où une brochette d'occidentaux se retrouve coincés par la neige. Il y a là des demoiselles yankees, une mamie gâteau et quelques célibataires britanniques -entre autres. Que diable allaient-ils faire dans ces montagnes ? On n'en saura rien mais, un peu plus tard, ils se retrouvent dans un train. La mamie gâteau disparaît, non seulement du décor (pas si facile, il n'y en a que deux dans tout le film : l'hôtel et le train), mais de la tête de tous les passagers - tous sauf une, une yankee du genre têtue. Un grand jeu de piste commence alors sur le thême "à la recherche de la vieille dame tombée dans un trou de mémoire". Un jeu pour se regarder de derrière le miroir, un jeu pour avoir peur pour de rire.

Femme est une femme (Une)

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1961, France
Acteurs principaux : Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Jean-Claude Brialy (1933 - 2007), Marie Dubois (1937 - 2014), Anna Karina (1940 - ), Jeanne Moreau (1928 - 2017)
Genre(s) : Paris /en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Chez M. JLG, la femme est une femme est un petit animal charmant. Un peu pute, un peu conne, mais tellement charmante. Pour lui plaire, on a le droit de l'insulter un peu, mais gentiment. Elle a l'habitude. Pas fichue de faire correctement la cuisine, mais capable de répondre. Le seul vrai problème est que, cette conne, elle n'attend que de se faire épouser et d'avoir des enfants. En cas de refus du compagnon officiel, elle peut demander ça au premier voisin venu. J'vous jure, des fois. Et en chantant, s'il vous plait. Et on est heureux, et on rigole, et le monde est coloré et enchanté comme chez Jacquot. Des fois, M. JLG oublie un peu, ce con, que l'humour et la légèreté ne sont pas son fort. C'est un homme est un homme.

Woman under the Influence (A) - Femme sous influence (Une)

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Réalisé par : John Cassavetes (1929 - 1989)
En : 1974, USA
Acteurs principaux : Peter Falk (1927 - 2011), Gena Rowlands (1930 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 140 mn, couleur

Critique perso :

Voir un film de Cassavetes, c'est comme alller au cinéma pour la première fois : on n'a jamais vu ça, c'est comme dans la vie ! Le scénario n'est pas bien poli et lissé, les dialogues ont l'air improvisés (ils ne le sont pas toujours tant que ça), les scènes s'étirent au-delà du raisonnable. Il y a des gens devant nous, qui vivent et qui souffrent et ni eux ni le réalisateur n'ont l'air de savoir de quoi ils sont capables. A ce jeux-là, Gena Rowlands (la femme de Cassavetes) est la reine. Elle déborde de tendresse, elle en fait trop, elle est bouleversante, elle passe pour folle ; c'est notre voisine, notre cousine, notre soeur, c'est encore mieux et pire que dans la vie !

Frau im Mond - Femme sur la lune (La)

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1929, Allemagne
Genre(s) : c'était demain /conte de fées relooké /poésie en image
Caractéristiques : 163 mn, NB

Critique perso :

Hélius -autrement dit M. Soleil- rêve depuis longtemps d'un RDV avec la lune. D'autant plus, peut-être, que son vieux prof d'astronomie prétend que le sous-sol y regorge d'or... (de l'or sur la lune ? c'est vraiment n'importe quoi : depuis que Wallace y est allé, on sait bien qu'elle est en fromage !). L'histoire met un peu de temps à décoller, mais une fois le compte-à-rebours entâmé (le 1er de l'histoire de l'humanité), ça s'envole vraiment. Avec une femme -et quelques autres traîtres potentiels- à bord... Dans la fusée, et sur place, on s'attend sans arrêt à voir passer le capitaine Haddock et sa bande (ils étaient du même voyage pourtant, c'est sûr !). Alors, de l'or sur la lune ? Plein de pépites, en tous les cas...

Rear Window - Fenêtre sur cour

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : Grace Kelly (1929 - 1982), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

Le meurtre mode d'emploi selon sir Alfred. Jeff a la jambe cassé et le platre qui le démange. Alors, il fait comme tout le monde : il regarde par la fenêtre dans la cour de l'immeuble en face de chez lui. Et il voit tout -ou presque : les étapes de la vie, les saisons de l'amour, les heurs et malheurs des hommes. Le reste, quand son infirmière et sa fiancée lui en laissent l'occasion, il a tout le temps de l'imaginer (ça tombe bien : il a beaucoup d'imagination !). Hitchcock invente le thriller en pyjamas, le huis clos avec vue sur le monde, la tragédie humaine dans une maison de poupée -bref, il ré-invente (une fois de plus) le cinéma.

Festen

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Réalisé par : Thomas Vinterberg (1969 - )
En : 1998, Danemark
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

C'est la fête chez les grands bourgeois. Le patriarche a 60 ans, une gentille femme, de beaux enfants, une superbe demeure avec domestiques au sous-sol. Et, comme il se doit, de magnifiques secrêts honteux qui ne demandent qu'à sortir. C'est l'aîné, Christian, qui leur ouvre la porte. C'est les employés du sous-sol qui le soutiennent. C'est tous les autres qui se précipitent pour colmater. Alors bon, certes, la non-réaction des invités -pas très crédible, j'espère- sent la figuration bon marché. Alors aussi, la beaufferie du frangin -qui n'a même pas l'excuse d'être un faux-frère- est lestée à tous les métaux les plus lourds. En fait, les vidéos de famille des autres -surtout quand le petit cousin qui filme se prend pour un artiste- sont rarement supportables très longtemps. Sauf peut-être quand la famille elle-même est pire. Peut-être le seul film pour lequel le canular Dogme 95 méritait d'être inventé.

Limelight - Feux de la rampe (Les)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Claire Bloom (1931 - ), Charles Chaplin (1889 - 1977), Buster Keaton (1895 - 1966)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 141 mn, NB

Critique perso :

Pour un de ses avant-derniers tours de piste, Chaplin échange ses frusques de Charlot pour celles d'un certain Calvero et joue à se faire croire qu'il n'est plus qu'un tocard solitaire qui ne fait plus rire personne. Plus inquiétant encore : fidèle à son grand coeur, il sauve du suicide une charmante jeune fille, elle lui tombe dans les bras et voilà qu'il s'esquive pour laisser la place à un plus jeune (même pas plus drôle) que lui (qui pourrait même être son fils). Ca va vraiment mal pour les vieux drôles (Buster Keaton aussi, aurait besoin d'être sauvé du suicide). Le temps d'un avant-dernier tour de piste, jouons à croire qu'ils ne pourront plus jamais nous faire rire comme avant.

Luci del varietà - Feux du music-hall (Les)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1950, Italie
Acteurs principaux : Giulietta Masina (1920 - 1994)
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

En ce temps-là, le Maestro n'était qu'un apprenti. Il a fait l'assistant pour Rosselini, il a besoin de l'oublié Latuada pour oser co-signer son premier film qui déjà, pourtant, lui ressemble. Il y est question d'une troupe d'artistes de dernière catégorie : ceux des cabarets minables et des publics à rire gras. Il y a là un fakir, un bonimenteur et un chanteur de charme (d'ailleurs, ce sont les mêmes), de quelques playmettes plus ou moins affriolantes. Juste assez pour tout de même donner envie à une jeune première de se joindre à la troupe : une Eve du pauvre, en quête de gloire en polystyrène. Ses jambes retiennent l'attention du bellâtre vieillissant de la bande -pas sûr que ce soit une bonne pioche. Dans cette version méditerranéenne de La Nuit des forains, les OS du bastringue rament pour ne pas mourir de faim. Mais il n'est sans doute pas de plus grand maestro que celui qui met son grand art au service des plus merdiques de ses collègues.

Bride of Frankenstein - Fiancée de Frankenstein (La)

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Réalisé par : James Whale (1889 - 1957)
En : 1935, USA
Acteurs principaux : Colin Clive (1900 - 1937), Boris Karloff (1887 - 1969), Elsa Lanchester (1902 - 1986)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 75 mn, NB

Critique perso :

Pour commencer : ressuscitons Frankenstein. Pas de problème : il n'était pas mort, et Mary Shelley elle-même est appelée à la rescousse. Ensuite : introduisons un personnage nouveau : voici le mystérieux et inquiétant Dr. Pretorius, qui n'avoue qu'une faiblesse : l'alcool et les cigares (entre autres), et cultive des petits hommes dans des bocaux. Puis donnons quelques rudiments de langage et de théologie au monstre : le bien, le mal, d'où je viens, etc. Juste assez pour lui donner envie d'autre chose : une femme, par exemple... Les deux savants s'y emploient : il faut bien ça ! Il faut aussi un coeur frais et des cerf-volants par temps d'orage. Le résultat, qui présente un sérieux air de famille avec la génitrice de papier, est du plus bel effet pré-punk. Mais le monstre n'a pas l'air de lui plaire (pourtant, l'actrice était l'épouse de Charles Laughton : elle en avait vu d'autres !)... Le mythe continue, plus vivant que jamais.

Fiancée du pirate (La)

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Réalisé par : Nelly Kaplan (1931 - )
En : 1969, France
Acteurs principaux : Michel Constantin (1924 - 2003), Julien Guiomar (1928 - 2010), Bernadette Lafont (1938 - 2013), Jacques Marin (1919 - 2001), Claire Maurier (1929 - ), Jean Parédès (1914 - 1998)
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

Dans le village de Tellier (!!), on vit un peu comme au XIXème siècle. Il y a des notables, des proprios, des petits commerçants et des bouseux, organisés en régime quasi-féodal. Les hommes sont toujours fourrés au bistro, les femmes (à quelques exceptions près) quasi invisibles. Il y a même une sorcière qui vit avec sa fille et sa chèvre dans une cabane au fond des bois. Tout le monde les méprise et les exploite à mort, sous prétexte de ne pas les avoir dénoncées à la police quand elles ont débarqué. Mais quand la mère meurt dans l’indifférence générale, sa fille, revancharde, se met à changer d’attitude et de vie. La morale bourgeoise, elle s’en balance (et le chante (et le rechante)). Comme elle suscite toutes les convoitises, elle réaménage cosy sa bicoque et, faute de concurrence, impose ses tarifs. Elle ne tarde pas à bien tenir tous les mâles (et pas que) du canton par le bout de la queue, elle va pouvoir accomplir sa vengeance… Mi-Chabrol rural, mi-Maupassant relooké, c’est anar, gonflé, mal léché, féministe et réjouissant.

Fitzcarraldo

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Réalisé par : Werner Herzog (1942 - )
En : 1982, Allemagne
Acteurs principaux : Claudia Cardinale (1938 - ), Klaus Kinski (1926 - 1991)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pauvre espèce humaine /épique pas toc
Caractéristiques : 158 mn, couleur

Critique perso :

Pour mener à bien un projet grandiose et utopique (construire un opéra en pleine forêt amazonienne pour y faire venir Carruzo), Fitzcarraldo (Fitzgerald pour ses ancêtres) est amené à en réaliser un autre plus fou encore (faire passer un bateau à pieds secs par dessus une montagne). Il sera aidé et trahi par des jivaros qui ont, encore plus que lui, le sens du rêve et de l'effort inutile. Il y a là-dedans toute la poésie de la technique (si je n'y étais pas sensible, je ne serais jamais devenue ingénieure) et tout le panache de la quête chimérique (si je n'en avais pas le goût, je n'aurais jamais fait de recherche). Qu'est-ce que les cinéastes ne feraient pas pour arracher au monde des images que personne n'y avait vu avant eux..?!

Flor de mi secreto (La) - Fleur de mon secret (La)

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Réalisé par : Pedro Almodovar (1949 - )
En : 1995, Espagne
Acteurs principaux : Marisa Paredes (1946 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Leo est une encore belle femme presqu'en fleur, presque toujours au bord de la crise de larmes. Elle écrit des romans pour dames. Elle a aussi dans ses tiroirs le scénario d'un futur film d'Almodovar (cf. Volver), mais il n'est pas encore intéressé. Elle a aussi une maman, une soeur, une bonne et une copine qui, toutes, contribuent autant à son bonheur qu'à son malheur. Et quelques anges gardiens barbus. Comme les héroïnes de ses histoires, elle ne pense qu'à l'amour -surtout celui, parti on se sait où, de son mari. Comme les héroïnes de La Garçonnière ou de Casablanca, elle se trompe d'amour. En attendant d'enfin coïncider avec elle-même, elle se cache derrière ses lunettes, ses pseudos et ses mini-jupes. Magnifique portrait de femme en train de subir une greffe de personnalité, qui se bonifie avec les revoyures.

Anne of the Indies - Flibustière des Antilles (La)

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Réalisé par : Jacques Tourneur (1904 - 1977)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Louis Jourdan (1919 - 2015), Herbert Marshall (1890 - 1966), Jean Peters (1926 - 2000)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /pour petits et grands enfants /épique pas toc
Caractéristiques : 81 mn, couleur

Critique perso :

Le capitaine Providence est la terreur des navires anglais des mers du Sud. En fait, son petit nom, c'est Anne. Intrépide, cruelle, comme il sied à quelqu'un qui a été formé(e) à la meilleure école en piraterie du moment : celle de Barbe Noire. Et, effectivement, une petite dent contre les anglais. Donc, plutôt un a priori favorable à l'encontre des français. Ca se confirme lors de sa première rencontre avec un spécimen mâle de l'espèce : tout de suite, elle le fait fouetter torse nu. Mais bientôt, elle ne sait plus à quel genre se vouer. Après avoir embauché le beau frenchy, elle ne sait plus si elle doit convoiter un sabre ou une robe comme part de butin. Et ne sait plus non plus si elle doit faire confiance à son coeur ou à sa raison. Finalement, elle prouvera qu'elle en a (de la féminité) en surpassant tout le monde sur le créneau réservé aux femmes depuis la nuit des temps : le sacrifice. Anne, ma semblable, ma soeur Anne.

Trollflöjten - Flûte enchantée (la)

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1975, Suède
Genre(s) : conte de fées relooké /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 135 mn, couleur

Critique perso :

Dans une forêt, un chevalier errant et quelques nymphes, un oiseleur écolo. Une princesse prisonnière, ses parents qui se la disputent. On n'y comprend pas grand chose, sauf que chaque machino cherche sa machina, et que la vie est un grand mystère. Or, le mystère, ça se mérite. D'habitude, Bergman est asez fort pour se rendre la vie plus compliquée. Mais preuve est faite qu'il sait aussi, parfois, rendre l'exigence plus facile. Ici, tout paraît simple. Puisque l'histoire est à rêver debout, autant la laisser vivre là où elle est née : sur un plateau de théâtre. Avec accessoires bricolés et trucages d'amateurs. Avec rien que des copains dans la salle. Et que la magie ne vienne que par la musique.

Foolish Wives - Folies de femmes

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Réalisé par : Erich von Stroheim (1885 - 1957)
En : 1922, USA
Acteurs principaux : Erich von Stroheim (1885 - 1957)
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 117 mn, NB

Critique perso :

Un soit-disant comte russe (qui se fait appeler Karamazin) est en villégiature près de Monaco, avec deux soit-disant cousines aussi aristocrates que lui. Il s'intéresse de près à l'ambassadeur U.S. -et à son épouse. Et à quelques autres, plus ou moins friquées. Boutonné et galonné dans les règles, il a toujours l'air en campagne militaire, Karamazin. Et il a toujours quelques chose à tripoter dans les mains : une arme, une canne, un gland de rideau, une main de femmes. Il fait confiance à son charme, à son regard et à son destin. La folie des femmes, c'est de faire confiance aux hommes de son genre. Mais à Monaco, c'est assez souvent que rien ne va plus.

Cluny Brown - Folle ingénue (La)

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Réalisé par : Ernst Lubitsch (1892 - 1947)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : Sara Allgood (1879 - 1950), Charles Boyer (1899 - 1978), Jennifer Jones (1919 - 2009), Peter Lawford (1923 - 1984)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Ils ne pensent qu'à ça -mais n'en montrent jamais rien. Ils ne parlent que de ça -sans jamais rien en dire. C'est un peu comme les politiciens de cette époque, qui ne parlaient jamais de guerre non plus avec Hitler. De quoi est-il question, alors ? De tuyauterie, de bonnes manières. De ce qui se fait et ce qui ne se fait pas. Par exemple, qu'il n'est pas très correct pour une jeune fille de s'occuper de la plomberie. Et que si un homme ose s'intéresser aux domestiques, c'est qu'il a au moins l'excuse d'être un dissident tchèque. Et que rien d'intéressant n'arrive si on ne fait jamais rien de pas correct. On sent le maître qui sourit derrière chaque sous-entre-entendu, jubile derrière chaque geste subtilement incongru. Et cligne de ses yeux malins derrière les paupières de sa caméra.

Night and the City - Forbans de la nuit (Les)

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Réalisé par : Jules Dassin (1911 - 2008)
En : 1950, Angleterre
Acteurs principaux : Gene Tierney (1920 - 1991), Richard Widmark (1914 - 2008), Googie Withers (1917 - 2011)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 101 mn, NB

Critique perso :

Harry Fabian est un « artiste sans art », comme l’a bien compris son voisin (un vrai artiste, lui) : un artiste qui, pour accéder à la réussite, n’a toujours choisi que les chemins les plus courts, les raccourcis les plus risqués et les plus foireux. Harry Fabian, il a la bidouille toujours brillante, le ratage toujours flamboyant -bref, quand il demande, une fois de plus, de lui prêter de l’argent pour son dernier plan mirobolant, plus personne ne lui fait plus confiance depuis longtemps, même (et surtout) la (sainte) Mary qui (des fois) partage sa vie. Pourtant, cette fois, faut reconnaître qu’on aurait presque envie de lui donner raison, à Harry Fabian. Il a déniché le Dieu vieillissant de la lutte gréco-romaine et va, grâce à lui, organiser le combat de catch réglo (si ça existe) du siècle. Enfin, presque. Dans ce polar nocturne sans coup de feu, le noir et blanc et la profondeur de champ sont éblouissants. Du coup, les personnages ont souvent l’air de ne pas être à la même échelle : il y a ceux qui se camouflent, ceux qui se voient trop grand, ceux qui voudraient bien en rabaisser un(e) autre. Harry Fabian est de plus en plus traqué et cerné, mais sa dernière arnaque désespérée sera pour sauver son âme, à défaut d’autre chose…

Forrest Gump

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Réalisé par : Robert Zemeckis (1952 - )
En : 1994, USA
Acteurs principaux : Tom Hanks (1956 - ), Gary Sinise (1955 - ), Robin Wright Penn (1966 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 142 mn, couleur

Critique perso :

L'Amérique telle qu'elle voudrait qu'on la voie : pas fut-fut, mais la meilleure en tout. Forrest Gump en est la conscience claire. 75 de QI, né sous le signe du KKK (Naissance d'une nation), ça ne l'empêche pas d'habiter la maison d'Autant en emporte le vent, d'apprendre à Elvis à danser le rock, de serrer la main de 3 présidents de la république américaine (au moins, contrairement à l'innocent de Bienvenue Mr. Chance, il ne leur fait pas une grosse impression !), de survivre à Apocalypse Now, d'inspirer "imagine" à John Lennon, de déclencher le Watergate et d'inventer le jogging. Un ange, à défaut d'être un crac. Evidemment, il y a bien sa copine Jenny qui, elle, se coltine avec le côté obscur de la mémoire nationale (sex, drog and R&R façon Hair ou Georgia), mais c'est pour mieux s'en repentir à la fin. Réac et charmeur, brillant et énervant comme l'Amérique. Comme un imbécile heureux qui est né quelque part.

Petrified Forest (the) - Forêt pétrifiée (La)

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Réalisé par : Archie Mayo (1891 - 1968)
En : 1936, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Bette Davis (1908 - 1989), Leslie Howard (1893 - 1943)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 83 mn, NB

Critique perso :

Un écrivain-auto-stoppeur en panne de tout débarque dans une station-service au milieu de nulle part, y drague la fille du patron qui lit François Villon, sous le regard jaloux et menaçant du mécano-gros-bras, ancien champion de football. La situation est donc, dès le début, un rien théâtrale. Ca ne s'arrange pas avec l'arrivée d'un caïd en cavale qui prend tout le monde en otage. La nuit d'attente est donc consacrée à disserter sur les temps qui changent et le sens de la vie... Le caïd est jouée par un petit (plus si) jeune débutant (pas si) gros dur nommé Bogart. A part lui, ce sont les dialogues qui font tout le boulot. Rencontre improbable entre le mélo-intello et le film noir, les grands espaces déserts et le huis-clos claustro. Molasson, bavard, énervant, pas si mal.

Smultronstället - Fraises sauvages (Les)

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1957, Suède
Acteurs principaux : Bibi Andersson (1935 - ), Gunnar Björnstrand (1909 - 1986), Victor Sjöström (1879 - 1960), Ingrid Thulin (1926 - 2004), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

A 78 ans, Isaac Borg est devenu le type de grand professeur auquel j'espère bien ne jamais ressembler : sec, maniaque, arrogant par habitude. Aujourd'hui, à l'autre bout du pays, on lui fête son jubilée : 50 ans de bons et loyaux diagnostics médicaux. Pour se sentir encore jeune, sans doute, il fait un caprice, renonce à l'avion et part en voiture. Le temps de cette journée particulière, il rêve de ce qu'il est déjà devenu -un homme mort-, et imagine les souvenirs d'enfance qui ont échappé à sa mémoire. Sur la route, il remonte à l'envers le cours de sa vie. Il rencontre celui qu'il a été, la famille dont il est issu, celle qu'il n'a pas su fonder, les libertés qu'il n'a jamais osé prendre. Au bout du chemin, il a droit à sa médaille mais il sait, qu'en fait, il a été recalé à son certif de belle vie. Le bilan est impitoyable : c'est celui qu'un homme encore jeune fait à son avenir, et c'est encore plus troublant.

Frankenstein

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Réalisé par : James Whale (1889 - 1957)
En : 1931, USA
Acteurs principaux : Colin Clive (1900 - 1937), Boris Karloff (1887 - 1969)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 71 mn, NB

Critique perso :

Au lieu de se marier et de faire des enfants, comme tout le monde, Frank-E(i)nstein cherche à propager la vie par d'autres moyens. Avec un assistant qui est le frère jumeau de Casimodo, dans un labo (sans doute loué au Dr. Caligari) qui est pour toujours le prototype des endroits où se concoctent les secrets les plus inavouables de l'humanité, avec de l'audace et beaucoup d'éclairs il donne vie... à un mythe. Malgré un scénario rudimentaire qui lui laisse finalement assez peu de scènes, Boris Karloff se révèle aussi fort et fragile qu'on l'avait imaginé, à la hauteur du souvenir que nous n'avions pas encore de lui.

Freaks

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Réalisé par : Tod Browning (1882 - 1962)
En : 1932, USA
Acteurs principaux : Henry Victor (1892 - 1945)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 64 mn, NB

Critique perso :

Un freak, c'est un monstre de foire, un mauvais rêve sur pattes, de ceux qui font commerce de leur bizarrerie, de ceux qu'on paie pour voir. En général, c'est aussi un être humain, partageant la vie d'autres êtres humains -dans un cirque, par exemple. Donc, il sait aimer, il sait haïr. Pourtant, les amours du nain Phroso et de la trapéziste Venus, on les sent dès le début plutôt mal parties. Les vrais monstres de l'histoire, évidemment, ne sont pas ceux qu'on croit. Et il faudra forcer un peu la justice et le destin pour que Venus devienne ce qu'elle a toujours été : une poule... Un drôle de cirque d'éclopés, une drôle de société démocratique, qui proposerait un inventaire des états du corps. Un drôle de film drôle qui ne ressemble à aucun autre -c'est bien la moindre des choses.

Frida

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Réalisé par : Julie Taymor (1952 - )
En : 2002, USA
Acteurs principaux : Antonio Banderas (1960 - ), Salma Hayek (1966 - ), Alfred Molina (1953 - ), Edward Norton (1969 - ), Geoffrey Rush (1951 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 123 mn, couleur

Critique perso :

Peinture à l'hollywoodienne de la plus mexicaine des peintres. Frida Khalo est au Mexique ce que Diego Rivera fut un moment pour elle : une idole (après, elle l'a épousé). Sa vie est un roman, il n'y manque pas une touche de musique, pas une note de couleur, pas un parfum de mythe. Rockefeller, Breton et Trotsky font de la figuration, King Kong passe dans le décor. De la souffrance, de l'amour et encore de la souffrance. Le biopic est un peu épicé, mais pas trop. La douleur est sur l'écran, qui fait tout de même un peu écran à la douleur. Des petites tentatives timides pour mettre de la vie dans le tableau, en rendant vivants les tableaux. Mais ces toiles, pour ce qu'on peut en voir, gagnent fastoche le match de l'intensité dramatique avec la peinture hollywoodienne.

Play Misty for Me - Frisson dans la nuit (Un)

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Réalisé par : Clint Eastwood (1930 - )
En : 1971, USA
Acteurs principaux : Clint Eastwood (1930 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 97 mn, couleur

Critique perso :

DJ amateur de jazz, animateur de nuit sur la radio locale, Dave est la star de son bled. En Califormie, au bord de la mer, pas mal le bled (tellement que Clint en sera le maire, en plus d'en être la star, mais c'est pour plus tard...). Et, bien sûr, il les fait toutes craquer, facile. Il a bien une petite préférence pour Tobie, artiste quoique poupée Barbie blonde, mais elle est souvent absente. Alors quand Evelyn se présente, brune mais tout de même fan de première catégorie en mini-jupe, il ne se fait pas prier. Dommage, parce qu'Evelyn est aussi une harceleuse-schizo de première catégorie qui s'ignore (mais pas pour longtemps). Une vraie Norman Bates en mini-jupe. Jeune encore et déjà persécuté par les jolies femmes qui en veulent à sa virilité, le pauvre Clint ! Il résiste mais faut pas le chercher trop longtemps, quand même. Un bon film de genre avec une petite touche perso en plus (le jazz, filmé en direct dans un festival), facile.

Rebel Without a Cause - Fureur de vivre (La)

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Réalisé par : Nicholas Ray (1911 - 1979)
En : 1955, USA
Acteurs principaux : James Dean (1931 - 1955), Dennis Hopper (1936 - 2010), Natalie Wood (1938 - 1981)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

L'adolescent est un animal à sang chaud. Il aime errer là où il n'est pas censé aller, et faire exactement le contraire de ce que lui disent ses congénaires adultes. En famille, l'adolescent a une facheuse tendance à s'opposer à l'absence d'autorité de ses géniteurs. En fait, il n'est jamais content. L'adolescent est aussi un animal grégaire. En bandes, les individus s'enferment dans des carrosseries ou s'échangent leur blouson : c'est qu'ils sont en pleine mue et qu'ils n'ont pas encore reconstitué leur carapace. Dans la nature, l'adolescent a une espérance de vie limitée. C'est un animal perdu au milieu de l'univers qui n'a pas encore appris à s'en foutre. C'est un homme en entier qui n'a pas encore eu le temps de l'oublier.

Cat People - Féline (la)

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Réalisé par : Jacques Tourneur (1904 - 1977)
En : 1942, USA
Acteurs principaux : Simone Simon (1910 - 2005)
Genre(s) : New York - New York /conte de fées relooké /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 73 mn, NB

Critique perso :

Oliver Reed est architecte. il vit dans un monde où les traits sont tirés à la règle et où les angles filent droit. Irena Dubrovna a le crayon plus souple : elle est styliste pour dames. Elle s'entraîne à dessiner au zoo, devant la cage des panthères. Elle a des ancêtres venus d'Europe de l'est, ce qui explique sans doute son accent français et qu'on la sent capable de tout. Elle a du chien -enfin, plutôt du chat. Comme toutes les choses intéressantes, elle fait envie et elle fait peur. Elle a envie et elle a peur... A quoi rêvent les jeunes femmes ? A la panthère tapie en elles. Et aux hommes qui la réveilleront... Pour se rappeller que la naissance du frisson, c'est la caresse d'une griffe sur du velour.

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G


Yojimbo - Garde du corps (Le)

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Réalisé par : Akira Kurosawa (1910 - 1998)
En : 1961, Japon
Acteurs principaux : Toshirô Mifune (1920 - 1997), Takashi Shimura (1905 - 1982)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Sanjuro est un samouraï free-lance, pas empoté du manche. Il débarque dans un petit village de gaulois nippons, scindé entre le clan du fabriquant de saké, et celui du fabriquant de soie. Sanjuro n'est pas très en fonds, et pas empoté de la langue. Il se vend donc au plus offrant -c'est-à-dire aux deux camps. D'où, très vite : provocations, intimidations, menaces, préjudices, représailles contre préjudices, enlèvement contre représailles, contre-enlèvement contre retour de représailles. Eastern nouilles-sautées qui sera repris en western spaghetti (avec pas mal de ketchup). Et le type de l'autre coté de la caméra, il n'est pas non plus empoté du manche.

Garde à vue

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Réalisé par : Claude Miller (1942 - 2012)
En : 1981, France
Acteurs principaux : Guy Marchand (1937 - ), Romy Schneider (1938 - 1982), Michel Serrault (1928 - 2007), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 86 mn, couleur

Critique perso :

Bienvenue au réveillon du commissariat. Oui, il fait froid dehors. C'est glauque, c'est la province, quoi. Il ne manque rien, même pas le sapin de Noël à guirlandes. Le champagne, les petits fours et les noeuds papillons, c'est au rez-de-chaussée. Non, désolé, vous vous allez à l'étage, dans le bureau de l'inspecteur Gallien. Oui, c'est pour un interrogatoire. Oui, ça peut durer longtemps... Alors comme ça, vous êtes notaire de province. Et vous avez tué et violé deux petites filles... Non ? Peut-être ? Peut-être pas ? Comment ça, c'est la faute à votre dame !? Ca ne se dit pas, ces choses-là. Pas mal, la dame, d'ailleurs. Une belle silhouette de mante-religieuse. Et ça cause, et ça cause. Bon, ben moi je crois que je préfère aller me recoucher.

Boy with Green Hair (The) - Garçon aux cheveux verts (Le)

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Réalisé par : Joseph Losey (1909 - 1984)
En : 1948, USA
Acteurs principaux : Pat O'Brien (1899 - 1983), Dean Stockwell (1936 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 82 mn, couleur

Critique perso :

Un jeune garçon se souvient du matin où il a compris qu'il était unique et seul au monde. Et, accessoirement, orphelin de guerre. Du jour au lendemain, ses cheveux ont tourné au vert pomme. Déjà que la plupart des adultes ne lui inspiraient pas confiance ; là c'est la trahison générale. Il devient rebelle et pacifiste presque malgré lui : natural-born punk ! C'est une fable, bien sûr. Une histoire aux multiples entrées et à la morale ferme et claire. Un film simple et beau comme on n'ose plus en faire.

Apartment (The) - Garçonnière (La)

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1960, USA
Acteurs principaux : Jack Lemmon (1925 - 2001), Shirley MacLaine (1934 - ), Fred MacMurray (1908 - 1991), Ray Walston (1914 - 2001)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

Ca se passe dans l'immense immeuble d'une compagnie d'assurance new-yorkaise. Les chefs sont en haut, ils disposent de grands bureaux individuels et de plaques à leur nom. Les employés ordinaires sont en bas, ils travaillent côte à côte sur d'interminables files de bureaux anonymes. Le pouvoir, l'argent et l'arrogance sont réservés aux uns, l'exploitation et la servilité aux autres. Jack Lemmon incarne un petit employé des bas étages qui a l'espoir de sortir du rang parce qu'il daigne prêter son appartement à ceux d'en haut en mal de garçonnière discrète. Shirley Mac Laine est une fille d'ascenceur (social ?) courtisée par les hautes sphères. Ce sera dur de rapprocher ces deux-là parce que l'amour, aussi, est plutôt réservé aux étages supérieurs... Une comédie grinçante et amère qui est aussi une critique sévère de la corruption "à tous les étages" de la société. Jubilatoire, drôle et intelligent.

Gendarme de St Tropez (Le)

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Réalisé par : Jean Girault (1924 - 1982)
En : 1964, France
Acteurs principaux : Michel Galabru (1924 - 2016), Jean Lefebvre (1919 - 2004), Louis de Funès (1914 - 1983)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /nanar pur sucre /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 92 mn, NB/couleur

Critique perso :

Cruchot, un gendarme du terroir à la tagadactactique éprouvée, se voit confier, en récompense de ses zèlés services, un poste prestigieux dans la France d'en haut (mais en bas de la carte) : St Trop' ! Incorruptible, il refuse les pastis, organise des commandos contre les nudistes dans le seul but de leur coller une contravention (on se demande bien où) et réussit à ne pas croiser B.B. Bref, il multiplie les exploits et mérite toute notre estime. Point faible : une grande fifille de 20 ans qui se verrait bien, elle, héritière de milliardaire vogant sur son yatch. Il y a là-dedans du bricolage naïf, un parfum d'enfance et de sable chaud qui est comme un goutte à goutte de jouvence.

Genou de Claire (Le)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1970, France
Acteurs principaux : Jean-Claude Brialy (1933 - 2007), Fabrice Luchini (1951 - ), Béatrice Romand (1952 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Xavier se marie dans un mois : par amour raisonné ou raison amoureuse, c'est pas très clair. En attendant, il est en vacances au bord du lac de Genève, loin de sa fiancée mais tout près de charmantes voisines -dont une vieille copine écrivaine qui adore mettre en scène le désir des autres. Ils se racontent leurs histoires, ça leur donne envie d'en vivre. Et comme les voisines, bien que souvent en maillot de bain, se révèlent assez fuyantes, Xavier se fixe un objectif raisonnable : un genou. Par désir raisonné ou raison désirante, c'est pas très clair. Au jeu dont il est le héros, Xavier ne sait pas lui-même quel est son personnage. Mais quel genou !

Dead (The) - Gens de Dublin (Les)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1987, USA
Acteurs principaux : Angelica Huston (1951 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 79 mn, couleur

Critique perso :

Un soir de réveillon en bonne compagnie à Dublin, 1904. Des vieilles tata-gateaux, leur neveu chéri, raisonnable et éloquent, quelques artistes sur le retour, quelques jeunes gens plein d'avenir, quelques parasites. Et quelques fantômes. Dehors, il neige. Dedans, tout est en ordre. Chacun y va de sa petite performance, près du piano ou du whisky. Des conversations anodines, de la musique et du pudding. Rien. Dans cet océan de bienséance, errent pourtant les ombres blanches de passions endormies. De secrets du coeur qui affleurent, tels des icebergs à la dérive. D'autres vies possibles qui refont surface, après la fête. D'autres mondes, d'autres gens. Aux côtés des vivants déjà morts, il y a des morts bien vivants. Qui étaient cachés dans l'ombre, ce soir-là, pour ce réveillon en bonne compagnie à Dublin, en 1904.

Gigi

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Réalisé par : Vincente Minnelli (1903 - 1986)
En : 1958, USA
Acteurs principaux : Leslie Caron (1931 - ), Maurice Chevalier (1888 - 1972), Louis Jourdan (1919 - 2015)
Genre(s) : Paris /du Moyen-Age à 1914 /en avant la musique /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Bienvenue sur une planète étrange : Paris en 1900. Les autochtones y sont terriblement exotiques et raffinés -en un mot : français. Et ils cotoient une autre race encore plus mystérieuse : la française. Là, par exemple, dans ce petit appartement à l'intérieur purpurin, vivent 3 générations de cocottes -enfin, la dernière, Gigi n'a pas 17 ans, elle est encore en couveuse. Elle ne montre d'ailleurs pas beaucoup de dispositions naturelles pour l'affectation requise par son futur emploi, dont elle ignore encore a peu près tout. A coup de somptueux tableaux vivants (recyclés de My Fair Lady) et de chansons enjouées (idem), et en ayant l'air de ne pas y toucher, Minnelli tape fort là où ça va mal. Il montre la cruelle élégance d'une broyeuse de jeunes filles en gants blancs : la bonne société bourgeoise, cette grande mère maquerelle de si bonne compagnie.

Gilda

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Réalisé par : Charles Vidor (1900 - 1959)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : Glenn Ford (1916 - 2006), Rita Hayworth (1918 - 1987)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Un tripot clandestin mais chic dans une Argentine de pacotille : voilà pour le décor. Deux hommes qui fondent leur vie sur le jeu, une femme sublime et superstitieuse : voilà pour les personnages. Fric, mensonges et dialogues à triple fonds : voilà pour les moteurs de l'intrigue. Pas facile de mettre un nom sur les sentiments et les motivations des protagonistes, qui s'échangent des déclarations de haine enflammées. Mais quand, dans une scène mythique, Gilda retire langoureusement son gant en chantant aux grands garçons qui la regardent de s'en prendre à Mame, tout le monde retient son souffle. Un film qui serait comme la partie émergée d'un iceberg de pulsion troubles.

Ginger e Fred - Ginger et Fred

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1986, Italie
Acteurs principaux : Franco Fabrizi (1926 - 1995), Giulietta Masina (1920 - 1994), Marcello Mastroianni (1924 - 1996)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 125 mn, couleur

Critique perso :

Dans ses derniers films (et celui-ci est sans doute le premier de ses derniers films), Fellini combat son ennemi intime : la télé-Berlusconi (petit jeune plein de cheveux et d'avenir, à l'époque). Pour Noël, elle ratisse large, la TV : elle se transforme en fête foraine, en foire aux sosies, en marché aux héros et en Freaks en tout genre (bienvenue au pays des monstres gentils !). Au milieu d'eux : un vieux faux couple composé d'une ex-pseudo Ginger et d'un ancien simili Fred. Ils ont eu leur 1/4h de gloire avec leur show dansant, quand tout le monde savait encore à qui leur nom d'artiste faisait référence. Mais le monde petit écran n'est plus le leur. Il n'est pas non plus tout à fait le nôtre : les rues sont pleines de poubelles fumantes façon Soleil vert, il y a des télés dans toutes les pièces, conformément à la prédiction de Charly. Nous sommes dans une sorte de science fiction sauce bolognaise, un enfer pavé de publicités vulgaires. Le terreau puant est bien là ; les éclats de poésie qui y poussent aussi.

Girlfriend Experience (The)

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Réalisé par : Steven Soderbergh (1963 - )
En : 2009, USA
Acteurs principaux : Sasha Grey (1988 - )
Genre(s) : New York - New York /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 77 mn, couleur

Critique perso :

Chelsea est une girlfriend à vendre, une call-girl, une vraie pro haut de gamme. Evidemment, c'est une professionnelle du sexe mais elle ne traite qu'avec des clients qui ont les moyens de croire qu'ils lui achètent surtout du temps et de la présence, et que ce n'est pas (que) leur argent qui compte. Tout est une question de prix. Son vrai boyfriend à elle s'appelle Chris, il vend de la gonflette dans une salle de sport. On le voit négocier ses services et ses produits ; lui aussi s'y connaît sur le prix de la beauté, en version mecs. Ils se sont trouvés, c'est-à-dire visiblement évalués au même niveau sur l'échelle économique du capitalisme du look. Un bon investissement mutuel, tout est under control dans le meilleur des mondes modernes (impersonnels et glaçants) possible. Enfin presque...

Girls (Les)

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Réalisé par : George Cukor (1899 - 1983)
En : 1957, USA
Acteurs principaux : Taina Elg (1931 - ), Mitzi Gaynor (1931 - ), Gene Kelly (1912 - 1996), Kay Kendall (1926 - 1959)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 114 mn, couleur

Critique perso :

Encore un scandale, encore un procès dont Londres est le théâtre. Personne n'est mort, mais il s'en est fallu de peu. Il s'agit de savoir qui, des trois girls de Barry, dit la vérité. Ensemble, ils ont dansé sur les scènes de tous les cabarets d'Europe. Mais laquelle des trois avait sa préférence, qui était la chouchoute secrète ? Bien sûr, c'était la française libérée, sa très intime partenaire de répétitions qui s'éternisaient. Evidemment, c'était l'anglaise portée sur la bouteille, qui connaissait ses manies de très très près. Of course, c'était la discrète américaine intello-bio, grande consommatrice de fruits et légumes. Trois visions de l'amour, trois versions de la vie (mais on ne saura jamais qui a gardé la montre). Un Rashômon glamour et rigolo qui ne sème le doute que pour récolter le tempo.

Glaneurs et la glaneuse (Les)

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 2000, France
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /en France profonde
Caractéristiques : 82 mn, couleur

Critique perso :

De l'humble geste de ramasser par terre ce que l'économie ou la société y a laissé, Agnès Varda fait un petit docu à la première personne, modeste et lumineux. Elle va à la rencontre des pros de la récup', des rois du recyclage. Ceux pour qui c'est une question de survie, ceux pour qui c'est un jeu, un défi ou une morale. Des Sans toit ni loi, des artistes et des militants "100% poubelle" qui n'ont pas peur de se salir les mains. Elle montre aussi ceux qui ont montré avant elle ce geste éternel : les peintres, surtout. Et elle se peint elle-même en pièces détachées, à la DV : ses mains tâchetées par le temps (comme celles de son cher Jacquot), son beau visage de vieille dame. Là où on ne s'y attendait pas, l'esthétique et l'éthique se mélangent. Un bonus, des boni, du bonheur. Rien à jeter.

Gloria

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Réalisé par : John Cassavetes (1929 - 1989)
En : 1980, USA
Acteurs principaux : Gena Rowlands (1930 - )
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 123 mn, couleur

Critique perso :

Gloria a laissé passer la sienne depuis longtemps. Elle habite New York, un immeuble mal fréquenté. Justement, un de ses voisins pas clairs reçoit une visite pas sympa du tout, et la voilà qui recueille malgré elle le gamin de la famille, seul rescapé d'une pétarade. Elle le kidnappe, à moins que ce ne soit le contraire. Elle le perd, le retrouve, l'oublie, le protège, le lache, elle fait n'importe quoi. Faut dire, le petit est un mafioso en miniature, sentimental et macho à l'italiennne. Insuportable bien sûr, mais c'est pas une raison pour se faire tirer dessus. Elle, c'est une grande larguée qui ne sait plus ce qu'elle veut depuis longtemps, ni ce qu'elle vaut ni ce qu'elle a. Insuportable aussi, mais c'est pas une raison pour tirer sur tout le monde. Le film, c'est un road movie qui tourne en rond, imprévisible, flamboyant et mal foutu. C'est pas une raison pour le manquer.

Gosford Park

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Réalisé par : Robert Altman (1925 - 2006)
En : 2001, USA
Acteurs principaux : Alan Bates (1934 - 2003), Helen Mirren (1945 - ), Kristin Scott Thomas (1960 - ), Maggie Smith (1934 - ), Emily Watson (1967 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 137 mn, couleur

Critique perso :

Les voitures sont de 1930, le manoir et ses meubles sont victoriens, ses occupants le temps d'un week-end de la plus haute lignée du genre homo britannicus. Il y a une armée de domestiques, aussi, mais à l'étage au dessous. Les infos, les services, les frustrations et les désirs circulent dans tous les couloirs et tous les escaliers, de bouche à bouche et de mains en mains, de haut en bas et de bas en haut. Ca mange et ça parle, aussi. Le maître de céans a tellement d'ennemis dans la place qu'il réussit à se faire assassiner plusieurs fois... On dirait parfois le script de La Règle du jeu rewrité par Agatha Christie. A d'autres, c'est un ballet de marionnettes en maison de poupées grandeur nature. Tout le temps, c'est une caméra en liberté dans une prison dorée.

Goto, l'île d'amour

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Réalisé par : Walerian Borowczyk (1923 - 2006)
En : 1968, France
Acteurs principaux : Ligia Branice (1932 - ), Pierre Brasseur (1905 - 1972), Ginette Leclerc (1912 - 1992)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 93 mn, NB/couleur

Critique perso :

Attention aux faux amis : ce Walerian-là ne va pas dans l’espace et son île d’amour n’est pas aussi sexy que certaines des autres oeuvres qu’il fera plus tard. Là, c’est plutôt du film politico-anar en mode bricolo conceptuel, fauché mais jamais en manque d’idées. Dans l’île, donc, règne un dictateur-de-père-en-fils méfiant, jaloux, cocu (de-père-en-fils aussi, sans doute) et très bête. Ca s’est déjà vu ailleurs. Les moeurs y sont étranges et rudes. On suit la destiné de quelques autochtones : le roi, la reine, son cher maître d’équitation, quelques écoliers étourdis et un ex-bagnard ambitieux. Celui-là a été gracié de justesse d’une mort funeste, et il escalade rapidement les barreaux de l’échelle sociale par son ingéniosité en pièges à mouches. Ca, c’est nettement moins banal. En fait, les dictatures, c’est des endroits où tout peut arriver. Dans les films de Boro aussi, mais c’est plus amusant à vivre.

Goupi mains rouges

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Réalisé par : Jacques Becker (1906 - 1960)
En : 1943, France
Acteurs principaux : Blanchette Brunoy (1918 - 2005), Robert Le Vigan (1900 - 1972), Fernand Ledoux (1897 - 1993), Maurice Schutz (1866 - 1955), Louis Seigner (1903 - 1991)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 104 mn, NB

Critique perso :

Dans la famille Goupi, il y a beaucoup de monde et ils habitent tous sous le même toit. Quatre générations, plus ou moins entremêlées et consanguines. Une famille-souche, du genre qui sera pas facile à déraciner. Le plus ancien, c’est Goupi-L’empereur, plus que centenaire, que les autres respectent surtout parce qu’il n’a pas encore révélé où il a planqué son magot. Ce qui intéresse particulièrement Goupi-Mes-sous, qui s’occupe de la compta. Goupi-Monsieur, c’est celui qui vient de débarquer du train, après avoir fait sa vie à Paris. A côté, les surnoms sont parfois distribués bizarrement. Goupi-tisane est une teigne qui ne contribue pas des masse à apaiser les conflits. Et Goupi mains rouges n’est pas forcément celui qui a le plus de sang sur les mains… Parce que pour révéler encore un peu mieux les caractères, rien ne vaut un petit meurtre de derrière les fagots. Tout ça fait le portrait d’une espèce de vestige de l’ancien régime au coeur des campagnes, une archéologie des français bien de chez nous, pieds dans la boue et yeux dans le ciel.

Ta'm e guilass - Goût de la cerise (Le)

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Réalisé par : Abbas Kiarostami (1940 - 2016)
En : 1997, Iran
Genre(s) : culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Il est au volant de sa voiture, il a de grands yeux inquiets qui font un peu peur, il cherche un homme à embarquer. Un homme solitaire qui aurait besoin d'argent facile. Non non, pas pour ça. Pour un service très bien rémunéré. Honnête, mais qui demande un peu de courage d'âme. Un service existentiel, métaphysique, un service d'homme libre. Mais c'est pas facile à trouver, à Téhéran, un homme libre. Il faut remuer ciel et terre pour réussir à trouver quelqu'un qui accepterait de remuer un peu de ciel et de terre. D'abord, il ne récupère que des gamins. Un apprenti soldat, un séminariste débutant, pour qui ce service n'est visiblement pas au programme de leurs études. Et puis, il rencontre un homme, un homme vrai. Et puis, et puis... Après pas mal de virages en formes de point d'interrogation, on aboutit à une fin indécidable. Comme la vie, quoi.

Goût des autres (Le)

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Réalisé par : Agnès Jaoui (1964 - )
En : 2000, France
Acteurs principaux : Anne Alvaro (1951 - ), Jean-Pierre Bacri (1951 - ), Alain Chabat (1958 - ), Agnès Jaoui (1964 - ), Gérard Lanvin (1950 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

Les préjugés, aveuglements et petites intolérances sans conséquences sont les défauts du monde les mieux partagés, et n'épargnent ni les chefs d'entreprise ni les artistes. C'est sur cette idée simple qu'Agnès Jaoui a bâti son film en prenant soin -ce qui est beaucoup moins simple- de donner sa chance à chacun de ses personnages. Et ils sont nombreux, les personnages ! Tout un microcosme, et quelques lieux clés (un café, une entreprise) où les identités sociales se croisent à défaut de se rencontrer. Il faut des agents doubles (une actrice prof d'anglais pour arrondir ses fins de mois, un ancien flic garde du corps) et un peu d'art aussi (la peinture, le théâtre) pour briser l'étanchéité des univers où chacun évolue. Des rôles taillés sur mesure dans un scénario de haute couture : de la belle et réjouissante ouvrage !

Grand Hotel - Grand Hôtel

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Réalisé par : Edmund Goulding (1891 - 1959)
En : 1932, USA
Acteurs principaux : Lionel Barrymore (1878 - 1954), John Barrymore (1882 - 1942), Joan Crawford (1904 - 1977), Greta Garbo (1905 - 1990)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

Sans doute le premier film choral de l'histoire du cinéma. Décor idéal : le Grand Hôtel de Berlin, son grand hall circulaire, sa porte en tambour, ses sept étages en cercles concentriques. Tout tourne, comme le destin. C'est là qu'échouent toutes les élites financières et artistiques de la ville. Où débarquent aussi tous les jaloux qui ont échoué à en faire partie ou à s'y maintenir. Ou qui en rêvent. Rien que des grands cabotins de leur vie qui font des drames à tous les étages, comme il se doit (d'autant que les stars doivent rentabiliser le peu de temps d'écran qui leur est alloué). Le temps de quelques jours, ils vont donc s'échanger le peu qu'ils n'ont déjà plus vraiment : un peu d'argent, un peu d'amour, un peu de vie (un peu de gloire ?). En le criant un peu fort sur les tréteaux -pardon, le plancher- tout de même. Pas mal, pour l'époque. Mais où sont les blockbusters d'antan ?

Big Sleep (The) - Grand sommeil (Le)

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : Lauren Bacall (1924 - 2014), Humphrey Bogart (1899 - 1957), Elisha Cook Jr. (1903 - 1995), Dorothy Malone (1925 - 2018)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 116 mn, NB

Critique perso :

Le détective privé Philip Marlowe est un peu le grand frère de Sam Spade. Pour les cinéphiles, il aura à jamais le même visage : celui de Bogart en majesté, imperméable, chapeau mou, cigarette et ironie toujours au bord des lèvres. Notre homme se voit ici proposer par un vieillard impotent de démèler une affaire de chantage dans laquelle une de ses filles est impliquée. L'autre fille, c'est Lauren Bacall. Le jeu du chat et de la souris peut commencer. Quelques cadavres plus tard, l'histoire d'amour a un peu progressé mais l'affaire est toujours aussi obscure. Une anecdote célèbre (sans doute bidon) rapporte que ni le réalisateur ni les scénaristes (parmi lesquels William Faulkner himself) n'étaient capables de dire, au bout du compte, qui avait tué le chauffeur. Qu'importe ! L'atmosphère somnambulique est de celles qui font veiller très tard.

Grande illusion (La)

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1937, France
Acteurs principaux : Julien Carette (1897 - 1966), Marcel Dalio (1900 - 1983), Jean Dasté (1904 - 1994), Pierre Fresnay (1897 - 1975), Jean Gabin (1904 - 1976), Dita Parlo (1906 - 1971), Erich von Stroheim (1885 - 1957)
Genre(s) : pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /épique pas toc
Caractéristiques : 114 mn, NB

Critique perso :

Pour dénoncer la guerre, Renoir a eu une intuition géniale : plutôt que de montrer une boucherie, il montre au contraire des soldats plus grands que la barbarie, des hommes qui ont su le rester, malgré tout. Ils sont aussi bien français qu'allemands, d'ailleurs. Et les batailles, d'ailleurs, sont toujours hors champs puisqu'on reste loin du front, dans un camp de prisonniers de la Grande Guerre. L'occasion de mener une grande enquête sur ce qui réunit et sépare vraiment les hommes. Et aussi sur le passage du XIXème au XXème siècle, quand même les gentilhommes d'antant se mettent à devenir républicains. Un monde en miniature, un changement de civilisation en condensé : parfois, le cinéma sait voir loin et grand...

Grande vadrouille (La)

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Réalisé par : Gérard Oury (1919 - 2006)
En : 1966, France
Acteurs principaux : Bourvil (1917 - 1970), Marie Dubois (1937 - 2014), Louis de Funès (1914 - 1983)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 132 mn, couleur

Critique perso :

Faut vraiment pas avoir regardé la télé depuis de longues années pour avoir envie d'acheter le DVD de la Grande vadrouille. C'est mon cas. Et, après 20 ans d'abstinence de ce film, je peux le dire : c'est vraiment drôle ! Qu'il passe là-dedans plein de clichés franchouillards sur l'homosexualité supposée des anglais ou le goût de l'ordre des allemands, ça ne fait aucun doute. Que son succès s'explique en partie parce qu'il a contribué à réconcilier la génération de mes parents et grands-parents avec leurs souvenirs de guerre peu glorieux, c'est fort possible. Cela n'enlève rien au plaisir de voir les grands duellistes comiques du cinéma française, dans leur numéro sado-maso favori, transformer chaque scène en sketch. Grâce à eux, un film sympathique se transforme en icône nationale.

Stachka - Grève (La)

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1925, Russie
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /vive la (critique) sociale ! /épique pas toc
Caractéristiques : 82 mn, NB

Critique perso :

Historiquement, le premier film du Grand Russe, une histoire de grève ouvrière. Les personnages : des prolétaires très pauvres et très opprimés, des capitalistes vieux, adipeux et suffisants, des mouchards qui ont des têtes de mouchards, des policiers qui n'en ont pas (de têtes), des enfants et des gueux, des machines et des chevaux. Le décor : une usine, des bureaux, des cités, des grands espaces, des têtes. C'est qu'on n'est pas dans une grève à la mode piquet : plutôt le grand air, le grand vent, des masses qui se rentrent dedans, un bouillonnement d'idées, un flot de trognes et de corps. Des cercles et des lignes droites qui bougent, s'affrontent, comme mus par une énergie animale : ce Grand Russe-là est un Kandinski du réel.

Star Wars: Episode IV, A New Hope - Guerre des étoiles (La)

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Réalisé par : George Lucas (1944 - )
En : 1977, USA
Acteurs principaux : Carrie Fisher (1956 - 2016), Harrison Ford (1942 - ), Alec Guinness (1914 - 2000), Mark Hamill (1951 - )
Genre(s) : c'était demain /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /pour petits et grands enfants /épique pas toc
Caractéristiques : 125 mn, couleur

Critique perso :

Une princesse sequestrée par un grand méchant loup (RDV dans Le Retour du Jedi pour comprendre qui c'est) envoie, à défaut de bouteille à la mer, un droïde dans l'espace. Un jeune et gentil fermier du désert le récupère. Pour sauver la princesse, il devra se faire chevalier, suivre les enseignements d'un grand maître et parcourir un long chemin initiatique... Effectivement, ça se passe bien il y a très très longtemps, dans tous les livres d'images de tous les enfants du système solaire, relookés par Metropolis, Casablanca, 2001, Kurosawa et pas mal de westerns. Je saute un peu les étapes mais, à la fin, une fois la princesse récupérée, le postulant chevalier se retrouve dans un bolide volant avec une nuée de confrères, qui ne pensent tous qu'à envoyer un petit coup de feu bien placé dans une espèce de grosse ovule noire. Sacré Lucas ! Un peu plus et on n'y aurait vu que du feu (mais quel feu !).

Guerre du feu (La)

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Réalisé par : Jean-Jacques Annaud (1943 - )
En : 1981, France
Acteurs principaux : Ron Perlman (1950 - )
Genre(s) : pauvre espèce humaine /à l'antique
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

A l'aube de l'humanité, différentes tribus de bipèdes s'étripent sauvagement pour des trucs idiots : une énergie qui réchauffe, un bout de territoire. Le feu s'éteint, et c'est la crise. C'est ce que subit le groupe de notre héros, un grand genre suédois, mais en moins bien peigné. Il est envoyé en reconnaissance avec deux autres barbus. Lors de sa mission, il aura l'occasion de faire des rencontres intéressantes : à défaut de monolithe, il y a d'autres bipèdes, et des animaux plus ou moins sympathiques (les éléphants sont très bien dans le rôle des mamouths). Il croise aussi une charmante femelle au maquillage corporel bouse-cendre toujours impeccable. Elle vient d'une tribu nettement plus avancée que la sienne, puisqu'elle a déjà inventé le rire et la position du missionnaire. Plutôt accueillante, la tribu : elle pratique l'hospitalité comme, un peu plus tard, les indiens de Little Big Man. On comprend tout sans un seul sous-titre. A l'aube de l'humanité, les hommes étaient déjà des hommes.

Gattopardo (Il) - Guépard (Le)

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Réalisé par : Luchino Visconti (1906 - 1976)
En : 1963, Italie
Acteurs principaux : Claudia Cardinale (1938 - ), Alain Delon (1935 - ), Burt Lancaster (1913 - 1994), Serge Reggiani (1922 - 2004)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914
Caractéristiques : 205 mn, couleur

Critique perso :

Ce film, c'est un peu le Autant en emporte le vent sicilien -en bien mieux ! C'est l'histoire de l'unification italienne vue du côté des perdants : dépassés mais fiers, lucides, désabusés. Aristocrates toujours. De ceux qui ont tout compris de l'âme de leur terre ancestrale, et qui savent anticiper son destin. Qui acceptent de "changer pour que rien ne change". Burt Lancaster est chargé d'incarner la noblesse à lui tout seul. Surprise : il passe à l'aise des dilligences du far ouest aux coupés princiers. Il pose un regard perçant de patriarche sur sa tribu familiale, sur ses pairs en pleine perdition, sur les nouvelles élites en pleine ascencion. On le suit volontiers jusqu'à son dernier bal (50mn, le dernier bal) tant la fresque est somptueuse.

Giant - Géant

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Réalisé par : George Stevens (1904 - 1975)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : Carroll Baker (1931 - ), James Dean (1931 - 1955), Rock Hudson (1925 - 1985), Mercedes McCambridge (1916 - 2004), Elizabeth Taylor (1932 - 2011), Rod Taylor (1930 - 2015)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 293 mn, couleur

Critique perso :

Une grande saga familiale qui voudrait, sans doute, être pour le Texas du XXème siècle ce que fut Autant en emporte le vent pour la Georgie du XIXème. 30 ans de vie commune, donc, pour Jordan, son plat pays et ses miliers de vaches, et Leslie, recrutée à Washington, un seul cheval mais de beaux yeux. Dans le rôle du méchant (successivement) : une belle soeur, quelques bons vieux préjugés racistes ou machistes, le temps qui passe... Dans le rôle, plus inattendu, de l'autre qui dérange (un peu), un marginal parvenu qui mettra 30 ans à comprendre que l'argent ne fait pas le bonheur. James Dean, de toute façon, joue dans un autre film. La civilisation vient de l'Est, et des femmes. Pour la richesse, descendez au sous-sol. Ca lorgne pas mal du côté de Douglas Sirk (surtout Ecrit sur du vent et Imitation of Life) mais ça préfigure surtout Dallas (le feuilleton).

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H


Hana-bi

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Réalisé par : Takeshi Kitano (1947 - )
En : 1997, Japon
Acteurs principaux : Takeshi Kitano (1947 - ), Susumu Terajima (1963 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /vers le soleil levant
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Nishi est un flic taciturne, plus à l'aise avec les coups qu'avec les mots (2 lignes de dialogue dans tout le film) et plus habile avec les yakusas qu'avec les sentiments (2 secondes de sourire dans tout le film). A la suite d'une négligence, il envoie toute son unité à l'hôpital et démissionne de la police. C'est alors qu'il se voit confier la mission la plus difficile de sa carrière : distraire sa femme, à qui il ne reste que quelques mois à vivre. Alors, il règle ses derniers comptes et entame un road movie vers nulle part, mais au bord de la mer -lieu de tous les sursis chez Kitano. Dans ce monde-là, on ne cause pas (Monsieur), on ne pleure pas. On joue, on fuit, ce qui revient au même. Les hommes sont des handicapés, des empotés du coeur. Des convalescents en exil d'eux-mêmes, des jolies fleurs dans des peaux de bête, des tournesols à l'ombre. Dans ce monde-là, les humains ont la nostalgie de l'avoir été.

Hannah and her Sisters - Hannah et ses soeurs

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1986, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Michael Caine (1933 - ), Mia Farrow (1945 - ), Carrie Fisher (1956 - 2016), Barbara Hershey (1948 - ), Fred Melamed (1956 - ), Maureen O'Sullivan (1911 - 1998), Dianne Wiest (1948 - ), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Trois soeurs : la première joue au théâtre, la deuxième se cherche, la troisième se shoote (enfin, c'est du passé). Deux hommes (et même un peu plus) qui passent de l'une à l'autre : les veinards, ils ont l'ambarras du choix ! Deux années qui s'écoulent et Thanksgiving qui reste. Assez pour changer d'avis, décider de partir ou de revenir. Assez pour se poser pas mal de questions sur l'amour, la mort, la fraternité et la réussite d'une vie, par exemple. Un entrelacs de destins, de souvenirs, d'espoirs, toute la palette des sentiments. Et, pour les parcourir, toute la palette de la technique : voix off, flashs-back, montage virtuose, fantasmes et réalité qui se mèlent. New York : dedans (appartements bourgeois, loft d'artiste, librairie, restaurants, hôtels, hôpital), dehors (immeubles, parcs, baie) et la Soupe au canard... Mais comment c'est possible de mettre autant de choses dans un seul film !

Chun gwong cha sit - Happy Together

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 1997, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Chen Chang (1976 - ), Leslie Cheung (1956 - 2003), Tony Leung Chiu Wai (1962 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 96 mn, NB/couleur

Critique perso :

Dans tous les couples, disait Gainsbourg (ou un autre), il y en a un qui s'ennuit, et un qui souffre. Ho s'ennuit, Lai souffre. Leur quotidien est immuable et toujours changeant : ils s'aiment, s'engueulent, se quittent, se retrouvent, se trahissent. De temps en temps, ils repartent à zéro. En général, c'est pour arriver nulle part. Sans doute qu'ils ne vieilliront pas (heureux) ensemble. Gays asiatiques au pays du tango, ils sont doublement en exil, doublement aux antipodes. Habitués, comme tous les personnages de Wong, à être en même temps ici et ailleurs, à vivre en mode décalé. De l'autre côté du monde et désynchronisés. Même si l'envers du miroir, et de Hong Kong, ressemble furieusement à son endroit.

Werckmeister harmoniak - Harmonies Werckmeister

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Réalisé par : Béla Tarr (1955 - )
En : 2000, Hongrie
Acteurs principaux : Lars Rudolph (1966 - ), Hanna Schygulla (1943 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /poésie en image
Caractéristiques : 145 mn, NB

Critique perso :

Quand Jonas -pardon, Janos- se retrouve nez à nez et oeil à oeil avec une baleine empaillée, on se dit que ce sont des retrouvailles entre deux très très vieux amis. Il ne parle pas beaucoup, ce Janos, mais il porte le courrier. Au café, il fait jouer à des ivrognes le ballet du système solaire et la mécanique céleste des éclipses. Il appelle tous ceux qu'il croise "oncle" ou "tante", même ce vieil érudit qui mène, seul, des recherches sur l'harmonie oubliée du monde. Janos, c'est le fils du frère des hommes, un ange porteur de messages vides, le prophète sans parole d'un monde qui a perdu à jamais sa lumière. Le "prince" ("de ce monde", sans doute) a gagné la bataille. Dieu est mort et empaillé, il pue déjà. Un film extraodinaire, uniquement composé de 12 plans-séquences somptueux (de 12 minutes chacun...), sombre et beau comme un évangile d'après l'Apocalypse.

Hellboy

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Réalisé par : Guillermo del Toro (1964 - )
En : 2004, USA
Acteurs principaux : Selma Blair (1972 - ), Rupert Evans (1976 - ), John Hurt (1940 - 2017), Ron Perlman (1950 - )
Genre(s) : c'était demain /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 122 mn, couleur

Critique perso :

Hellboy, comme son nom l’indique, est un petit démon apprivoisé. Il est tout rouge, avec un bras (mais pas un coeur) de pierre et une tête de cochon (au sens figuré, principalement). Né d’une expérimentation à haut risque à la fin de la 2ème guerre mondiale (les nazis espéraient en faire leur arme de destruction massive de la dernière chance), il a été sauvé par un gentil savant américain qui a fait le pari de l’élever au service de la Démocratie. Depuis, tous les matins, il se ponce soigneusement les cornes, en compagnie de quelques autres monstres élevés dans un bunker ultra-secret pour servir le Bien en toute discrétion -enfin quand ça reste possible. Alors, quand la momie de Raspoutine réveille un sinistre zombi nazi (ne m’en demandez pas plus, j’ai pas tout compris), c’est les monstres gentils qui s’y collent. Si sa métaphysique de l’inné et de l’acquis manque un peu de subtilité, ce film de super-héros pas comme les autres a tout ce qu’il faut en matière de punch et d’invention plastique. Et d’humour.

Histoire d'Adèle H. (L')

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1975, France
Acteurs principaux : Isabelle Adjani (1955 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 96 mn, couleur

Critique perso :

Elle est amoureuse, fauchée, en fuite de chez papa-maman. Elle écrit, elle écrit, elle écrit. La demoiselle a de qui tenir. Papa est le plus grand écrivain de l'univers et elle a, semble-t-il, pris un peu trop au sérieux ses leçons de romantisme. Aimer une fois pour toute, s'abandonner à en mourir : il l'a rêvé, elle l'a fait. Son plus beau roman à lui est aussi sa fifille la plus cinglée. Les plus désespérés sont les chants les plus beaux (non, ça c'est pas de lui). Mais tout ça ne fait pas nécessairement le scénario le plus palpitant de l'univers : trop monotone pour étonner, trop cheap pour emballer. Isabelle se démène bien mais pour elle, la folie est un minimum syndical. Pour elle, sans doute que Truffaut était aussi prêt à tout mais ça ne suffit pas à faire le plus beau film de l'univers.

Histoires Extraordinaires

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Réalisé par : film à sketchs
En : 1968, France
Acteurs principaux : Brigitte Bardot (1934 - ), Alain Delon (1935 - ), Anny Duperey (1947 - ), Jane Fonda (1937 - ), Peter Fonda (1940 - ), Terence Stamp (1939 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /du Moyen-Age à 1914 /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 121 mn, couleur

Critique perso :

Un film en trois parties comme ça se faisait beaucoup à l'époque, trois coups de Poe, trois histoires de dandys décadents qui finissent en tragédie plus ou moins grandiloquente, par trois plus/moins grands cinéastes. Le premier sketch, de Roger Vadim, verse dans le porno-soft et kitsch. C'est un pre-Barbarella pas drôle qui se situerait au Moyen-Age, avec chatelaine perverse et beau brun ténébreux de voisin (tiens, n'est-ce pas donc son frère ? plus ou moins...). La contribution de Louis Malle est plus torturée. Elle porte le sérieux hautain et orgueilleux de son Delon de héros -en double exemplaire s'il vous plait- (et la Bardot en prime !). Comme il doit beaucoup courir, et dans des lieux sublimes en plus, il est souvent essoufflé et ça lui évite de dire trop de conneries. Quant au segment du Maestro : total respect ! Cette fois, on change vraiment de monde, on est passé de l'autre côté du rideau de fumée (de la gloire, et des rêves), on est à la fois dans le paradis du cinéma et dans l'enfer du showbiz, on s'y perdrait bien encore pendant des heures...

Hit (The)

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Réalisé par : Stephen Frears (1941 - )
En : 1984, Angleterre
Acteurs principaux : John Hurt (1940 - 2017), Fernando Rey (1917 - 1994), Tim Roth (1961 - ), Terence Stamp (1939 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Trois hommes (et occasionnellement une femme) sont dans une voiture. En fait, deux d'entre eux ont la mission de tuer le troisième. Mais pas tout de suite. Pas trop vite. La vengeance, en Espagne, se boit frappée. Le troisième, il a joué à la balance, dans un tribunal anglais, 10 ans avant. Depuis, il a migré plein sud, s'est mis à lire, à réfléchir et à attendre. Les deux autres n'ont visiblement pas utilisé leur temps de la même façon. Mais chacun a ses petites faiblesses. Ce road-movie de croix avec virages dangereux, crochets imprévisibles et stations sanglantes intégrés, pratique l'humour noir au grand air, et cueille à froid en plein soleil.

Man with the Golden Arm (The) - Homme au bras d'or (L')

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1955, USA
Acteurs principaux : Kim Novak (1933 - ), Frank Sinatra (1915 - 1998)
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 119 mn, NB

Critique perso :

Frankie rentre au pays avec son bras de chair en or. Pourquoi en or ? Trois pistes simultanées : deux au passé -c'était le meilleur distributeur de cartes des tables de poker du coin, c'était le plus camé aussi- et un au présent de l'espoir -il a appris la batterie de jazz en prison (la musique, épatante, est devenue un standard). Frankie traîne aussi quelques autres casseroles de sa vie d'avant -mais je raconte pas tout, parce que tout est un peu trop too much, dans ce film. Le naturalisme social et le drame conjugal sont poussés un peu loin, aussi. La démo est lourde. Gonflée pour l'époque, sûrement, et pour toutes les époques. Portrait de l'humanité en état de dépendance qui guette, impatiente, l'heure de s'envivrer. De dope, de sentiment ou de musique, à votre guise...

Meet john Doe - Homme de la rue (L')

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Réalisé par : Frank Capra (1897 - 1991)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Walter Brennan (1894 - 1974), Gary Cooper (1901 - 1961), Barbara Stanwyck (1907 - 1990)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 122 mn, NB

Critique perso :

Pour sauver son job, une journaliste excitée -mais belles jambes- bidonne un article dont le héros s'appellerait John Doe, autant dire Jean Dupont ou M. Toutlemonde. Triomphe. Tout le monde veut connaître le type, il n'y a plus qu'à l'inventer. Pour l'incarner, elle caste un vagabond sans le sou -mais belle gueule- et lui fait lire les dicours de son papa humaniste. Capra se moque de sa morale de boy-scout, tout en la donnant à entendre avec conviction. Et puis la machine s'emballe, John Doe devient une icône. Sa pygma-lionne est débordée sur sa droite par une ombre de populisme cynique (à marionnette, marionnette et demi), on ne sait plus trop à quel saint se vouer. Reste John, fidèle à lui-même, prophète sans qualités qui accomplit les écritures des autres. Print the legend et la légende fut. Une nouvelle Genèse de l'Amérique.

Invisible Man (The) - Homme invisible (L')

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Réalisé par : James Whale (1889 - 1957)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Claude Rains (1889 - 1967), Gloria Stuart (1910 - 2010)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 71 mn, NB

Critique perso :

Un drôle de voyageur enturbané débarque un soir dans une auberge borgne. Il est de mauvais poil, le genre à attirer des ennuis et la Police. Sous les bandelettes : rien. Invisible. La tête pleine, pourtant, de projets grandioses à rendre fou n'importe quel policier. Et contre lesquels même une ex-fiancée dévouée (solide, pourtant, la fiancée : plus de 50 ans plus tard, elle survivra au triomphal naufrage du Titanic !) ne pourra rien. C'est peut-être le seul film tout public où le héros est intégralement nu la moitié du temps. Rien de plus cinégénique que l'invisibilité, pour jouer avec nos rêves d'impunité.

Leopard Man (The) - Homme léopard (L')

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Réalisé par : Jacques Tourneur (1904 - 1977)
En : 1943, USA
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 66 mn, NB

Critique perso :

Dans un Mexique de pacotille, suite à une opération publicitaire douteuse, un léopard de compagnie -nettement moins sympa que celui de L'Impossible M. Bébé- est laché dans la nature. Peu après, des femmes disparaissent. On ne voit rien mais on sent tout, surtout le goût du sang. Le film est choral : on passe d'un personnage à un autre, tous reliés entre eux par le fil invisible du destin -ou celui, très lisible, du scénario. Aucun n'est un héros : que des victimes, que des coupables. C'est comme dans La Féline, mais à l'envers. Cherchez la bête. Cherchez l'homme derrière la bête. Cherchez la bête derrière l'homme derrière la bête.

Homme qui aimait les femmes (L')

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1977, France
Acteurs principaux : Nathalie Baye (1948 - ), Nelly Borgeaud (1931 - ), Leslie Caron (1931 - ), Charles Denner (1929 - 1995), Brigitte Fossey (1946 - )
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Avec son air sérieux et sombre, on lui donnerait le mariage sans cérémonie. Erreur : c'est un homme à femmes. Toutes, il les aime toutes, les grandes tiges et les petites pommes, les plantes exotiques et les fleurs vénéneuses. Avec une sérieuse préférence, tout de même, pour le modèle tradi, jupes courtes et talons hauts. Et une sérieuse fixette sur ce qu'il y a entre les deux : les jambes. Ingénieur en aérodynamisme, c'est un expert pour le jeu, la glisse, l'esquive. C'est aussi un hommes à livres, comme Antoine Doinel et quelques autres de la même famille, un collectionneur d'histoires, un épingleur de personnages, prêt à tout pour mettre du roman dans sa vie. Si vous êtes comme lui, ne me téléphonez pas !

Man Who Knew Too Much (The) - Homme qui en savait trop (L')

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1934, Angleterre
Acteurs principaux : Leslie Banks (1890 - 1952), Pierre Fresnay (1897 - 1975), Peter Lorre (1904 - 1964)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 75 mn, NB

Critique perso :

Un gentil jeune couple avec enfant en excursion touristique loin de chez lui sympathise un peu vite avec un type étrange (un champion de ski français, louche ça) et se retrouve bientôt avec un cadavre, un enlèvement et un lourd secret sur le dos. Ca vous rappelle quelque chose ? Non, ça n'est pas avec James Stewart mais avec un Peter Lorre à mèche blonde. Oui, pourtant, y'a bien le coup de (la) cymbale ! Heureusement d'ailleurs, parce que sinon le reste du scénar est un peu tissé de cordes blanches. Un dentiste louche, une secte louche, pas très discrets ces espions... Pourtant, le film est un peu plus brut, moins poli à l'americanwayoflife puritaine que l'autre. Ici, madame est championne de ball-trap, elle a moins peur des armes que la police anglaise. Non mais !

Man Who Knew Too Much (The) - Homme qui en savait trop (L')

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : Doris Day (1924 - ), Daniel Gélin (1921 - 2002), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en avant la musique /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Replay, en couleur et en plus long. La même histoire d'homme ordinaire embarqué malgré lui dans une embrouille d'espionnage (cf. aussi Les 39 marches, entre autres). Cette fois, l'homme est marié à une ex-chanteuse (elle a changé d'arme mais ça reste utile), ils ont un petit garçon et ils sont en vacances au Maroc. Il est toujours censé en savoir trop, mais on a plutôt l'impression qu'il navigue encore dans le fog (d'ailleurs, c'est le seul personnage qui ne connaît rien à la musique). Quelques péripéties plus tard, tout converge aussi vers l'Albert Hall de Londres. Là, le meilleur du film : Hitch fait passer la musique au premier plan, il inverse la figure et le fond, en quelque sorte. La cymbale devient le personnage principal. Et c'est la musique, encore et toujours, qui achèvera le dénouement final. Bien joué, maestro ! Un film un peu mineur mais que sera sera toujours aussi plaisant.

Man Who Shot Liberty Valance (The) - Homme qui tua Liberty Valance (L')

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Réalisé par : John Ford (1894 - 1973)
En : 1962, USA
Acteurs principaux : John Carradine (1906 - 1988), Lee Marvin (1924 - 1987), Vera Miles (1929 - ), Edmond O'Brien (1915 - 1985), James Stewart (1908 - 1997), John Wayne (1907 - 1979)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 123 mn, NB

Critique perso :

Le grand sujet des grands westerns, c'est comment créer de la civilisation dans le désert, comment passer en quelques décennies de la loi du plus fort à la loi tout court -bref, sur quels mensonges se bâtit un Etat. Face à la Liberty de faire n'importe quoi, deux hommes se dressent. Le premier est le modèle tradi : un cow-boy rustaud, as de la gachette qui ne rêve au fond que de se ranger et de fonder une famille. Le deuxième est le modèle moderne : un petit avocat venu de l'est, le nez dans ses bouquins. Au milieu : une femme. Mais ne comptez pas sur John Ford pour développer les histoires d'amour : c'est au spectateur de tout imaginer à partir de quelques regards en coin (ce sont évidemment toujours les plus belles). Lui se contente de filmer la légende -et comment on la fabrique. La démocratie et le cinéma, mode d'emploi.

Mies vailla menneisyyttä - Homme sans passé (L')

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Réalisé par : Aki Kaurismäki (1957 - )
En : 2002, Finlande
Acteurs principaux : Kati Outinen (1961 - ), Markku Peltola (1956 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 97 mn, couleur

Critique perso :

Un type dans un train. A l'arrivée, il se fait dépouiller et tabasser. Il est mort. Il ressuscite mais il a tout oublié. En fait, en 10 mn il a été complètement réinitialisé (d'ailleurs, il ressemble à L'Homme invisible) et nous, spectateurs, en savons autant que lui sur lui-même. Il lui (nous) reste donc le temps d'un film pour apprendre à vivre dans le monde des hommes. Dur dur, le monde des hommes, quand on a perdu son numéro de sécu. Il commence par le commencement : prendre une bière avec le voisin, planter 3 pommes de terre, inviter une fille et écouter du rock... Pas besoin d'éclats spectaculaires -surtout que là-haut, en Finlande, on cause et on rigole plutôt avec les yeux. Un film qui arriverait presque à faire croire que le monde est habitable -bien sûr c'est un conte de fées.

Chelovek s kino-apparatom - Homme à la caméra (L')

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Réalisé par : Dziga Vertov (1896 - 1954)
En : 1929, Russie
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /entre Berlin et Moscou /jeu dans le jeu /poésie en image
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

C'est un film sans décor, sans comédien et sans histoire - ou plutôt, un film dont Odessa est le studio, le cameraman et les habitants les personnages et la vie le scénario. C'est un documentaire sur comment on fait un documentaire. Un cours-TD-TP sur la force des images et le pouvoir du montage, fait la même année que La Ligne générale (ces russes : toujours une révolution d'avance !). Un film sur la vie du cinéma, le cinéma de la vie. C'est comme une journée de 80mn, un flash qui durerait longtemps, une expérience avec la vue et le temps, une poésie pour les yeux. C'est une image inimaginable, comme seul le cinéma pouvait en inventer.

Gentlemen Prefer Blondes - Hommes préfèrent les blondes (Les)

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Charles Coburn (1877 - 1961), Marcel Dalio (1900 - 1983), Marilyn Monroe (1926 - 1962), Jane Russell (1921 - 2011)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Une blonde et une brune de Little Rocks (Arkansas) partent à la pêche au coeur et au gros poisson dans une croisière transatlantique. L'une est fiancée et intéressée (et blonde), l'autre sentimentale. Bref, libres comme l'air. L'équipe olympique américaine (on ne sait pas trop de quoi, d'ailleurs) est aussi sur le bateau. Fausse piste : les sportifs se couchent à 9h et, avec leur entrainement à la grecque, on ne peut vraiment pas compter sur eux (cf. The Celluloid Closet). Et surtout (à l'époque en tout cas), ils ne gagnent pas un rond. Mais les amateurs ne manquent pas quand Marilyn -sexy comme jamais, blonde comme toujours, pétasse comme personne- est dans les parages. La pertinence de sa conversation fait d'ailleurs des bonds insoupçonnés quand il est question des choses importantes de l'existence : l'argent, les bijoux (Girls' Best Friends) et les fortunes personnelles. Même poursuivies par des juges intègres dans la ville d'Un Américain à Paris (à ne pas confondre avec Paris en France), pas de quoi s'en faire pour elles. Le rire est everyone's best friend.

Human Factor (The)

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1979, USA
Acteurs principaux : John Gielgud (1904 - 2000), Robert Morley (1908 - 1992)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Une drôle d'histoire d'espionnage tragique, mâtinée d'humour anglais où, pour réchauffer un peu la guerre froide agonisante, on fait appel au bon vieil apartheid sud-africain, alors florissant. Le cadre, c'est la cellule africaine des services secrets anglais, peuplée de petits fonctionnaires paisibles et discrets : des Sherlock Holmes en attaché-case, des James Bond de bureau. Malgré leur volonté affichée de mettre leur vie dans des petites boîtes étanches, elle prend l'eau. Il y a des fuites. Et le téléphone, comme ailleurs, est en train de devenir l'instrument de torture le plus raffiné de ce monde raffiné. Un film pour rire, pleurer et avoir peur tout à la fois. Pour transformer tout spectateur en agent double.

Humanité (L')

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Réalisé par : Bruno Dumont (1958 - )
En : 1999, France
Genre(s) : culte ou my(s)tique /en France profonde /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 148 mn, couleur

Critique perso :

A Bailleuil (nord de la France, plat pays, centre du monde), une petite fille est retrouvée morte. Assassinée. Pharaon de Winter, l'inspecteur de police, descendant et homonyme d'un peintre local, suit l'affaire. A sa manière. C'est un doux au regard d'enfant qui ne ferait pas de mal à une teigne. Il cause pas beaucoup. Il fait du vélo et du jardinage. Il aime en silence sa voisine Domino. Il souffre de compassion chronique envers ses semblables. Autour, il y a le monde technique qui va vite et qui fait du bruit (un camion-citerne, un avion de chasse et un TGV font de la figuration). Le malaise de ces petits pantins de chair -saint ou salauds, c'est la même pâte (filmée de très près)- perdus dans l'immensité indifférente du monde (filmé de très loin) n'a jamais été aussi palpable.

Heiress (The) - Héritière (L')

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Réalisé par : William Wyler (1902 - 1981)
En : 1949, USA
Acteurs principaux : Montgomery Clift (1920 - 1966), Miriam Hopkins (1902 - 1972), Ralf Richardson (1902 - 1983), Olivia de Havilland (1916 - )
Genre(s) : New York - New York /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 115 mn, NB

Critique perso :

Henry James, grand coupeur de cheveux en 4000, a inspiré cette histoire de jeune femme sous influence, dans la bonne société new-yorkaise du XIXème siècle. La jeune femme est censée être très moche et très fade (bien qu’incarnée par Olivia de Havilland), si mal aimée de son père, docteur de la haute, qu’il n’imagine pas un instant qu’on puisse la courtiser pour autre chose que ses sous à lui, surtout si on est fauché et beau comme Montgomery Clift. Une fois toutes les pièces du jeu posées, il n’y a plus qu’à observer la lente destruction d’un coeur par tout ceux qui sont censés lui vouloir du bien. L’héritage (financier et biologique) comme malédiction et obstacle au bonheur : la leçon de maître Henri est, comme on pouvait s’y attendre, subtile et ambiguë, mais néanmoins assez claire, même découpée en 4000. Film de prestige typique de l’âge d’or hollywoodien, en mode beau boulot.

Heros for Sale - Héros à vendre

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Réalisé par : William A. Wellman (1896 - 1975)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Loretta Young (1913 - 2000)
Genre(s) : pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 76 mn, NB

Critique perso :

Entre la Grande Guerre et la Grande Dépression, en Amérique, c'était un peu la foire aux héros, aux martyrs et aux salauds. Aux pauvres et aux parvenus. Y'en avait plein les rues, on pouvait devenir l'un ou l'autre en moins de deux, pour un rien, par hasard ou par erreur. C'est ce qui arrive à Tom Holmes, faux traitre et vrai type bien, sorte de nouveau Jean Valjean au pays du capitalisme roi. Pour lui comme pour pas mal d'autres, sortir de la pauvreté est aussi dur que sortir des tranchées. Et faut pas trop compter sur les institutions pour se faire aider. C'e'st un peu La vie est belle en mode réaliste, ou comment la vie en société se transforme en moins de deux en guerre sans merci… Pêchu et pas nunuche !

Hôtel du Nord

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1938, Allemagne
Acteurs principaux : Annabella (1909 - 1996), Arletty (1898 - 1992), Jean-Pierre Aumont (1911 - 2001), Bernard Blier (1916 - 1989), Paulette Dubost (1911 - 2011), Louis Jouvet (1887 - 1951), François Périer (1919 - 2002)
Genre(s) : Paris /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

Encore un mythe qui passe de justesse la barre du potable à sauver. C'est un film choral, comme on ne le disait pas encore alors. Le décor : un hôtel au coeur de Paris, avec vue sur le canal St Martin et pittoresque à tous les étages. Les personnages principaux : Paris canaille, et Paris populo. Les histoires : des maris, des femmes, des amants, et quelques coups de feu. Celle qui est mise au premier plan (une histoire de petit couple tellement jeune, beau et amoureux que c'en est désespérant -c'est eux qui le pensent !) est de loin la plus tarte et la plus barbante. Heureusement, il y a quelques briscards, pas encore si vieux que ça, qui sauvent la mise. Ils s'incrustent, forcent un peu les portes de la fiction, changent l'atmosphère à force de brasser de l'air. Ils sont les seuls à parler parisien comme aucun parisien n'a jamais parlé. Les seuls à être dignes du mythe qu'ils ont créé.

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I


C'era una volta il West - Il était une fois dans l'ouest

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Réalisé par : Sergio Leone (1929 - 1989)
En : 1968, Italie
Acteurs principaux : Charles Bronson (1921 - 2003), Claudia Cardinale (1938 - ), Henry Fonda (1905 - 1982), Jason Robards (1922 - 2000)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique /épique pas toc
Caractéristiques : 165 mn, couleur

Critique perso :

Il était une fois un réalisateur qui aurait vu et aimé Duel au soleil, Johnny Guitar, Rio Bravo et L'Homme qui tua Liberty Valance (entre autres). Il croirait donc au pouvoir hypnotique du cinéma. Il était une fois, donc, trois hommes de l'Ouest : un joueur d'harmonica taciturne, un bandit romantique et une brute sanguinaire. Il était une fois une femme qui serait à la fois une maman et une putain. Ils auraient tous des comptes à règler avec le passé, et des paris à faire sur l'avenir. Ils laisseraient pas mal de cadavres derrière eux. Pour eux, le temps se serait comme arrêté, suspendu, dilaté. Et le temps, au cinéma, c'est ce qui permet de parcourir les déserts mythiques de Monument Valley, de scruter les paysages tourmentés d'un visage, de laisser se deployer la géniale musique de Morricone. Le temps d'un merveilleux conte de fées pour grandes personnes.

Once Upon a Time in America - Il était une fois en Amérique

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Réalisé par : Sergio Leone (1929 - 1989)
En : 1984, USA
Acteurs principaux : Danny Aiello (1933 - ), Robert De Niro (1943 - ), Joe Pesci (1943 - ), James Woods (1947 - )
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /portrait d'époque (après 1914) /épique pas toc
Caractéristiques : 229 mn, couleur

Critique perso :

Noodles fume de l'opium. Non pas pour oublier, mais pour se souvenir d'oublier éternellement. Oublier éternellement sa jeunesse de James Cagney, apprenti parrain sur les trottoirs de New-York. Oublier Deborah, celle qu'il a toujours aimé, celle qui n'a jamais voulu de lui. Oublier Max, celui qu'il a toujours aimé, celui qu'il a trahi. En fait, ce qu'il ne lui pardonnera jamais, à Max, c'est qu'il est encore plus fort que lui : Max, il a réussir à trahir une trahison. En quelques décennies, il en est passé du sang sous le pont de Brooklyn. Oublier éternellement que la clé du coffre est restée cachée dans le balancier de la pendule, comme toujours, même si le magot s'est envolé. La version western du mythe de l'ouest était une histoire de vengeance. La version noire, c'est une histoire de vengeance contre soi-même. Noodles en rit encore.

Illusionniste (L')

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Réalisé par : Sylvain Chomet (1963 - )
En : 2010, France
Acteurs principaux : Jacques Tati (1909 - 1982)
Genre(s) : animation /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 80 mn, couleur

Critique perso :

Dans son dernier rôle -très posthume- Jacques Tati est transformé en cartoon mais il joue pourtant sous son vrai nom (Tatischeff) et exerce quasiment son vrai métier (artiste de music-hall itinérant). Le film est tiré d'un de ses scénarios, comme le rêve de quelqu'un dessiné par quelqu'un d'autre. C'est l'histoire d'un artiste, donc, trop grand pour son pantalon et égaré par les circonstances dans les brumes écossaises. Comme un lapin vit dans son chapeau, une Alice en devenir le choisit pour père adoptif et le suit à Glasgow à la recherche de son avenir, alors que lui n'en a plus beaucoup en réserve. Ils croisent pas mal de trognes burinées par la brise et par la vie, ivres d'art, de solitude ou de whisky. Il se passe entre eux comme la transmission de quelque chose qu'ils ont perdu ou jamais eu, la grâce silencieuse et délicate d'une aquarelle. Pour la beauté des gestes, des gens et des atmosphères qui changent, pour la beauté tout court.

Immortel (ad vitam)

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Réalisé par : Enki Bilal (1951 - )
En : 2004, France
Acteurs principaux : Linda Hardy (1973 - ), Thomas Kretschmann (1962 - ), Frédéric Pierrot (1960 - ), Charlotte Rampling (1946 - )
Genre(s) : New York - New York /c'était demain /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

New-York, 2095 : des élections se préparent, des hommes meurent, des avatars 3D se mèlent aux vivants sans que personne n'y trouve à redire. Le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle. Orus, Dieu égyptien en instance de mortalité, se réfugie dans un corps humain en hibernation, expulsé par erreur de son congélateur géostationnaire, et répondant au nom de Nikopol. Orus est un rapace ; il a plus à voir avec le "ça" qu'avec le "surmoi", ce Dieu-là. Nikopol, lui, fait de temps en temps des crises de Baudelairite aigües. Et puis, il y a Jill, superbe jeune femme de 3 mois 1/2. A eux trois, ils rejouent Jules et Jim chez Metropolis -à moins que cela ne soit Stalker au Brazil, ou L'Odyssée de l'espace des Ailes du désir. Et l'Homme, dans tout ça ? Une jambe de plomb, l'aile bleue d'un ange tatouée sur le bras.

Bringing Up Baby - Impossible M. Bébé (L')

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1938, USA
Acteurs principaux : Cary Grant (1904 - 1986), Katharine Hepburn (1907 - 2003)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 102 mn, NB

Critique perso :

Un espèce de professeur Tournesol, en quête de la clavicule intercostale (?) de son dinosaure préféré, croise la route d'une Miss Catastrophe flanquée d'un léopard de compagnie -le Bébé du titre. Pas mal, pour un début -et ce n'est vraiment qu'un début... Il faut donner le temps aux spécimens de toutes espèces de passer de la cage à la nature (et réciproquement). Les acteurs sont géniaux. Aux commandes, un de mes chouchous. Comme la plupart du temps chez lui, les femmes ont quelques longueurs d'avance sur leur partenaire masculin. Et comme toujours, la vérité a besoin d'un peu de désordre pour pointer le bout de son nez. Ce film est devenu l'étalon or de la comédie à la sauce américaine, ce monde où la fantaisie et l'invraisemblance sont un mode de vie.

Yôkihi - Impératrice Yang Kwei fei

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Réalisé par : Kenji Mizoguchi (1898 - 1956)
En : 1955, Japon
Acteurs principaux : Machiko Kyô (1924 - ), Masayuki Mori (1911 - 1973)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /vers le soleil levant
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

L'empereur est inconsolable. Il pleure son épouse, son grand amour, son seul amour. Depuis qu'il l'a perdue, il n'aime plus que l'art. Mais sa cour s'occupe de lui : on lui présente plus ou moins discrètement toutes les jolies jeunes filles du royaume. Un jour, il rencontre ainsi tout à fait fortuitement la jolie Yang. Ce sera sa nouvelle épouse, son grand amour, son seul amour. Avec elle, il connaît le grand frisson de sa vie quand, un soir de nouvel an, il se déguise en homme normal pour aller faire la fête dans la rue au milieu des hommes normaux en mangeant des brochettes. Le reste du temps, il n'aime que l'art, et ça tombe bien : elle aussi. Ils vivent comme dans une série de tableaux vivants, au milieu de jolies couleurs. Quel dommage que la famille de la dame ne soit qu'une bande d'arrivistes corrompus. Faudra payer pour ça, quitter le beau décor. Pas facile tous les jours d'être un grand empereur, ou un grand artiste.

Scarlet Empress - Impératrice rouge (L')

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Réalisé par : Josef von Sternberg (1894 - 1969)
En : 1934, USA
Acteurs principaux : Marlene Dietrich (1901 - 1992), Sam Jaffe (1891 - 1984), John Lodge (1903 - 1985), Akim Tamiroff (1899 - 1972)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou
Caractéristiques : 104 mn, NB

Critique perso :

Petite princesse prussienne, Sophie est choisie, comme sur catalogue, pour devenir la future grande impératrice de la Russie éternelle. Ayant traversé en traineau le grand pays blanc, elle se retrouve enfermée dans un palais dont elle ne sortira plus guère, et où elle ne tarde pas à égarer son nom, son innocence et ses illusions. Là, elle apprend la démesure slave en cours accélérés. Mariée à un empereur débile, elle apprend aussi à ne compter que sur ses propres armes, et sur l'armée avec qui elle entretient des relations étroites. Dans un décor extravagant confié à un sculpteur fou, Marlène déballe sa garde-robe, non moins extravagante. Comme les meilleurs von Sternberg, c'est une ode à la beauté vénéneuse des femmes qui en ont bien bavé. Trop de tout, mais du genre dont on n'a jamais assez.

Fa yeung nin wa - In the mood for love

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 2000, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Maggie Cheung (1964 - ), Tony Leung Chiu Wai (1962 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /poésie en image /vers le soleil levant
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

Ce serait comme un souvenir lointain, embelli par la mémoire. Elle aurait une robe couleur du temps : toujours la même et toujours différente. Il aurait la cravate élégante et les cheveux bien gominés. Ils habiteraient Honk Kong, sur le même palier. Ils seraient mariés, mais pas ensemble. Ils se croiseraient éternellement dans tous les couloirs du monde, en allant chercher leurs nouilles aux marchands du coin. Ce serait comme une danse éternellement recommencée. Ils finiraient pas se parler, de nouilles et de romans de chevalerie, en fumant dans le noir. Ils finiraient pas inventer leur histoire qui n'existerait pas. Tout autour d'eux ne serait que trahison, compromission. Mais eux, non. Droits sous la pluie, imperméables aux ragots, éternellement -ou presque. Et le secret de leur histoire à jamais préservé. Sublime, éternellement sublime.

Incompreso (L') - Incompris (L')

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Réalisé par : Luigi Comencini (1916 - 2007)
En : 1966, Italie
Acteurs principaux : Anthony Quayle (1913 - 1989)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Dès le début et jusqu'à la fin des temps : une absence -injuste et horrible, comme toutes les absences. Au centre, au fond : l'absente qui fut, on le devine, délicate et douce. Ceux qui restent : Milo, Andrea et leur diplomate de père, une famille de gens beaux, riches et très malheureux -et même Florence (la ville) n'y peut rien, c'est dire. C'est surtout Andrea, 10 ans, que nous suivons. C'est celui dont la bulle, à égale distance de celle des autres, est la plus fragile. Derrière ses forfanteries d'enfant à la dérive, on le devine délicat et doux. Il est plein de bonne volonté, mais toujours à côté de la plaque continentale de son père. C'est un mélo sur des orphelins qui souffrent : un enfant de 5 ans, un enfant de 10 ans, un enfant de 40 ans. Des hommes sans femme, inguérissables de leur nostalgie du bonheur perdu.

Strangers on a Train - Inconnu du Nord-Express (L')

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Farley Granger (1925 - 2011), Robert Walker (1918 - 1951)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Guy, un champion de tennis bien propre sur lui, croise dans un train un admirateur anonyme et empressé, prêt à accomplir ses désirs les plus inavouables. Il en oublie son briquet. Il va le regretter. Le film démarre donc sur une espèce de pacte faustien. La suite sera, pour Guy, l'occasion de franchir, les unes après les autres, toutes les marches de l'enfer. Par lâcheté, mensonge, compromission. Secrête attirance, peut-être ? En Méphisto de fête foraine décidément de plus en plus envahissant, Robert Walker tient le rôle de sa vie. Le genre de films qui laisse des traces (un plan de meurtre réfléchi par des lunettes, un briquet tombé au fond d'une bouche d'égout, un manège infernal) même quand on a tout oublié.

India Song

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Réalisé par : Marguerite Duras (1914 - 1996)
En : 1975, France
Acteurs principaux : Michael Lonsdale (1931 - ), Claude Mann (1940 - ), Delphine Seyrig (1932 - 1990)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /poésie en image
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Marguerite, c'était la gourou de mon adolescence ; Le ravissement de Lol V. Stein un de mes livres cultes. Autant dire que je suis capable de tenir des heures devant un vide aussi plein qu'India Song... Nocturne indien, réception chez l'ambassadeur. Champagne, musique. Une femme passe de bras en bras. Un homme pur et maudit crie qu'il l'aime. Mélancolie ouatée, élégance du désespoir. Des fois, il y a des personnages ensemble dans le même plan, mais ils n'habitent jamais le même espace. Sauf quand ils dansent. Sinon, des paysages flottants, des bouts de conversation. Comme L'année dernière à Marienbad, ce film, c'est comme un objet qui serait quelque part entre l'écran et le spectateur. Ailleurs, avant. Les images en sont une projection partielle, les sons en sont une autre. La meilleure, c'est celle qui reste dans la tête,

Indiana Jones and the Last Crusade - Indiana Jones et la dernière croisade

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Réalisé par : Steven Spielberg (1946 - )
En : 1989, USA
Acteurs principaux : Sean Connery (1930 - ), Harrison Ford (1942 - ), River Phoenix (1970 - 1993)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 127 mn, couleur

Critique perso :

C'est un peu comme dans le Parrain II : pour comprendre la suite, revenons d'abord aux sources. Indiana, donc, a été jeune, et il a eu un père (sans doute aussi une mère, mais les personnages féminins n'ont jamais été le point fort de la série). Il a tout appris de lui, et puis il a développé son style perso, plus décontracté. Ils sont fachés, ils sont restés rivaux en tout. Or, là, le Père, qui était parti tout seul à la quête du Graal, a été intercepté par des méchants. Au programme du jeu de piste pour le retrouver : visite guidée des égouts de Venise, détour par un châteaux hanté par les Nazis, crochet par Berlin pour récupérer un autographe du Fuhrer, avant de retrouver le bon vieux désert biblique de l'épisode 1. Là, pour avoir le droit de rencontrer un père Fouras de 750 ans environ, il faudra encore résoudre quelques énigmes. On se doute assez tôt que, de toute façon, le père, le fils (et le saint esprit cinématographique) auront droit à l'immortalité des légendes.

Indiana Jones and the Temple of Doom - Indiana Jones et le temple maudit

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Réalisé par : Steven Spielberg (1946 - )
En : 1984, USA
Acteurs principaux : Kate Capshaw (1953 - ), Harrison Ford (1942 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 118 mn, couleur

Critique perso :

A l'Obi Wan bar, tripot de Shangai, Indiana se souvient d'être un héros. Il perd quelques plumes, comme d'hab, mais gagne le droit de trimballer une cruche blonde et un gamin pour le reste du film. Lequel film prend ensuite la route des Indes -des Indes mythiques sous influence Fritz Lang, comme si le Tombeau indou était tombé dans les bas-fonds de Metropolis. L'aventure prend cette fois la forme d'un trip immobile, un Voyage fantastique au fond de gouffres amers, rouges comme des entrailles, chauds comme les enfers. Atmosphère lourde et sombre, ambiance claustro (faudra attendre l'épisode suivant pour affiner le bronzage) : pas facile tous les jours d'accoucher du héros qui est en soi.

Raiders of the Lost Ark - Indiana Jones et les Aventuriers de l'arche perdue

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Réalisé par : Steven Spielberg (1946 - )
En : 1981, USA
Acteurs principaux : Karen Allen (1951 - ), Harrison Ford (1942 - ), Anthony Higgins (1947 - ), Alfred Molina (1953 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

En 35, c'est bien connu, les Nazis n'avaient pas grand chose d'autre à faire que fouiller le désert egyptien à la recherche de l'Arche d'Alliance mythique des Juifs, ce truc qui renferme le seul manuscrit connu de Dieu lui-même (celui que Charlton Heston a descendu du Sinaï). Les Américains, qui sentent le coup de l'arme suprème, envoient leur meilleur atout. Jones, il s'appelle Jones. Prénom : Indiana ; profession : archéologue de la mémoire occidentale, explorateur de mythes, savant et aventurier tout terrain. Une sorte de Tintin sexy, plus cuir et moins bien rasé, héritier en ligne directe d'Ulysse et de l'Homme de Rio. Toujours prêt pour un voyage au fond de lui-même, toujours là pour la bagarre contre ses fantômes. Le XXème siècle finissant s'est enfin inventé le héros qu'il aurait dû avoir.

Philadelphia Story (The) - Indiscrétions

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Réalisé par : George Cukor (1899 - 1983)
En : 1940, USA
Acteurs principaux : Cary Grant (1904 - 1986), Katharine Hepburn (1907 - 2003), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

Philadelphia, le berceau de la démocratie en Amérique. Un palais luxueux, écuries et argenterie comprises. Une déesse (aux pieds d'argile), trois prétendants au trône : l'ex, le fiancé et le journaleux. Autour de la piscine, ces enfants de l'Olympe débattent de l'aristocratie des âmes. En gros, ça consisterait non pas à être sans défauts, mais à avoir des défauts dignes de soi. Ainsi le fiancé, parvenu, a l'art de se rendre odieux, tout en étant toujours irréprochable. L'ex, lui, bien que violent, absent ou en pyjamas, est irrésistible. Et le journaleux douteux n'est jamais aussi charmant que quand il est bourré. C'est ça la classe, ça ne s'achète pas. Ne pas exclure une éventuelle lecture politique, mais ça n'empêche pas de rigoler. Et le tout grâce à quoi ? Au champagne, bien sûr !

Innocents (The) - Innocents (Les)

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Réalisé par : Jack Clayton (1921 - 1995)
En : 1961, Angleterre
Acteurs principaux : Deborah Kerr (1921 - 2007), Michael Redgrave (1908 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Deux adorables orphelins et leur gouvernante très comme il faut vivent dans un somptueux manoir gothique. Pourtant, une ombre plane sur ce vert paradis. Apparemment, il s'en est passé de belles, dans le coin, il y a peu. Evidemment, il est hors de question d'en parler ouvertement. Mais, depuis, il semble bien que quelques fantômes occupent aussi le terrain. Habitent-ils dans le grenier, dans la tête des enfants ou dans celle de la vieille fille ? that is the question... Et à quelles maléfiques influences peuvent-ils donc prétendre puisque les enfants sont des anges et puisque leur irréprochable gouvernante n'agit que pour leur bien ? Sauf que, parfois, les pires innocences et les plus pures perversions ont le même visage.

Institut Benjamenta, or This Dream People Call Human Life - Institut Benjamenta (ce rêve qu'on appelle la vie humaine)

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Réalisé par : frères Quay (1947 - )
En : 1995, Angleterre
Genre(s) : conte de fées relooké /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 104 mn, NB

Critique perso :

Jakob entre un jour dans une très étrange école pour étudiants tardifs. Ils sont là pour apprendre à devenir des serviteur, des serfs -ou des cerfs, peut-être. C'est sans doute la seule institution dont l'objectif pédagogique n'est pas d'élever ses élèves mais de les abaisser, ou au moins de les maintenir en état de servitude volontaire. D'en faire des idiots, ou des saints, ou les deux, ce qu'ils sont sans doute déjà. Dans une ambiance de cruauté ouatée, la seule prof du lieu -lady Benjamenta, la soeur du patron- ne leur apprend d'ailleurs pas grand chose : à s'oublier, à mimer toujours les mêmes gestes. Mais Jakob et la lady, des fois, ils en inventent de nouveaux qui n'étaient pas au programme. C'est que l'institut et les êtres qui y vivent recèlent en fait des passages secrets. Derrière certains cercles, s'ouvrent de troubles corridors qui ne mènent nulle part, comme leurs esprits embrumés. Ce film, comme peint avec de la lumière, ressemble à une oeuvre d'avant-garde à l'ancienne - ou à un film muet du XXIIème siècle.

Yadon ilaheyya - Intervention divine

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Réalisé par : Elia Suleiman (1960 - )
En : 2002, Palestine
Acteurs principaux : Elia Suleiman (1960 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 92 mn, couleur

Critique perso :

A Nazareth, même les enfants ne croient plus au Père Noël. En tout cas, il n'y est pas le bienvenu. Le territoire, en état de coexitence hostile, est occupé par la rage muette. C'est qu'ils sont toujours cadrés, encadrés, surcadrés, ces Palestiniens. Ils ne connaissent que l'éternel retour du désespoir, et de la police. C'est pourtant là que débarque un Buster Keaton mangeur d'abricots. Son père est malade. Il a une fiancée au regard qui tue, une oeuvre à faire. Il donne ses RDV amoureux au check point. Souvent, il a le check point blues. Cette terre, qui ne semble plus porteuse de Bonnes Nouvelles depuis longtemps, donne encore de beaux arts. L'art du gag lent à la Blake Edwads, seul capable de transmuter un chant de douleur en un acte de résistance poétique.

Intervista

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1987, Italie
Acteurs principaux : Anita Ekberg (1931 - 2015), Federico Fellini (1920 - 1993), Marcello Mastroianni (1924 - 1996)
Genre(s) : jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 102 mn, couleur

Critique perso :

Le cinéma mode d'emploi : des rêves et des studios, des grues et des conféttis, de la mémoire et des projecteurs. Il faut aussi, c'est mieux, quelques éléphants, une baleine (prénommée Anika), et un acteur-magicien (prénommé Marcello). Et, au milieu du chaos comme un poisson dans l'eau de son bocal préféré : un grand type en chapeau à la voix douce, qui ne feint pas d'en être l'organisateur (il l'est !). Il suffit qu'il ait tout prévu pour que l'imprévisible dont il avait besoin surgisse. Il suffit qu'il rêve de l'Amérique (celle de Kafka et de DeMille) pour les indiens de ses westerns viennent à lui tout seuls. Il suffit qu'il soit là pour me rendre heureuse. C'est un film qui serait à la fois son propre making-of, sa propre pub (interviews, bande-annonce et bêtisier compris), et sa propre négation (par la télévision), sans jamais cesser d'être lui-même, c'est-à-dire introuvable.

Intolerance - Intolérance

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Réalisé par : David W. Griffith (1875 - 1948)
En : 1916, USA
Acteurs principaux : Tod Browning (1882 - 1962), Lillian Gish (1893 - 1993), Eugene Pallette (1889 - 1954)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /à l'antique /épique pas toc
Caractéristiques : 178 mn, NB

Critique perso :

Pour se faire pardonner de l'idéologie suspecte de Naissance d'une nation, Griffith nous mitonne une fresque historico-morale qui ne manque pas de souffle et d'audace : l'histoire de l'humanité y est sondée (pas du tout aléatoirement) en 4 points clé, et découpée façon carpaccio de tableaux vivants. Sur les 4 histoires, il y en a 3 dont on connaît d'avance plus ou moins la fin : la vie d'un barbu à Jérusalem, dans les années 30 après lui-même ; un certain jour de la St Barthélémy en France ; la bataille de Cyrus contre Babylone aux tout débuts de la Mésopotamie (bon, là c'est un peu plus dur mais on est aidé). Et puis, il y a une histoire contemporaine plus modeste et plus indécise, un mélo qui résume et synthétise les 3 autres dans le quotidien d'une vie ordinaire. Le point de vue passe par le montage et les cartons : l'humanité n'en est qu'à son berceau, on massacre toujours les innocents au nom des meilleurs sentiments... J'oubliais : ça date d'il y a presque un siècle, donc rien à voir, bien sûr, avec ce qui se passe aujourd'hui.

Invasions barbares (Les)

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Réalisé par : Denys Arcand (1941 - )
En : 2003, Canada
Acteurs principaux : Dorothée Berryman (1948 - ), Marie-Josée Croze (1970 - ), Pierre Curzi (1946 - ), Rémy Girard (1950 - ), Yves Jacques (1956 - ), Dominique Michel (1932 - ), Louise Portal (1950 - ), Stéphane Rousseau (1966 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

Rémi (celui qui était le plus vivant dans le Déclin de l'empire américain) est très malade. Il n'y aurait pas grand monde à son chevet si son fils ne s'y collait, finalement. Alors, revoilà la troupe réunie de nouveau : les hommes ont perdu des cheveux, tous ont gagné des rides et des souvenirs. Ils parlent toujours autant de sexe, mais pratiquent un peu moins. Côté langue par contre, ils n'ont rien perdu de leur verve. Ils ont vu passer l'esprit du temps, à défaut d'avoir pu influer sur son souffle. Comme Rémi, ils ont un peu raté leur vie, alors pour la mort ils s'appliquent. Quant à Denis Arcand, toujours aussi à l'aise dans les portraits d'époque, il ose parier sur un humanisme plus nourri de dollars que de culture.

Invention de Morel (L')

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Réalisé par : Claude-Jean Bonnardot (1923 - 1981)
En : 1967, France
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Au départ, c'est un de mes livres préférés : l'histoire d'un fugitif qui se réfugie sur une île déserte (mais hantée et maudite) et devient la victime (bientôt consentante) d'une espèce d'hallucination scientifiquement générée. Ce livre, c'est le mot de passe absolu de tous ceux qui préfèrent un autre monde -qu'il s'appelle vin, poésie ou vertu, littérature, cinéma ou rêves- à la réalité. Et il marque l'invention d'un nouveau type de paradoxe, quelque chose comme la superposition des espaces. Le (télé)film est très (peut-être trop) fidèle, avec sa voix off littéraire, ses fantômes futiles et rationels et son ambiance années folles décadante à souhait. On dirait du Resnais (un peu cheap quand même) : un plagiat par procuration (de l'Année dernière à Marienbad) ou par anticipation (de Je t'aime je t'aime ou de certaines idées de Mon oncle d'Amérique), autrement dit de certaines des meilleures hallucinations cinématographiquement générées.

Ivan Groznyy I - Ivan le Terrible I

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1944, Russie
Acteurs principaux : Nikolai Cherkasov (1903 - 1966)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /épique pas toc
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

Après Alexandre Nevski, un nouveau portrait pseudo-historique de Grand Russe Eternel. Ivan, c'est le centralisme de la dictature (du prolétariat démocratique) à lui tout seul ; la Raison d'Etat incarnée dans un géant. Dans cette 1ère partie, il étend progressivement son ombre sur toute la terre russe, et se fait progressivement pousser la barbichette. Ivan se fait couronner, Ivan se marie, Ivan gagne une bataille... L'impératrice rouge n'a qu'à bien se tenir : chaque scène est une cérémonie, un lent ballet de poses et de regards, un défilé de figures dans un tableau de maître. Chaque plan est une icône à la grandeur du cinéma.

Ivan Groznyy II: Boyarsky zagovor - Ivan le Terrible II: le complot des Boyards

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1958, Russie
Acteurs principaux : Nikolai Cherkasov (1903 - 1966)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /épique pas toc
Caractéristiques : 81 mn, NB/couleur

Critique perso :

Ivan is back et il n'est pas content. Maintenant que sa barbichette est à point -et en pointe-, on va enfin comprendre pourquoi il a mérité son "Terrible" surnom. Désormais il est seul, sombre, torturé. Il ne fait confiance à personne. Sa grande ombre s'étend surtout sur lui-même. Ce sont encore ces gros lards de Boyards -et leurs alliés cléricaux- qui lui en veulent. Et sa tante est son pire ennemie. Alors, il préfère s'entourer de jeunes gens dévoués, avec qui il organise des fêtes décadentes. Y aurait-il quelque chose de pourri dans le royaume de Russie ? Il paraît qu'Eisenstein a eu une crise cardiaque quand il a su que le petit père des peuples (du prolétariat démocratique) visionnait son film. Et le pays a dû attendre 13 ans avant de pouvoir se regarder dans ce miroir déformé. Heureusement, les images du poète ont survécu à leur inspirateur.

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J


You Only Live Once - J'ai le droit de vivre

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1937, USA
Acteurs principaux : Henry Fonda (1905 - 1982), Sylvia Sidney (1910 - 1999)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Henry Fonda en méchant ? Non, il n'y a pas que Sergio qui a osé. Fritz, déjà... Mais lui, c'était par ruse. Une ruse pour faire comprendre aux américains que même les ex-taulards ont du coeur, parfois. Que même, ils peuvent être sincères, pleins de bonne volonté, et mériter l'amour des plus belles et gentilles filles du pays. Que même, ils pourraient de temps en temps avoir de bonnes raisons de ne pas faire complètement confiance à la société qui, des fois, peut les condamner à tort. Mais là-dessus, ils ont toujours été un peu durs d'oreilles, les américains. Au point qu'il y a des gars qui sont tellement américains qu'ils n'arrivent pas à croire eux-mêmes à leur innocence. C'est dire les dégats.

J'ai pas sommeil

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Réalisé par : Claire Denis (1948 - )
En : 1994, France
Acteurs principaux : Béatrice Dalle (1964 - ), Alex Descas (1958 - ), Yekaterina Golubeva (1966 - 2011), Laurent Grévill (1961 - ), Line Renaud (1928 - )
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Paris la nuit comme un écosystème, la niche écologique naturelle de tous les déplacés, les déclassés, les déphasés, tous ceux qui ne devraient pas y être et qui y sont quand même. Par malchance, par amour ou par hasard, ce qui revient souvent au même. Pour tenir, ils ne se battent pas tous avec les mêmes armes (l'action, le charme, le silence ou le couteau, à votre guise), mais tous ils essaient. Ca ne réussit pas souvent, ou pas longtemps. Entre eux, ils se croisent beaucoup et se ratent encore plus. Avec eux-mêmes, c'est pareil. Claire Denis sait capter comme personne des corps, des décors et des ambiances, et comment tout s'assemble et se mélange. Les gueules et les atmosphères, c'est son créneau. Son film a le goût des nuits blanches amères et la texture des petits matins passés au javel.

Jacquot de Nantes

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 1991, France
Genre(s) : conte de fées relooké /en France profonde /en avant la musique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 118 mn, NB/couleur

Critique perso :

Ce petit garçon, mes parents auraient pu le rencontrer chez le sabotier de la Chapelle-Basse-Mer (où ils sont nés). Et, à quelques années près, ça aurait pu être la caméra pour amateurs de mon frère (mon premier prof de cinéphilie) qu'il aurait acheté dans la boutique du passage Pommeraye. C'est un pote de mon autre frère qui lui joue du saxo. Autant dire que j'ai toutes les raisons d'adorer ce film et que je l'adore. C'est le rêve d'une enfance que j'aurais pu avoir, c'est l'enfance d'un rêve de cinéma qui m'a donné du bonheur. Il avait de la chance, Jacquot : il a passé ses premières années à regarder les films qu'il allait faire plus tard. Pas la peine d'être malheureux pour avoir des choses à raconter, il faut juste avoir le regard qui passe à travers le rideau des guignols, les colonnades du théâtre et l'écran à fantasmes. La vraie vie, c'est juste du cinéma en un peu moins bien.

Dr. No - James Bond contre Dr No

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Réalisé par : Terence Young (1915 - 1994)
En : 1962, Angleterre
Acteurs principaux : Ursula Andress (1936 - ), Sean Connery (1930 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Première apparition sur la scène du cinéma mondial du plus célèbre des espions glamours au service de Sa Gracieuse Majesté. Son nom est Bond, etc. Le film fixe à jamais le cahier des charges de la série : action, exotisme, traitrises. Costards, cocktails et p'tites pépés. Et un méchant hybride (mi-homme mi-machine, mi-asiatique mi-allemand, c'est dire comme il est méchant), savant fou-génial-mégalo, cruel et raffiné of course (c'est ce qui le perdra), qui manigance dans sa base secréte la fin du monde. Et Sean, à l'aide en eaux troubles comme s'il était au bowling, auprès de qui les méchants et les femmes tombent comme des mouches. Délicieusement désuet et nonchalant.

Io sono un autarchico - Je suis un autarcique

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 1976, Italie
Acteurs principaux : Nanni Moretti (1953 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Avant d'être un quadragénaire minoritaire, Nanni a été un vingtenaire autarcique -ce qui semble vouloir dire, ici, minoritaire parmi les minoritaires. Papa isolé, marié mais séparé, autonome mais vivant de subventions paternelles, individualiste mais toujours au milieu de sa bande : le parfait emmerdeur. Il ne manque pas une occasion de faire la tronche, surtout quand il s'agit de participer au n-ième spectacle de théâtre expérimental fauché -et engagé, naturalmente- monté par son pote le plus intello. Son ex lui reproche de ne jamais réussir à avoir l'air tendre, elle a bien raison. Lui aussi, c'est comme ça qu'il est le meilleur. Cinéphile, déjà, et déjà pas très sympa avec certains de ses futurs confrères. Un brouillon de Journal intime filmé en super 8, mais déjà du vrai cinéma.

Je t'aime je t'aime

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1968, France
Acteurs principaux : Bernard Fresson (1931 - 2002), Olga Georges-Picot (1940 - 1997), Claude Rich (1929 - 2017)
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 94 mn, couleur

Critique perso :

Claude Ridder ne va pas fort, il vient d'essayer de se suicider. C'est ce qui en fait le cobaye idéal pour une étrange expérience scientifique : un mini-voyage dans le temps, la possibilité de revivre une petite minute de son passé, il y a un an, quand il allait mieux. Les souris font apparemment ça très bien, mais elles ne racontent pas grand chose en revenant. Claude, amateur de Magritte et de bons mots (il a écrit un livre, sur le temps en plus), sera certainement plus intéressant. Alors, il se laisse entrainer dans un sous-sol clandestin par des gens en costards qui ont l'air très sérieux, il se laisse enfoncer dans un gros pouf rose simili-organique et le flash-back commence. Mais la fonction Replay a des ratés, la minute dure, repasse en boucle, saute ailleurs dans la mémoire de Claude. La tête de lecture bégaie, s'emballe, s'enraye. Les images se suivent et ne se ressemblent pas toujours -la faute à Catrine, surtout, son grand amour disparu. Et à quelques autres aussi. L'afflux de souvenirs dure finalement le temps d'un film dont il est le héros (toujours plein cadre, au milieu), ce qu'il a eu bien du mal à faire de sa vie. L'art de faire une grande fresque intime avec des petits morceaux de pas grand chose, une vie dans la tête d'un homme, sans doute pas beaucoup plus intéressant qu'une souris, mais avec des images, des mots et du temps en plus -du cinéma, quoi.

Jeanne Dielman, 23 Quai du Commerce, 1080 Bruxelles - Jeanne Dielman, 23 Rue du Commerce

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Réalisé par : Chantal Akerman (1950 - 2015)
En : 1975, Belgique
Acteurs principaux : Delphine Seyrig (1932 - 1990)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 201 mn, couleur

Critique perso :

Jeanne est le parfait prototype de la parfaite bourgeoise respectable. Elle est veuve, élève seule son grand fiston à hormones, tient son parfait intérieur du plus parfait mauvais goût de l'époque avec une conviction parfaite qui force de le respect. Une femme, sous le regard d'une femme qui ne montre que ce qu'on ne montre pas d'habitude : tout le temps qu'il faut pour ne rien faire d'autre (courses, cuisine, ménage...) que simplement maintenir à flot une vie de parfaite desperate housewive. Une vie tellement bien (en)cadrée que c'en est insupportable. Jeanne, donc, lave, nettoie, plie, range, arrange tout ce qu'elle touche, ne fait jamais la cuisine sans son tablier ni l'amour sans une petite serviette en dessous. Ben oui, faut bien gagner sa vie, quand même -mais pas plus d'un homme par jour, à domicile, pas plus que le temps de cuisson du plat du jour. Un jour, les patates sont trop cuites et on comprend qu'il a dû se passer quelque chose d'inhabituel, d'inconcevable, d'indécent, quelque chose de pas prévu au programme de cette vie-là. Le lendemain, on comprend que ça ne s'arrange pas. Il va falloir remédier au problème... Simplement génial et glaçant !

Muso (Den) - Jeune fille (La)

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Réalisé par : Souleymane Cissé (1940 - )
En : 1975, Mali
Acteurs principaux : Balla Keita
Genre(s) : pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 88 mn, NB/couleur

Critique perso :

Une famille africaine, mais riche : papa est patron, maman se pomponne, deux jeunes filles qui vivent leur vie de jeune fille. Sauf que l'une est muette, comme la souffrance des femmes de son pays : victime idéale pour le beau parleur glandu du quartier, qui vient juste de quitter la boîte du papa. L'intrigue principale est simple et désespérée. Mais on prend au début pour de la maladresse ce qui est en fait de l'audace : un récit plein de digressions, d'ellipses, plein de gens, plein de vie. Du coup, le film est autant une tragédie antique qu'un docu sur la vie à Bamako, ou qu'un tract militant sur la condition féminine. La société entière entre dans l'image comme la musique dans le son : en douce, par imprégnation. Comme la sourde colère du réalisateur contre la misère matérielle des pauvres, et la misère morale des riches.

Sommarlek - Jeux d'été

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1951, Suède
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

Le temps d'un incident technique pendant une répétition, Marie la ballerine va faire un tour au pays de ses souvenirs. En particulier du côté de cet été passé au bord de l'eau avec son voisin Henrik. Ils avaient l'âge de Zéro de conduite. C'était le temps où faire des ricochets dans l'eau et ramasser des fraises des bois les amusaient encore ; c'était aussi le temps d'apprendre de nouveaux jeux... L'été au goût de paradis a précédé un automne au parfum d'enfer, dont il n'est pas sûr que Marie soit jamais sortie. Nostalgie de la douceur de l'enfance, douleur du temps qui passe et de la solitude : c'est triste et beau comme du Bergman.

Johnny Guitar

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Réalisé par : Nicholas Ray (1911 - 1979)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : John Carradine (1906 - 1988), Joan Crawford (1904 - 1977), Sterling Hayden (1916 - 1986), Mercedes McCambridge (1916 - 2004)
Genre(s) : carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

C'est un western à la fois classique et étonnant. Classique parce qu'on y croise des héros de la gachette, un saloon-tripot, une attaque de diligence, un casse de banque, un projet de gare et des oppositions entre bandes. Toute la panoplie ! Et comme toujours, la loi et l'autorité sont à négocier en permanence ; ils reviennent à ceux qui ont l'énergie de s'en emparer. Mais, en même temps, tout semble nouveau : les meneurs y sont des femmes (ce qui donne lieu à un duel final iconoclaste) ; les hommes, "gun-crazy" fatigués, font la cuisine. Il faut dire que tous les éléments de la nature s'en mèlent : tempête de vent, feu de la vengeance, cascade d'eau et galeries souterraines protectrices. Je ne suis pas très fan des westerns d'habitude, mais celui-là touche à l'essentiel...

Johnny Got His Gun - Johnny s'en va en guerre

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Réalisé par : Dalton Trumbo (1905 - 1976)
En : 1971, USA
Acteurs principaux : Timothy Bottoms (1951 - ), Jason Robards (1922 - 2000), Donald Sutherland (1935 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 111 mn, NB/couleur

Critique perso :

Quand un Johnny s'en va en guerre il a... des bonheurs plein la tête, des sourires plein la mémoire. Quand un Johnny revient de guerre il a... simplement eu pas d'bol et puis voilà. Mauvaise nouvelle : vivant certes, mais aveugle, sourd, manchot et cul-de-jatte. La bonne : comme il n'a plus de visage, il ne risque pas de s'enrhumer. Johnny est un légume, mais c'est un légume pensant. Aux mains de bouchers en uniformes, et de gentilles infirmières. Il vit dans sa tête ce qui lui reste à ne pas vivre. Filmer une âme en caméra subjective, c'est toujours un peu casse-gueule (à part pour Antonioni qui ne sait faire que ça). Mais celle du soldat inconnu de toutes les guerres du monde valait bien la flamme des projecteurs.

Joueur d'échecs (Le)

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Réalisé par : Jean Dréville (1906 - 1997)
En : 1938, France
Acteurs principaux : Françoise Rosay (1891 - 1974), Conrad Veidt (1893 - 1943)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 70 mn, NB

Critique perso :

Vision politique : la Pologne du XVIIIème siècle (et d'ailleurs) est la marionnette de Moscou. Catherine II -que Françoise Rosay reprend là où Marlene l'avait laissée- reigne en maîtresse. Son amant du moment, le genre gras, borgne et vulgaire éructant contre les turcs, nous rappelle vaguement quelqu'un. Mais le petit pays résiste encore et toujours... Vision scientifico-fantastique : il se trouve un allié en la personne de Kempelen, savant excentrique qui préfère vivre avec les avatars à ressorts qu'il fabrique plutôt qu'avec leurs originaux (l'original, c'est lui). Vision mystique : le créateur finit par s'incarner dans sa créature, et se sacrifier pour elle. Précurseur sans en avoir l'air d'Astérix et de Second Life (entre autres), c'est encore mieux que dans mon souvenir ébloui de cinéphile en couettes.

Pied Piper (The) - Joueur de flûte (Le)

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1972, Angleterre
Acteurs principaux : Donovan (1946 - ), John Hurt (1940 - 2017), Donald Pleasence (1919 - 1995)
Genre(s) : conte de fées relooké /du Moyen-Age à 1914 /en avant la musique /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, NB

Critique perso :

Dans un Moyen-âge crapoteux en proie aux démons de la cupidité et de la guerre, circule, comme un ilôt d'innocence, une troupe de baladins en roulotte. C'est à Hamelin qu'ils débarquent. Les rats, porteurs d'un méchant virus, sont arrivés avant eux. A l'intérieur des remparts, d'autres rats à figure humaine s'affairent. Seule la flûte magique (et enchantée) d'un musicien parviendra à sortir la ville de la mouise. Mais l'impressario improvisé du coin ne respecte pas son contrat : malheur à la population ! Avec cette légende sombre comme un cauchemar, on est plus proche du 7ème sceau que de Peau d'âne. Jacques Demy dévoile enfin son côté obscur. Perçoit-il l'arrivée prochaine d'une nouvelle peste dont il sera lui-même la victime (il mourra du sida) ? En tous cas, il réussit aussi bien à désenchanter les contes de fée qu'il savait rendre le réel merveilleux.

Day at the Races (A) - Jour aux courses (Un)

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Réalisé par : Sam Wood (1883 - 1949)
En : 1937, USA
Acteurs principaux : Margaret Dumont (1889 - 1965), Allan Jones (1907 - 1992), Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961), Maureen O'Sullivan (1911 - 1998)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 111 mn, NB

Critique perso :

Maintenant qu'on sait où ils passent leurs nuits, restait à savoir ce qu'ils font de leurs journées. Et bien, ils sont en clinique privée -chauffeur-livreur-homme à tout (dé)faire et vétérinaire-chevalier servant pour vieille bique friquée, respectivement. Et pour celui qui reste, jokey au champ de course local (il a toujours aimé les chevaux, celui-là, cf. ici par exemple). Expliquer comment et pourquoi tout ce petit monde se retrouve constamment dans des situations perpétuellement absurdes et compromettantes, est au-dessus de mes forces (et sans intérêt). Les journées sont parfois un peu longues (surtout les inévitables pauses musicales) mais il y a quelques séquences qui méritent qu'on parie sur elles.

Vredens dag - Jour de colère

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Réalisé par : Carl Theodor Dreyer (1889 - 1968)
En : 1943, Danemark
Acteurs principaux : Lisbeth Movin (1917 - 2011), Preben Lerdorff Rye (1917 - 1995)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

On se croirait dans une série de tableaux de Rembrandt en noir et blanc. Les dialogues pourraient être extraits d’un bréviaire protestant. La vie est sobre, digne, et très très encadrée, comme dans un plan de cinéma qui bougerait pas beaucoup. Le temps s’écoule lentement en attendant l’éternité. Ca se passe à une période où on croyait encore en l’existence des sorcières, surtout certains hommes quand ça les arrangeait de se débarrasser de certaines femmes. Le pasteur de l’histoire est un de ces pieux hommes, il joue accessoirement le rôle d’inquisiteur en chef quand sa Foi l’exige. Ou alors peut-être quand sa femme, deux fois plus jeune que lui, le trompe (désolée, je spoile un peu). Ca se passe à une période où les hommes (jeunes et vieux) décidaient de tout, étaient bornés et superstitieux, tenaient les clés de la maison et les cordons de la bourse, avaient avec eux la loi et Dieu lui-même. Il y a une éternité. Mais l’éternité du cinéma est encore plus forte.

Jour de fête

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Réalisé par : Jacques Tati (1909 - 1982)
En : 1948, France
Acteurs principaux : Jacques Tati (1909 - 1982)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 76 mn, couleur

Critique perso :

Voir "Jour de fête", c'est un peu comme feuilleter l'album d'une famille qu'on aurait pu avoir. Deux jours dans la vie d'un petit village rural de l'après-guerre, avec le facteur comme trait d'union entre toutes les individualités qui le composent. L'Amérique et le cinéma tiennent le rôle du fantasme, le manège et la fête foraine celui de l'imaginaire local, un peu plus terre à terre, le village entier celui de la famille. Quant au facteur, on n'a pas forcément envie de lui confier son courrier délicat, mais on le suivrait volontiers faire éternellement le tour du pâté de maisons en répétant "Faut voir ça !".

Jour se lève (Le)

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1939, France
Acteurs principaux : Arletty (1898 - 1992), Jules Berry (1883 - 1951), Jean Gabin (1904 - 1976)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Un homme en tue un autre au seuil de son appartement haut perché. Le mort dévale l'escalier, le tueur s'enferme chez lui en attendant les gendarmes. Avant que le jour ne se lève, la nuit va être longue... Une nuit pour revoir l'essentiel de sa vie, résumée par les objets présents dans sa chambre, une petite vie d'ouvrier soudeur qui a bien le droit à sa(ses) petite(s) histoire(s) d'amour. Sauf qu'un autre homme s'en mèle toujours. C'est celui qui dévale l'escalier au début, il aime mener les hommes (surtout les femmes) et les chiens à la baguette, sa vraie profession est beau salopard. Le genre à déclencher tous les engrenages fatals. Le film qui a inventé le flash-back, le réalisme poétique, Arletty sortant de sa douche, les répliques de Prévert et les colères de Gabin : on s'incline...

On the Town - Jour à New-York (Un)

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Réalisé par : Stanley Donen (1924 - )
En : 1949, USA
Acteurs principaux : Gene Kelly (1912 - 1996), Ann Miller (1923 - 2004), Frank Sinatra (1915 - 1998)
Genre(s) : New York - New York /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

Trois marins en perm' de 24h dans le port de New-York : en moins d'une matinée, ils ont épuisé toutes les curiosités qu'il m'a fallu une semaine pour parcourir ; il ne leur reste que 3/4 de journée pour draguer quelques millions de jeunes filles. Alors que deux d'entre eux se font assez rapidement sauter dessus par deux girls pas nunuches et pas farouches (dont une Impossible Miss Baby), le troisième, lui, a plus de mal. Il tourne autour d'une "Miss Tourniquet" qui lui donne le tournis : poursuites, mensonges, RDV obligé (depuis Elle et lui) en haut de l'Emprire State Building , avant la tournée des bars de nuit. Un concentré de vie, d'énergie et de musique, comme si la forme d'une ville posait déjà sa marque sur le coeur des mortels qui arpentent ses rues.

Journal d'une femme de chambre (Le)

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Réalisé par : Luis Bunuel (1900 - 1983)
En : 1964, France
Acteurs principaux : Jean-Claude Carrière (1931 - ), Georges Géret (1924 - 1996), Jeanne Moreau (1928 - 2017), Michel Piccoli (1925 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /en France profonde /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Dans la famille Pervers Ordinaires, il y a le grand-père, fétichiste des bottines et de Huysmans. Il y a la fille, tellement riche qu'elle est frustrée de tout, et il y a son époux, tellement frustré d'elle qu'il saute sur tout ce qui bouge. Quelques domestiques aussi, bien sûr, tellement habitués aux vices de la famille qu'ils savent à peine quels sont ceux qu'ils n'ont pas eux-mêmes. Et enfin il y a Célestine, la nouvelle femme de chambre tout juste débarquée de Paris, seule âme libre de la maison. Forcément elle intrigue, Célestine, elle attire les regards, les instincts et les sollicitations. Elle est comme un tableau blanc (ou noir, à votre guise), un miroir inversé tendu à tous. Elle est aussi belle qu'ils ne le sont pas, mais malheureusement impuissante à guérir à elle toute seule toute la bonne bougeoisie de son époque.

Caro diario - Journal intime

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 1994, Italie
Acteurs principaux : Nanni Moretti (1953 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Nanni Moretti, superbe quadragénaire minoritaire, nous ouvre quelques pages de son journal, en images qui bougent et en musiques. D'abord, il nous fait son Roma à lui, en vespa et en musique -avec au passage un coucou à Flashdance (ça, désolée, je ne l'ai pas en stock) et un au-revoir à Pasolini. Après, il nous fait son Stromboli à lui -en musique aussi, mais moins dansant. Et puis, la musique s'arrête (lui aussi) et il frole la mort pour de bon, avant de nous réserver son plus beau sourire (avec les yeux). Ce truc inclassable à la pemière personne, toujours en mouvement, ne raconte rien et ne ressemble à rien. C'est une espèce de testament anthume qui laisse le sentiment d'avoir fait une rencontre inoubliable. Avec un superbe quadragénaire minoritaire, vraiment vivant.

Giornata particolare (Una) - Journée particulière (une)

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Réalisé par : Ettore Scola (1931 - 2016)
En : 1977, Italie
Acteurs principaux : Sophia Loren (1934 - ), Marcello Mastroianni (1924 - 1996)
Genre(s) : pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 110 mn, NB/couleur

Critique perso :

Au début : bandes d'actu d'époque, qui commentent la triomphale visite de courtoisie du Fuhrer au Duce. On se croirait dans un remake pas drôle de To Be or Not to Be ou du Dictateur. Puis : début d'une journée pas comme les autres pour Antonietta, une ménagère romaine de moins de 50 ans -mais avec 6 gamins et 2 000 ans de machisme sur le dos. Sa marmaille et son mari s'en vont faire le salut fasciste au camarade visteur, en compagnie de la totalité de leur immeuble. Tous ? Non, un homme est resté là, aussi, dans l'appartement d'en face, au milieu de ses livres, dans un autre monde. Grâce à un oiseau en cage, à une concierge à moustache et à quelques malentendus, Antonietta et Gabriel s'échangent quelques mots, et même un peu plus, et même ce qu'ils n'ont pas, sur fond de discours militaires et de musique martiale. A peine une étincelle, le temps de croire que Trois Mousquetaires peuvent quelque chose contre deux tyrans. Rien, mais qui sauve l'honneur. Rien, mais qui change la vie.
PS : Honte aux DVDs René Chateau, qui ne proposent que la VF, et même pas avec la voix de Mastroianni !

Jules et Jim

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1962, France
Acteurs principaux : Marie Dubois (1937 - 2014), Jeanne Moreau (1928 - 2017), Henri Serre (1931 - ), Oskar Werner (1922 - 1984)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

Jules, germanique mélancolique, tombe en amitié avec Jim, dandy français. Ils fréquentent Shakespeare, les cafés et beaucoup de jolies parisiennes. Ils vivent à toute vitesse. Le jour où ils rencontrent Catherine, elle leur rappelle quelque chose comme l'image de la beauté. C'est la première qui court plus vite qu'eux : Jules l'épouse. Ils font bien de se dépêcher, la Grande Guerre arrive. Puis les fluctuations du désir et le tourbillon de la vie. Ce film est une merveille de drame léger. Il est raccord avec ces stock-shot des années folles qui y sont intégrés, et qui montrent la vie en accéléré, comme en courant, à 23 images/seconde. Il est raccord aussi avec le présent de la mémoire, le goût de la liberté et la saveur inoubliable du bonheur en allé.

Giuletta degli spiriti - Juliette des esprits

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1965, Italie
Acteurs principaux : Giulietta Masina (1920 - 1994)
Genre(s) : jeu dans le jeu /poésie en image
Caractéristiques : 137 mn, couleur

Critique perso :

A quoi pense la ménagère (italienne, bourgeoise) de moins de 50 ans ? A se faire belle pour son mari, à entretenir son intérieur, à sourire tout le temps. Mais le mari, semble-t-il, a d'autres préoccupations. Depuis quelques années, Fellini est passé maestro dans l'art de filmer la vie intérieure. Ici, il tente, avec beaucoup de bonne volonté, de trouver une forme aux fantasmes raisonnables de la sainte femme qui partage sa vie. Pour elle, il fait parler des esprits frappeurs et un gourou hermaphrodite. Il ridiculise ses copines pétasses, sa famille de pétasses, sa pétasse de voisine. Il moque ses souvenirs de petite fille modèle et sourit de son grand-père volage. Il lui offre plusieurs figures d'amant idéal sur un plateau (elle ne se sert même pas). Il lui dit d'être, enfin, actrice de sa vie. Espérons qu'elle a entendu le message qu'elle a joué.

Juliette ou la clef des songes

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1951, France
Acteurs principaux : Jean-Roger Caussimon (1918 - 1985), Suzanne Cloutier (1923 - 2003), Roland Lesaffre (1927 - 2009), Gérard Philipe (1922 - 1959), Yves Robert (1920 - 2002)
Genre(s) : conte de fées relooké /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /poésie en image
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Un jeune homme en prison, beau comme Gérard Philippe, s'évade en douce pendant son sommeil, en rejoignant en rêve un mystérieux village où le temps s'est arrêté et où tout le monde est à la recherche de sa mémoire. Il a bien envie d'y rester, d'autant qu'il vient d'y rencontrer la jeune fille de ses rêves (c'est bien la moindre des choses), belle comme Suzanne Cloutier. Il a assez de mémoire pour tout le monde, mais ça présente aussi quelques inconvénients. Bon, on n'est pas vraiment dans Paprika ou dans Inception, mais il y a de ça quand même. En fait, c'est plutôt un remake caché du Jour se lève, où l'imagination prend la place du passé -avec le même mode d'emploi au début, pour ne pas larguer les spectateurs. Un poil de Magicien d'Oz, aussi, sans les couleurs. Tentative pour passer du réalisme poétique à la poésie réaliste. La magie et les grands sentiments sont un peu laborieux mais il y a de ça quand même.

Juno and the Paycock - Junon et le paon

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1930, Angleterre
Acteurs principaux : Sara Allgood (1879 - 1950)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 85 mn, NB

Critique perso :

Pour fêter le début du cinéma parlant, Hitchcock, déjà gros mais pas encore grand, se lance, comme il fera souvent, dans l'adaptation d'une pièce de théâtre contemporaine à succès... et oublie par la même occasion les règles les plus élémentaires de sa vraie langue, ce parler en images qu'il a commencé à inventer. C'est peu dire que la pièce a peu d'intérêts et que le film est raté : un mélo irlandais vaguement socio-politque, en huis clos sordide, chez des prolos au fond du trou, le tout à cause du manque de sens de responsabilité des hommes de la famille. Ca commence comme une comédie pas drôle et ça se termine en drame pas touchant. Quand il fait chanter ses personnages, c'est même pas sous la menace, c'est juste pour tester ses micros. Zéro mystère, pas un pence de suspense ni un gramme d'ambiguïté : qu'est allé faire Hitch dans cette absence de galère ?

Juste avant la nuit

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Réalisé par : Claude Chabrol (1930 - 2010)
En : 1971, France
Acteurs principaux : Stéphane Audran (1932 - 2018), Michel Bouquet (1925 - ), Jean Carmet (1921 - 1994), François Périer (1919 - 2002)
Genre(s) : pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Dans une rue gris-bleue, des volets clos. "Viens Charles, tue-moi !" fait la femme toute nue à quatre pattes sur un lit. Aussitôt demandé, aussitôt fait, par Charles. Faut dire, la dame avait un prénom de garce : Laura et un nom de mère maquerelle : Tellier (enfin, je dis rien, c'est aussi le mien). Charles, lui, est le meilleur ami du mari. C'est par ailleurs un excellent père et très bon mari, parfait bourgeois sans vagues. Un peu dépressif, tout de même, le Charles, depuis le passage à l'acte. Au point d'en arriver à tout avouer à sa femme, puis au mari. Mais, dans ce milieu gris-bleu, la passion et la culpabilité n'existent pas. Pareil écart est tout simplement inconcevable. Surtout pas de vagues. Une traversée glaçante au-dessus d'un abîme bouillonant.

Jésus de Montréal

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Réalisé par : Denys Arcand (1941 - )
En : 1989, Canada
Acteurs principaux : Lothaire Bluteau (1957 - ), Rémy Girard (1950 - ), Yves Jacques (1956 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 118 mn, couleur

Critique perso :

Quelle mouche a bien pu piquer l'auteur du Déclin de l'empire américain pour qu'il se lance ainsi, lui le chantre des intellos libertins, dans un Jésus au pays du show-biz -anticlérical certes, mais très fidèle aux Evangiles ? En fait, il parle toujours de la même chose : des fondements de la civilisation occidentale (la raison, la foi) et de ce qui la menace (l'argent, le commerce des corps). Et par la même occasion, il rend hommage aux acteurs de théâtre, à Dostoievski, à l'Homme qui en savait trop et à To Be or Not to Be. Pour tout cela, il lui sera beaucoup pardonné.

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K


Kermesse héroïque (La)

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Réalisé par : Jacques Feyder (1885 - 1948)
En : 1935, France
Acteurs principaux : André Alerme (1877 - 1960), Louis Jouvet (1887 - 1951), Françoise Rosay (1891 - 1974)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

On serait à l'âge d'or du cinéma français. On aurait réuni un casting de rêve et on s'amuserait à imaginer le générique parfait : Molière au scénario, Bruegel aux décors et aux costumes, Rembrandt à la lumière... Voilà qui nous orienterait vers le XVIIème siècle, et vers les Flandres. Pourquoi pas une histoire de troupe espagnole à la mode Velasquez, qui prendrait ses quartiers dans une toile de Vermeer, par exemple : choc des cultures et guerre des parures. Luxe, ripaille et volupté. Un peu de féminisme dans le tableau, tout de même, pour montrer que c'était pas rigolo tous les jours. Mais on arriverait encore à croire à la paix des peuples. Cinq ans plus tard, certes, on n'y croirait plus : cette histoire d'occupation libératrice, non, ça ne serait plus possible. Mais là, elle arrive à nous rendre inguérissablement nostalgique d'un l'âge d'or qui n'a jamais existé.

Kid (The)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1921, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977), Jackie Coogan (1914 - 1984), Edna Purviance (1895 - 1958)
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 50 mn, NB

Critique perso :

Les gosses, ça tombe toujours du ciel quand on ne s'y attend pas. C'est ce qu'a l'air de se dire une triste fille-mère, à la sortie de l'hospice où elle vient d'accoucher. C'est ce que se disent, ensuite, deux voleurs de voiture mal inspirés. C'est ce que se dit, enfin, un petit homme à moustaches et à grandes chaussures. Le petit de la fille-mère devient donc le petit du petit homme. Bientôt, il a acquis ses bonnes manières : il sait semer les policiers et faire cuire les pancakes. Il est presque aussi bon comédien que lui. Le petit homme, ça lui donne des ailes. Après, pour relancer l'histoire, d'autres personnages tombent du ciel : des travailleurs sociaux, une gentille marraine, une ange coquine. Premier long métrage venu de la galaxie Chaplin. Une bonne étoile, à suivre.

Kidzu ritan - Kids Return

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Réalisé par : Takeshi Kitano (1947 - )
En : 1996, Japon
Acteurs principaux : Susumu Terajima (1963 - )
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

C'est deux potes de lycée qui font Les 400 coups. Quand ils grimpent sur le même vélo, ils semblent ne former qu'un seul corps : deux petites têtes, quatre grandes jambes. Mais pour aller où ? Au bahut ils sèchent, rackettent, glandouillent, mal partis pour devenir pas grand chose. Pour jouer aux durs, ils se mettent à la boxe. Le plus doué n'est pas forcément celui qu'on croit (comme Rocco). A leur âge, tous les chemins ont l'air ouverts. Ils sont tous, aussi, durs et cruels. A coup d'ellipses fulgurantes et d'éclats de rire noirs, Kitano fait le portrait de sa jeunesse et des vies qu'il a grillées. Coup de bol, il lui en est restée une pour faire l'artiste.

King Kong

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Réalisé par : Cooper & Schoedsack
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Fay Wray (1907 - 2004)
Genre(s) : New York - New York /conte de fées relooké /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Dans une île lointaine, une peuplade humaine survit sur une petite portion de territoire. Le reste est isolé par un haut mur et il s'y passe de drôles de choses. Le roi de ce monde perdu primitif s'appelle Kong : 6m de force brute et d'instincts à l'état pur. Des fois qu'on n'aurait pas compris, il est précisé que l'île a la forme d'un crâne... Les petits blancs qui y débarquent apportent avec eux les atouts de la civilisation occidentale : des armes lourdes, une caméra et une blonde. Avec elle, Kong va apprendre à jouer à la poupée Barbie, et à faire son plus beau sourire... Après, il est presque impossible d'ignorer qu'il finira sa vie dans une autre jungle (celle de New-York), au sommet de l'Empire State Building (où on peut encore se faire photographier en sa compagnie), avec toute notre sympathie. C'était au temps béni où les effets spéciaux n'étaient pas encore ennemis de la poésie et de l'émotion.

Kuch Kuch Hota Hai

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Réalisé par : Karan Johar (1972 - )
En : 1998, Inde
Acteurs principaux : Kajol (1974 - ), Shahrukh Khan (1965 - ), Anupam Kher (1955 - ), Rani Mukherjee (1978 - )
Genre(s) : Bollywooderie /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 177 mn, couleur

Critique perso :

Il y a 9 ans, comme l'apprend la fille qu'ils n'ont pas eu ensemble, Rahul et Anjali étaient les meilleurs amis du monde (mais c'était toujours elle qui gagnait au basket). Et puis, maman est arrivée. Et puis, la fifille est née et maman est morte (je ne révèle aucun secret, c'est au début). Il serait temps de retrouver la trace d'Anjali... Ca tombe bien : elle s'est laissée pousser les cheveux et, de garçon manquée, est devenue une fille très réussie. Avant de se marier, elle doit s'occuper toute seule d'une centaine de gamins dans un camp de vacances... Moitié "college movie", moitié film de colo : le public visé est plutôt jeune. Habilement construit, c'est un plaidoyer sympatoche pour la diversité des sentiments (amour-amitié, relations triangulaires) qui s'arrête juste au seuil de plus grandes audaces (le réalisateur serait un peu gay que ça n'étonnerait personne). Sympa-pa-toc, donc.

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L


L.A. Confidential

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Réalisé par : Curtis Hanson (1945 - 2016)
En : 1997, USA
Acteurs principaux : Kim Basinger (1953 - ), Russell Crowe (1964 - ), Danny DeVito (1944 - ), Kevin Spacey (1959 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /cadavre(s) dans le(s) placard(s)
Caractéristiques : 138 mn, couleur

Critique perso :

Trois cops de Los Angeles années 50, entre glamour et trafics. Trois styles : le costaud cogneur aux yeux de chien battu, le mondain compromis avec la presse, le premier de la classe à lunettes. Des stars (Lana Turner, Rita Hayworth, Veronica Lake) qui font de la figuration -à moins que ça ne soit leur sosie, on n'en sait rien, c'est du cinéma. De l'amour et du sang. Une belle histoire tordue comme on n'en avait plu vu depuis Le Grand Sommeil (cette fois, en écoutant bien, on arrive même à savoir qui a tué le chauffeur !). Une variation sur le thème de la légitime violence qui vaut bien celle de Rio Bravo. Un grand film comme, heureusement, on en fait encore !

Laberinto del fauno (El) - Labyrinthe de Pan (Le)

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Réalisé par : Guillermo del Toro (1964 - )
En : 2006, Mexique
Acteurs principaux : Sergi Lopez (1965 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /poésie en image
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Y'a des moments dans la vie, dans l'Histoire, où on doit être bien content d'avoir son pass pour le Pays des Merveilles. Ofélia a à peu près l'âge d'Alice, et elle habite dans un de ces moments-là, au milieu d'une inquiétante forêt, parmi des militaires en uniforme, à la fin de la guerre d'Espagne. Elle a aussi deux fées-marraines, un petit frère en cours de cuisson et beaucoup d'imagination. Des fois, elle arrive même à croire à l'existence de ses parents -enfin, ça dépend des quels. La forêt autour est peuplée de gentils communistes et de méchants crapauds, de demi-Dieux et de complets salauds. Des fois, il est tortueux, le labyrinthe de la vie des petites filles, la moindre avancée est une épreuve. Ce remake updaté par ordinateur de l'Esprit de la ruche remet à jour toutes ses peurs d'enfants, et aussi tout l'émerveillement qu'on s'est créé pour s'en remettre. En provenance directe du Pays des Merveilles du cinéma.

Lady Oscar

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1979, Japon
Acteurs principaux : Catriona MacColl (1954 - ), Lambert Wilson (1958 - )
Genre(s) : Paris /du Moyen-Age à 1914 /jeu dans le jeu /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 124 mn, couleur

Critique perso :

Il était une fois au XVIIIème siècle, un aristocrate old school qui en a marre de faire des filles, et qui décide donc d'appeler la dernière Oscar. La demoiselle, qui en prend pour 20 ans de psychanalyse, devient donc une escrimeuse redoutable au service très rapproché de Marie-Antoinette. Elle affole son nigaud de copain d'enfance roturier, trouble l'amant de la reine et pas mal d'autres courtisan(ne)s, mais reste inflexible sur les principes, allant même jusqu'à boxer un certain Maximilien de Robespierre qui lui a manqué de respect. Mais un petit coeur bat pourtant sous son uniforme d'opérette. Les malheurs de la France et les beaux yeux d'André (le copain d'enfance) ne la laissent finalement pas indifférente. Après qu'une telle forteresse soit tombée, la prise de la Bastille est presque une formalité. Mais c'est une autre Histoire...

Ladybird Ladybird - Ladybird

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Réalisé par : Ken Loach (1936 - )
En : 1994, Angleterre
Acteurs principaux : Crissy Rock (1958 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 101 mn, couleur

Critique perso :

Au bout de 2mn, n'importe quel spectateur normalement constitué devrait déjà sentir l'eau salée lui monter aux pupilles. Maggie chante dans un karaoké, et c'est comme si sa vie en dépendait. D'ailleurs, c'est le cas. Heureusement, il y a au moins un bon gars dans le pub qui s'en rend compte. On apprend, avec lui, ce qui bout dans Maggie : 4 enfants, de 4 pères différents, placés dans 4 foyers différents. Un passé lourd comme une enclume et comme les coups de poing qu'elle a déjà largement encaissés. La bon gars va s'employer à alléger les souvenirs, et à fabriquer avec elle d'autres enfants, puisqu'il n'y a que comme ça que Maggie se sent vivante. Toujours borderline, toujours en rage, mais toujours vivante. Au bout de 2h, si vos yeux ne se sont pas complètement noyés dans un océan d'eau salé, c'est que vous n'êtes pas un spectateur normalement constitué.

Lagaan: Once Upon a Time in India - Lagaan

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Réalisé par : Ashutosh Gowariker (1968 - )
En : 2001, Inde
Acteurs principaux : Aamir Khan (1965 - )
Genre(s) : Bollywooderie /conte de fées relooké /du Moyen-Age à 1914 /en avant la musique
Caractéristiques : 224 mn, couleur

Critique perso :

Le "lagaan", c'est l'impôt que les méchants colons anglais prélevaient sur les récoltes des gentils paysans indiens à la fin du XIXème siècle. Or, la mousson a du retard et les récoltes s'annoncent lamentables. Les paysans quémandent un répit, ils récupèrent de la part du méchant colon (un faux air de Romain Duris) une promesse absurde : exemption du lagaan s'ils arrivent à battre les anglais au cricket. Le vaillant leader des gentils paysans (un faux air de Tobey Maguire) relève la défi... Là, je dois le dire, ça manque un peu de crédibilité : à moins d'avoir été initié depuis son berceau, ce jeu est incompréhensible. Dommage qu'ils n'aient pas plutôt récupéré un concours de danse folklorique, ça aurait pu être plus entrainant. Chaque camp a droit à son traitre : une gentille traitresse anglaise initie les joueurs, un méchant traitre indien (mais qui se repent...ouf !) informe les English. On ne se doute pas du tout du dénouement. A la compet' avec Hollywood, le cinema made-in-Bombay montre ses plus beaux atours.

Land and Freedom

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Réalisé par : Ken Loach (1936 - )
En : 1995, Angleterre
Acteurs principaux : Ian Hart (1964 - ), Frédéric Pierrot (1960 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /portrait d'époque (après 1914) /épique pas toc
Caractéristiques : 109 mn, couleur

Critique perso :

Liverpool 1995 : un vieil homme meurt, ça n'intéresse pas grand monde à part sa petite-fille. Espagne, 1936 : le même, en plus jeune, militant communiste enthousiaste, vient offrir ses petits bras à la cause républicaine. Il rejoint le POUM, un groupe de prolétaires de tous pays unis dans la lutte, un peu anars, un peu révolutionnaires, rouges et noirs comme leurs foulards. Le problème, c'est qu'on ne fait pas une bonne révolution avec de bonnes intentions. Il faut aussi apprendre à utiliser des pétoires, à se méfier de ses alliés et à essayer de suivre les aléas des intérêts russes. Ken Loach est bien le seul à être capable de démèler dans un film les querelles crypto-trotkistes. Il est le seul à pouvoir faire sentir ce que frères d'armes veut dire. Il est le seul à filmer l'histoire comme un documentaire, et à voir dans les papys de son pays des héros pour la jeunesse d'aujourd'hui.

Lantana

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Réalisé par : Ray Lawrence (1948 - )
En : 2001, Australie
Acteurs principaux : Barbara Hershey (1948 - ), Anthony LaPaglia (1959 - ), Geoffrey Rush (1951 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 121 mn, couleur

Critique perso :

Il semblerait que le lantana soit un buisson australien, une sorte de rosier avec des roses petites et des épines beaucoup. Il semblerait que les quadras australiens soient autant en désarroi que partout ailleurs. Ils parlent, ils font. Ils savent très bien ce qu'ils font. Ils savent très bien ce qui (les) fait souffrir, mais ils ne sont pas foutus de faire autrement. Ni de dire ce qu'ils ont à dire à ceux qui doivent l'entendre. Petites lâchetés, petites méprises, gros dégâts. Il y a une victime, il y a une enquête, mais là n'est pas l'essentiel. L'essentiel est dans la mosaïque des désirs frustrés, dans le puzzle des impuissances rageuses, dans le lantana des coeurs déchirées.

Laura

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1944, USA
Acteurs principaux : Judith Anderson (1897 - 1992), Dana Andrews (1909 - 1992), Vincent Price (1911 - 1993), Gene Tierney (1920 - 1991)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /la parole est d'or /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 88 mn, NB

Critique perso :

Le Lieutenant-détective McPherson -type homme d'action taciturne-, rend visite au chroniqueur mondain Waldo Lydecker -type homme de lettres fielleux-, dans sa baignoire. Et sourit. La guerre du carnet de notes contre la machine à écrire commence. L'enquête porte sur le meurtre d'une certaine Laura, avec qui Waldo a joué à Pygmalion. Il y a aussi Shelby, qui était son ex-futur potentiel époux. Elle valait le coup, Laura, à en juger par son portrait dans le salon, qui a l'air d'aimanter tous les hommes qui passent à proximité (en le regardant, ils finissent tous par se servir un whisky). Une femme de rêve, un rêve de femme, une musique entêtante qui s'insinue partout. Le temps s'inverse, se retourne et n'en finit pas de ne pas s'arrêter : on appelle ça un classique.

Letter from an unknown Woman - Lettre d'une inconnue

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Réalisé par : Max Ophüls (1902 - 1957)
En : 1948, USA
Acteurs principaux : Joan Fontaine (1917 - 2013), Louis Jourdan (1919 - 2015)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Vienne, 1900. Stefan, grand séducteur et petit pianiste, se prépare à fuir bravement de chez lui pour échapper à un duel. Et voilà que lui parvient une longue lettre -la lettre d'une vie. La signature ne lui dit rien et pourtant c'est celle d'une femme qui a mis toute son existence sous le signe de sa pâle étoile : adolescente, elle a guetté ses moindres pas, jeune fille, elle s'est donnée à lui juste avant -pas de chance !- qu'il ne parte pour une longue -très longue- tournée. Femme mûre, elle a croisé une fois encore sa route... L'éternelle histoire de la groupie du pianiste : rien de tel que de fréquenter un minable pour entretenir une âme sublime (et un peu maso quand même). Mon coeur de midinette ne s'en est jamais remis.

Piano (The) - Leçon de piano (La)

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Réalisé par : Jane Campion (1954 - )
En : 1993, Nouvelle-Zélande
Acteurs principaux : Holly Hunter (1958 - ), Harvey Keitel (1939 - ), Sam Neill (1947 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /vers le soleil levant
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Ca se passe au XIXème siècle en Nouvelle-Zélande. Quand les frèles corps d'Ada et de sa petite fille débarquent sur une plage, aux portes d'une forêt sauvage, pour un mariage arrangé, on ne donne pas cher de leurs peaux douces. D'autant qu'Ada est muette et qu'on la sépare tout de suite de son piano, sa voix, son âme, qui échoue par marchandage chez un voisin analphabète. Alors, il va lui falloir tout reconquérir : son indépendance, son art, sa vie, au prix de quelques sacrifices. Elle a tout à apprendre mais c'est elle qui donne les leçons et c'est ça qui la sauve. L'art et de la barbarie, les corps et la nature enfermés dans un bocal : c'est la recette de la passion.

Dangerous Liaisons - Liaisons dangereuses (Les)

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Réalisé par : Stephen Frears (1941 - )
En : 1988, USA
Acteurs principaux : Glenn Close (1947 - ), John Malkovich (1953 - ), Michelle Pfeiffer (1958 - ), Uma Thurman (1970 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Ce sont des experts en cruauté, des docteurs ès alcôves, des professionnels du coeur humain. Ils s'appellent Valmont et Merteuil, respectivement Vicomte et Marquise de. Ils ont compris avant tout le monde que le pouvoir repose sur le contrôle de la circulation de l'information (à l'époque : la correspondance). Ils sont persuadés de reigner sur leurs propres sentiments mais c'est à force de se mentir à eux-mêmes. Ils sont pervers, raffinés, libertins. Extrêmement brillants. Ils se lancent des défis absurdes, dans le seul but de faire souffrir. Ils y arrivent souvent. Ils vivent dans le plaisir et sont malheureux comme des chiens. Le film n'est pas complètement à la hauteur du livre, mais quelque chose de la fine fleur de l'esprit français y passe malgré tout.

Staroye i novoye - Ligne générale (La)

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1929, Russie
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /entre Berlin et Moscou
Caractéristiques : 121 mn, NB

Critique perso :

Petit docu-drama tout ce qu'il y a de plus objectif sur les bienfaits de la collectivisation dans les campagnes, les mérites du camarade Lénine et la force irrésistible du progrès soviétique. Et qui, heureusement, se transforme souvent en terrain expérimental sur le montage et sa force métaphorique. Il sera ainsi permis de sourire devant les faces hilares de femmes éclaboussées de lait par une écrèmeuse. Et puis, ce n'est pas tous les jours qu'on peut assister à une saillie de taureau en caméra subjective ! Quand la révolution à l'est avait encore un visage humain.

Thin Red Line (The) - Ligne rouge (La)

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Réalisé par : Terrence Malick (1943 - )
En : 1998, USA
Acteurs principaux : Adrien Brody (1973 - ), John Cuzack (1966 - ), Elias Koteas (1961 - ), Sean Penn (1960 - ), John C. Reilly (1965 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 170 mn, couleur

Critique perso :

Des hommes, des crocodiles et des grands arbres. On entend des chants indigènes qui ont l'air de souhaiter la bienvenue au paradis. Mais derrière la colline, un peu plus loin, il y a des japonais et des canons. C'est la guerre à Guadalcanal, Hollywood y a dépêché un bataillon de ses meilleurs représentants (mâles exclusivement). Ce sont des soldats qui, le matin en se rasant ou le soir au coin du feu, parlent du sens de la vie plutôt que de leurs photos de pin-up. Des hommes qui doutent, qui pensent donc qui sont. La ligne rouge, c'est sans doute celle qui les sépare de la nature. Ou de leur propre nature, de leur propre barbarie. Ou de leur propre mort. C'est la ligne à suivre pour aller derrière la colline. En tout cas, de celles qu'on franchit diffcilement, à contre coeur. C'est la ligne de l'ennemi, c'est son sang -ou le mien. Un film de guerre philosophique, beau, terrible et assez pompeux, comme il se doit.

Lili Marleen

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Réalisé par : Rainer Werner Fassbinder (1945 - 1982)
En : 1981, Allemagne
Acteurs principaux : Rainer Werner Fassbinder (1945 - 1982), Hanna Schygulla (1943 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Armée d'une pauvre chanson de cabaret recyclée, Willie, modeste employée de bastringue (mais beau cul), traverse la guerre presque sans encombres. Malgré un amant juif, elle a des protecteurs à galons et des millions de fans, ce qui compense largement. Elle en perd son nom, pour s'identifier à celui de sa chanson. C'est fou le nombre de soldats morts en l'écoutant -sans compter ceux qui écoutaient Marlene chanter la même chose, de l'autre côté des lignes. C'est fou le nombre de vitres, parois et cloisons qui la séparent de la réalité. Fassbinder regarde l'Allemagne dans le miroir de son passé nazi et il ne l'aime pas. Il la trouve futile et vulgaire. Otage de sa pompe, vendue au confort, pas sortie de ses rêves de midinette.

Baby Face - Liliane

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Réalisé par : Alfred E. Green (1889 - 1960)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Barbara Stanwyck (1907 - 1990), John Wayne (1907 - 1979)
Genre(s) : New York - New York /Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 71 mn, NB

Critique perso :

Lily a été élevée -si on peut dire- à la dure. Son papa tient une espèce de bistrot, mais il tire surtout ses clients, et ses revenus, des beaux yeux -et de la jolie silhouette- de sa fille. Il y a tout de même, parmi les clients, des gens qui savent lire. Y'en a même un à l'accent allemand qui offre à Lily "La volonté de puissance" pour la draguer, c'est dire (un nietzschéen revendiqué dans un film américain ? on hallucine...). Un fois le papa parti brûlé en enfer, c'est le moment pour Lily de trouver une situation à la hauteur de ses talents. Direction New York, donc, et le plus haut building qu'elle peut trouver. Plein d'hommes, cela va sans dire, qui ne manquent pas non plus de remarquer ses compétences et sa jolie silhouette -ni ses beaux yeux bien sûr, qui n'ont jamais froid, malgré leur air innocent. Son ascension sociale fulgurante se mesure à la sophistication de sa coiffure, au poids de ses fourrures et au numéro de l'étage où elle est affectée. Les choses vraiment sérieuses commencent au niveau des chefs, pères et fils... Film (dé)culotté typique de l'époque pré-code Hays (tellement qu'on hallucine !).

Little Big Man

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Réalisé par : Arthur Penn (1922 - 2010)
En : 1970, USA
Acteurs principaux : Faye Dunaway (1941 - ), Dustin Hoffman (1937 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /carrément à l'ouest /conte de fées relooké /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 139 mn, couleur

Critique perso :

Ce serait le Jeanne Calment américain : dernier survivant de la bataille de Little Big Horn, petit par la taille, grand par le coeur, Little Big man. Ce serait le condensé de tous les destins possibles de son temps : fils de pionnier devenu indien Cherokee, enfant de coeur, colporteur douteux, as de la gachette, commerçant honnète, trappeur solitaire et pisteur de cavalerie. Capable de tout, sauf de tuer un homme. Précurseur de Zelig (pour sa capacité d'adaptation) et de Forrest Gump (pour ses rencontres prestigieuses), blanc chez les rouges, rouges chez les blancs : Candide au Far West. Ce serait toute la mémoire du western, toute la mémoire de l'Amérique : un enfant de 121 ans.

Little Odessa

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Réalisé par : James Gray (1969 - )
En : 1994, USA
Acteurs principaux : Vanessa Redgrave (1937 - ), Tim Roth (1961 - )
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

Little Odessa, Brooklyn, New-York. Joshua y est né, y a aimé, y a tué. Ca a dû lui plaire, il en a fait son métier. Pour cela, son père l'a bani et renié. Mais il est pourtant de retour, pour un contrat. Et pour revoir sa maman et son petit frère. Little Odessa : il neige et il fait froid, comme là-bas mais en moins pire, sans doute. Les petits Parrains y reignent -comme là-bas aussi, sans doute. Ici, les juifs sont d'ici sans en être, comme partout. Ils aiment, ils souffrent, ils tuent, comme tout le monde. A la recherche de son Eden perso, du vert paradis de ses amours enfantines, Joshua ne trouve que désolation et éternel recommencement du malheur. Une antique tragédie biblique déguisée en polar noir -ça lui va bien.

Lola

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1961, France
Acteurs principaux : Anouk Aimée (1932 - ), Elina Labourdette (1919 - 2014), Corinne Marchand (1937 - ), Marc Michel (1929 - 2016)
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 85 mn, NB

Critique perso :

Roland, dandy glandeur, rencontre Cécile, une ancienne copine devenue maman et putain, dans le passage Pommeraye. La demoiselle de Nantes se fait appeler Lola, couche avec un marin américain de passage tout en attendant Michel, son premier et son seul amour. Or, justement, Michel est en ville après 7 ans d'absence (tiens, c'est l'âge d'Yvon, le fils de Lola), tandis que plusieurs autres Cécile guettent le grand amour au coin de la rue. Y'a plus qu'à regarder chacune chercher son chacun. Demy, déjà, sait y faire. On peut faire confiance à ses talents de marionnettiste, pour ne pas emmèler les fils de son intrigue virtuose : il arrive à concentrer en 3 jours et en quelques personnages toutes les étapes de la vie d'un coeur. Initialement, il voulait faire une comédie musicale en couleur. Il se contente finalement d'une épure en noir et blanc, tournée sans son mais pas sans brio : à défaut de choristes, c'est la caméra qui danse avec les acteurs et la lumière qui chante avec la ville.

Lolita

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1962, USA
Acteurs principaux : Sue Lyon (1946 - ), James Mason (1909 - 1984), Peter Sellers (1925 - 1980), Shelley Winters (1922 - 2006)
Genre(s) : pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 147 mn, NB

Critique perso :

Au départ, un roman sulfureux de Nabokov, journal très intime d'un amateur de nymphettes. James Mason est l'image parfaite de ce mâle entre deux âges, vague intellectuel européen venu donner des cours aux US et tombant sous le charme acidulé de la fille de sa logeuse. Pour rester auprès d'elle, il sera prêt à tout. Il finirait presque à se faire croire que leur histoire a un avenir, s'il n'y avait ce stupide et mystérieux ecrivain-caméléon (Peter Sellers, excellent, comme d'hab), qui trainait partout. C'est celui qui meurt avec une grandiose veuleurie dès la première scène. La médiocrité américaine aux mille visages, qui n'en font qu'un.

Louise-Michel

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Réalisé par : Kervern & Delépine
En : 2008, France
Acteurs principaux : Mathieu Kassovitz (1967 - ), Bouli Lanners (1965 - ), Yolande Moreau (1953 - ), Benoît Poelvoorde (1964 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 94 mn, couleur

Critique perso :

Quelque part au Nord : une usine avec des (femmes) ouvrières et quelques (hommes) patrons. Un jour, elle n'est plus là, elle est partie faire sa grande migration vers l'Est. Une seule solution : se venger du patron. Une ouvirère lambda, pas plus à l'aise pourtant avec le français qu'avec le grec, se charge de dénicher le tueur à gages idéal. Et elle le trouve, même s'il est un peu fauché tendance mégalo. Elle s'appelle Louise, il s'appelle Michel - à moins que ce ne soit le contraire. Mais les patrons ont une facheuse tendance à se délocaliser aussi vite que leurs usines. Le contrat tourne alors au road-movie artisanal. Les plans sont presque fixes mais, comme les personnages, ils cachent presque toujours quelque chose. Et le film est tellement anar qu'il mélange et inverse tous les genres. C'est de la tragédie poilante, du thriller trash, de la romance désespérée. On en ressort en se sentant tout propre, comme un gant de toilette retourné.

Ludwig - Ludwig - Le crépuscule des Dieux

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Réalisé par : Luchino Visconti (1906 - 1976)
En : 1972, Italie
Acteurs principaux : Helmut Berger (1944 - ), Trevor Howard (1913 - 1988), Silvana Mangano (1930 - 1989), Romy Schneider (1938 - 1982)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 235 mn, couleur

Critique perso :

Ludwig est un prince charmant parfait : jeune, beau, intelligent et amateur d'art, que rêver de plus. Sa cousine, c'est Sissi et c'est encore Romy qui s'y colle. Le décor et les costumes sont donc ceux d'un conte de fées. Mais il y a des toujours des vers qui se cachent dans les meilleurs fruits. Cette Sissi-là n'est pas la même que l'autre, elle ne croit pas aux princes charmants, elle vient de l'autre côté du miroir. Et le frère de Ludwig, il est encore plus beau que lui mais pas extrêmement équilibré. Et puis, il va trop loin dans les belles idées, ce prince-là : soutenir Wagner (ce débauché), construire des châteaux (immenses, somptueux et vides) en Baviève... En fait, il aime décidément trop les belles choses (et les beaux jeunes hommes) pour être honnête. C'est comme un long long opéra, filmé au ralenti, sur la décomposition d'un empire, d'une famille, d'un homme.

Yeelen - Lumière (La)

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Réalisé par : Souleymane Cissé (1940 - )
En : 1987, Mali
Acteurs principaux : Balla Keita
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /poésie en image
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Chez les Bambaras, pour devenir un homme, il faut faire connaissance avec ses ancêtres et avec leur histoire -longue et compliquée, forcément. Il faut quitter sa mère, traverser le pays et les générations, rencontrer d'autres femmes. Il faut affronter ses semblables différents et mesurer sur eux l'étendue de ses pouvoirs. Et il faut bien, un jour, affronter le "pilon magique" de son père. Chez les Bambaras, comme partout, pour devenir un homme, il faut, au moins, toute la mémoire du monde. Ce 2001, l'Odysée de l'espace à l'africaine est une machine à remonter le temps du mythe jusqu'à la lumière originaire, une Genèse animiste à la complexité biblique, belle comme une cosmogonie et universelle comme un conte.

City Lights - Lumières de la ville (Les)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1931, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Cela fait quelque temps déjà que le cinéma est devenu parlant. Et pourtant, un irréductible petit bonhomme à moustache résiste encore. Pire, il se permet de faire un film sur une aveugle qui retrouve la vue, en ignorant superbement qu'il pourrait, en plus, lui donner la parole. De quoi devenir schizo, comme ce milliardaire porté sur le whisky, dont l'amitié avec notre vagabond préféré est proportionnelle au taux d'alcool dans le sang. Charlot est décidément le seul personnage du cinéma à pouvoir ainsi cotoyer les deux visages de l'Amérique, les belles voitures et les vendeuses des rues. A pouvoir réaliser un mélo hilarant. Il n'a jamais pris la parole mais il avait encore des gestes à faire. On lui en aurait beaucoup voulu de ne pas avoir donné ce film-là.

Se, jie - Lust, Caution

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Réalisé par : Ang Lee (1954 - )
En : 2007, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Tony Leung Chiu Wai (1962 - ), Wei Tang (1979 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /portrait d'époque (après 1914) /vers le soleil levant
Caractéristiques : 157 mn, couleur

Critique perso :

Shanghai et Hong-Kong, début du XXème siècle, alors que la Chine est occupée par les japonais. Comme toujours dans ces cas-là, il y a des collabos et des résistants. M. Yee est un collabo de haut rang très très méchant et très très séduisant, un tortionnaire en chef et un homme raffiné qui a le charme noir de Tony Leung. Le rôle des résistants très très gentils qui veulent le tuer est pris par une troupe de comédiens amateurs, nationalistes et idéalistes, et par leur jeune première ingénue, la jolie Wong Chia Chi. Pour faire illusion, elle va devoir passer pro et donner -de plus en plus- de sa personne. Quand elle joue au Mah-jong avec les amies de Mme Yee, elle joue à jouer au Mah-Jong -ce qui nuit d'ailleurs sensiblement à ses performances dans ce jeu. Avec M. Ye, elle joue carrément avec le feu -en improvisant pas mal sur les règles... Avec ce Lorenzaccio érotique, l'éclectique Ang Lee refait le coup du caméléon mal dans sa peau, du taiseux dont le corps menace sans cesse de dévoiler ce que l'esprit s'acharne à dissimuler. Quelque chose à cacher, M. Lee ?

Tree Grows in Brooklyn (A) - Lys de Brooklyn (Le)

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Réalisé par : Elia Kazan (1909 - 2003)
En : 1945, USA
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 128 mn, NB

Critique perso :

Ca se passe à New-York (made in Hollywood), début XXème siècle (made in du milieu), dans un taudis réglementaire pour émigrés fraichement débarqués qui en sont encore à leur première leçon de rêve américain. C'est le genre d'histoire que doivent adorer les ex-profs de ZEP en retraite : celle de la bonne petite élève méritante, qui réussira à sortir de sa condition par sa bonne volonté, et par Shakespeare. C'est aussi le genre d'histoire que doivent adorer les artistes qui ont réussi : celle du raté pathologique (père de la précédente) qui s'est perdu dans sa bohème mais dont la fantaisie a réussi tout de même à embellir un peu la petite vie de sa modeste famille. Moins efficacement que M. Corleone, qui a dû être son voisin, mais plus honnêtement tout de même. C'est le genre d'histoire qui avait de quoi tenter le débuttant cinéaste Kazan. Il n'avait pas encore eu l'occasion de visiter tous ses côtés obscurs, mais était déjà capable de faire le genre de film social qui peut plaire à tout le monde.

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M


M - M le maudit

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1931, Allemagne
Acteurs principaux : Peter Lorre (1904 - 1964)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /entre Berlin et Moscou /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 118 mn, NB

Critique perso :

Les serial killers amateurs de petites filles ne datent pas d'hier. M en est l'archétype pour toujours. Avec ses yeux ronds, sa tête de gros bébé joufflu et ses manières délicates, on lui donnerait le Bon Dieu sans confession. Attendre quand même la confession... Cette homme met la police sur les dents et la pègre sur les nerfs -comme les deux faces d'une même médaille. Un génial montage parallèle met en regard le déploiement de leurs méthodes respectives (pour attrapper un schizophrène, mieux vaut s'y mettre à deux !). Et un marchand de ballons promis à une longue carrière cinématographique (cf. par exemple Le Troisième homme ou Minority Report) scellera le destin de M. Ce film est tellement mythique que la réalité a fini par lui ressembler.

Ma nuit chez Maud

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1969, France
Acteurs principaux : Marie-Christine Barrault (1944 - ), Françoise Fabian (1932 - ), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /en France profonde /la parole est d'or
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Jean-Louis est ingénieur depuis peu chez Michelin, à Clermont. Célibataire, il va à la messe et y remarque Françoise. Puis il croise un ancien camarade de lycée devenu prof de philo, qui l'introduit chez Maud le soir de Noël. La nuit sera animée, mais par les esprits plus que par les corps : restés seuls, Maud et Jean-Louis se font des confidences sur le pari de Pascal, dissertent sur le hasard des rencontres et la nécessité d'aimer -et se quittent au matin. Jean-Louis hésite. Entre Maud la brune libre penseuse et Françoise la blonde pieuse, sa dialectique balance. Grand film d'action sur la parole et l'engagement, comme tous les Rohmer, chaudement recommandé à tous ceux pour qui les vies de l'esprit et du coeur sont une grande aventure.

Mad Max

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Réalisé par : George Miller (1945 - )
En : 1979, Australie
Acteurs principaux : Mel Gibson (1956 - )
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 88 mn, couleur

Critique perso :

Au début, on comprend rien. Y’a des types qui se coursent les uns après les autres dans des bolides (autos ou motos) customisés, ce qui a l’air de les rendre assez hystériques. Y’a des gangs simili-punks, qui dévalisent ce qu’ils peuvent. Y’a des simili-flics, très sexys dans leur uniforme tout cuir, qui font à peu près la même chose, sauf qu’ils sont censés les chasser, quand ils ne sont pas chassés par eux. Après, on comprend que y’a rien comprendre, que c’est le chaos et que ces courses dans un sens ou dans un autre seront les seules actions à attendre. Y’a quand même un flic -Max, donc- qui a l’air d’avoir une vie en dehors de l’asphalte, mais c’est pas pour longtemps. Au moins, on sait ce qu’il aura à regretter. Ce premier épisode (nettement moins bon que le deuxième) est un peu brouillon, mais il a le mérite d’inventer une gueule qui, à ce moment-là, attire toute notre sympathie. Et de poser les bases d’un univers original, où le visuel prime sur le scénar. Y’a des fans. On passe son temps sur la route, à traverser les paysages à toute vitesse. C’est un peu comme dans le Tour de France. Mais en Australie. Et sans vélo.

Madame de...

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Réalisé par : Max Ophüls (1902 - 1957)
En : 1953, France
Acteurs principaux : Charles Boyer (1899 - 1978), Danielle Darrieux (1917 - 2017), Vittorio De Sica (1902 - 1974)
Genre(s) : Paris /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

Madame de… est la très délicieuse épouse très gâtée d’un galant général. Pour régler de mystérieuses dettes, elle décide de revendre à un bijoutier des boucles d’oreilles -des diamants en forme de coeurs-, que son mari lui avait offertes « juste après leur mariage »… C’est, de tout son attirail à coquette, ce à quoi elle tient le moins, pense-t-elle. Le bijou passe de mains en mains, avant de lui revenir, en cadeau, de celles d’un très galant diplomate italien, par ailleurs très bon danseur de valses. Ce sont bien les mêmes, et pourtant ça n’a plus rien à voir. Cette fois, elle donnerait tout au monde pour les garder. C’est qu’entre temps, Mme de… a un peu changé. Elle a appris la valeur sentimentale des choses. Elle était superficielle ? Superficiellement seulement. Comme l'ambiance de l'époque. Comme la caméra, qui dessine des arabesques infiniment raffinées dans le temps et l’espace. Comme les personnages, et comme les dialogues, et comme la paire de boucles d’oreilles. Ils dansent tous très bien la valse à travers les pièces et à travers les coeurs. Les diamants en forme de coeur, ou les coeurs en forme de diamant…

Made in USA

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1966, France
Acteurs principaux : Anna Karina (1940 - ), Jean-Pierre Léaud (1944 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /poésie en image
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Il s'en passe de drôles, à Atlantic-cité sur Méditerranée. Des morts plein les hôtels, des barbouzes plein les garages, avec des flingues plein les poches. Des images de toutes les couleurs, des bruits incongrus, de la musique, des slogans et des discours. Une journaliste qui enquête, en se prenant pour Bogart, quelques guest stars égarés (Marianne Faithfull, Philippe Labro). Et ces personages qui portent des noms bizarres (Goodis, Mizoguchi, Preminger, Aldrich..., j'en passe et des non moins bons). Apparemment, le scénario et les dialogues relèvent de la série noire, mâtinée d'humour absurde. Ca pourrait même être un film politique contre les magouilles et les compromissions policières. Mais ça se passe surtout au pays des livres, des affiches, des comic books et des images qui bougent. Made in Godard, made in cinéma.

Wizard of Oz (The) - Magicien d'Oz (Le)

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Réalisé par : Victor Fleming (1883 - 1949)
En : 1939, USA
Acteurs principaux : Judy Garland (1922 - 1969)
Genre(s) : conte de fées relooké /en avant la musique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 101 mn, NB/couleur

Critique perso :

Dorothy, jeune campagnarde du Kansas (Judy Garland à 16, avec des tresses, mais chez qui la femme pointe... -ses partenaires ne sont pas dupes !) vit en noir et blanc. Une tornade la propulse au pays des Schtroumphs en couleurs (1ère à droite derrière l'arc-en-ciel) où on lui fait la fête en lui offrant des sucettes. Malgré tout, elle regrette son Kansas en noir et blanc (on se demande bien pourquoi), et se met à suivre, avec ses chaussures rubis, une route jaune en quête du magicien mirobolant qui la ramènerait chez elle. C'est le pitch d'une des premières légendes produites par l'Amérique. La morale paysanne qui en ressort officiellement (il faut se contenter de ce qu'on a, "there is no place like home") est heureusement contredite par l'enthousiasme juvénile de Judy, heureuse comme un poisson dans l'Oz, et par l'ironie un brin canaille du magicien (on n'est que ce que les autres voient de nous). Rêve et effroi d'une nature aseptisée, road movie et nostalgie : un pilier de la conscience américaine !

Main du Diable (La)

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Réalisé par : Maurice Tourneur (1873 - 1961)
En : 1943, France
Acteurs principaux : Pierre Fresnay (1897 - 1975), Pierre Larquey (1884 - 1962), Noël Roquevert (1892 - 1973)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 78 mn, NB

Critique perso :

La main du diable est une main gauche (évidemment). Elle ne coûte presque rien en argent (un peu de son âme en gage, quand même) et rapporte amour, gloire, richesse… et juste une petite malédiction éternelle en cas de possession prolongée. Roland Brissot, artiste peintre qui, sans elle, était médiocre, se coltine au cours d'une fuite dans un chalet de montagne le long récit en flash-back de sa fatale acquisition. Le flash remontera même jusqu'au Moyen Age, on ne mégote pas sur l'ambiance trouble. Evidemment, tout cela est assez pompé sur Faust (via Nerval), mais c'est aussi un des très beaux et rares exemples de cinéma fantastico-gothique-expressionniste français. Et au fait, en 1943, qui donc avait la main (gauche) sur le pays ? Ah, certes, ça n'a rien à voir puisque c'est la Continental, firme allemande, qui a produit le film. Quand même, il a l'air largement aussi métaphorique -et aussi bon !- que les Visiteurs du soir, dans le genre.

Mains sales (Les)

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Réalisé par : Fernand Rivers (1879 - 1960)
En : 1951, France
Acteurs principaux : Pierre Brasseur (1905 - 1972), Daniel Gélin (1921 - 2002), Christian Marquand (1927 - 2000), Claude Nollier (1919 - 2009)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, NB

Critique perso :

La période est à peu près claire -la 2ème guerre mondiale. Le pays est mystérieux -quelque part à l'est, sans doute. Le parti n'est jamais nommé mais se laisse aussi bien deviner que le métier d'une certaine p... respectueuse. Le héros est un homme. Enfin, héros c'est à voir, c'est toute la question. Il a eu une mission à accomplir, il a l'air de s'en être sorti, mais pas sans mal. C'est un agent double, peut-être aussi un double traitre. A sa classe et à ses camarades. A ses camarades traitres. A sa femme et, évidemment, à lui-même. Ou peut-être que les vrais traites, ce sont les femmes, comme toujours. Bref, c'est la guerre et tout le monde se pose beaucoup de questions. C'est un film de guerre, mais où on n'oublie pas de ramasser les copies à la fin. Faut croire qu'on se battait beaucoup à coups de mots, en ce temps là...

Spellbound - Maison du Docteur Edwardes (La)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1945, USA
Acteurs principaux : Ingrid Bergman (1915 - 1982), Gregory Peck (1916 - 2003)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 111 mn, NB

Critique perso :

Le Docteur Edwardes est en fait un imposteur, sa Maison est un asile de fous. Ca démarre sur de bonnes bases. La douce (et belle) Constance, elle, est une vraie top psychanaliste de la Maison, qui semble avoir reçu (en vain) les tranferts de tous ses patients et de tous ses collègues. Elle craque pour le faux (mais beau) docteur amnésique, qui pourrait bien être le cas (et l'homme) de sa vie. Le faux (mais beau) Edwardes a des morts à aller récupérer au fond de son trou de mémoire. Et la douce (et belle) Constance, elle, se trouvera bien quelques portes à ouvrir et un père à tuer. La clé des révélations à double fond réside dans un rêve obscur, mis en image par M. Dali himself. Bien mieux qu'une leçon de psychanalyse pour les nuls, un grand film fantas(ma)tique pour tous les grands névrosés que nous sommes.

Manhattan

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1979, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Diane Keaton (1946 - ), Meryl Streep (1949 - )
Genre(s) : New York - New York /culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

New York, mode d'emploi. Son aède s'appelle Isaac. Il a une ex-femme qui a viré lesbienne, une petite-amie-trop-bien-mais-trop-jeune-pour-lui, et une attirance poussée pour la maîtresse de son meilleur pote, une cérébrale presque aussi tourmentée que lui. Tous, cela va sans dire, artistes-intellos-bobos très intelligents, très cultivés et très malheureux. Grâce à ce sublime hypocondriaque, la carte du tendre du XXème siècle a pris la forme des rues de Manhattan. Mais c'est une carte en 3D, avec ses tours, son parc, ses ponts et ses cafés. Et une quatrième dimension pour la vie de l'esprit, les cinémas et les musées. Un petit univers en entier dans une grosse pomme, le paradis des vers de terre qui ont la tête dans les étoiles. Et la BO de la ville est du Gershwin forever.

Manèges

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Réalisé par : Yves Allégret (1907 - 1987)
En : 1950, France
Acteurs principaux : Bernard Blier (1916 - 1989), Simone Signoret (1921 - 1985)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Au début : un mari éploré à l'hôpital, au chevet de sa femme chérie : larmes, désespoir et souvenirs. Fausse piste. Belle-maman débarque et vend la mèche : sa fille n'en voulait qu'à son argent, elles se sont bien foutues de lui. Le mélo tourne vinaigre, le grand déballage commence... Pas joli joli pour la gente féminine, ce Rashômon en costume de cheval (le mari tente de faire vivre un manège). Pas terrible non plus pour les mâles, qui se partagent en salauds de pauvres et en pauvres salauds. Comme dans Le Mépris, les relation sociales se résument à la prostitution. Comme dans Lettre d'une inconnue, celui qui a tout compris est celui qui parle le moins. Bio cynique d'une Comtesse aux pieds nus un peu trash, dont l'élégance sentira toujours l'écurie. Noir c'est noir.

Mari de la coiffeuse (Le)

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Réalisé par : Patrice Leconte (1947 - )
En : 1990, France
Acteurs principaux : Anna Galiena (1954 - ), Jean Rochefort (1930 - 2017)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 92 mn, couleur

Critique perso :

Petit garçon, Antoine supportait mal le maillot de bain en laine tricotté par sa maman. Il aimait la musique orientale et rêvait d'épouser une coiffeuse, en hommage à celle qui lui tripottait si agréablement les cheveux en laissant voir un sein généreux, à côté de chez lui. Ainsi fut fait : Antoine est devenu le mari d'une coiffeuse, c'est son métier ! Patrice Leconte a toujours eu une prédilection pour les amours sublimées ou étranges : le champouinage comme substitut et déclencheur des rapports amoureux est une belle trouvaille. La lumière chaleureuse du salon de coiffure un peu démodé, la beauté d'Anna Galiena, la nonchalence de Jean Rochefort et ses danses du ventre improvisées contribuent à donner à ce rêve d'enfant réalisé le parfum d'un conte oriental tragique qui parlerait de l'amour idéal.

Royal Wedding - Mariage royal

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Réalisé par : Stanley Donen (1924 - )
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Fred Astaire (1899 - 1987), Peter Lawford (1923 - 1984), Jane Powell (1929 - )
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 93 mn, couleur

Critique perso :

Tom et Ellen sont partenaires sur scène et inséparables dans la vie. Pas mariés pour autant -ça ne se fait pas, ils sont frère et soeur. Leur impressario new-yorkais les envoie à son frère jumeau de Londres pour jouer leur spectacle, juste quelques semaines avant que future Queen Elisabeth et Prince Philippe ne jouent le leur. Ca fait déjà pas mal de couples d'opérettes. Tom et Ellen s'empressent bien sûr d'en constituer deux autres avec d'authentiques autochtones -un vrai Lord et la fille d'un tenancier de bistrot qui est en fait celle de Winston Churchill (dans la vraie vie, pas dans le film !). Tout finira par des chansons -mais vu que ça commençait déjà comme ça, on n'est pas trop surpris. J'oubliais : 15 ans avant les spationautes de 2001, l'Odyssée de l'espace et 50 ans avant Spider-man, Fred Astaire, l'homme qui danse comme il respire, passait déjà sans effort des murs au plafond.

Marie du port (La)

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1950, France
Acteurs principaux : Blanchette Brunoy (1918 - 2005), Julien Carette (1897 - 1966), Nicole Courcel (1930 - 2016), Jean Gabin (1904 - 1976), Roland Lesaffre (1927 - 2009), Louis Seigner (1903 - 1991)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 88 mn, NB

Critique perso :

A Port-en-Bessin : des pêcheurs qui vont au bistrot, surtout celui où sert Marie, la "sournoise" taciturne. A Cherbourg : des marins en uniforme qui vont à la brasserie et au cinéma, propriétés d'Henry, le patron séducteur. 100km, une génération et pas mal d'obstacles les séparent. Un enterrement et un bateau les rapprochent. Ils parlent beaucoup (avec le quota réglementaire de bons mots du cinéma de l'époque) mais rarement pour dire ce qu'ils pensent, et encore moins ce qu'ils ressentent. Mais le patron a les idées larges : la preuve, il passe aussi bien des films de Georges Lampin que de Murnau, dans sa salle de ciné. En coupant les 10 dernières mn, avec une fin façon Enfants du paradis, ça pourrait tenir la route du large. Dommage...

Down to the Sea in Ships - Marins de l'orgueilleux (Les)

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Réalisé par : Henry Hathaway (1898 - 1985)
En : 1949, USA
Acteurs principaux : Lionel Barrymore (1878 - 1954), Dean Stockwell (1936 - ), Richard Widmark (1914 - 2008)
Genre(s) : pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants /épique pas toc
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

Il a 12 ans, est orphelin, a été élevé par son grand-père marin sans quasiment jamais mettre un pied à terre, et passe très laborieusement son certificat d'étude grâce à l'indulgence du jury. Il ré-embarque sur un baleinier dirigé par son grand-père, qui le confie à son second qui a fait des études. Toute l’histoire, ce sera : c'est quoi la meilleure école, celle de la vie ou celle de la culture, les baleines ou les livres ? La bonne réponse, ce sera : les deux, mon capitaine ! Mais attention, on n'est pas dans un livre, justement, on est dans un film avec des hommes des vrais dedans, beaucoup d'eau, de la sueur, du sang, des larmes et des baleines (sans doute un peu fausses, elles, mais on s’en fiche). De l'aventure, du panache, des héros des vrais. Du vrai cinéma, de la vie la vraie (et inversement).

Blind Husbands - Maris aveugles

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Réalisé par : Erich von Stroheim (1885 - 1957)
En : 1919, USA
Acteurs principaux : Erich von Stroheim (1885 - 1957)
Genre(s) : pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 68 mn, NB

Critique perso :

Mme Armstrong accompagne son docteur de mari en vacances à Cortina d'Empezzo, aux pieds de leurs dolomites favorites. Un peu délaissée par son époux, elle tombe sur un officier autrichien très prévenant. Uniforme, monocle et sabre au clair, ce Don Juan des alpâges ne ménage aucun effort et aucun effet. Il a, paraît-il, escaladé toutes les montagnes du monde... Mais la belle résiste, le mari et le destin s'en mèlent. Tout culmine, comme il se doit, au sommet du Pinacle, d'où tout le monde ne descendra pas indemne... Un vieux film plein d'audaces et qui, bien que muet, ne manque pas de sous-entendus.

Husbands and Wives - Maris et femmes

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1992, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Judy Davis (1955 - ), Mia Farrow (1945 - ), Sydney Pollack (1934 - 2008)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, couleur

Critique perso :

Woody en mode autofiction, play and play again. Ca se gâte dans son couple, il se rattrappe comme il peut, caméra au poing, poing à la caméra, devant et derrière. Il se dédouble en deux couples amis qui forment les deux piliers du récit : le premier a décidé de se séparer, l'autre va apparemment plutôt bien. Moins de deux heures plus tard, ils ont échangé leurs maillots comme des joueurs de foot... Le film orchestre leur errance, en serrant au plus près leur corps qui fait le contraire de ce qu'ils disent avec pourtant plein de conviction et de rationnalité apparente. Le spectateur est aussi invité aux séances psy de tout ce beau monde et se régale de tant de mauvaise foi. On rit de se voir si vil dans son miroir.

Mariée était en noir (La)

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1968, France
Acteurs principaux : Michel Bouquet (1925 - ), Jean-Claude Brialy (1933 - 2007), Charles Denner (1929 - 1995), Michael Lonsdale (1931 - ), Jeanne Moreau (1928 - 2017), Claude Rich (1929 - 2017)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

C'est une sorte d'ange exterminateur à coupe Mireille Matthieu. Non, il ne joue pas dans un film des frères Coen. En fait, c'est une femme, qui ne décolère pas depuis qu'on lui a trucidé son mari le jour de ses noces et qui ne songe qu'à se venger. Non, ce n'est pas non plus un personnage de Tarantino. Elle ne s'habille qu'en noir, ou en blanc, ou en noir et blanc, mais la vie autour est en couleur. Elle voudrait bien sortir d'un film d'Hitchcock, mais sans passer par la case glamour. Du coup, l'histoire un peu dure à avaler, d'autant que l'héroïne semble avoir acheté ses armes létales dans un magasin de farces et attrappes. En fait, c'est plutôt un ange avec des ailes de plomb, qui fait tout le temps la tronche. Comme quoi on peut être un grand cinéaste et rater complètement certains de ses films.

Marseillaise (La)

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1938, France
Acteurs principaux : Charles Blavette (1902 - 1967), Julien Carette (1897 - 1966), Lise Delamare (1913 - 2006), Louis Jouvet (1887 - 1951), Pierre Renoir (1885 - 1952)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /en France profonde /vive la (critique) sociale ! /épique pas toc
Caractéristiques : 135 mn, NB

Critique perso :

Il était une fois un roi qui, au réveil du 15 juillet 1789, apprend une mauvaise nouvelle. Ca, c'est l'histoire officielle, celle des livres, celle des stars de cinéma, et elle dure 2mn. Tout le reste du film, c'est le contraire : la Révolution vue du côté des figurants qui en sont les vrais héros : le peuple, le vrai. Celui qui est mal peigné, parle avec un accent, braconne des lapins dans la garrigue, apprend à manier le fusil pour la première fois et fait le piquet de grève devant les usines (ah non, pardon, je confonds, ça c'était l'actu de l'époque du tournage). On suit donc un bataillon marseillais en route vers le Nord pour porter main forte à ces empotés de la capitale -provinciale, en plus, la Révolution, on aura tout vu ! Quelques belles scènes de fraternisation au coin du feu, de bataille pas rangée dans les jardins des Tuileries : la fresque ne manque pas de souffle. Et, comme de bien entendu, tout finit par une chanson…

Mary and Max. - Mary et Max.

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Réalisé par : Adam Elliot (1972 - )
En : 2009, Australie
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 89 mn, couleur

Critique perso :

On se croirait au pays d'Amélie, sauf que c'est aux antipodes, c'est-à-dire sans couleurs, sans sourires béats et sans Paris. Ca commence en 1976. Mary : 8 ans, sosie miniature de Nana Mouskouri australienne complexée. Max : gros juif new yorkais d'une quarantaine d'années, névrosé carabiné. Chez Max, c'est normal, c'est pathologique : il a un syndrome d'Asperger, un autisme light qui le rend imperméable aux codes sociaux et aux émotions des autres, mais ne l'empêche pas de ressentir les siennes (puissance mille). Pour les mettre en contact, il faut un hasard gros comme le bottin de New York et une lettre envoyée comme une bouteille à la mer. Pour les faire continuer à s'écrire pendant 25 ans sans qu'ils se rencontrent jamais, il faut le miracle des amitiés impossibles qui changent la vie -et pas mal de chocolat. Ils vivent dans un monde qui ressemble au nôtre, en légèrement plus biscornu, peuplé de drôles de trognes. Et que tout soit en plasticine ne change rien : de toute façon, ils sont différents et solitaires, normaux et pathologiques, comme tout le monde. Et il faudrait souffrir d'un syndrome d'Asperger carabiné pour ne pas être ému aux larmes par leur histoire.

Masculin féminin

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1966, France
Acteurs principaux : Brigitte Bardot (1934 - ), Chantal Goya (1946 - ), Marlène Jobert (1943 - ), Jean-Pierre Léaud (1944 - )
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Dans "masculin", il y a "masque" et "cul" ; dans "féminin" il n'y a rien (extrait du dialogue). Dans les bistrots, il y a des dragueurs, et des jeunes filles à draguer. Préoccupations politiques pour les hommes (la conscience ouvrière, la guerre au Vietnam), chansons et cosmétiques pour les femmes (Salut les copains, mais surtout ne me mets pas enceinte). Une mort violente tous les 1/4h. Portrait d'une France qui s'ennuie mais ne le sait pas encore. Portrait d'une jeunesse concernée, portrait d'une jeunesse qui s'en fout. Enfants de Marx et de Coca-Cola (extrait des intertitres). Des gestes, des choses, des sondages : inventaire avant liquidation. Dans féminin, finalement, il y a "fin".

Matador

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Réalisé par : Pedro Almodovar (1949 - )
En : 1986, Espagne
Acteurs principaux : Antonio Banderas (1960 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

C'est l'histoire de deux serial killers très glamours, des corrida-addicted qui ne jouissent qu'en sacrifiant leur partenaire. Ils sont donc tout naturellement faits depuis la nuit des temps pour s'embrocher mutuellement à la mode Escamillo dans un orgasme sublime... Eros et Thanatos sont potes, on le sait au moins depuis Duel au soleil. Avec ce film, Almodovar a voulu faire son Pandora pervers (clone d'Ava Gardner compris). Il y a mis toutes les névroses de l'Espagne : l'Opus Dei, les mères abusives et les arènes de sable chaud. Dans cette succession de couples en rouge et noir, anges et démons se bousculent : lesquels sont les taureaux, lequels sont les toreros ? C'est pas toujours clair. Le film est un tantinet abstrait et théorique. Pas si mal pour un quasi-débutant.

Matrix

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Réalisé par : frères/soeurs Wachowski
En : 1999, USA
Acteurs principaux : Laurence Fishburne (1961 - ), Carrie-Anne Moss (1967 - ), Keanu Reeves (1964 - )
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 136 mn, couleur

Critique perso :

Le grand secret nous est révélé au bout d'1/2h. Comme il s'est un peu éventé depuis, je peux bien le dire : le monde est un jeu vidéo. La réalité vraie, pas belle à voir, c'est que les hommes sont en faits cultivés dans des cuves par des machines qui parasitent ainsi leur énergie, en maintenant leur esprit en servitude dans un leurre numérique. C'est Néo le novice que nous suivons, au moment où il fait le grand saut de l'autre côté du miroir. Morpheus, son prof de philo et de Ju Jitsu, croit que c'est lui the One, celui qui libérera les hommes de leur esclavage. Faut dire, comme il a été pirate informatique durant sa vie virtuelle, il saute les niveaux de jeu plus vite que tout le monde dans sa nouvelle. Ca vous rappelle quelque chose ? C'est normal, c'est pompé dans Alice au pays des merveilles, le Magicien d'Oz, la caverne de Platon, Descartes, Dennett, EXistenZ et, of course, LA Bible. Les images, elles, viendraient plutôt de Il était une fois dans l'ouest, des Blues Brothers, de Star Wars et de 2001, l'Odyssée de l'espace, mais à la mode PlayStation. Recyclage bluffant malgré tout.

Where the Wild Things Are - Max et les Maximonstres

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Réalisé par : Spike Jonze (1969 - )
En : 2009, USA
Acteurs principaux : Catherine Keener (1959 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /jeu dans le jeu /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 101 mn, NB

Critique perso :

Max, 10 ans, toutes ses dents et pas mal de morgue, n'est pas content de sa chieuse de petite soeur, ni de sa gentille maman débordée. Un soir, il s'enfuit de chez lui en costume de (petit gentil) loup, et se retrouve au pays des (grands méchants) monstres gentils : une île peuplée uniquement de maximonstres. Les maximonstres, c'est des peluches géantes anthropophages qui vivent en tribus anarchiques dans les bois -un beau ça en pagaille, quoi. Après épreuve initiatique de rigueur, il est élu roi de la bande, chargé des opérations militaires -un petit moi en construction, quoi. Avant, of course, de retrouver sa bienveillante famille inquiète -le surmoi qu'il lui faut pour grandir. Un gentil petit film pour petits grands enfants, avec un petit Freud dedans.

French Lieutenant's Woman (The) - Maîtresse du Lieutenant français (La)

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Réalisé par : Karel Reisz (1926 - 2002)
En : 1981, Angleterre
Acteurs principaux : Jeremy Iron (1948 - ), Meryl Streep (1949 - ), David Warner (1941 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 127 mn, couleur

Critique perso :

Point de Lieutenant français dans ce film. Quant à celle censée avoir été sa maîtresse, jamais ne le fut. Mais on est au cinéma, alors ne nous étonnons de rien, surtout qu'on est dans ce type particulier de films qui racontent la fabrication d'un autre film, dans une histoire d'amour qui en cache une autre -la même sans doute- et d'autres temps et d'autres lieux. Subtil entrelacement de sentiments retenus et de fantasmes entretenus, de libertés compromises et de liaisons dissimulées, hommage raffiné à l'intensité du vécu et à celle -encore plus grande ?- du souvenir et de la représentation.

Metropolis

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1927, Allemagne
Acteurs principaux : Alfred Abel (1879 - 1937), Brigitte Helm (1908 - 1996)
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique /épique pas toc
Caractéristiques : 123 mn, NB

Critique perso :

A Metropolis, il y a la ville d'en haut -où les bien-nés s'amusent dans d'éternels jardins - et la ville d'en bas -où les mal-nés triment 10h par jour à faire tourner des machines infernales. C'est la division verticale du capital et du travail, une sacrée fracture que seul un Messie-médiateur amoureux pourra, peut-être, réduire. A condition de ne pas se laisser abuser par une femme fatale aux deux visages... Le recit, construit comme une symphonie, est complexe, mythique, mystique. Les décors sont grandioses, les effets bluffants, les foules inquiétantes à souhait. C'est de l'expressionnisme à angle droit, une grande machine de cinéma : l'oeuvre d'un grand horloger virtuose.

Draughtsman's Contract (The) - Meurtre dans un jardin anglais

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Réalisé par : Peter Greenaway (1942 - )
En : 1982, Angleterre
Acteurs principaux : Anthony Higgins (1947 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Au début, les joueurs décident de la règle du jeu et la signent devant témoin. L'équipe du château joue en blanc, le visiteur extérieur (un artiste bien conscient de sa valeur) en noir. Au milieu du film, ils changent de côté, de maillots et même de règles... Le terrain est une belle propriété, l'époque la fin du XVIIIème siècle anglais. Il est, officiellement, question de dessiner le château sous tous ses angles, tout en profitant de la châtelaine par tous les bouts. Mais, à force de dessiner ce qu'il a devant les yeux, notre challenger finit par capter ce qu'il ne devrait pas : ce qui est là et ce qui est caché, et le temps qui passe. En fait, il invente la caméra à 12 images par semaine. Pour autant, ce n'est pas toujours lui qui évalue le mieux les coups à l'avance. Pour son premier film, l'esthète Greenaway soigne tout : le scénario brillamment tarabiscoté, les dialogues subtilement enluminés, les costumes soigneusement asticotés et les cadres bien sûr, savamment géométrisés (il a même fait les dessins lui-même). Il donne cette impression de maîtrise suprème qu'il refuse à son personnage. Mauvais joueur, mais excellent cinéaste !

Miller's Crossing

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Réalisé par : frères Coen
En : 1990, USA
Acteurs principaux : Gabriel Byrne (1950 - ), Albert Finney (1936 - ), Marcia Gay Harden (1959 - ), John Turturro (1957 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Chicago, la Prohibition. Deux bandes rivales, des alliés douteux, des politiciens véreux, une poule et un conseiller des princes très écouté : Tom. Ses faiblesses : les courses, le whisky et son grand coeur d'artichaud. Ses armes : savoir très bien encaisser les coups de poing et savoir encore mieux convaincre ses interlocuteurs qu'il est plus intelligent qu'eux. Face aux mitraillettes, il s'en sort pas mal, le beau Tom, sauf à la fin où il se trouve réduit à la dernière extrémité : tirer un coup de feu sur un de ses semblables... On est dans le rêve d'un grand ado retors et malicieux qui aurait trop regardé "les incorruptibles" et on aime ça !

Milou en mai

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Réalisé par : Louis Malle (1932 - 1995)
En : 1990, France
Acteurs principaux : Paulette Dubost (1911 - 2011), Michel Duchaussoy (1938 - 2012), Miou-Miou (1950 - ), Michel Piccoli (1925 - )
Genre(s) : en France profonde /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

C'est un jeune vieux veuf qui vit à la campagne avec sa maman et qui s'appelle Milou -on ne saura pas s'il a eu un chien qui s'appelait Tintin. La maman -très vieille France- a le bon goût de mourir au moment où s'annonce le printemps 68. La famille, étendue à quelques invités et pique-assitettes de passage, tiendra lieu de groupe de camarades, l'enterrement tiendra lieu de défilé de manif, et le partage des biens maternels d'héritage à liquider. A part ça, c'est presque comme à Paris : plein de faux-frères en état second. Le huis-clos à l'air libre, encerclé de dangereux grévistes, permet une relecture ironique (et très drôle) de L'Ange exterminateur (hommage de Jean-Claude Carrière au scénario qu'il aurait pu écrire). La révolution au vert mode d'emploi, par ceux qui auraient pu ne pas passer complètement à côté.

Minority Report

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Réalisé par : Steven Spielberg (1946 - )
En : 2002, USA
Acteurs principaux : Tom Cruise (1962 - ), Samantha Morton (1977 - ), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 145 mn, couleur

Critique perso :

En 2003, les américains ont inventé la guerre préventive. Vers 2050, ils inventent l'arrestation préventive des meutriers grâces aux pouvoirs de devination de trois oracles-mutants-voyants : les "précognitifs" et à une unité de police d'élite : la "précrime". Les prisons regorgent donc de putatifs assassins maintenus en état d'hibernation et la sécurité reigne. Par ailleurs, la technologie informationnelle s'est répandue partout, par écrans transparents et multiples autres babioles interposés. Bref, nous sommes dans le meilleur des mondes possibles selon Sarkozy -à condition, bien sûr, d'être répertorié du côté des honnètes gens (du futur). Quand on passe de l'autre côté, évidemment, la vie devient un peu moins simple. C'est ce que va comprendre à ses dépens John Anderton, pourtant à la tête de la fameuse "précrime". Sa fuite le forcera à changer de regard (en plus d'un sens !) sur le monde parfait dans lequel il vit... Tiens tiens, même Spielberg se mettrait donc à douter des images ? (bon, je vous rassure : il croit toujours à la famille). Très spectaculaire et bigrement intéresante, cette grosse production américaine !

Midnight in Paris - Minuit à Paris

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 2011, USA
Acteurs principaux : Kathy Bates (1948 - ), Adrien Brody (1973 - ), Marion Cotillard (1975 - ), Marcial Di Fonzo Bo (1968 - ), Rachel McAdams (1978 - ), Léa Seydoux (1985 - ), Owen Wilson (1968 - )
Genre(s) : Paris /conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 94 mn, couleur

Critique perso :

Ah Paris, Paris…! Ah, les douze coups de minuit…! Conte de fée au carré, donc, pour Woody, plus Américain à Paris que jamais. Parce que ce qu’il aime à Paris, au fond, c’est quand les meilleurs américains de leur temps (Fitzgerald, Hemingway, Gertrude Stein, Joséphine Baker, j’en passe et des pas moins bons…) y faisaient la fête loin de chez eux. Alors, quand il y envoie un jeune couple américain côte ouest bien propre sur lui, c’est pour le subvertir à coup de trou noir temporel en forme de carrosse de cendrillon shooté à la culture. Un peu Belles de nuit, un peu Quelque part dans le temps, beaucoup de jazz et de fayotage francophile. Pas sûr qu’il ait dépassé le périph’ ni la page 1930 de son encyclopédie, l’oncle Woody, mais il a à coup sûr parcouru tout le bottin des stars du moment. Et on pardonne tout à ceux qui font les même rêves que nous.

Mist (The)

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Réalisé par : Frank Darabont (1959 - )
En : 2007, USA
Acteurs principaux : Marcia Gay Harden (1959 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 126 mn, couleur

Critique perso :

Une petite famille américaine pépère, dans la campagne américaine authentique. Une nuit, passe un gros orage qui met un peu de pagaille dans le voisinage. Pendant que le papa fait des courses avec le fiston au supermarché du coin pour réparer les dégâts, l’orage fait place à un brouillard particulièrement épais d’où sortent de drôles de hurlements. Vaut mieux plus trop sortir du magasin. Bon, en fait, c’est pas un orage, c’est carrément des grosses bestioles à tentacules, pas bien répertoriées dans la faune terrestre, qui font une opération razzia au supermarché, camouflées dans le brouillard. Sauf que la marchandise qui a l’air de surtout les intéresser, c’est la chair humaine. A partir de là, le film bascule en survival collectif. Le huis-clos façon Ange exterminateur tourne au cauchemar typiquely American, avec clans antagonistes qui se forment et prophétesse hallucinée. La religion et la consommation se mêlent toujours à la politique, quand ça se passe par là-bas. C’est pas trop la rationalité qui domine… Le film est incontestablement efficace et se paie l’audace du happy end le plus déprimant qu’on puisse imaginer, du American Way of Death du meilleur cru.

Model Shop

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1969, USA
Acteurs principaux : Anouk Aimée (1932 - ), Gary Lockwood (1937 - ), Jean Sorel (1934 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 92 mn, couleur

Critique perso :

George est le parfait jeune américain modèle 60ies : uniforme jean-tee shirt-baskets, bien éduqué mais pas super motivé par le mode de vie de ses parents, cool et sympa. Il vit à L.A., au milieu des derricks, avec une blonde qui se verrait bien en haut de l'affiche. Il a des potes cools et sympas qui jouent de la musique (les Spirit, pour les amateurs), d'autres qui donnent dans le journalisme underground. Ambiance peace and love. Un jour qu'il cherche des sous à taxer, il croise une fille en blanc qu'il prend pour Eurydice. En fait, c'est Lola. Elle est là parce que Michel, son prince charmant, a foutu le camp avec la belle de la Baie des anges. 24h de la vie d'un homme sans boulot qui, en quelques heures, perd tout ce qui lui reste, et que l'armée veut envoyer passer ses vacances au Vietnam. Mais il a trouvé Lola qui lui a rendu l'envie du bonheur, alors qu'elle ne savait pas elle-même où elle l'avait rangée. Keep trying, George. C'est la traduction en idiome local de la maxime éternelle des films de Demy.

Mummy (The) - Momie (La)

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Réalisé par : Karl Freund (1890 - 1969)
En : 1932, USA
Acteurs principaux : Boris Karloff (1887 - 1969)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro /à l'antique
Caractéristiques : 73 mn, NB

Critique perso :

On ne réveille pas impunément une momie qui dort depuis 3700 ans, fallait s'en douter. Im-ho-tep a été embaumé vivant (sans son consentement, semble-t-il) et il lui reste donc quelques petites affaires à régler. Ca tombe bien, il a pour cela gardé en mémoire quelques sortilèges magiques bien utiles. Il est calme, patient (il ne doit plus être à un millier d'années près), et il sait ce qu'il veut : la fiancée dont il a été éloigné, il y a quelques siècles. Sur son passage, on retrouve d'étranges cadavres : mort de rire, mort de peur, à votre guise. Il est terriblement séduisant et terriblement dangereux. Normal : il possède le secret de l'envoutement des légendes.

Mon oncle d'Amérique

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1980, France
Acteurs principaux : Pierre Arditi (1944 - ), Nelly Borgeaud (1931 - ), Jean Dasté (1904 - 1994), Gérard Depardieu (1948 - ), Marie Dubois (1937 - 2014), Nicole Garcia (1946 - ), Roger Pierre (1923 - 2010), Brigitte Roüan (1946 - )
Genre(s) : la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Deux modes de discours en parrallèle : d'un côté, une petite conf scientifique du professeur Laborit sur l'évolution des espèces, la vie sur Terre et l'interprétation des comportements (des souris et des hommes). De l'autre, une fiction qui entremèle les destins de trois personnages aussi dissemblables par leur origine que comparables par leurs difficultés à vivre. Ces trois-là ont nourri de nobles ambitions, ont été bien partis pour les accomplir. Mais ils finissent tous par nager un peu dans un costume trop grand pour eux, et auncun oncle d'Amérique ne vient les sauver du naufrage. Le discours scientifique distancié, comme mode d'emploi ironique de la comédie humaine. Le romanesque, comme horizon de l'observation objective (des souris et des hommes). A apprécier avec tous ses yeux, toutes ses oreilles et tous ses cerveaux.

Westworld - Mondwest

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Réalisé par : Michael Crichton (1942 - 2008)
En : 1973, USA
Acteurs principaux : Yul Brynner (1915 - 1985)
Genre(s) : c'était demain /carrément à l'ouest /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 88 mn, couleur

Critique perso :

Disneyland, c'est bon pour les enfants. Dans pas longtemps, les grands auront bien mieux pour s'amuser : Mondwest. A Mondwest (ou Westworld, sans doute une traduction de Hollywood en langage de l'époque) on peut choisir son thème : le western (pour tuer à l'aise), l'empire romain (pour baiser tranquille) ou le Moyen Age (pour les deux). C'est un peu cher mais on est traité comme des stars de cinéma et on ne craint rien : le personnel local n'est composé que de robots consentants et pas syndiqués -et de savants fous bien planqués. D'ailleurs, les pistolets ne marchent pas sur les vrais humains. Mais, comme dans tous les Edens, il y a parfois des créatures qui se détraquent. Des robots qui refusent d'obéir à leur cahier des charges -et, ma foi, on serait pas loin de leur donner raison. La piste métaphysique est légère mais le film d'action-science-fi bien troussé pour l'époque. Terminator s'est évadé direct de ce parc-là, et pas mal d'autres films qui ont suivi.

Sommaren met Monika - Monika

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1953, Suède
Acteurs principaux : Harriet Andersson (1932 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

Un très jeune couple rêve d'amour le temps d'un été au bord de l'eau, avant de devoir faire face aux difficultés de la vie quotidienne. Dans le rôle du petit animal sauvage, sexy et pas farouche, en France on a eu B.B., en Suède ils ont eu Monika - Harriett Andersson. "Monika", c'est l'irruption de la jeunesse, de la sensualité et d'un rêve de liberté dans le cinéma. C'est aussi la découverte d'un jeune réalisateur nommé Bergman (qui n'en est pourtant déjà pas à ses premiers essais quand il tourne ce film), à mi chemin entre le réalisme et le symbolisme. A l'époque, tous les cinglés de cinéma sont tombés amoureux de Monika.

Monkey Business - Monnaie de singe

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Réalisé par : Norman Z. McLeod (1898 - 1964)
En : 1931, USA
Acteurs principaux : Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961), Zeppo Marx (1901 - 1979), Thelma Todd (1905 - 1935)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 77 mn, NB

Critique perso :

Les paquebots les plus sérieux -ceux, par exemple, qui transportent Maurice Chevalier- ne sont pas toujours à l'abris des passagers clandestins. On ne se méfie jamais trop des frères Marx : philosophes de l'absurde squatteurs de tonneaux, passeurs de bons mots et de mauvais esprit en bonne société, trafficants d'incongruités dans un monde sérieux. De dangereux contrebandiers, capables tout en même temps de draguer les dames, duper les truants et de cloner Maurice Chevalier en son absence... Jamais en cale sèche d'inspiration. Bon, c'est pas leur meilleur film mais, dans la succession des sketchs, il y a des perles (glissées en douce, comme tout le reste) où la croisière s'amuse (vraiment, pour une fois).

Monsieur Verdoux

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1947, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 124 mn, NB

Critique perso :

Une voix d'outre-tombe nous raconte son histoire. Celle d'un certain M. Verdoux, qui ressemble comme deux gouttes de poison au cauteleux M. Vernay, ainsi qu'à un pimpant capitaine Bonheur. En temps de crise des Temps modernes, en France ou ailleurs, tout est bon pour survivre. M. Verdoux a monté une petite entreprise prospère : le détroussage de veuves avec consentement. Un Landru, ce n'est après tout rien d'autre qu'un Charlot qui aurait de l'éducation et des bonnes manières. Mais le métier de multigame polyrécidiviste et de serial-killer en chambre demande une bonne santé et une grande organisation, surtout quand on a le coeur faible. Surtout quand l'heure est aux assassins professionnels d'Etat et à l'industrie du crime rationnalisé. M. Verdoux peut passer à bon droit pour un humaniste désuet ; il arriverait presque à nous faire regretter les petits artisans du bon vieux temps.

Monster

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Réalisé par : Patty Jenkins (1971 - )
En : 2003, USA
Acteurs principaux : Bruce Dern (1936 - ), Christina Ricci (1980 - ), Charlize Theron (1975 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /carrément à l'ouest /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 109 mn, couleur

Critique perso :

Portrait « basé sur une histoire vraie » d’une serial-killeuse made in USA. Elle s’appelle Aileen, elle est rondouillarde et complexée, a sans doute pas eu une enfance facile, fréquente les bars et les dancing du bas du panier. Elle survit en faisant la pute pour des machos qu’elle déteste. Son premier meurtre, c’est en légitime défense face à l’un d’entre eux, particulièrement pervers. Après, faut reconnaître que sa défense devient de moins en moins légitime. Mais c’est aussi la période où elle tombe amoureuse de Selbi, gentille fille presque aussi paumée qu’elle, tellement moins macho que ses fréquentations précédentes. Eros, Thanatos et toute la clique, font encore des ravages à tous les niveaux du panier. Le film est modeste mais incarné de façon saisissante. Charlize Theron, qui est à peu près le contraire d’Aileen (quoique que sa mère ait tué son père en légitime défense), s’est laissée possédée par elle. Monster mon semblable, ma soeur (ma mère…).

Mostri (I) - Monstres (Les)

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Réalisé par : Dino Risi (1916 - 2008)
En : 1963, Italie
Acteurs principaux : Vittorio Gassman (1922 - 2000), Marisa Merlini (1923 - 2008), Ugo Tognazzi (1922 - 1990)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 115 mn, NB

Critique perso :

Les monstres bipèdes forment une espèce animale assez répandue. Ils feraient des voisins très fréquentables s'ils n'étaient pas juste un peu pourris, veules et magouilleurs. Ils ont l'ego et le verbe hauts, très hauts même - mais tout le reste au ras des pâquerettes. Petits monstres de la dernière averse, vieux monstres des neiges d'antant (quand on est monstre, on est monstre). Tableau de famille avec voitures et prestige à entretenir : regardez comme ils font le beau, ces fiers mâles, tous unis dans le puissant syndicat de la connerie universelle. Des vrais coqs empâtés. Portrait de l'Italie comme un zoo où se serait installée une fête foraine pleine de miroirs déformants. Portraits d'humains ordinaires, mes semblables mes frères.

North by Northwest - Mort aux trousses (La)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1959, USA
Acteurs principaux : Cary Grant (1904 - 1986), Martin Landau (1931 - 2017), James Mason (1909 - 1984), Eva Marie Saint (1924 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 136 mn, couleur

Critique perso :

Roger Thornhill, publicitaire new-yorkais surbooké mais sans histoires, est pris pour un certain Geoges Kaplan, ce qui lui vaut d'être kidnappé par une bande d'espions qui ne lui veut pas que du bien -et lancé dans une histoire de fous. Plus tard, c'est lui qui les poursuivra, de New-York à Chicago direction Rushmore (north by northwest of course), en se faisant passer pour Georges Kaplan. Les rôles s'inversent et s'échangent sans cesse dans ce cauchemar délicieusement emberlificoté où un homme finit par en devenir un autre. Roger devient donc Georges, endossant une identité inventée de toute pièce (au cinéma, on s'appelle ça un personnage), pour vivre une autre vie que la sienne (au cinéma, on appelle ça un scénario). Ce film est un musée du cinéma à lui tout seul, tant il enchaîne les scènes d'anthologie : le meurtre aux Nations Unies, l'attaque d'un avion en rase campagne, la poursuite sur les têtes du mont Rushmore, le train s'enfonçant dans un tunnel... Une histoire de fous relookée en film d'espionnage glamour, à revoir régulièrement comme on rend visite à un vieux pote délicieusement pervers.

Fly (The) - Mouche (La)

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Réalisé par : David Cronenberg (1943 - )
En : 1986, Canada
Acteurs principaux : Geena Davis (1956 - ), Jeff Goldblum (1952 - )
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Le brillant professeur Brundle a le mal des transports. Alors, il travaille sur le voyage immobile : la téléportation... C'est presque au point, il ne lui manque plus que le brin de folie final. C'est justement ce que lui apporte la belle Veronica, journaliste scientifique émoustillée par la découverte du siècle... et par Brundle. Ayant goûté aux vertiges de la chair, le cérébral professeur est enfin prêt à toutes les hybridations : un soir de beuverie, il se décide à tester sa machine sur lui-même. Le seul problème c'est que, ce soir-là, une mouche a la même idée, au même moment, au même endroit. La machine s'emmêle un peu les ADN, et recrache un superbe OGM : Organisme Génétiquement Monstrueux, mi-mouche mi-Brundle. Au début, tout va bien : Brundle apprend à marcher sur les murs comme Spiderman. Mais bientôt, il récupère la tête d'Elephant man et ça devient moins rigolo pour lui et son entourage. Cronenberg a tout compris : le monstre est en nous depuis toujours et la mouche est l'avenir de l'homme.

Mulholland Dr. - Mulholland drive

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Réalisé par : David Lynch (1946 - )
En : 2001, USA
Acteurs principaux : Ann Miller (1923 - 2004), Naomi Watts (1968 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 145 mn, couleur

Critique perso :

L'affiche du film promettait "une histoire d'amour dans la cité des rêves". L'histoire d'amour, ce sera entre deux femmes sublimes (une brune et une blonde) et la cité des rêves (de gloire), c'est bien sûr Hollywood, Olympe contemporain et miroir aux allouettes. Mais ce film est aussi bien plus que cela : il y a des morts, des embrouilles mafieuses, un cow boy et une piscine (mais Sunset Blvd en a vu d'autres !). Et encore : plusieurs histoires en parrallèle, un récit qui bifurque, des personnages qui se dédoublent, deux répétitions -très différentes- d'une même scène digne des pires feuilletons américains (comme dans Pension d'artistes), des sueurs froides et des effets de miroir... Pour retrouver son chemin dans ce somptueux labyrinthe narratif, baigné de musique en apesanteur, il faudra guetter les clés (l'une est bleue !). Mais Maître Lynch a excellemment fait les choses : interdit de critiquer ce film avant de l'avoir vu au moins deux ou trois fois car le puzzle est complet (et beau).

My Blueberry Nights

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 2007, USA
Acteurs principaux : Norah Jones (1979 - ), Jude Law (1972 - ), Natalie Portman (1981 - ), Rachel Weisz (1971 - )
Genre(s) : New York - New York /carrément à l'ouest /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Pour une fois, Wong se met lui-même (plutôt que ses personnages) en exil, il va voir en Amérique s'il y est. Il commence par organiser soigneusement, comme toujours, le carambolage aléatoire de quelques coeurs brisés, Anges déchus à qui il oblige à faire le tour du pays à cloche pied (ou quasi) comme gage de malchance. C'est grand, l'Amérique. Sans doute pour ne pas trop se perdre, il recycle le tube d'In the Mood for Love à l'harmonica, remplace le Chungking Express par tous les modèles de bars qu'il croise sur sa route, et mise de nouveau tous ses jetons, comme dans 2046, sur une triplette féminine : une histoire en bleu nuit, une partie en rouge sombre, une virée en violet-doré et au grand jour. Est-ce à cause des contrastes visuels trop accentués, des dialogues trop explicites ou des acteurs qui ont oublié de mettre du mystère asiatique au bord de leurs yeux ? Ca fait le même effet qu'une tarte aux myrtilles avec de la glace vanille : assez écoeurant à la longue.

My Own Private Idaho

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Réalisé par : Gus Van Sant (1952 - )
En : 1991, USA
Acteurs principaux : River Phoenix (1970 - 1993), Keanu Reeves (1964 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 104 mn, couleur

Critique perso :

Mike vit dans la rue. Des fois il tombe -littéralement- de sommeil. Il a des blancs, c'est-à-dire des trous noirs. Et le film aussi. Et
Mike gagne le peu de vie qui lui reste en se prostituant. Auprès des hommes, des femmes. Mais il préfère les hommes. Surtout Scott, qui lui aussi tapine. Sauf que lui, c'est l'héritier d'une grande lignée. Il est juste là pour faire chier son papa. Il fait le voyou pour de faux. A sa majorité, il sera riche. Et
Ils sont différents et ils se ressemblent. Des fois, ils parlent comme Shakespeare (Henri IV). Des fois
C'est deux vies qui vont diverger radicalement. Une, c'est l'enfance d'une star -pardon, d'un chef. L'autre, c'est un drôle de voyage en pointillé, au goût de gruyère (surtout les trous). Toujours au bord ou au fond du trou. Et qui ne va pas tarder à y rester pour de bon.
Shakespeare dans le caniveau.

My Fair Lady - My fair Lady

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Réalisé par : George Cukor (1899 - 1983)
En : 1964, USA
Acteurs principaux : Rex Harrison (1908 - 1990), Audrey Hepburn (1929 - 1993)
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 170 mn, couleur

Critique perso :

Suite à un pari stupide, le professeur Higgins (bien aspirer le "H") décide de faire sauter toutes les classes (sociales) en 6 mois à son élève-cobaye Eliza Doolittle -fleuriste de rue. Comment s'y prend-il ? Facile : la spécialité du professeur Higgins, c'est la phonétique. Or, l'habit ne fait peut-être pas le moine, mais l'habit + l'accent des beaux quartiers et la langue chatiée fait facilement la lady ! Mais changer de langage, c'est changer d'identité (les écrivains le savent bien). Eliza Doalot l'apprend vite, tandis que l'ignoble Higgins doit apprendre, lui, que l'être humain parlant est doué d'un peu plus d'autonomie et de sensibilité que le perroquet. Suprêmement méchant, profond et allègre.

Kennel Murder Case (The) - Mystère de la chambre close (Le)

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Réalisé par : Michael Curtiz (1886 - 1962)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Mary Astor (1906 - 1987), Eugene Pallette (1889 - 1954), William Powell (1892 - 1984)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s)
Caractéristiques : 73 mn, NB

Critique perso :

Au début, il est question d'un concours de chiens, d'héritages et de mésalliances - mais on s'y perd un peu parce que les hommes portent tous la moustache réglementaire, et que les chiens sont du même poil. Et puis le type qui était apparemment le plus riche, le plus vieux et le plus détesté de tout le monde se suicide, enfermé dans son bureau, avec un couteau dans le dos. Et ce n'est que le début. Il y aura d'autres cadavres -et d'autres chiens. La police est sur les lieux mais elle manque singulièrement de flair. Heureusement pour elle, il y a aussi un certain Philo Vance, éleveur de chiens et détective amateur (et à moustache) de son état. L'histoire est du genre à tiroir à double fond sous le double fond : tout le monde a quelque chose à cacher derrière sa moustache, il y a toujours un cadavre derrière chaque cadavre, une femme derrière chaque homme. Et une petite truffe fouineuse derrière toutes les bonnes petites énigmes.

General (The) - Mécano de la Générale (Le)

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Réalisé par : Clyde Bruckman (1894 - 1955)
En : 1927, USA
Acteurs principaux : Buster Keaton (1895 - 1966)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour)
Caractéristiques : 75 mn, NB

Critique perso :

Johnny est mécano (c'est-à-dire chauffeur-livreur-ajusteur) de locomotives. Sa monture de prédilection s'appelle la Générale. C'est la Guerre (la seule, la vraie côté US : celle de Secession). Johnny veut s'engager comme volontaire ; il est recalé à l'embauche. Mais la Générale, elle (c'est la moindre des choses quand on s'appelle comme ça), veut participer aux manoeuvres. Alors Johnny est obligé de suivre. Il joue donc le plus sérieusement du monde au train à vapeur -pour l'honneur des sudistes et les beaux yeux de sa fiancée : d'abord comme poursuivant (la Générale a été prise en otage), puis comme poursuivi (il a récupéré la Générale, les ennemis sont à ses trousses). C'est fou l'inventivité dont font preuve les hommes à cheval sur un train à vapeur, à croire que ça leur donne des ailes (de fumée). Un peu comme Naissance d'une Nation, mais en nettement plus drôle.

Sound of Music (The) - Mélodie du bonheur (La)

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Réalisé par : Robert Wise (1914 - 2005)
En : 1965, USA
Acteurs principaux : Julie Andrews (1935 - ), Christopher Plummer (1927 - )
Genre(s) : en avant la musique /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 174 mn, couleur

Critique perso :

Maria chante et danse au milieu des montagnes verdoyantes, façon "petite maison dans la prairie". Maria veut devenir religieuse. Mais avant, elle doit faire un stage de gouvernante chez un capitaine à la retraite de 25 ans, veuf avec 7 enfants. Elle se révèle pour ce qu'elle est : la nounou préférée des culottes courtes (à bretelles, on est en Autriche). En vrai clône de Blanche-Neige, elle fabrique des fringues pour tout le monde avec les rideaux de sa chambre (syndrôme Autant en emporte le vent typique) et invente une méthode rose-express pour tranformer sa nichée de nains en chorale de compet' (on est à Salzburg). Le père-capitaine, pas fou, l'embauche gratis à vie (il l'épouse) et se révèle pour ce qu'il est : un héros patriote anti-nazi (on est à la fin des années 30). Pour la décomposition de la haute société pré-World War II, mieux vaut voir La Règle du jeu. Pour les mauvais souvenirs du nazisme en chansons, mieux vaut voir Cabaret. Pour tout le reste, ça se lasse voir.

Mépris (Le)

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1963, France
Acteurs principaux : Brigitte Bardot (1934 - ), Fritz Lang (1890 - 1976), Jack Palance (1919 - 2006), Michel Piccoli (1925 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Sans doute la seule fois où B.B. a été actrice (où, du moins, son absence de jeu a servi un vrai personnage). En blonde ou en brune-Louise Brooks, elle trimballe son mystère avec une opacité têtue, sous le regard désarmé de son mari-Dean Martin. La première scène est un "blason" devenu scène d'anthologie. Après, il est question de cinéma, de l'argent qui pourrit les relations humaines, de l'Ulysse d'Homère et de vie quotidienne. Il y a une longue scène de ménage, beaucoup d'effets de distanciation, quelques statues antiques et les plages de Capri. Godard fait son Voyage en Italie. La géniale musique de Georges Delerue arriverait à rattraper n'importe quel navet. En l'occurrence, rien à rattrapper, juste à ajouter un peu de mythe dans un film déjà mythique. Pour les non-initiés, c'est le Godard le plus visible. A aimer totalement, tendrement, tragiquement (les initiés comprendront).

Chasing Amy - Méprise multiple

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Réalisé par : Kevin Smith (1970 - )
En : 1997, USA
Acteurs principaux : Ben Affleck (1972 - )
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

Holden et Blanky sont des geeks pratiquants de l'ère pré-Internet. Ils publient ensemble des comics (une série BD, quoi) à succès, ont des copains cools et sympas comme eux et cohabitent en tout amitié (et plus si affinités). Dans un salon pro plein d'autres geeks amateurs de leurs oeuvres, ils rencontrent Alyssa, comme eux auteuse prometteuse et (plus qu'eux) fille libérée. Holden voudrait bien un peu plus (étant donné son affinité), mais Alyssa aime les filles, quoiqu'en fait elle a aussi aimé des mecs, quoiqu'en fait elle n’en sait plus rien. Le film a ce côté bricolo qui sied bien à son sujet, sans doute parce que la parole y est le vrai personnage principal. Il ne s'y passe quasiment que des mots. C'est cru, cash, couillu, tout en lorgnant vers le mythe, genre quête éternelle de l'amour impossible. Du performatif un peu fauché, mais cool et sympa, quoi. Et avec des poils.

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N


Birth of a Nation - Naissance d'une nation

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Réalisé par : David W. Griffith (1875 - 1948)
En : 1915, USA
Acteurs principaux : Lillian Gish (1893 - 1993)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /épique pas toc
Caractéristiques : 125 mn, NB

Critique perso :

L'Amérique, cette grande famille de grands enfants... Au début, la famille du Nord rend visite à ses amis du Sud : badinage et barratins (enfin, c'est muet mais on devine). Et puis, c'est la guerre (la Grande de là-bas, celle de Sécession) : canons et clairons. Et du sang, plein (enfin, c'est en noir et blanc mais on devine). Bien sûr, c'est toujours con, les guerres -surtout entre membres d'une même famille. L'épaisseur romanesque de cette histoire, son ampleur et ses ramifications nous en convainquent aisément. Malheureusement, la suite n'est pas très idéologiquement correcte. En gros, elle voudrait réussir à nous faire prendre le Ku Klux Klan pour un club de boys-scouts courageux. L'Amérique, cette grande famille de grands enfants...

Naissance du jour (La)

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1980, France
Acteurs principaux : Danièle Delorme (1926 - 2015), Dominique Sanda (1948 - ), Jean Sorel (1934 - )
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Se sentant sur la fin de sa vie, une dame qui s'appelle Colette se sent assez sage comme ça pour se permettre de faire poireauter dans son potager son gentil voisin trop jeune pour elle. Vial, le voisin, a toujours quelque chose à tripotter entre les mains, mais manque un peu de belles paroles en l'air. Colette, elle, a le stylo et le caractère bien trempés et comme elle sait s'en servir, c'est elle qui mène la danse (qu'elle ne danse plus, justement) en observant et manipulant tout ce beau monde de loin. Et puisqu'elle décide aussi du temps qu'il fait, elle décrète que son automne à elle vaudra bien une naissance... Un joli miroir plein de mots et de lumière pour Agnès, qui le lui rendra bien.

Black Narcissus - Narcisse noir (Le)

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Réalisé par : Powell (& Pressburger) (1905 - 1990)
En : 1947, Angleterre
Acteurs principaux : Deborah Kerr (1921 - 2007), Jean Simmons (1929 - 2010)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /épique pas toc
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Sister Clodagh, brave et charmante nonne, est envoyée en mission par sa mère sup dans les hauteurs himalayennes, pour y créer une nouvelle communauté. Elle embarque avec elle une poignée d'encapuchonnées toutes aussi pleines de bonne volonté -enfin, presque toutes. Le lieu est escarpé, la population locale indifférente -sauf rémunérations. Des femmes ont déjà vécu là, en groupe, pour le compte du potentat local, mais un peu moins chaudement vêtues... Le seul saint de l'histoire vit encore plus haut, et tout seul. Le représentant de l'administration anglaise, lui, est en bas, et contre toute logique climatique il est toujours en short. Les fleurs du jardins embaument de capiteux parfums, on sent la menace de multiples vertiges. Bref, là haut, tout n'est que désordre et danger, vent, exotisme et sensualité. Elles sont entrées dans un décor (tout a été tourné en studio !) trop grand pour elles, too much pour de braves et charmantes nonnes...

Ne nous fâchons pas

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Réalisé par : Georges Lautner (1926 - 2013)
En : 1966, France
Acteurs principaux : Michel Constantin (1924 - 2003), Mireille Darc (1938 - 2017), Jean Lefebvre (1919 - 2004), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /nanar pur sucre
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Beretto s'est rangé des voitures pour se reconvertir dans le bateau de plaisance. Un jour, il reçoit la visite de deux Blues Brothers louches qu'il a l'air de bien connaître. Ca le lance sur la piste d'un certain Michalon, à Nice. Michalon, c'est la mascotte des tortionnaires, le serial connard idéal. Pour d'obscures raisons, il a une promo de Collège anglais en motocyclettes rouges et coupe Beatles aux trousses. Il n'aura pas de trop de Beretto et de ses potes pour volatiliser les uns après les autres à coup de dynamite les yéyés british biberonnés à "Chapeau melon et bottes de cuir". Voilà à quelles extrémités conduit l'abus d'humour surréaliste sur fond de gouaille franchouille.

Sin-se-gae - New World

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Réalisé par : Hoon-jung Park
En : 2013, Corée
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 134 mn, couleur

Critique perso :

Effervence dans une tentaculaire mafia coréenne. Le big boss vient de mourir (de façon pas trop naturelle), va falloir désigner son successeur, sans doute parmi les boss des diverses branches de la holding. Un problème de mecs, évidemment. Parmi les moyens-boss a priori pas vraiment éligibles mais au début de carrière prometteur, y'a Jung-jae Lee. En fait, lui serait surtout soutenu par la police locale, qui est son vrai employeur, mais évidemment c'est pas une campagne très officielle. Alors, Jung-jae Lee fait comme il peut pour satisfaire ses divers boss. Il est très bon pour garder un visage impassible en toutes circonstances et pour ne pas trop tâcher son parfait costume d'homme d'affaires, ce qui lui sera extrêmement utile. Beaucoup manoeuvrer, tout cacher à tout le monde le plus longtemps possible, that is the problem pour à peu près tout le monde, dans ce film. Y compris aux spectateurs, si possible... Mission accomplie...

New York, New York

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Réalisé par : Martin Scorsese (1942 - )
En : 1977, USA
Acteurs principaux : Robert De Niro (1943 - ), Liza Minnelli (1946 - )
Genre(s) : New York - New York /en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 155 mn, couleur

Critique perso :

45-57 : quelques années dans l'histoire de la musique américaine. Quelques années dans l'histoire de l'âge d'or du musical. Quelques années dans la vie d'un couple désaccordé : une chanteuse à chignon et un fanfaron du saxo. Il fonce, elle dit non, elle cède. Il exagère, elle craque. Ils sont passionnés tous les deux, mais de musique avant toute chose -et pas de la même. Robert en impose en roi de l'impro toujours en mouvement, insupportable et charmeur. Liza épate dans le rôle de sa mère qui tournerait dans un film de son père. En Amérique aussi, tout finit par des chansons -même l'amour. Une tragédie en notes et en néons ; le brouillon ou le remake d'un film musical idéal qui n'existera jamais.

Ninotchka

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Réalisé par : Ernst Lubitsch (1892 - 1947)
En : 1939, USA
Acteurs principaux : Felix Bressart (1892 - 1949), Melvyn Douglas (1901 - 1981), Greta Garbo (1905 - 1990), Bela Lugosi (1882 - 1956)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Paris, après la révolution russe, mais avant la 2ème Guerre -un petit enclos de paradis. Débarque un trio de moujiks mandatés par les soviets pour y négocier des bijoux légalement extorqués aux traitres blancs. Fiasco de la troupe, dépassée par la subtilité diplomatique locale. Pour rattraper ce qui peut l'être, les bolcheviques envoient leur meilleur atout : Ninotchka. Ninotchka, c'est la révolution prolétarienne incarnée, un ordinateur implacable dans un corps de femme -et quel corps ! A Paris, elle remet vite les affaires en ordre. Et fait la connaissance d'un dandy dont le blanc des yeux l'intéresse. Il lui enseigne les mensurations de la Tour Eiffel, et à lever le sourcil gauche -entre autres. Entre deux paradis, son coeur ne balance pas très longtemps... Les dialogues doivent pas mal au génial Billy , le charme beaucoup aux interprètes, la touche irrésistible entièrement à Lubitsch.

No Smoking

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1993, France
Acteurs principaux : Pierre Arditi (1944 - ), Sabine Azéma (1949 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 140 mn, couleur

Critique perso :

De l'influence d'une petite clope (Smoking or No Smoking ?) -ou d'une petite parole en l'air- sur le déroulement d'une vie. Ou bien : la Théorie du Chaos appliquée au destin des hommes, dans un théâtre en plein air déguisé en campagne anglaise. 9 personnages, 2 acteurs en majesté, 3 ou 4 décors et le regard muet d'un chat égyptien sans doute échappé du Portrait de Dorian Gray : une multitude de combinaisons possibles. Pour les explorer, le récit est un sentier aux chemins qui bifurquent (et, en bonne informaticienne que je suis, j'ajouterai que l'arbre des possibles est parcouru en "profondeur d'abord"). Cette variation-ci est centrée sur un couple mal assorti : Miles et Rowena Coombes. Lui a choisi l'option conformisme timoré, elle est plutôt du genre excentrique excitée. Ils sont en pleine crise de vaudeville ; une remise au fond du jardin de leurs amis Teasdale va jouer le rôle du placard. On suit, comme dans un feuilleton qui bafouille, les aléas de leurs amours, de leurs amitiés, de leurs projets. Mais, la plupart du temps, après un petit dérèglement passager, tout rentre dans l'ordre des choses, l'ordre des classes, l'ordre des couples. En fait, c'est simple : ou bien on aime, ou bien on adore.

Kind Hearts and Coronets - Noblesse oblige

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Réalisé par : Robert Hamer (1911 - 1963)
En : 1949, Angleterre
Acteurs principaux : Joan Greenwood (1921 - 1987), Alec Guinness (1914 - 2000), Dennis Price (1915 - 1973)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 103 mn, NB

Critique perso :

La quintessence du British sense of humor ! Sic Alec Guinness, avant de se prendre pour Obi-Wan Kenobi, était l'acteur emblématique du genre. Ici, il incarne à lui tout seul les huit victimes successives d'un sérial killer aux manières de gentleman. Il faut dire que ce dernier tue pour la bonne cause : celle de sa maman, née noble mais rejetée par sa famille après une mésalliance, et pour récupérer un titre de noblesse qu'il estime devoir lui revenir. Sur les inconvénients de prendre un peu trop au sérieux les codes de l'aristocratie britannique et la perversion qu'ils recellent, on n'a guère fait mieux, have we ?

Corpse Bride - Noces funèbres (Les)

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Réalisé par : Tim Burton (1958 - )
En : 2005, USA
Genre(s) : animation /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /en avant la musique /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 77 mn, couleur

Critique perso :

Victor est un jeune garçon timide, maladroit et raffiné. Fils de nouveaux riches. Victoria est une jeune fille pâle, délicate et sensible. Fille de nobliaux ruinés. Les parents ont décidé d'unir leurs intérêts, et leurs enfants, qui ne se connaissent mais ont tout pour se plaire. Ils se plaisent, tout va bien. Trop bien. Victor est tellement empoté qu'il foire sa répet' de la cérémonie du mariage, met le feu à sa (future) belle-mère et trouve le moyen d'épouser pour de vrai-faux une inconnue morte et enterrée depuis longtemps (qui a tout de même de beaux restes). C'est là qu'est l'os. Il se retrouve malgré lui embarqué dans le royaume des morts, beaucoup plus fun que celui des vivants. Ca swingue appremment pas mal, au dernier sous-sol. La vie, les désirs et la réalité ont toujours au moins deux faces, pas facile de choisir son camp. Pas dur en revanche de classser ce film-là dans le camp des très bons.

A Fei zheng chuan - Nos années sauvages

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 1990, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Leslie Cheung (1956 - 2003), Maggie Cheung (1964 - ), Andy Lau (1961 - ), Carina Lau (1964 - ), Tony Leung Chiu Wai (1962 - )
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 94 mn, couleur

Critique perso :

Un play-boy de Hong-Kong et quelques unes de ses victimes, années 60. En sous-vêtements blancs devant son miroir ou dans sa voiture de minet, il est toujours charmant, toujours fuyant. Irrésistible auprès des filles. Son secret, c'est qu'il connaît les formules magiques qui rendent inoubliable le tour d'une aiguille sur le cadran d'une montre. Son autre secret, c'est qu'il ne sait pas qui est sa mère et qu'il est très malheureux (mais c'est pas une excuse pour faire pleurer les filles). Et le secret qu'il ignore lui-même, c'est que son temps est compté, comme celui de l'oiseau sans pattes qui ne vit que le temps d'un vol, et qui sert de métapore au film. L'univers, les obsessions, les personnages de Wong sont déjà là. Aucune ombre ne manque à ses lumières, aucune occasion manquée ne manque à son scénario. Portrait de l'artiste en jeune homme mélancolique, et en jeunes femmes tristes.

Meglio gioventù (La) - Nos meilleures années

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Réalisé par : Marco Tullio Giordana (1950 - )
En : 2003, Italie
Acteurs principaux : Alessio Boni (1966 - ), Luigi Lo Cascio (1967 - ), Maya Sansa (1975 - ), Jasmine Trinca (1981 - )
Genre(s) : portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 400 mn, couleur

Critique perso :

Mon film préféré de l'année 2003 : 6h, 40 ans de vie (des années 60 à nos jours) , un pays (l'Italie), une famille. Italienne, donc, certes, mais dont les membres préfèrent les livres et les voyages au football et à la télé. Une famille sur plusieurs générations : évidemment il est, au bout du compte, beaucoup question de transmission, d'héritage, de mémoire. L'esprit du temps et le vent du destin soufflent en coulisse. Le secret des meilleurs récits, de ceux qui font sens, c'est de tisser un réseau de rimes, de connexions, de fils qui relient les faits, les gestes et les êtres à travers le temps et l'espace, c'est d'entrelacer les vies individuelles avec les événements historiques, Stromboli , Rocco et ses frères et la musique des Parapluies de Cherbourg. Tel pas de porte plusieurs fois le décor d'un dernier adieu, tel voyage commencé par l'un et fini par un autre, une génération plus tard, telle rencontre qui mettra 20 ans à prendre sens. Ce film a un tissage tellement subtil qu'il se confond sans peine à la trame de nos propres souvenirs. Si le cinéma est un songe, nous sommes tous fait de l'étoffe de ce songe-là.

Nosferatu, eine Symphonie des Grauens - Nosferatu

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Réalisé par : F. W. Murnau (1888 - 1931)
En : 1922, Allemagne
Acteurs principaux : Max Schreck (1879 - 1936)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Un homme entreprend un voyage à la rencontre de ses fantômes... En fait, il est envoyé par son patron (un peu louche, le patron) dans les Carpathes pour proposer une affaire immobilière à un certain comte Nosferatu -ou Dracula, suivant les versions (un peu louche, le client). Il aurait dû se méfier, c'est sûr. En fait, en matière immobilière, le comte se contente de fort peu (un petit cercueil lui suffit). Mais en matière de ravitaillement, en revanche, il semble nettement plus exigeant... Un cauchemar obsédant, filmé comme un théâtre de marionnettes en ombres chinoises (expressionnisme, qu'y disent). Un piège à retardement, une bombe d'ombre et de lumière dont l'explosion dure le temps d'un film.

Nous irons tous au paradis

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Réalisé par : Yves Robert (1920 - 2002)
En : 1977, France
Acteurs principaux : Guy Bedos (1934 - ), Claude Brasseur (1936 - ), Danièle Delorme (1926 - 2015), Victor Lanoux (1936 - 2017), Jean Rochefort (1930 - 2017)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Etienne et sa bande d'Un Eléphant ça trompe énormément tente un revers et monte au filet. Encore des histoires de copains (entre mecs exclusivement) plus ou moins inséparables, d'infidélités conjugales plus ou moins fantasmées et de petits arrangements avec la vie. Etienne se prend pour l'inspecteur Clouseau, Bouly hésite entre Dom Juan et papa Poule, Simon choisit ses patientes en connaisseur et Daniel veut se marier. C'est comme si on les connaissait depuis toujours. C'est comme si on était déjà sûr de les retrouver un jour au paradis des personnages.

Nuit américaine (La)

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1973, France
Acteurs principaux : Jean-Pierre Aumont (1911 - 2001), Nathalie Baye (1948 - ), Jacqueline Bisset (1944 - ), Jean-Pierre Léaud (1944 - ), François Truffaut (1932 - 1984)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Encore un film qui raconte une grande histoire d'amour... Sauf que là, il s'agit de celle d'un homme (François Truffaut) fou amoureux du cinéma depuis l'enfance, qui a réalisé son rêve : devenir réalisateur. Portrait de l'artiste en lui-même (ou presque), portrait de groupe aussi, puisque cette création-là est forcément collective (avec intrigues amoureuses et caprices de stars inclus), manuel de bricolage et d'improvisation, surtout. Ce film pourrait être le making of d'un autre qu'on ne verra pas (pas sûr qu'on en ait envie d'ailleurs), mais il est bien mieux, évidemment, puisque le cinéma est toujours plus beau que la vie. Puisqu'il rend les femmes magiques...

Night of the Iguana (The) - Nuit de l'iguane (La)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1964, USA
Acteurs principaux : Richard Burton (1925 - 1984), Ava Gardner (1922 - 1990), Deborah Kerr (1921 - 2007), Sue Lyon (1946 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 125 mn, NB

Critique perso :

Un ex-pasteur douteux et fiévreux, reconverti en guide touristique pour américaines friquées, embarque sa fournée de vieilles demoiselles sans avenir dans un cul de sac mexicain. Sur place, il y a tout de même trois femmes fréquentables, aussi dangereuses les unes que les autres : une petite allumeuse, l'hôtelière en chaleur et une espèce de sainte mendiante. Une bête étrange est tapie dans l'ombre, pendant que les humains passent la nuit à causer. Ils ont l'inquiétude métaphysique bavarde, ça se faisait beaucoup à l'époque. Mais ils sont tous au bout de leurs rouleaux. Ils sont au paradis et trop fatigués pour en profiter, il y fait plus chaud que prévu. Un film sur l'honneur des vaincus qui survivent au désastre de leur vie.

Night of the Hunter (The) - Nuit du chasseur (La)

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Réalisé par : Charles Laughton (1899 - 1962)
En : 1955, USA
Acteurs principaux : Lillian Gish (1893 - 1993), Robert Mitchum (1917 - 1997), Shelley Winters (1922 - 2006)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 89 mn, NB

Critique perso :

La rencontre improbable entre le western, le film noir et le conte de fées a donné ce bijou improbable, seule réalisation de son auteur (par ailleurs excellent acteur). Le diable s'est déguisé en pasteur, il a la tête de Robert Mitchum et il plaît aux dames. Il rejoue par coeur le sketch du combat entre le bien et le mal (les américains ont toujours adoré ça) à qui veut bien l'écouter. Mais c'est pour de faux. Pour de vrai, il n'est pas à quelques cadavres près pour récupérer son magot. Pour de vrai, c'est un grand loup dans la bergerie du monde de l'enfance. De ceux dont on a toujours adoré avoir peur.

Night at the Opera (A) - Nuit à l'opéra (Une)

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Réalisé par : Sam Wood (1883 - 1949)
En : 1935, USA
Acteurs principaux : Margaret Dumont (1889 - 1965), Allan Jones (1907 - 1992), Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

L'opéra c'est beau, c'est noble, c'est le grand art par excellence. En plus, la jeune première est jolie. Sauf que son copain, le gentil ténor, est un figurant sans le sou tandis que le jeune premier officiel est un salaud qui la colle de trop près. Enfin, on s'inquiète pas trop quand même. Ils partent tous en tournée sur l'océan, agents, doublures et agents doubles plus ou moins officiels compris. On nous avait promis du spectacle première classe et on se retrouve embarqués dans une croisière d'opérette, à partager une cabine à 25 (attention scène culte) et à danser la polka sur le pont. Au nez et à la barbe (surtout la barbe) de héros de guerre en vadrouille. En fait, l'opéra, c'est beau et un peu emmerdant, sauf quand on en confie la machinerie et tous les rouages à une bande de brothers déchaînée. Le vrai grand art, c'est eux.

Nuits de la pleine lune (Les)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1984, France
Acteurs principaux : Tchéky Karyo (1953 - ), Fabrice Luchini (1951 - ), Pascale Ogier (1958 - 1984)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Louise vit en banlieue avec Rémi. Mais Louise habite aussi Paris, et sort avec Octave, qu'elle adore tout en se refusant à lui. Elle aime aussi aller danser dans des soirées ; elle se laisse draguer par Damien. Les soirs où elle préfère être seule, c'est parce qu'elle n'a réussi à débaucher personne au téléphone. Elle ne sait pas ce qu'elle veut, Louise ? Si, elle sait très bien : elle veut autre chose, pour s'assurer qu'elle a bien ce qu'elle a. Elle veut être libre. En fait, Louise, d'abord, elle fait. Après, elle raisonne. Et elle s'explique si bien qu'elle arrive à se croire elle-même (mais être libre, c'est vouloir ce que l'on peut et pas pouvoir ce que l'on veut, disait Jean-Paul). Et la lune, là-dedans ? C'est peut-être la vraie cause de tout, mais on ne le saura jamais.

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O


Obsession

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Réalisé par : Brian De Palma (1940 - )
En : 1976, USA
Acteurs principaux : Geneviève Bujold (1942 - ), Cliff Robertson (1923 - 2011)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

Monsieur aime les belles choses : sa maison, son épouse, les églises de Florence (où il l'a connue) et la fille qu'ils ont faite ensemble. Tout irait parfaitement dans le meilleur des paradis possibles s'il était un peu moins riche. Kidnapping de l'épouse et de la fille, demande de rançon, intervention de la police qui foire : il perd tout (sauf sa maison). Seize ans plus tard, il est toujours riche, de nouveau à Florence et face au sosie de son épouse décédée. On rembobine le film, la copie sera-t-elle meilleure que l'originale ? Ce remake sur les remakes pompe explicitement Vertigo, Rebecca, Marnie et quelques autres, en un poil plus pervers, dans l'esthétique kitsch des années 70 parfois au bord du ridicule (et pas toujours du bon côté du bord). Il se prendrait pas pour la réincarnation du gros bonhomme du cinéma, le De Palma ? C est son obsession à lui...

Oktyabr - Octobre

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1928, Russie
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale ! /épique pas toc
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

Pour célébrer en images le 10ème anniversaire de sa Révolution, la Russie ne pouvait, évidemment, que faire appel à lui. Pour l'occasion, il se démène : il remplit ses images de textes, accumule les signes, plante des forêts de symboles. Il filme des hommes vides (les réacs) qui se transforment en pantins, et des hommes pleins d'idéal (les bolchéviques) qui se transforment en statues pour l'éternité. Il filme Lenine qui parle à la tribune et la foule qui envahit le palais de Pétersbourg comme autant d'idéogrammes sur l'écran blanc de l'Histoire (il semblerait que Trotsky, lui, ait été coupé au montage de la révision historique). Jamais un film muet n'aura été aussi plein de paroles de concepts.

Birds (The) - Oiseaux (Les)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1963, USA
Acteurs principaux : Tippi Hedren (1931 - ), Rod Taylor (1930 - 2015)
Genre(s) : les chocottes à zéro
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Deux histoires pour le prix d'un film ! D'abord, une parade de séduction raffinée entre deux grands enfants en costume d'adulte qui sortent le grand jeu. Et puis, là-dessus, de drôles d'oiseaux menaçants se mettent à assombrir sérieusement le ciel et l'avenir du petit village de bord de mer qui sert de décor. Evidemment, Hitchcock n'explique rien, ne force aucune interprétation symbolique de cet étrange rapprochement ; mais nous, pauvres humains, nous ne pouvons pas nous empêcher d'essayer de faire du sens avec tout ça : violence sexuelle, étrangeté du monde, rebellion de la nature, défi à la raison et au contrôle... On est attaqué en plein inconscient, on a compris quelque chose et on ne sait pas quoi, c'est le pouvoir des grands films.

Oliver Twist

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Réalisé par : David Lean (1908 - 1991)
En : 1948, Angleterre
Acteurs principaux : Alec Guinness (1914 - 2000)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 116 mn, NB

Critique perso :

Par un soir d'orage, une pauvre jeune fille donne la vie à un ange blond -et rend la sienne. Le pauvre petit ange blond est élevé à l'hospice. Il passe de mains en mains -et elles sont de moins en moins propres. Jusqu'à ce qu'on reconnaisse enfin que, sous ses cheveux d'ange, coule un sang pur et bleu. Hem, comment dire, la fausse pauvreté pittoresque, c'est pas vraiment mon truc. Les portraits ne font pas trop dans la subtilité -ni le scénario d'ailleurs. Les taudis et les âmes sont cracra à souhait, il ne manque pas un accroc aux guenilles ni un coup fourré aux trognes grimaçantes. Ici tout n'est que luxure, crasse et cupidité. De la caricature pour livres d'images, gênante à force de ne pas l'être.

Olvidados (Los)

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Réalisé par : Luis Bunuel (1900 - 1983)
En : 1950, Mexique
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

Les oubliés du titre, ce sont les enfants des rues de Mexico. Les adultes, ici, sont absents, aveugles ou épuisés de travaux domestiques. La seule loi qui tienne est celle du plus fort de la bande. Or, il s'appelle Jaibo et il sort de prison, ce qui ne présage rien de bon... Mais on est chez Bunuel, pas dans le néo-réalisme : la peinture de la misère se teinte de symbolisme et la figuration des rêves et des fantasmes n'est pas oubliée. Le poids du destin et l'injustice subie par l'enfance sacrifiée n'en est que plus puissante. Dur dur, sobre et beau...

Shadow of a Doubt - Ombre d'un doute (L')

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1943, USA
Acteurs principaux : Joseph Cotten (1905 - 1994), Teresa Wright (1918 - 2005)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Au commencement, Dieu créa la famille américaine moyenne. Et puis, le petit dernier, avec son premier vélo, fit une chute et se fractura le crâne. Devenu grand, il est parti vivre ailleurs, a fait d'autres bêtises. Il rêve de veuves joyeuses. Il s'appelle Charlie. Un jour, il revient hanter le foyer de sa grande soeur qui, elle, a su (re)constituer une parfaite famille américaine moyenne (avec maison typique, jardin, garage, mari et enfants), et dont la fille aînée s'appelle Charlie, en hommage à l'enfant prodige. L'ange déchu parviendra-t-il à pervertir l'ange ingénue qui porte son nom ? Après avoir sérieusement écorné les joies matrimoniales (cf. ses premiers films américains), Hitchcock introduit un soupçon de Soupçons dans le paradis familial.

They Shoot Horses, Don't They ? - On achève bien les chevaux

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Réalisé par : Sydney Pollack (1934 - 2008)
En : 1969, USA
Acteurs principaux : Bruce Dern (1936 - ), Jane Fonda (1937 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Un marathon de danse : il n'y a que les américains en plein crise pour inventer un truc pareil. Ca se joue en couple, le but est de tenir debout le plus longtemps possible en bougeant les pieds (10mn de pause toutes les 2h). Les meilleurs tiennent plus d'un mois. Moi qui serais plutôt assez douée pour les marathons de sommeil, c'est une des pires tortures que je puisse imaginer. Ces jeux du cirque modernes, scénarisés par la misère et la bêtise, attirent le gratin de Hollywood (comme spectateurs) et les cramés du rêve américain (comme concurrents). On suit le parcours d'un couple de hasard : un cow-boy égaré en ville et une poupée pleine de rage qui fait non non non. Quelques flash forward de mauvaise augure laissent présager très tôt que ces losers qui n'ont plus que leur fatigue à vendre peuvent tomber encore plus bas. Métaphore cruelle d'à peu près tout ce qu'il y a de pire dans le monde occidental...

On connaît la chanson

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1997, France
Acteurs principaux : Pierre Arditi (1944 - ), Sabine Azéma (1949 - ), Jean-Pierre Bacri (1951 - ), Jane Birkin (1946 - ), Nelly Borgeaud (1931 - ), André Dussolier (1946 - ), Agnès Jaoui (1964 - ), Lambert Wilson (1958 - )
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Ce n'est pas une comédie musicale mais il y a des chansons, ou plutôt des morceaux de tubes de variété mimés en play-back par les acteurs. L'histoire ? Un vaudeville qui ne dit pas son nom, quelques péripéties dérisoires dans la vie d'une demi-douzaine de bobos parisiens plus ou moins névrosés-dépressifs, mais suffisamment bien éduqués pour faire bonne figure. En public, ils soutiennent des thèses ou causent crise du chômage ou de l'immobilier. Ils se font la cour à l'ancienne. Mais c'est Sylvie Vartan, France Gall ou Alain Bashung qui chantent sur la BO de leurs petits cinémas intérieurs. Resnais pose sur ce petit monde un regard d'entomologiste compatissant. Depuis Maupassant, on sait que le bonheur n'est pas gai -mais la dépression des autres, des fois, oui...

On purge bébé

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1931, France
Acteurs principaux : Fernandel (1903 - 1971), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 62 mn, NB

Critique perso :

Une pochade de Feydeau, scatologique et misogyne, jouée entre potes et tournée en quelques jours : drôle de débuts pour une carrière comme celle de Renoir. Scènes de la vie bourgeoise et conjugale, fin XIXème. Pour une fois, pas d'amant dans le placard, mais une femme qu'on voudrait bien y mettre (au placard). Une histoire de commande de pots de chambre pour l'armée française qui interfère avec la constipation passagère du fiston capricieux. Michel Simon en notable mielleux (et cocu of course). Première apparition de Fernandel. Premier film parlant de son auteur, comme le babillage émerveillé de quelqu'un qui vient d'apprendre à parler. Un petit galop d'entrainement avant de passer aux choses sérieuses...

Clockwork Orange (A) - Orange mécanique

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1971, Angleterre
Acteurs principaux : Malcolm McDowell (1943 - )
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 137 mn, couleur

Critique perso :

C'est une espèce de "Crime et chatiment" qui aurait été transposé quelques années après que le Dr Folamour ait pris le pouvoir. Le héros s'appelle Alexandre le Large, c'est donc un explorateur de territoires inconnus. Ses drogues préférées ont pour nom : sexe, violence et Beethoven. Forcément, ça finit par mal tourner. La société policière en fait le cobaye d'un nouveau traitement de choc contre le mal : en psycho, ils l'appellent le "conditionnement opérant" ; ça marche assez bien avec les rats et les chiens. Alex est "guéri". Effet de bord non désiré, il est aussi dégoûté de Beethoven -mais pas de Singin' in the Rain, ce qui lui causera des ennuis à sa sortie de prison. Son enfer est pavé des meilleures intentions gouvernementales. Et la société, elle, ne sera jamais guérie de ses démons... Encore une magistrale et impressionnante leçon signée du maître.

Orlando

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Réalisé par : Sally Potter (1949 - )
En : 1992, Angleterre
Acteurs principaux : Lothaire Bluteau (1957 - ), Tilda Swinton (1960 - ), Billy Zane (1966 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 94 mn, couleur


Orphée

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Réalisé par : Jean Cocteau (1889 - 1963)
En : 1949, France
Acteurs principaux : Maria Casares (1922 - 1996), Henri Crémieux (1896 - 1980), Marie Déa (1912 - 1992), Jean Marais (1913 - 1998), François Périer (1919 - 2002)
Genre(s) : conte de fées relooké /pas drôle mais beau /poésie en image
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

Rien de plus casse-gueule que le genre mythico-poétique. C'est comme la traversée des miroirs : ça passe ou ça casse ! mais Cocteau est un expert en passage de miroirs... Il nous peint un Orphée de mauvaise humeur. C'est un poète, mais boudé par St Germain-des-prés (un comble, à l'époque). Il aime la mort (l'immortalité ?) plus que sa femme Euridyce. Et l'inspiration tombée du ciel (par ondes radio) plus que la vie quotidienne. Des deux côtés du miroir, deux mondes se contemplent sans se reconnaître... L'abîme symbolique guette, mais la noyade dans le ridicule est évitée haut la main. S'il y a vertige, ce serait pluôt vers le haut...

Oscar

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Réalisé par : Edouard Molinaro (1928 - 2013)
En : 1967, France
Acteurs principaux : Claude Gensac (1927 - 2016), Claude Rich (1929 - 2017), Louis de Funès (1914 - 1983)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

A l'origine : un vaudeville bourgeois (chantages, quiproquos et mésalliances) quoique finalement très classique (respect des 3 unités, plus celle de la famille, reconnaissances finales). Long polissage sur les planches du théâtre parisien, dans les années 60 (dans la même veine, voir aussi Pouic-Pouic). Il n'en resterait peut-être pas plus qu'un parfum de nostalgie désuette si Fufu fou furieux n'était de la partie. Boule de nerf sur ressort, il crée à jamais le personnage du bourreau rigolo, du patron irrascible et irrésistible, celui qu'on adore mépriser. Avec lui, l'excès n'est jamais en trop.

Oublie-moi

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Réalisé par : Noémie Lvovsky (1964 - )
En : 1994, France
Acteurs principaux : Valeria Bruni Tedeschi (1961 - ), Emmanuelle Devos (1964 - ), Laurent Grévill (1961 - ), Emmanuel Salinger (1964 - ), Philippe Torreton (1965 - )
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Elle s'appelle Nathalie, elle vit officiellement avec Antoine mais harcèle Eric, son ex, et cherche à coucher avec Fabrice, son rien du tout. Rien que des gentils garçons, pourtant. Elle veut tout, dit le contraire de tout et ne sait plus ce qu'elle veut. La parole est sa principale arme, elle s'en sert pour séduire et pour faire mal, mais elle se blesse au moins autant que les autres avec. Elle fait n'importe quoi et ne va sans doute pas fort, elle énerve même ses meilleures amies. Portrait virtuose de chieuse en majesté, de celles qu'on aurait du mal à supporter plus que le temps d'un film. Portrait aussi, par la même occasion, d'une nouvelle génération d'acteurs, de celle qu'on va adorer pendant les 20 années qui viennent. Noémie commence sans fard, par sa pilule la plus amère ; elle apprendra plus tard à napper ses déprimes du sucre de son humour.

Ours et la poupée (L')

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Réalisé par : Michel Deville (1931 - )
En : 1970, France
Acteurs principaux : Brigitte Bardot (1934 - ), Jean-Pierre Cassel (1932 - 2007), Daniel Ceccaldi (1927 - 2003)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

L’ours vit en pleine campagne -en fait, à quelques kilomètres de Paris, mais il y règne perpétuellement un microclimat tellement normand que ça paraît très loin. Il exerce le délicieux et désuet métier de contrebassiste de l’ORTF et élève tous seul une ribambelle d’enfants -pas tous à lui mais on s’en fiche. Il porte des pulls à cols roulés et circule en 2CV, une vraie caricature de bobo hypster avant que ce soit vintage. La poupée habite seule un loft design et classieux, occasionnellement envahis de prétendants distingués et de gourous enfumés. Elle collectionne les toiles de maître et les ex-maris, a un corps à faire rougir sa baignoire immaculée. Un papa poule et une poule ultra branchée : deux France qui ne vivent pas dans le même monde. Le hasard et/ou le caprice d’un Dieu malicieux fait se croiser leur voiture sur une route de campagne. Elles se frôlent un peu trop fort. Les conducteurs mettront un peu plus de temps à faire la même chose, à croire que c'est pour ça que le cinéma a été inventé…

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P


Pane, amore e fantasia - Pain, amour et fantaisie

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Réalisé par : Luigi Comencini (1916 - 2007)
En : 1953, Italie
Acteurs principaux : Vittorio De Sica (1902 - 1974), Gina Lollobrigida (1927 - ), Marisa Merlini (1923 - 2008)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 90 mn, NB

Critique perso :

Antonio est rentré dans la gendarmerie principalement, semble-t-il, pour le prestige supposé que l'uniforme confère auprès des dames. Le poil qui blanchit mais le coeur toujours vert, il trimballe ses galons, sa moustache et sa guitare au gré de ses affectations dans l'Italie profonde. A Sangliena, petit village (imaginaire) haut perché où il débarque, deux demoiselles retiennent son attention : une sauvageonne dévergondée qu'il laisse généreusement à son benet de subalterne, et une sage-femme plus mûre mais non moins gironde, qu'il trimballe généreusement partout sur son vélo -visiblement, il n'a que ça à faire. C'est un peu Don Juan chez Don Camillo, sans la dimension politique ni métaphysique - ni quoi que ce soit d'autre que pittoresque, d'ailleurs. Du pain et des jeux (de séduction) : tout ce que les italiens ont toujours aimé. Quant à la fantaisie, c'est à peu près celle de mes grands-parents.

Pane, amore e gelosia - Pain, amour et jalousie

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Réalisé par : Luigi Comencini (1916 - 2007)
En : 1954, Italie
Acteurs principaux : Vittorio De Sica (1902 - 1974), Gina Lollobrigida (1927 - ), Marisa Merlini (1923 - 2008)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

Ca commence le lendemain matin de la dernière nuit du précédent : une vraie suite, quoi. Mais comment relancer les affaires de coeur, apparemment bien stabilisées à l'issue du premier épisode ? Bon sang mais c'est c'est bien sûr : instiller un peu de jalousie là-dedans, à coup de quiproquos (plus ou moins) bien sentis. Un peu de comedia del arte (mais pas trop quand même : faudrait pas que les filles prennent goût au spectacle non plus !), un peu de superstition tournée en dérision (mais le bon père est toujours bien bon !), un peu de morale bien pensante (la jolie sage-femme qui a retrouvé son amour de jeunesse n'a plus qu'à reboutonner son corsage !). Bref, après un peu de pagaille (et de pasta) passagère, tout rentre finalement dans le meilleur des ordres possibles. Difficile d'être très drôle sur de telles bases...

Pane, amore e... - Pain, amour, ainsi soit-il

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Réalisé par : Dino Risi (1916 - 2008)
En : 1955, Italie
Acteurs principaux : Vittorio De Sica (1902 - 1974), Sophia Loren (1934 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 93 mn, couleur

Critique perso :

On en prend d'autres (actrices, décor, réalisateur), et on recommence -en moins bien. Dans ce quasi remake paresseux du numero uno, Antonio, seul pilier encore en place est passé de la gendarmerie à la police municipale. Il a perdu (un peu) en prestige, quoique -toujours un bel uniforme et rien d'autre à glander que regarder passer les filles. Innovations : on est passé à la couleur, on a déménagé en Sicile, au bord de la mer, dans le village natal du héros et on lui a déniché un frangin prêtre, histoire de bien clarifier les enjeux dramatiques et moraux de l'affaire. Sinon, la typologie féminine ne s'est guère nuancée (bigotte coincée ou dévergondée affriolante, à votre guise, on n'a rien d'autre en rayon) et la subtilité du scénario pas des masses enrichie (plutôt l'une ? non plutôt l'autre !). Plus grand chose à croûter sur ces pains-là...

Paisa

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Réalisé par : Roberto Rossellini (1906 - 1977)
En : 1946, Italie
Genre(s) : pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

Le seul bon côté des guerres, c'est qu'elles permettent parfois à des peuples de se rencontrer -enfin, de se cotoyer plutôt, parce que la rencontre, c'est autre chose. Ainsi, en 44, les américains ont cotoyé les européens -et, à quelques exceptions près, les européens étaient bien contents de les voir arriver. Mais ça ne suffit pas forcément à faire des rencontres. Illustration italienne en six tableaux du sud au nord, du printemps 44 à l'hiver 45. Six sketchs, six quiproquos que ni la bonne volonté, ni la solidarité, ni même l'amour ou la foi ne permettent de lever complètement. Les êtres et les peuples restent le plus souvent opaques les uns aux autres, sauf face à la mort, peut-être. Les combats les plus durs se passent dans les coeurs et dans les têtes...

Pandora and the flying Dutchman - Pandora

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Réalisé par : Albert Lewin (1894 - 1968)
En : 1951, Angleterre
Acteurs principaux : Ava Gardner (1922 - 1990), James Mason (1909 - 1984)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

C'est Homère-Geoffrey qui donne la clé du film : "L'amour se mesure à ce qu'on est prêt à sacrifier pour lui". Que ne sacrifierait-on pas pour Ava Gardner-Pandora ? La gloire, la richesse, la connaissance, la vie... Les mâles du film, en tout cas, ne ménagent pas leurs démonstrations de bonne volonté. Mais la sirène est en veilleuse. Pour qu'elle se jette à l'eau, il faut quelqu'un à sa hauteur. C'est alors que surgit un mystérieux "Hollandais volant" (qui, malgré son nom, est un marin et non un aviateur -et cache un lourd secret). Mais, au pays des Dieux, la tragédie, ça s'appelle du sublime. La deuxième clé, empruntée à Oscar (celui du Portrait de Dorian Gray), ça pourrait être : la vie -mort comprise- ne vaut le coup que quand elle imite l'art, quand celui-ci est une Question de vie ou de mort. Alors, la mythologie grecque peut rejoindre les vieilles légendes nordiques et le cinéma donne à vivre un instant d'éternité. Si je ne devais emporter qu'un seul film sur une île déserte, ce serait celui-là.

Room Service - Panique à l'hôtel

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Réalisé par : William A. Seiter (1890 - 1964)
En : 1938, USA
Acteurs principaux : Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961), Ann Miller (1923 - 2004)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 78 mn, NB

Critique perso :

En bons camarades, les frères Marx(istes) ont inventé le partage du rire (entre l'intello, le mime et le magouilleur). Ils sont ici chefs d'une troupe de théâtreux fauchés, flanqué d'un beau-frère compatissant et d'un auteur provincial encore plus fauché qu'eux. Un odieux capitaliste propriétaire d'hôtel ose leur réclamer des notes de frais. Alors, ils font ce qu'ils savent le mieux faire au monde : berner, truquer, jouer pour nous une pièce bien meilleure que celle qu'ils font mine de préparer. Ce qui inclut : faire mine d'être partis, faire mine d'être malades, faire mine d'être morts (apparemment, il n'y a que comme ça qu'on tolère les artistes...). On ne fait pas mine de rire.

Paprika

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Réalisé par : Satoshi Kon (1963 - 2010)
En : 2006, Japon
Genre(s) : animation /c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /pour petits et grands enfants /vers le soleil levant
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

C'est une invention géniale qui met le feu aux neurones. Ca vient d'un labo high tech peuplé de geeks à un stade plus ou moins avancé. Ca contient la clé du passage secret qui permet de passer à travers tous les écrans (des rêves, des ordinateurs et des salles de cinema). Ca a la forme d'un point d'interrogation et ça répond à la question qui tue : qu'est-ce qu'il se passe dans une tête ? C'est une espèce de caméra-scanner connectée direct sur l'esprit, qui renvoie des images de l'âme en action. Evidemment, la chose intéresse pas mal de monde : des flics, des psys, des scientifiques, des artistes et des cinglés. Et éventuellement, ceux qui sont un peu tout ça à la fois. Evidemment, la chose rend fou. Et comme elle libère les doubles inconscients de ses utilisateurs, ça fait du (pas si) beau monde à s'agiter derrière le miroir du réel. Petite visite sans guide et sans filet au pays des mondes parralèles : vertiges aléatoires garantis, troubles en tous genres aussi.

Parade

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Réalisé par : Jacques Tati (1909 - 1982)
En : 1974, France
Acteurs principaux : Jacques Tati (1909 - 1982)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 84 mn, couleur

Critique perso :

C'est pas vraiment un film, mais c'est du cinéma : un mélange de cirque hippy, de music-hall de l'entre deux guerres (les mimes du maître), de concert hétéroclite qui dégénère... C'est aussi un documentaire sur le monde du spectacle où les rôles entre les artistes, les techniciens et les spectateurs s'intervertissent à plaisir. A l'époque, en France, personne ne voulait plus financer Tati après la ruine de Play Time. Du coup, il a tourné ça en Suède -mais on s'en rend à peine compte, car il n'est besoin d'aucune parole pour véhiculer la fantaisie et l'émerveillement...

Parapluies de Cherbourg (Les)

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1964, France
Acteurs principaux : Nino Castelnuovo (1936 - ), Catherine Deneuve (1943 - ), Marc Michel (1929 - 2016)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 83 mn, couleur

Critique perso :

Une belle histoire d'amour (contrariée) sur fond de guerre (qui ne dit pas son nom), pleine de couleurs éclatantes (sous la pluie) et où tout se chante (même le désespoir). Comme tous les bons mélos, c'est surtout une histoire de désirs individuels et de bienséance sociale : il y a des épines dans les roses, des lézardes dans les murs et de troubles intérêts financiers planqués sous le vernis des conventions... Le riche prince de l'histoire a un sombre manteau et un sombre passé sur les épaules. Les parapluies ne protègent pas contre le malheur. Dans ce film, il n'est question que de cacher (un amour, une difficulté financière, une grossesse...) tout en en mettant plein les yeux et les oreilles. De l'émotion comme s'il en pleuvait (et il pleut beaucoup !) pour ne pas oublier d'en pleurer.

Profumo di donna - Parfum de femme

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Réalisé par : Dino Risi (1916 - 2008)
En : 1974, Italie
Acteurs principaux : Vittorio Gassman (1922 - 2000)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Voyage en Italie, vers le sud, d'un nain et d'un géant. Le géant est un aveugle extralucide, grande gueule intarrissable, grand amateur de femmes, suprêmement insupportable. Le nain est un jeune militaire timide qui lui est affecté comme guide officiel et souffre-douleur attitré. Un Fanfaron blessé et sa victime de compagnie, embarqués pour une drôle de mission dont on ne sait rien, qui les mène sur une Terrasse crâmée de soleil, où ils retrouvent des collègues et une nuée de jeunes filles. Là, les masques grimaçants tombent, la souffrance de ceux qui ont renoncé à aimer affleure. Une comédie-mélo dopée à l'énergie du désespoir.

Parking

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1985, France
Acteurs principaux : Francis Huster (1947 - ), Jean Marais (1913 - 1998), Hugues Quester (1948 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 95 mn, NB/couleur

Critique perso :

Orphée n'est pas encore rangé des voitures : il s'est réincarné en pop-star-idôle des jeunes à pantalons blancs et pulls en laine, époux d'une artiste conceptuelle japonaise et amant d'un ingénieur du son qui, pour réussir à le supporter, doit manquer un peu d'oreilles. Sur scène, il porte déjà le costume des damnés du dernier sous-sol mais, une fois vraiment en enfer, il ne cesse de clamer qu'il n'est pas à sa place. Comment choisir, pourquoi choisir ? C'est lui qui le dit, mais au moins le réalisateur aurait-il pu lui donner des idées (ou des chansons), au lieu de le faire bégayer toutes ses répliques. Demy se serait-il égaré sur une voie de garage ? Il a perdu toutes ses couleurs en route et ne décolle pas vraiment du purgatoire

Hable con ella - Parle avec elle

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Réalisé par : Pedro Almodovar (1949 - )
En : 2002, Espagne
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

C'est une étrange et fascinante partie de cache-cache, le destin parrallèle et mélangé de deux couples que tout oppose (les virils : une femme-torero et son journaliste de copain, les sensibles : une danseuse et un infirmier) et que le destin réunit (les hommes assistent au même spectacle, les femmes se retrouvent dans le même hôpital). Cherchez qui prendra la place d'un(e) autre et quel est le bon couple à former avec ces éléments-là : pas évident ! D'autant qu'Almodovar y va par quatre chemins : il prend le temps en route de réinventer le cinéma muet, passe par la case prison et donne un passé à chacun de ses personnages. On est étonné, ému, choqué, secoué : l'improbable cocktail est excellent.

Godfather (The) - Parrain (Le)

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Réalisé par : Francis Ford Coppola (1939 - )
En : 1972, USA
Acteurs principaux : Marlon Brando (1924 - 2004), James Caan (1939 - ), John Cazale (1935 - 1978), Robert Duvall (1931 - ), Sterling Hayden (1916 - 1986), Diane Keaton (1946 - ), Al Pacino (1940 - )
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 175 mn, couleur

Critique perso :

Le film préféré des américains (cf. IMDB) est l'histoire d'une famille (ce qui ne surprendra guère) qui prospère dans le crime (doit-on vraiment s'en étonner ?). La famille avant toute chose, donc : mariages, baptèmes, repas interminables pendant que les enfants courent autour de la table -de l'universel, avec juste un peu plus de pasta et d'enterrements que la moyenne. Ensuite viennent les affaires : une subtile économie du service rendu et du respect dû, de l'influence monnayée et de l'intimidation musclée ("on n'est pas des communistes !" comme ils le disent eux-même) -avec juste un peu plus de coups de feu que la moyenne. Surtout : l'histoire d'un héritage empoisonné, ou comment le regard insouciant d'un beau jeune homme intègre se fige progressivement. Les meurtres sont filmés comme des cérémonies religieuses, sa résistible ascension à lui comme une damnation.

Godfather: Part II (The) - Parrain II (Le)

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Réalisé par : Francis Ford Coppola (1939 - )
En : 1974, USA
Acteurs principaux : John Cazale (1935 - 1978), Robert De Niro (1943 - ), Robert Duvall (1931 - ), Diane Keaton (1946 - ), Al Pacino (1940 - ), Harry Dean Stanton (1926 - 2017), Leopoldo Trieste (1907 - 2003)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 200 mn, couleur

Critique perso :

On ne change pas une famille qui gagne. Vous voulez la suite ? Vous aurez le préquel (30 ans avant) et le séquel (5 ans après) pour le même prix ! Histoire de bien comprendre comment, en deux générations, on passe du petit racket de quartier à l'escroquerie grandeur nature (en l'occurrence, le pillage en règle de Cuba). Le crime organisé vit sa révolution industrielle, en quelque sorte. Michaël a pris la place de son père, et il s'en montre digne. Le plus dur -le baptème du sang inaugural- a déjà eu lieu dans l'épisode précédent. Mais la famille n'est plus ce qu'elle était : le frangin restant n'est pas le plus brillant, la frangine ne sait pas ce qu'elle veut, et Kay ose dire qu'elle n'est pas contente. On ne peut même plus compter sur les politiciens, qui envoient Michaël en commission d'enquête. Grandeur et décadence du crime business, apogée flamboyante du murder show.

Godfather: Part III (The) - Parrain III (Le)

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Réalisé par : Francis Ford Coppola (1939 - )
En : 1990, USA
Acteurs principaux : Helmut Berger (1944 - ), Andy Garcia (1956 - ), Diane Keaton (1946 - ), Jo Mantegna (1947 - ), Al Pacino (1940 - ), Remo Remotti (1924 - 2015), Raf Vallone (1916 - 2002), Eli Wallach (1915 - 2014)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 162 mn, couleur

Critique perso :

20 ans plus tard... Désormais, Michaël est clean : plus rien d'illégal dans son activité, il est simplement devenu capitaliste immobilier. Il est aussi diabétique, papa gateau et en quête de rédemption. Il a bien un neveu un peu turbulent qui voudrait renouer avec les bonnes vieilles méthodes (ça, c'est le côté Mean Street) mais lui préfère traiter avec les huiles de la finance et du Vatican (ça, c'est le côté Tempête à Washington et Le Cardinal). Son seul fiston veut devenir chanteur lyrique, et ne trouve rien de mieux à faire que d'entraîner tout le monde dans une représentation piégée (ça, c'est le côté Homme qui en savait trop). Mais Michaël en a vu d'autres : malgré ses cheveux blancs, il a encore de l'allure et pourrait bien re-séduire Kay (ça, c'est le côté Dallas). Le crépuscule de la lignée vaut bien un dernier opéra.

Party (The)

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Réalisé par : Blake Edwards (1922 - 2010)
En : 1968, USA
Acteurs principaux : Peter Sellers (1925 - 1980)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 99 mn, couleur

Critique perso :

A première vue, comme ça, c'est un acteur indien timide et zèlé. Méfiance, en fait c'est une bombe (comique) à retardement, le plus grand gaffeur professionnel jamais inventé par le cinéma. Méfiance méfiance, en plus, c'est Peter Sellers. Pour le récompenser d'avoir étourdiment dynamité un tournage en se prenant un peu trop bien pour Gunga Din, il est étourdiment invité à une party hollywoodienne, avec producteurs chauves et starlettes affriolantes. La maison est un peu celle de Mon oncle, les cuisines sont un peu celles du restau de Play Time, les invités sont un peu ceux de la Dolce vita. Jusqu'ici, tout va (un peu trop) bien. Mais notre indien débarque là-dedans et la catastrophe tranquille peut commencer. L'essentiel, en fait, se passe presque toujours au deuxième plan : derrière, après. Et quand, en fin de soirée, débarquent enfin quelques alliés zèlés (danseurs russes et fils de famille revenant d'un happening avec un éléphant), c'est le bouquet-soirée-mousse final. Le plaisir du gag lent, mais qui dure longtemps.

V ogne broda net - Pas de gué dans le feu

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Réalisé par : Gleb Panfilov (1934 - )
En : 1968, Russie
Acteurs principaux : Inna Churikova (1943 - )
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale ! /épique pas toc
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

1917, quelque part en Russie. Ca bougeait pas mal, là bas, à l'époque. Y'avait pas mal d'idéalistes qui battaient la campagne, et de méchants contre-révolutionnaires qui ne se laissaient pas faire. Pour les femmes, le choix était moins grand. Infirmière ou fille à soldat (rouge bien sûr) ou les deux, c'était les principaux choix. Tanya est dans le premier camp, elle opère dans un train ambulant qui suit les troupes. En fait, personne avant ne s'était vraiment aperçu qu’elle était une femme. Personne, avant un gentil soldat. Ils sont un peu empotés, tous les deux, ils ont d'autres choses (une Révolution, par exemple) à faire. Ils ne se connaissent même pas eux-mêmes. Tanya découvre qu'à défaut de bien manier les idéologies, elle se débrouille pas mal avec les crayons et les pinceaux. Elle devient une artiste brut, un joyau (bien) caché dans une armée en marche. Un film en état de mouvement perpétuel. Il fallait bien une Révolution pour changer à ce point le regard d'un spectateur. Pas mal du tout !

Marnie - Pas de printemps pour Marnie

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1964, USA
Acteurs principaux : Sean Connery (1930 - ), Bruce Dern (1936 - ), Tippi Hedren (1931 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 130 mn, couleur

Critique perso :

Marnie est charmante. Dommage qu'elle soit un peu cleptomane. Et frigide. Marnie est folle. De temps en temps, elle voit la vie en rouge. Elle a des terreurs et une voix d'enfant pendant les orages. Son patron, lui, est amateur de bêtes sauvages. Il l'a connue ailleurs "brunette with legs". Il la trouve aussi pas mal en blonde. Il la présente à papa, l'emmène dans ses écuries, lui force un peu la main (et pas que la main). Il fait ce que Alfred aurait adoré faire à Tippy, si j'ai bien compris les biographes. Un drôle de cours de psychanalyse illutrée (en couleur) pour débutants, façon Dr. Ewardes à l'envers. Ou cauchemar à l'endroit.

Pas sur la bouche

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 2003, France
Acteurs principaux : Pierre Arditi (1944 - ), Sabine Azéma (1949 - ), Darry Cowl (1925 - 2006), Jalil Lespert (1976 - ), Isabelle Nanty (1962 - ), Daniel Prévost (1939 - ), Audrey Tautou (1978 - ), Lambert Wilson (1958 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Au départ, c’est une opérette légère de 1925. Elle est montée comme le serait un classique, sans « modernisation », sans condescendance mais pas sans malice. De quoi est-il question ? D’amour, toujours, par tous les bouts et tous les « trous » (de la serrure). De sexe, en fait, pour être clair. Tout le monde a sa petite théorie sur la question - et ses petites pratiques. Tout le monde ne parle que de ça, même en parlant d’autre chose. Alors, la mise en scène va en rajouter dans les sous-entendus. Ce serait peut-être plutôt des « sous-vus », d’ailleurs, parce que j’ai bien l’impression d’avoir reconnu, planqués dans les décors et dans les effets de perspective, tous les organes concernés. Quant aux acteurs, en costume d’époque, rien de mieux pour les mettre à poil que de les faire chanter eux-mêmes. Un film délicieux et malicieux, décidément, à regarder par le trou (de la serrure).

Passage to Marseille - Passage pour Marseille

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Réalisé par : Michael Curtiz (1886 - 1962)
En : 1944, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Sydney Greenstreet (1879 - 1954), Peter Lorre (1904 - 1964), Michèle Morgan (1920 - 2016), Claude Rains (1889 - 1967)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 109 mn, NB

Critique perso :

1944 : la guerre est presque finie, alors on va nous la raconter en marche arrière, en flash-backs emboîtés les uns dans les autres (4 niveaux : ça vaut bien Inception !) pour remonter jusqu'aux accords de Munich. Il y a deux journalistes dans l'histoire. Le premier est un petit jeune innocent qui découvre la guerre en spectateur : elle est cachée dans le paysage, littéralemente invisible. Le deuxième est un tough guy embourbé dans les combats (intellectuels puis réels) jusqu'au cou depuis le début. Il est devenu hors la loi, il a du sang sur les mains, mais c'est quand même lui qui a épousé Michèle Morgan. Comme on n'a pas les moyens d'embaucher le monde entier pour la figuration, on se contentera d'un vieux rafiot et de quelques avions, mais l'essentiel y est. La B.O. n'a pas dû coûter très cher non plus : on y entend surtout des versions instrumentales de la Marseillaise (moins emballante que dans Casablanca) et de "en passant par la Lorraine" (sans doute parce que le bâteau s'appelle "ville de Nancy"). A la fin, on sent poindre l'espoir d'un monde (et d'un homme) nouveau. Bref, de la belle allégorie déguisée en film d'action.

Pauline à la plage

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1983, France
Acteurs principaux : Féodor Atkine (1948 - ), Arielle Dombasle (1958 - ), Pascal Greggory (1954 - ), Amanda Langlet (1967 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /la parole est d'or
Caractéristiques : 94 mn, couleur

Critique perso :

Le titre fleure bon le "Martine au parc" de mon enfance. Le cadre : petite disponibilité estivale, comme dans La Collectionneuse ou Le Rayon vert. Les personnages : deux cousines en vacances, et leurs prétendants. Le décor : une grande plage normande, deux résidences secondaires. Les couleurs : primaires. Le sujet : l'amour. Côté femmes, on a le modèle ingénue en maillot de bain, et une poupée qui se voudrait passionnée. Côté hommes, un nomade opportuniste et un romantique ténébreux. En guest stars : un dragueur des sables et la marchande de cacahuètes. Au court d'un banquet initial, chacun choisit son rôle, définit son personnage. Puis essaie de le tenir, et d'influencer le jeu des autres. Au gré des rencontres et des rendez-vous, les double-jeu se révèlent... La morale : en matière d'amour, tout le monde se raconte des histoires ; chacun sa vérité.

Peau d'âne

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1970, France
Acteurs principaux : Catherine Deneuve (1943 - ), Fernand Ledoux (1897 - 1993), Jean Marais (1913 - 1998), Jacques Perrin (1941 - ), Delphine Seyrig (1932 - 1990)
Genre(s) : conte de fées relooké /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 89 mn, couleur

Critique perso :

Dans le pays bleu, vit un roi très riche, grâce à un âne banquier (comme tous les banquiers). Il aime tellement sa fifille qu'il voudrait bien l'épouser. Ne cache-t-il pas une âme de bête, celui-là ? Comme cela ne se fait pas, la princesse -très belle- s'enfuit planquée dans la peau de la bête (l'âne, pas le père). Pendant ce temps, dans le pays rouge, un prince très charmant et très déprimé s'ennuit. Une fée des lilas high-tech et quelques stratagèmes permettent leur rencontre... Tous les contes donnent un mode d'emploi du bonheur. Ici, c'est clair. Les jeunes filles doivent avoir quelques peaux en réserve, avant de pouvoir montrer qu'elles sont belles à l'intérieur. Mieux vaut aussi pour elles savoir tenir une maison et faire des gâteaux. Les jeunes hommes seront bien inspirés d'écouter les roses, et de ne pas se lasser trop vite des pâtisseries. Les couples, alors, pourront se permettre de faire des projets ambitieux (faire des galipettes et fumer la pipe en cachette). Le bonheur (très flower power) du cinéphile, lui, est disponible à tout âge.

Peau douce (La)

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1964, France
Acteurs principaux : Daniel Ceccaldi (1927 - 2003), Jean Dessailly (1920 - 2008), Françoise Dorléac (1942 - 1967)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 113 mn, NB

Critique perso :

Dans les années 60, on pouvait apparemment être un parfait bourgeois respectable, écrire des bouquins sur Balzac et avoir une notoriété de rock-star. A moins que ce ne soit possible que dans les films de François Truffaut. M. Lachenay, en tous cas, est cet intello idéal. Alors, quand il rencontre Nicole, modèle tout aussi parfait de poupée-hôtesse-de-l'air, c'est comme si deux fantasmes se rencontraient. Etincelles. Sauf qu'ils sont dans la vraie vie, avec ses contraintes et ses petites contrariétés, et que les fantasmes ne sont pas très utiles pour affronter la vraie vie. Sauf que Balzac, ça ne suffit pas longtemps à alimenter les discussions avec une hôtesse de l'air. Sauf que Monsieur est lâche comme un mari, mufle comme un amant, faible comme un homme. Sauf que Nicole sait tout de même faire la différence entre une vraie rock-star et un intello un peu chiant. Grandeur et misère de l'adultère ordinaire, celui qui finira forcément tué par les détails -à coups de carabine. Les détails, comme antidotes au fantasme.

Pension Mimosas

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Réalisé par : Jacques Feyder (1885 - 1948)
En : 1935, France
Acteurs principaux : André Alerme (1877 - 1960), Arletty (1898 - 1992), Paul Bernard (1898 - 1958), Lise Delamare (1913 - 2006), Françoise Rosay (1891 - 1974)
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 109 mn, NB

Critique perso :

A la pension Mimosas, situé juste en face du casino de Nice, on accueille tous les espoirs et toutes les désillusions du monde. Surtout ceux qui n'ont pas beaucoup d'argent, car Louise, la patronne a bon coeur. Et comme son mari est employé par le casino, rien ne se perd jamais vraiment. Il y a pas mal de formes d'amour, chez Louise : celui qu'elle porte au long cours à son gentil mari, celui qu'elle réserve à l'enfant qu'elle n'a pas pu avoir avec lui et qu'elle a juste brièvement élevé pour un autre, et celui, moins clair, qu'elle lui porte encore quand il est devenu grand, beau, et mauvais garçon. Mais il y en a d'autres, dans ce film. Le mauvais garçon est accro à une jolie semi-cocotte qui, elle, a surtout l'air passionnée par ceux qui lui permettent de faire ses courses. Et c'est sans compter la passion du jeu, qui accapare une bonne partie du (pas tant que si) beau monde qui gravite à la pension Mimosas. Le catalogue est complet, mais personne ne choisit vraiment ce qu'il veut dedans, les dés sont bien sûr pipés dès le début.

Stage Door - Pension d'artistes

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Réalisé par : Gregory La Cava (1892 - 1952)
En : 1937, USA
Acteurs principaux : Katharine Hepburn (1907 - 2003), Adolphe Menjou (1890 - 1963), Ann Miller (1923 - 2004), Ginger Rogers (1911 - 1995)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 92 mn, NB

Critique perso :

Ouvrez bien les oreilles : distribution gratuite de vacheries jubilatoires à la mitraillette ! On est entre filles pas nunuches, dans une pension pour postulantes comédiennes fauchées pas sûres d'avoir une carrière devant -ou derrière- elles. Débarque là-dedans une gosse de riches qui fait un caprice : Miss Katharine Hepburn herself. Bon, nous on se doute qu'elle va finir par assurer sur les planches, mais a priori il y a du boulot : il lui faudra éviter quelques pièges et quelques producteurs intéressés. Il lui reste surtout à apprendre la grande loi des artistes : il faut souffrir pour être bonne ! Drôle mais pas dupe, péchu et amer : un excellent film injustement oublié.

Persepolis

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Réalisé par : Marjane Satrapi (1969 - )
En : 2007, France
Genre(s) : animation /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 96 mn, NB/couleur

Critique perso :

Elle a connu deux guerres, une révolution et quelques morts, mais son coeur de punk-hard-rockeuse is not de(a)d. Waouh, balaise. Elle s'appelle Marjane, elle est iranienne, française, rebelle, chieuse, artiste et pas mal d'autres choses encore. En lignes et en traits, en noir et en blanc (et un peu en couleur), en chair et en os, et toujours en énergie bouilonnante. C'est pas très original ça, au cinéma, l'éducation d'une jeune fille, de 5 à 25 ans : une famille, des amis, des amours, toujours pareil. Sauf quand la fille est tout de même plus vivante que la mort qu'elle rencontre, plus drôle que la tragédie qu'elle effleure, plus intéressante que la vie qu'elle n'aura pas en restant chez elle peinard. A la hauteur, finalement, de la Grande Histoire qu'elle cotoie, et de la sienne. Waouh, balaise.

Persona

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1966, Suède
Acteurs principaux : Bibi Andersson (1935 - ), Gunnar Björnstrand (1909 - 1986), Liv Ullmann (1939 - )
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 85 mn, NB

Critique perso :

Voici un chaînon -pas manqué du tout- entre Vertigo et Mulholland drive. : un portrait de l'artiste en deux femmes. Qu'importe le prétexte, l'histoire. C'est la rencontre entre une comédienne mutique et une infirmière pleine de remords. C'est l'impossible et nécessaire fusion entre une façade sociale et un inconscient, un corps et une parole, un fantôme et une âme -bref, entre deux actrices. C'est un souvenir d'enfance qui s'efface. C'est une géométrie de la lumière sur des visages humains. C'est une exploration par tous les bouts du pouvoir des images et des limites de la représentation. C'est un film extraordinaire.

Little Caesar - Petit Cesar (Le)

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Réalisé par : Mervyn LeRoy (1900 - 1987)
En : 1931, USA
Acteurs principaux : Douglas Fairbanks Jr. (1909 - 2000), Edward G. Robinson (1893 - 1973)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 79 mn, NB

Critique perso :

Ascension et chute de Rico, golden-boy du crime et self-made-truand, de format poche mais au mental de caïd. Comme il ne compte pas se cantonner toute sa vie aux caisses de stations services, il pose sa candidature chez un petit parrain régional. L'époque de la Prohibition est propice au petit commerce clandestin, Rico est engagé en CDD. Il ne lui reste plus qu'à devenir boss à la place du boss, à coups de balles dans la peau et de fanfaronnades. Au sommet de sa gloire, ses collègues de gachette lui offriront une montre, comme plus tard, à l'employé de la Rue rouge. Comme lui aussi, il finira pourtant misérablement dans le caniveau. Le film serait un brin théâtral sans la verve énergique d'Edward G. Il marque une date : celle où le noir et blanc bascule côté ombre.

Petits arrangements avec les morts

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Réalisé par : Pascale Ferran (1960 - )
En : 1994, France
Acteurs principaux : Charles Berling (1958 - ), Didier Sandre (1946 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 104 mn, couleur

Critique perso :

Trois personnes en short sur la plage de Bénodet. Sauf qu'ils ne sont pas vraiment en vacances, ils sont en plein travail : en plein travail de deuil. Chaque jour de l'été, tels des Sisyphe en maillot de bain, ils re-bâtissent le chateau de sable qui affrontera le flux et reflux des marées. C'est que leur sablier à eux est un peu enrayé. Chaque jour de leur vie, en silence, ils affrontent la blessure secrète planquée au fin fond de leur enfance. Construit sur le mode de l'analogie, c'est à la fois un tryptique et un puzzle, à la fois sur les morts et sur les vivants. A la fois tout neuf et incroyablement familier. Comme un souvenir éternellement rejoué.

Phantom of the Paradise

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Réalisé par : Brian De Palma (1940 - )
En : 1974, USA
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /en avant la musique /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 92 mn, couleur

Critique perso :

Un Faust musicien rencontre un Dorian Gray déguisé en pop star qui, après lui avoir tout piqué (entre autres : sa musique, son corps et son âme), le transforme en zombie à sa botte (de rocker) en s'alliant avec un Frankenstein punk. Mais le Faust, qui aime une Phoenix, se mue en oiseau de proie et devient le fantôme de l'Opéra rock qu'il a écrit (je résume en gros). Il n'y va pas avec le dos de la guitare, le De Palma. Il met des caméras et des miroirs partout, cite, pille et recycle tous ses Dieux et ne nous cache rien du rouge Paradis(e) des vengeances assassines dans le milieu pourri-gâté du show-biz. Une mise en abîme speedée de toutes les mises en abîmes possibles, qui donne le vertige des miroirs parrallèles.

Pickpocket

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Réalisé par : Robert Bresson (1901 - 1999)
En : 1959, France
Genre(s) : Paris /culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 75 mn, NB

Critique perso :

Une paire d'yeux sur un champ de course. Des mains qui ne font pas ce qu'elles ont l'air de faire. Un corps qui ne fait rien comme on dirait qu'il fait. Il est de l'élite des bandits en douce. C 'est un artiste, un aristocrate du vol sans préavis et sans violence, un magicien de l'entourloupe. Il n'a de compte à rendre à personne, même pas à sa mère, même pas au policier qui le traque. Même pas à ses amis, même pas à celle que son coeur traque sans le savoir. Même pas à son âme qu'il ignore. Il embrouille, il manipule, il ne sait que leurrer les corps et dérober les choses. Il ne sait que se tromper lui-même. Comme la grâce, en somme, qui finit fatalement par lui tomber dessus.

Pierrot le fou

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Réalisé par : Jean-Luc Godard (1930 - )
En : 1965, France
Acteurs principaux : Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Anna Karina (1940 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /heurs et malheurs à deux /poésie en image
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Pierrot s'appelle en fait Ferdinand, et c'est en clown bleu (et non blanc) qu'il va finir sa vie (et le film). Avant d'en arriver là, il quitte sa femme pour une autre, croise quelques cadavres et écrit son journal intime. Godard, lui, avec ce film, fait exploser les sons et les couleurs (et pas que ça, d'ailleurs). Il hybride tout : la comédie musicale, le film noir, le road movie, les sketchs de Raymond Devos, la BD et la poésie. Il reprend, récapitule, essaie de réinventer une fois encore le cinéma avec de la vie brute, sauvage. Il repart à zéro, encombré qu'il est de tous les matériaux hétéroclites de sa culture, de ses passions littéraire et cinématographique. Il réalise un magnifique documentaire sur son paysage intérieur, en chaos et en harmonie en même temps. Et sur la vie-l'amour-la mort, en chaos et en harmonie en même temps.

Soliti ignoti (I) - Pigeon (Le)

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Réalisé par : Mario Monicelli (1915 - 2010)
En : 1958, Italie
Acteurs principaux : Claudia Cardinale (1938 - ), Vittorio Gassman (1922 - 2000), Marcello Mastroianni (1924 - 1996), Renato Salvatori (1934 - 1988), Toto (1898 - 1967)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 111 mn, NB

Critique perso :

Vol de voiture dans les rues de Rome ; arrestation en flagrant délit. Dans la banlieue : des gamins qui jouent dans un terrain vague, quelques minables qui trafficottent comme ils peuvent. On cherche un pigeon pour prendre spontanément la place du voleur en prison. On en trouvera un pour prendre, tout aussi spontanément, sa place dans le casse du siècle. Ils sont tous là, les archétypes italiens qu'on adore : le séducteur-frimeur-froussard, le sicilien ombrageux, le pique-assiettes encombrant (et quelques autres). Ils sont tous là, aussi, les acteurs italiens qu'on adore, tout jeunes encore (et, en prime, le sublime Toto, espèce de Fernandel local). Ils sont tous là, déjà, les ressorts comiques du cambriolage mirobolant qui tourne au foirage grandiose. Retour à la source cachée de tant de plaisirs cinématographiques à venir.

Place in the Sun (A) - Place au soleil (Une)

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Réalisé par : George Stevens (1904 - 1975)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Montgomery Clift (1920 - 1966), Elizabeth Taylor (1932 - 2011), Shelley Winters (1922 - 2006)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 122 mn, NB

Critique perso :

Il y a deux sortes d'américaines : celles qui fabriquent les maillots de bain à la chaîne, et celles qui les portent sans jamais se salir les mains au travail. Il n'y a qu'une sorte d'américain : celui qui veut tout, comme George Eastman. Avec Alice, sa collègue ouvrière : une idylle de l'ombre. Avec Angela, la mondaine ingénue : le grand jeu et la belle vie. Il est long, pourtant, le chemin qui va de l'une à l'autre. George, auquel Montgomery Clift prête son regard brûlant et ses épaules de vaincu, a le tort de vouloir les aimer toutes les deux, et de croire aux slogans de son pays. Verdict implacable : coupable. Coupable d'avoir eu honte de l'une et envie de l'autre. Coupable d'avoir voulu apprendre à nager dans le grand bain.

Plages d'Agnès (Les)

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 2008, France
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Agnès, mamie-pas-gâteau du cinéma français vient d'avoir 80 balais (dont quelques balayettes). Elle les raconte à sa manière, inventant par la même occasion de genre de l'auto-docu-fiction-bio-pic. Faut dire qu'elle a eu une vie exceptionnelle : des rencontres, des voyages, de la création top niveau. Tout cela est illustré à la fois très littéralement (on remonte le temps ? je marche à l'envers), très métaphoriquement (j'égrène le sable, j'envoie des trapèzes volants sur la plage) et de façon très éclatée (façon puzzles, façon miroirs, façon patchwork). Avec une malice de vieux matou, la voilà qui se déguise (en charbonnier ou en patate), se reconstitue (en petite fille ou en jeune artiste), se réinvente (en mère abandonnée et en femme libre). Elle tape l'incruste dans des tableaux célèbres (Picasso, Magritte), ou invite ses potes arty (Calder, Jim Morrison, Chris Marker et un certain Jacquot) dans les siens. Des vieilles dames indignes comme ça, on en voudrait bien pour grand-mère ou comme petite-fille !

Plaisir (Le)

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Réalisé par : Max Ophüls (1902 - 1957)
En : 1952, France
Acteurs principaux : Pierre Brasseur (1905 - 1972), Henri Crémieux (1896 - 1980), Danielle Darrieux (1917 - 2017), Claude Dauphin (1903 - 1978), Paulette Dubost (1911 - 2011), Jean Gabin (1904 - 1976), Daniel Gélin (1921 - 2002), Ginette Leclerc (1912 - 1992), Roland Lesaffre (1927 - 2009), Louis Seigner (1903 - 1991), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : Paris /en France profonde /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Rien de tel qu'un grand viennois pour adapter notre Maupassant national (maison Tellier comprise, mais je ne crois pas que ce soit celle de mes ancêtres). On y voit des humains de toutes conditions (bourgeois, putains ou artistes, c'est tout comme) errer dans le labyritnthe de leur vie, coincés qu'ils sont dans des désirs frustrés et des destins étriqués. Et qui, parfois, trouvent tout de même une petite voie, un petit passage secret qui mène à leur innocence, un raccourci inattendu vers la grâce qu'ils ont perdue. Un petit moment de plaisir derrière les barreaux de leur morne existence. Ephémère ou illusoire, cela va sans dire, mais c'est déjà ça, juste le temps d'apercevoir ce qui aurait pu être. Et on voit ça par l'oeil d'une caméra malicieuse, plus libre qu'eux puisqu'elle traverse les murs et le temps -et les âmes aussi, parfois. C'est beau comme une partie de campagne, c'est triste pareil. Mais le bonheur (même celui du spectateur) n'est pas toujours gai...

Plan 9 from Outer Space

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Réalisé par : Edward D. Wood Jr. (1924 - 1978)
En : 1959, USA
Acteurs principaux : Bela Lugosi (1882 - 1956)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /nanar pur sucre
Caractéristiques : 79 mn, NB

Critique perso :

Depuis quelque temps, des morts tout frais se réveillent. Et il semble qu'Eros, Tanna (il y a un Os ?), et leur bande d'extra-terrestres anonymes, qui viennent de survoler Hollywood, y soient pour quelque chose (ne cherchez pas trop le rapport : dans ce film, la logique et la causalité sont vraiment des notions extra-terrestres). C'est un peu une version cheap (très cheap) du Jour où la terre s'arrêta assaisonnée de zombies et de stock-shots disponibles -dont 2 plans posthumes d'outre-tombe de Bela qui, le reste du temps, a bien du mal à ressembler à sa doublure. Quelques faiblesses dans le scénar, donc, une voix-off ronflante-gonflante, des dialogues au 0,5ème degré (j'en passe, et des pires)... Et dire qu'il y en a qui ont dû payer pour ne pas rigoler !

Planet of the Apes - Planète des singes (La)

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Réalisé par : Franklin Schaffner (1920 - 1989)
En : 1968, USA
Acteurs principaux : Charlton Heston (1924 - 2008), Kim Hunter (1922 - 2002)
Genre(s) : New York - New York /c'était demain /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

Grâce à la Relativité Générale, Taylor et son équipage d'astronautes parcourent 2000 ans d'espace-temps pendant un petit roupillon. Mais la planète étrangement familière et familièrement étrange où ils accostent leur enseigne un autre genre de relativité : celle de la civilisation homo sapiens. Ici, les hommes sont réduits en esclavage et traités en animaux qu'ils sont (il ne leur manque que la parole !) par de grands singes savants. Taylor, spécimen parlant, donc atypique, se fait remarquer. Il devient l'enjeu d'une controverse scientifique qui oppose le vieux rusé Dr Zaius et le jeune ambitieux Cornélius -un descendant de Darwin, probablement. Bienvenue de l'autre côté du miroir de 2001, l'Odyssée de l'espace : le singe est l'avenir de l'homme et il n'est pas beau ! Le film, lui, n'a rien perdu de son charme rétro.

Forbidden Planet - Planète interdite

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Réalisé par : Fred M. Wilcox (1907 - 1964)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : Leslie Nielsen (1926 - 2010), Walter Pidgeon (1897 - 1884)
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

Il sera une fois le vaillant équipage d'un vaisseau spatial terrien, parti au secours des éventuels rescapés d'un précédent voyage égaré sur une planète lointaine. En fait, il y a des rescapés, mais ils ne veulent pas être secourus. L'histoire est largement pompée à Shakespeare (le scénariste-dialoguiste de "La Tempête") relookée par le Dr. freud, mais, hélàs, pas les dialogues, qui ont plutôt l'air de sortir de comics cheaps. C'est de la SF vintage, où le plus démodé est moins les costumes et l'appareillage technique que la façon de traiter la seule femme de la bande, une jolie cruche à qui on n'explique et ne demande jamais rien (à part de l'embrasser), bien qu'elle soit censée être plus savante que tous les autres. Même Nielsen a encore ses cheveux bruns, c'est dire comme ça donne l'impression de dater. Le monstre est réussi, presqu'autant que Robby, le gentil robot-minute-à-(vraiment)-tout-faire.

Play Time

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Réalisé par : Jacques Tati (1909 - 1982)
En : 1967, France
Acteurs principaux : Jacques Tati (1909 - 1982)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants /poésie en image
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Dans une ville qui ressemble à toutes les villes (en pire), erre un drôle de type qui ressemble à tout le monde (en plus sympa). C'est pas vraiment un héros. D'ailleurs, c'est pas non plus vraiment une histoire. En plus on le connaît, c'est M. Hulot. Il est revenu de vacances, il a l'air de chercher du boulot. Ou pas. Il a rendez-vous avec un type qu'il n'arrête pas de rater, tombe sur d'autres types qu'il ne cherchait pas du tout. Au début, à part lui, tout file droit, comme sur les plans d'un architecte. Le temps est gris-bleu, comme le paysage. Comme les bureaux. Comme les gens. Et puis, ça commence à ne plus tourner très rond (ou plutôt si, justement). Faute à l'alcool, à la musique, et à quelques autres Hulot-berlus de passage. De toute façon, c'est un film qui n'en est pas vraiment un. Plutôt une expérience, un stage de plongée en aquarium dans un autre monde qui est exactement le nôtre. Un monde qui serait bien pire, si on n'apprenait pas à le regarder -et à l'écouter- comme un M. Hulot de passage.

Player (The)

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Réalisé par : Robert Altman (1925 - 2006)
En : 1992, USA
Acteurs principaux : Karen Black (1939 - 2013), John Cuzack (1966 - ), Peter Falk (1927 - 2011), Peter Gallagher (1955 - ), Jeff Goldblum (1952 - ), Angelica Huston (1951 - ), Jack Lemmon (1925 - 2001), Andie MacDowell (1958 - ), Malcolm McDowell (1943 - ), Sydney Pollack (1934 - 2008), Tim Robbins (1958 - ), Alan Rudolf (1943 - ), Greta Scacchi (1960 - ), Dean Stockwell (1936 - ), Bruce Willis (1955 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 124 mn, couleur

Critique perso :

Griffin Mill (Mr. M pour les intimes) est un enfoiré de 1ère classe de Sunset Blvd. Il assure la lourde tâche de choisir, pour le compte d'un grand studio hollywoodien, les quelques heureux Lauréats dont le scénario sera produit. Evidemment, son costume de Citizen Kane fait des rancuniers et des envieux : il travaille au milieu d'une bande de Freaks qui ne pensent qu'à prendre sa place. Un soir, dans un accès de panique, il fait une grosse connerie irréparrable (de plus). Certes il a eu, juste avant, le temps d'échanger quelques mots au téléphone avec un Ange bleu. Mais, le moindre Témoin à charge pourrait le faire tomber. En fait, il a La Corde au cou... Quant à Altman, lui, il s'amuse : non content de battre haut la main le record, précédemment détenu par La Soif du mal, du plus long plan séquence d'ouverture, il s'attaque aussi à celui du plus grand nombre de citations (visuelles ou sonores) de films anciens dans un film (j'ai oublié : il y a aussi Le Voleur de bicyclette). Et il montre par la même occasion que le cinéma n'est pas -toujours- fait par des cons.

Plein soleil

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Réalisé par : René Clément (1913 - 1996)
En : 1960, France
Acteurs principaux : Alain Delon (1935 - ), Marie Laforêt (1939 - ), Maurice Ronet (1927 - 1983), Romy Schneider (1938 - 1982)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

Deux jeunes gens : un fils à papa et un fils de rien, pauvre mais ambitieux, payé par le papa de l'autre pour ramener le fiston à la maison. Une fille, un bateau, l'Italie. L'ombre d'un désir mimétique qui passe entre les deux hommes. Alors qu'ils sont seuls au milieu de l'océan, l'un tuera l'autre pour prendre sa place. Traqué, inquiet, il devra affronter les conséquences de son acte et lutter contre les effluves du remort. Un scénario de film noir tourné au grand air dans la lumière d'Italie. Alain Delon est beau et pervers à souhait dans ce polar solaire.

Kuroi ame - Pluie noire

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Réalisé par : Shohei Imamura (1926 - 2006)
En : 1989, Japon
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 123 mn, NB

Critique perso :

Hiroshima, seconde zéro. Ben oui, le cinéma peut montrer ça, aussi -façon Retour des morts vivants. Pas de chance, Yasuko y était, -avec son oncle et sa tante. Ils ont survécu. 5 ans plus tard : apparemment, la communauté des hommes s'est reconstituée, la nature a repris son cours. Mais pas besoin de gratter beaucoup pour voir les cicatrices, les malaises, les soupçons. Les "irradiés d'après" sont toujours fatigués. Malgré ses certificats de santé et sa beauté, Yasuko ne trouve pas de mari. Le poison atomique prend son temps, mais il n'oublie personne. La mort lente est au travail, dans les corps et dans les têtes. On dirait du Ozu (conta)miné de l'intérieur par un ver invisible, saoûlé au désespoir calme.

Horse Feathers - Plumes de cheval

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Réalisé par : Norman Z. McLeod (1898 - 1964)
En : 1932, USA
Acteurs principaux : Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961), Zeppo Marx (1901 - 1979), Thelma Todd (1905 - 1935)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 68 mn, NB

Critique perso :

Marabout - boutes-en-train - train d'enfer - fer à cheval : c'est (en gros) le script. Ca se passe accessoirement dans un prestigieux College U.S. : Groucho est le doyen, Zeppo son (grand) fiston, les deux autres auraient pu/dû être les fers de lance de l'équipe de football locale. Mais, au lieu de bosser, tout le monde dit I love you à la vamp du coin. Tout le monde fait n'importe quoi. Les Marx ne sont jamais aussi à l'aise que quand on leur laisse les clés d'une institution : un Etat, une école. Les clés, c'est sûr qu'on les retrouvera jamais sous le paillasson (eux, éventuellement, c'est possible). Mais elles ouvrent des portes insoupçonnées. Comme chantait l'autre : s'en passer, I'm against it !

Beat the Devil - Plus fort que le diable

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Jennifer Jones (1919 - 2009), Gina Lollobrigida (1927 - ), Peter Lorre (1904 - 1964), Robert Morley (1908 - 1992)
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Un port italien après la guerre, cuit à l'étouffé. Un yankee désabusé, flanqué de trois complices pas tout à fait à la hauteur et d'une brune épouse explosive, fait la connaissance d'un couple de faux aristocrates so british avec qui il doit voyager. Ca s'observe, ça s'agite, ça se raconte des histoire. Ca cause chateaux en Espagne et uranium en Afrique. Les femmes et les mensonges circulent un peu trop vite. La pompe à récit déraille parfois autant que celle du bateau pourri censé les accueillir à son bord (dès que le capitaine aura déssoulé). Que vont-ils donc faire dans ce raffiot ? Se raconter d'autres histoires, of course. Un African Queen pour rire, hommage à la fiction qui ne mène nulle part et au plaisir du voyage immobile dans un bateau ivre.

Podium

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Réalisé par : Yann Moix (1968 - )
En : 2004, France
Acteurs principaux : Dominique Besnehard (1954 - ), Julie Depardieu (1973 - ), Benoît Poelvoorde (1964 - ), Jean-Paul Rouve (1967 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

J'avoue : aux environs de mes 7 ans, j'ai été amoureuse de Claude François (c'était avant -ou après, je ne sais plus trop- Thierry Le Luron, Gérard Majax et mon prof d'histoire). J'ai grandi. Bernard Frederic, lui, est resté à l'heure de Marity et Gilbert Carpentier. C'est un ex-fan des seventies, docteur ès cloclo avec félicitations du jury. Un coup de téléphone qui pleure et son ancien pseudo-pote (un certain Cousous PolnarG) le rappellent à sa vie de clône pour participer à une "nuit des sosies" plus vraie que nature. C'est qu'entre temps, notre imposteur professionnel s'était reconverti en banquier, essayant de jouer dans sa maison en toc un semblant de vie de famille. Il replonge dans la Valse des pantins. Revoilà les tournées en camionnette miteuse, l'élection de Miss Pizza sur un parking de supermarché, les néons, les paillettes et la vie en couleur (vives). Nettement plus drôle et plus kitch que Kagemusha. J'avoue : j'ai aimé !

To Have and Have Not - Port de l'angoisse (Le)

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1944, USA
Acteurs principaux : Lauren Bacall (1924 - 2014), Humphrey Bogart (1899 - 1957), Walter Brennan (1894 - 1974), Marcel Dalio (1900 - 1983), Sydney Greenstreet (1879 - 1954)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Transposée à la Martinique, c'est à peu près la même histoire que dans Casablanca, mâtinée d'une anticipation d'African Queen. Sauf que l'histoire d'amour (ici, entre Slim et Steve) ne s'écrit pas au passé : elle est dans le présent de l'action. Et même en direct, pour de vrai -tant les acteurs poussent loin la conscience professionnelle... Quant à en avoir (le titre original est quand même nettement meilleur), ils en ont tous les deux, ça ne fait aucun doute. En plus, tous les acteurs secondaire du genre sont aussi au rendez-vous : Greenstreet, Dalio, un bar et un piano. Et l'exotisme de pacotille. Et les 3 étages de l'hotel, pour suivre de près les fluctuations du désir. Il s'y sont mis à deux prix Nobel (Hemingway et Faulkner) pour pondre le scénario. Et un réalisateur génial. Et la grâce...

Picture of Dorian Gray (The) - Portrait de Dorian Gray (Le)

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Réalisé par : Albert Lewin (1894 - 1968)
En : 1945, USA
Acteurs principaux : Hurd Hatfield (1917 - 1998), Angela Lansbury (1925 - ), Peter Lawford (1923 - 1984), George Sanders (1906 - 1972)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 110 mn, NB/couleur

Critique perso :

Au début, Dorian est jeune, beau et amoureux : le portrait parfait du gendre idéal, tel que le peint son ami Basil. Mais, bientôt, perverti par un lecteur des "Fleurs du mal", il se met à fréquenter les bas-fonds de Londres (vers 1886, on y faisait décidément de mauvaises rencontres : Jack, Hide... qui est qui, telle est la question !). Ce qu'il y fait nous reste mystérieux, mais lui attire des ennuis et des ennemis. Lui voit des yeux partout mais garde son teint de bébé. La peinture, elle, traverse l'histoire de l'art à toute vitesse : il se voit dedans comme dans un miroir, mais il est bien le seul. Le roman d'Oscar Wilde m'avait fascinée. Lewin, déjà amateur des poèmes d'Omar Khayyan, de fantastique baroque et d'art raffiné, était l'homme de la situation. Un portrait, une chanson, deux tortues et un poignard : tous les éléments de sa Grande Oeuvre à venir sont déjà là.

Pouic-Pouic

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Réalisé par : Jean Girault (1924 - 1982)
En : 1963, France
Acteurs principaux : Daniel Ceccaldi (1927 - 2003), Mireille Darc (1938 - 2017), Jacqueline Maillan (1923 - 1992), Louis de Funès (1914 - 1983)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 90 mn, NB

Critique perso :

C'est avec Oscar un des plus bels exemples de la comédie bourgeoise du milieu du siècle dernier. C'est une belle mécanique un peu creuse, fondée sur une surrenchère de complots, intrigues et stratagèmes. Un décor unique : la Famille. Les motivations éternelles (de l'époque) : l'argent (beaucoup d'argent !) et le mariage des filles (les filles et les épouses sont toujours les points faibles de ces familles-là : les unes trop belles, les autres trop cruches...). Il y a toujours, aussi, un fils indigne parti en voyage à l'autre bout du monde. Et des valets qui ont perdu leur XVIIIème siècle. Les acteurs en font des tonnes. Et le pire : ça me fait toujours rire...

Baby Doll - Poupée de chair

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Réalisé par : Elia Kazan (1909 - 2003)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : Carroll Baker (1931 - ), Karl Malden (1912 - 2009), Eli Wallach (1915 - 2014)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 114 mn, NB

Critique perso :

"T'as trouvé le trou ? Le grand ?" C'est la première réplique du film. Archie s'adresse au type chargé de réparer la toiture de sa maison en ruine, mais on soupçonne déjà qu'il a autre chose en tête. D'ailleurs, il s'empresse aussitôt après d'agrandir un autre trou, dans le mur d'une chambre de sa maison en ruine, pour y observer en douce sa jeune épouse endormie dans son lit d'enfant qu'elle est encore. Et ça ne fait que commencer, de toute façon le film entier ne parle que de ça, ne pense qu'à ça, ne montre que ça, tout en faisant semblant de s'occuper d'autre chose. Du Sud profond, par exemple, et de ses plantations de coton -et de ses filles à la peau aussi blanche et douce que le coton. Ou alors de la rivalité économique entre les producteurs locaux, modèle fraichement immigré ou modèle vieux propriétaire déclassé -et de celui qui plait le plus aux filles. En fait, la seule question qui préoccupe tout le monde, c'est : qui aura le droit de jouer le premier à la poupée avec la fille du lit d'enfant ? Les hommes, dans leur cour de récré pour grands...

Arrival - Premier contact

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Réalisé par : Denis Villeneuve (1967 - )
En : 2016, USA
Acteurs principaux : Amy Adams (1974 - ), Jeremy Renner (1971 - ), Michael Stuhlbarg (1968 - ), Forest Whitaker (1961 - )
Genre(s) : c'était demain /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 116 mn, couleur

Critique perso :

Si un jour des extra-terrestres intelligents frappent à la porte de notre planète, le gros problème, ce sera de pouvoir causer avec eux. Le vrai héros d’un film de SF réaliste, ce sera donc forcément un-e linguiste : voilà un point de départ qui ne peut que me plaire ! Bon, dans le film y’a aussi un physicien qui est mis sur le coup, mais vu que les aliens jouent avec la gravité comme avec des baballes, il est vite dépassé par les événements. Vraiment bizarres, ces bébêtes venues de l’espace. Pour elles, le haut et le bas, l’endroit et l’envers, l’avant et l’après, c’est du pareil au même. Elles ont l’air à la fois de venir de l’âge de pierre et de maîtriser la high tech la plus avancée. Mais la vraie star c’est Louise, spécialiste ès-xénolinguistique générale et appliquée, confrontée aux énoncés en forme d’oeuvres d’art circulaires qu’elles produisent pour s’exprimer. Les déchiffrer et comprendre leur fonctionnement, ce sera l’oeuvre de sa vie à elle (et ça la changera à jamais, comme dirait la tagline…). Le film pousse le bouchon de la thèse de Sapir-Whorf (selon laquelle, en gros, la langue que l’on parle influe sur notre façon de penser) un peu loin, mais c’est pas tous les jours qu’on trouve un pitch inspiré d’une théorie scientifique. De la SF sérieuse et poétique en même temps, de la gourmandise pour l’oeil et l’esprit.

Take the Money and Run - Prends l'oseille et tire-toi

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1969, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour)
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Virgil Starkwell est un minable récidiviste. Il s'acharne à vouloir faire des casses et ne réussit qu'à cumuler les années de prison, ce qui lui donne l'occasion de s'acharner à tenter des tentatives d'évasion. Mais malgré ses efforts méritoires, il n'arrivera jamais à entrer dans le top 10 des criminels... Cette parodie de film noir marque l'entrée en cinéma de Woody Allen et porte déjà en miniature plusieurs de ses oeuvres à venir. C'est un faux reportage biographique à la Zelig, une chronique de quartier façon Radio Days. Le crime et la caméra s'y croisent déjà, comme dans Crimes et délits et Central Park est le centre de gravité de toutes les romances comme dans... tous ses films. On est comme dans l'antichambre -un peu mal rangée- d'un palais.

Warnung vor einer heiligen Nutte - Prenez garde à la sainte putain

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Réalisé par : Rainer Werner Fassbinder (1945 - 1982)
En : 1971, Allemagne
Acteurs principaux : Lou Castel (1943 - ), Eddie Constantine (1917 - 1993), Rainer Werner Fassbinder (1945 - 1982), Hanna Schygulla (1943 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Une équipe de cinéma allemande prise en flagrant délit de non tournage dans le hall d'un hôtel espagnol désert. On attend, on s'emmerde, on drague. On vide des verres et après on les casse -c'est plus drôle. Faut dire que le producteur est fauché et l'assistant débordé. Le réalisateur est absent, mais quand il arrive tout le monde regrette quand il n'était pas là. La pin-up blonde du casting est la seule à ne pas dire de conneries. La vedette américaine n'a pas besoin de dire un mot pour l'emballer. Ambiance de fin du monde déjà arrivé -paraît qu'il faut bien ça pour faire un film (allemand surtout). Ca ressemble à un anti-making of : un où tout le monde fait la tronche, s'engueule, dit du mal des copains et du film en train de se faire. On dirait un anti-film qui en serait tout de même un (mais très allemand tout de même).

Searchers (The) - Prisonnière du désert (La)

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Réalisé par : John Ford (1894 - 1973)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : Jeffrey Hunter (1926 - 1969), Vera Miles (1929 - ), John Wayne (1907 - 1979), Natalie Wood (1938 - 1981)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

La petite famille Edwards est plutôt modeste, mais elle dispose tout de même d’une concession avec vue imprenable sur Monument Valley. Ethan, il fait partie de la famille (c’est le frère du père) mais c’est l’homme du dehors. Il a fait l’armée, est resté célibataire (même si on sent qu’il n’est pas insensible à sa belle-soeur), est du genre baroudeur bougon. Quand, un soir, des indiens très méchants massacrent la famille et kidnappent les deux filles, Ethan trouve une mission à sa hauteur : les retrouver. Au début, il doit se coltiner l’aide d’autres volontaires mais ils jettent vite l’éponge sauf Martin, son neveu vaguement métis, fiancé de la plus âgée des filles. La quête va durer longtemps, longtemps. Le temps de voir passer les saisons, de quadriller toute la région, de dormir dehors, toujours. Une vraie route initiatique, où chacun des deux mecs a des choses à apprendre à/de l’autre, en particulier sur ce que c’est que la famille, les liens du sang et les liens du coeur. Et Ethan, l’homme du dehors, arrivera tout de même à nous convaincre qu’il a quelque chose de potable à l’intérieur.

Paradine Case (The) - Procès Paradine (Le)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1947, USA
Acteurs principaux : Ethel Barrymore (1879 - 1959), Charles Coburn (1877 - 1961), Louis Jourdan (1919 - 2015), Charles Laughton (1899 - 1962), Gregory Peck (1916 - 2003), Ann Todd (1909 - 1993), Alida Valli (1921 - 2006)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s)
Caractéristiques : 125 mn, NB

Critique perso :

Un (très) bel avocat doit assurer la défense d'une (très) belle veuve accusée d'avoir empoisonné son mari aveugle -à moins que le (très) beau valet du défunt n'ait quelque chose à se reprocher... Une moitié du film pour l'enquête, une autre pour le procès, déguisements et perruques comprises (ça se passe à Londres). Dialogues subtils, effets de manche, ombres menaçantes, cadrages brillants. Mais on comprend vite que le verdict n'est pas l'enjeu majeur du récit, puisque les personnages sont déjà tous, avant qu'il ne tombe, condamnés à perpet' à la douleur d'aimer sans retour.

Professione: reporter - Profession Reporter

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Réalisé par : Michelangelo Antonioni (1912 - 2007)
En : 1975, Italie
Acteurs principaux : Jack Nicholson (1937 - ), Maria Schneider (1952 - 2011)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 126 mn, couleur

Critique perso :

Le film se déroule dans le temps qui sépare les deux morts de M. Robertson : la vraie et la fausse (à moins que ça ne soit le contraire). Le genre fuyard, le Robertson. Sa (vraie) femme ne le connaît pas, ses (faux) frères ne veulent que les armes qu'il n'a pas (vu qu'en fait il était journaliste). A peine mort, tout le monde le traque en lui réclamant des comptes, le temps de quelques jours de déambulations dans les limbes du monde occidental. Le film se déroule aussi dans l'espace qui sépare deux déserts : le vrai et le faux (à moins que ça ne soit le contraire). Entre les deux : plein de belles pierres, mais pas beaucoup de chaleur humaine. Un vrai road movie à travers le purgatoire. Et en cadeau bonus : un avant-dernier plan, filmé du point de vue d'une âme, qui est le plus beau de l'histoire du cinéma.

Magliari (I) - Profession: magliari

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Réalisé par : Francesco Rosi (1922 - 2015)
En : 1959, Italie
Acteurs principaux : Renato Salvatori (1934 - 1988), Alberto Sordi (1920 - 2003)
Genre(s) : pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 111 mn, NB

Critique perso :

On est dans le milieu des émigrés italiens venus chercher, avec papiers (plus ou moins) en règles, du boulot plus au nord, dans la froide Allemagne (un truc complètement démodé). Magliari, ça a l'air d'être (à peu près) la traduction de Bidone en dialecte napolitain de Hanovre. Ca veut dire débrouille, arnaques, (petits) arrangements avec la conscience. C'est la vocation de Totonne, (très) bon dans le métier. Il essaie d'y initier Mario, (nettement) moins doué. Mais Mario a une belle gueule ; il prend de l'avancement en plaisant à la patronne, tandis que Totonne se lance dans la carrière d'apprenti-parrain-marchand de tissus à son compte. Portrait de groupe (quasiment) sans solidarité, (presque) sans femmes et sans (beaucoup d') argent, pour qui la bonne volonté ne fait pas (du tout) le bonheur.

Walk with Love and Death (A) - Promenade avec l'amour et la mort

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1969, USA
Acteurs principaux : Assi Dayan (1945 - 2014), Anthony Higgins (1947 - ), Angelica Huston (1951 - ), John Huston (1906 - 1987)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Héron de Fois est étudiant, jeune, beau et idéaliste. Il veut voir la mer. Mais dehors, c'est la guerre de 100 ans : il mourra avant d'en voir la fin. En attendant, il se trouve une dame à aimer : Claudia, jeune, belle et idéaliste. Nos deux tourtereaux, babas dans un monde pas cool, essaient de s'y faire un nid. Dehors, tout n'est que sang, rage et barbarie : des illuminés, des puritains, des chevaliers rendus à l'état sauvage, des paysans morts de tout. Le service militaire n'a pas encore été inventé, mais on sait déjà très bien faire souffrir les jeunes gens qui s'aiment. Huston fait son Septième sceau post-68 : une ode à la jeunesse en collants, et à l'amour à réinventer en rêvant.

Promeneur du champ de Mars (Le)

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Réalisé par : Robert Guédiguian (1953 - )
En : 2005, France
Acteurs principaux : Michel Bouquet (1925 - ), Jalil Lespert (1976 - )
Genre(s) : Paris /en France profonde /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

C'est un vieil homme que tout le monde appelle "M. Le Président". On dirait que Mitterrand lui ressemble. Il vit dans les ors de son Palais. Il est amoureux de l'éternité. Et puis, il y a un jeune homme, aussi. On dirait qu'il ressemble à tout le monde. Il vit dans les tracas de la banalité. Il est amoureux du vieil homme, qui lui fait l'honneur de quelques-unes de ses paroles. Le dernier Roi de la Vème République se meurt. Il pontifie, donne des leçons de séduction, joue la coquette et l'érudit qu'il était. Le jeune homme écoute, enquête, encaisse, n'arrive pas à jouer au méchant qu'il n'est pas. Comme lui, Guédiguian (ex-militant communiste proclamé) ne peut s'empêcher d'avoir de la tendresse pour le vieil homme (il envoie sa fille lui faire la bise). Hommage de l'idéaliste au pragmatique qu'il n'a pas eu envie d'être.

Providence

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1977, France
Acteurs principaux : Dirk Bogarde (1921 - 1999), Ellen Burstyn (1932 - ), John Gielgud (1904 - 2000), David Warner (1941 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Jours étranges. Pendant qu'une épidémie d'hommes-loups semble couver, un avocat grand bourgeois -et très britannique- s'acharne à encourager l'idylle fantomatique de son épouse avec le jeune homme vaguement hippy qu'il a échoué à faire condamner. Ils ont tous l'air de s'ennuyer, ou de ne pas savoir ce qu'ils font là. Chronique d'un changement d'époque ? Oui mais en fait, non, tout ça c'est rien que dans la tête bien imbibée d'un vieil écrivain malade -mais toujours très britannique- pendant une nuit d'insomnie. Il a des comptes à régler et les idées pas très claires, ce qui explique sans doute les incongruités de son scénario balbutiant. Et comme il vit à Providence, sa magnifique propriété, pas étonnant qu'il se prenne pour un démiurge. Chronique d'une fin de vie annoncée ? Oui mais en fait non, c'est encore un peu plus compliqué que ça, mais on laisse le suspens aux néophytes. En fait, de toute façon, c'est tout ça en même temps, et plus encore. Une superposition de banalités, conventions et lieux (plus ou moins) communs, qui finit par donner de la profondeur à la surface des choses.

Psycho - Psychose

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1960, USA
Acteurs principaux : Janet Leigh (1927 - 2004), Vera Miles (1929 - ), Antony Perkins (1932 - 1992)
Genre(s) : les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 109 mn, NB

Critique perso :

Marion -très bien en soutien-gorge- n'a pas la conscience tranquille : elle vient de voler 40 000 $ à son patron. Dans sa fuite, elle se réfugie au Bates Motel. Mauvaise idée. Surtout que Janet Leigh, elle aurait dû se souvenir du motel de La Soif du mal. Norman Bates, le jeune proprio, sourire d'ange mais regard de hibou, n'a pas, lui, le subconscient tranquille. Et puis, elle n'aurait jamais dû prendre une douche... Ah ! LA fameuse scène de la douche ! On en est encore tout dégoulinant d'eau, de sang et de peur. On n'en est pourtant qu'au milieu du film, et on vient de perdre une héroïne. Bon, je ne raconte pas tout le reste : suffit de savoir que le film est une plongée de plus dans les profondeurs marécageuses de nos cauchemars, l'ancêtre de tous les films d'horreur actuel -le gore en moins, le génie en plus.

Pépé le Moko

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Réalisé par : Julien Duvivier (1896 - 1967)
En : 1937, France
Acteurs principaux : Mireille Balin (1911 - 1968), Marcel Dalio (1900 - 1983), Jean Gabin (1904 - 1976), Charles Granval (1882 - 1943)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 90 mn, NB

Critique perso :

Il était une fois un petit rat des villes qui, pour échapper aux chats, se réfugie dans un labyrinthe. Le rat s'appelle Pépé, chef de bande de profession, et le labyrinthe, c'est la casbah d'Alger -période française. Débarque là-dedans une souris pomponnée dernière mode. "T'es belle comme le métro parisien", qu'il lui dit. "Tu me rappelles le pays", qu'elle répond (on a beau dire, les colonies, on les aime bien à condition de pouvoir en partir). Mais des facheux, des traîtres, des perfides trainent à tous les carrefours. Ils seront heureux (pas longtemps) et auront beaucoup d'ennuis...

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Q


How Green Was My Valley - Qu'elle était verte ma vallée

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Réalisé par : John Ford (1894 - 1973)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Sara Allgood (1879 - 1950), John Loder (1898 - 1988), Maureen O'Hara (1920 - 2015), Walter Pidgeon (1897 - 1884)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /pas drôle mais beau /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 118 mn, NB

Critique perso :

La verte vallée du titre, c'est le Pays de Galles charbonnier, période Germinal tardif. Pas forcément pimpant, dans l'imaginaire commun. Mais les paradis de l'enfance sont souvent verts, allez savoir pourquoi. Dans la famille Morgan il y a, si j'ai bien compté, 6 fils (dont un narrateur : le plus jeune) et une fille à marier. Des parents, aussi, bien sûr : modèle frustre mais droit (côté paternel) ou intelligent du coeur (côté maternel) -modèles tout court. La mine, la grève, les pintes de bière, le pasteur, l'école... rien d'étonnant au décor. Et pourtant, tout arrive par surprise, sans doute parce que c'est la première fois. Dans ce corron d'outre Manche, on parle une drôle de langue : du Welch poétique, peut-être. A moins que cela ne soit la langue de la nostalgie universelle.

Quai des brumes

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1938, France
Acteurs principaux : Pierre Brasseur (1905 - 1972), Jean Gabin (1904 - 1976), Robert Le Vigan (1900 - 1972), Michèle Morgan (1920 - 2016), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Il y a des films qui deviennent mythiques pour de mauvaises raisons : une vague atmosphère d'époque, une réplique qui permet à des générations entières de draguer, les premiers pas d'une star... Quai des brumes possède tout cela, mais sa poésie s'est un peu égarée en chemin dans le brouillard. A moins d'être encore sensible à la poésie des quais, à la poésie des brumes, à la fatalité qui lie les destins des jeunes filles pas encore perdues à celui des mauvais garçons pas encore pourris. Pas gagné d'avance. Encore heureux qu'il lui reste quelques ingrédients indémodables : un méchant jublatoire (Michel Simon) et un couple éternel (Gabin/Morgan). Juste de quoi échapper de peu aux limbes de l'histoire, tout en restant à quai...

Quai des orfèvres

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Réalisé par : Henri-Georges Clouzot (1907 - 1977)
En : 1947, France
Acteurs principaux : Charles Blavette (1902 - 1967), Bernard Blier (1916 - 1989), Suzy Delair (1917 - ), Louis Jouvet (1887 - 1951), Pierre Larquey (1884 - 1962)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 102 mn, NB

Critique perso :

Le quai des orfèvres, c'est bien sûr le siège de la Police Judicière. Pourtant, ce film ne traite pas des moeurs de la police, mais de celles (plus légères, paraît-il) du milieu des cabarets de music-hall, avec ses numéros de cirque et de chansons populaires. Mais il y a bien un crime et beaucoup de suspects, pas mal de faux alibis et de vrais secrets. Avec son petit tralala, Suzy Delair n'a vraiment pas besoin de castagnettes et Blier -le père- fait sa mauvaise tête de mari jaloux (à tort, bien sûr). En flic roublard, Jouvet est le clou du spectacle. Au petit poil, comme on disait alors !

Asphalt Jungle (The) - Quand la ville dort

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1950, USA
Acteurs principaux : Louis Calhern (1895 - 1956), Jean Hagen (1923 - 1977), Sterling Hayden (1916 - 1986), Sam Jaffe (1891 - 1984), Marilyn Monroe (1926 - 1962)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

Doc Erwin Riedenschneider, agrégé en combriolage juteux et metteur en scène affuté de son art, sort de prison et ne tarde pas à reprendre ses chères études. Pour mettre la main sur quelques bijoux, il a un scénario en or qui lui permet de choisir son casting : quelques stars incontestées de la cambriole, quelques seconds rôles de plus ou moins gros calibres. Le producteur-promoteur est véreux et amateurs de starlettes, ça n'étonnera personne. Préparation, exécution, conséquences : le plan (devenu) habituel (depuis) de toutes les écoles de casses, de cinéma et d'ailleurs. Comme d'hab, ce serait trop beau que tout se passe bien. Comme d'hab, tout est prévu sauf l'imprévisible : le hasard et la faiblesse des hommes -pas toujours la même, mais il suffit de la trouver. Quand la ville dort, tous les chats sont gris et tous les films sont noirs. Surtout les bons.

Secret Agent - Quatre de l'espionnage

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1936, Angleterre
Acteurs principaux : Madeleine Carroll (1906 - 1987), John Gielgud (1904 - 2000), Peter Lorre (1904 - 1964)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Certes, il y a une histoire d'espionnage dont le prétexte est (presque) aussi obscur pour ses héros que pour le spectateur. Certes, il y a du marivaudage dans l'air. Des coups de fil intrusifs, des choses cachées derrière les portes, et derrière les notes de musique. Du jeu, des décors de studio, du style. Un train, des morts. Du fétichisme (un bouton), des messages codés. Des personnages qui ne savent pas bien ce qu'ils font là -mais qui n'arrivent pas encore à faire mine de ne pas y attacher d'importance. Bref, ça ressemble à du Hitchcock qui aurait en main toutes les clés de sa maison, mais qui n'aurait pas encore trouvé toutes les bonnes serrures.

Hard Day's Night (A) - Quatre garçons dans le vent

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Réalisé par : Richard Lester (1932 - )
En : 1964, Angleterre
Acteurs principaux : George Harrison (1943 - 2001), John Lennon (1940 - 1980), Paul McCartney (1942 - ), Ringo Starr (1940 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Quatre garçons (plus un grand-père) sont dans un train. Le scénario tombe à l'eau. Que reste-t-il ? Du collage, du bricolage, tout sauf du train train. Faut dire que les garçons exercent la profession d'icônes débutantes et qu'ils sont attendus (c'est peu de le dire) à tous les tournants de leur tournée (qui tournait plutôt bien) par des hordes blondes, hurlantes et court-vêtues. Prétextes à courir plus vite, semelles de vent, et à chanter plus fort. Faut dire qu'ils chantent bien et qu'ils sont marrants, cheveux aux vents. C'est marrant, on jurerait de les avoir déjà entendus quelque part dans sa tête. Et s'ils font encore un peu peur aux grands-mères, ils aiment bien leur grand-père, ça les rend fréquentables par tout le monde. Au tournage : un autre débutant, qui a tout de même déjà fait débuter un autre débutant prometteur. Le making of étourdi (et presque sans le faire expres) d'une légende en marche (et en train) qui feint (presque) de s'ignorer encore.

Que la bête meure

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Réalisé par : Claude Chabrol (1930 - 2010)
En : 1969, France
Acteurs principaux : Caroline Cellier (1945 - ), Michel Duchaussoy (1938 - 2012), Maurice Pialat (1925 - 2003), Jean Yanne (1933 - 2003)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Les deux personnages principaux de cette histoire n'auraient jamais dû se rencontrer. D'ailleurs, ils mettent du temps à se trouver. Mais l'un a malencontreusement (et brièvement) croisé le fils de l'autre sur une route de campagne bretone. Le fils ne s'en est jamais relevé. Alors, l'autre s'est mis à parcourir (avec acharnement) toutes les villes de France pour retrouver l'un. Coup de bol, les rôles sont parfaitement distribués : le méchant chauffard est un serial connard idéal, le papa contrarié un gentleman écrivailleur. Et le scénar est poli aux meilleures écoles : c'est même une belle Hélène qui sera le cheval de Troie de la vengeance. Mais, même dans le meilleur des mondes possibles (c'est-à-dire au cinéma), c'est pas évident de tuer un homme, en bluffant un policier-cinéaste extra-lucide. Bluffer les spectateurs comme moi, c'est nettement plus facile.

All That Jazz - Que le spectacle commence

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Réalisé par : Bob Fosse (1927 - 1987)
En : 1979, USA
Acteurs principaux : Jessica Lange (1949 - ), Roy Scheider (1932 - 2008)
Genre(s) : en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 123 mn, couleur

Critique perso :

Joe Gideon est un chorégraphe surdoué de Broadway. Et aussi surbooké, surmené, surdopé. Il prépare un spectacle qui pourrait bien s'appeler Chicago, tout en montant un film qui pourrait bien s'appeler Lenny. Assailli par ses producteurs, ses danseurs, sa fille, son ex-femme, son ex-maîtresse, sa prochaine maîtresse, son ex-ex-maîtresse... il arrive pourtant, souvent, à faire assez bonne figure. Mais, la bonne figure, il passe de plus en plus de temps à la préparer le matin, devant sa glace. Il passe beaucoup de temps, aussi, à négocier un sursis avec une belle dame qui cherche à l'emmener définitivement en coulisses. Bob Fosse, maître ès malaise qui se danse, se fait à lui-même une opération à coeur ouvert. Il invente avec ce film le genre de l'agonie musicale autofictionnée. Surréaliste, survoltée, survitaminée. Il est vraiment surdoué, le bonhomme.

Que viva Mexico !

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Réalisé par : Sergei M. Eisenstein (1898 - 1948)
En : 1932, Mexique
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /épique pas toc
Caractéristiques : 55 mn, NB

Critique perso :

Quelques années après la La Ligne générale, encore un petit docu-drama signé Eisenstein (enfin, pas vraiment signé parce que le film est resté inachevé de son vivant). Cette fois, il y est modestement question de l'histoire de l'humanité des origines à nos jours -et du Mexique. La séquence "paradis" parle de la nature luxuriante, du mariage et de la fête. Puis, comme dans La Ligne générale, vient le taureau (dans une arène), ce qui nous vaut encore quelques plans en caméra subjective (Eisenstein se prendrait-il décidément pour un taureau ?). Et la fête. Après, vient le propriétaire terrien, arrogant et aviné, et ça se gâte. Manquent les plans de la révolution et de l'avenir radieux. Dommage : ce gars-là peut réussir à nous faire croire à tout !

Somewhere in Time - Quelque part dans le temps

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Réalisé par : Jeannot Szwarc (1939 - )
En : 1980, USA
Acteurs principaux : William H. Macy (1950 - ), Christopher Plummer (1927 - ), Christopher Reeve (1952 - 2004), Jane Seymour (1951 - ), Teresa Wright (1918 - 2005)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Richard Collier, écrivain dramatique beau comme un Dieu (qu'il fut dans un autre film, une autre vie...), est l'idole des vieilles dames (enfin, surtout d'une, apparemment…). Un jour qu'il est un peu contrarié, il se paye une petite escapade dans un grand hôtel des environs (de Chicago). Là, il tombe amoureux d'un portrait sur un mur : celui d'une très belle actrice du début du XXème siècle à la carrière aussi fulgurante que brève, prématurément retraitée des planches… et devenue 60 ans plus tard sa groupie sénior. En fait, il se sont connus en vrai, en 1912, dans ce même grand hôtel. En fait, il va l'y rejoindre en voyageant dans le temps, par la seule force de son mental et de ses sentiments, pour lui permettre d'accomplir ce destin qu'elle a déjà vécu. En fait, tout a commencé là bas, à ce moment-là, dans ce passé dont lui n'a encore aucun souvenir. L'amour comme éternel paradoxe temporel, comme flash back mental idéal dans les souvenirs qu'il nous reste à découvrir... Pandora nous a déjà fait le coup, mais (pour moi) ça marche à tous les coups. C'est beau, romantique et kitch comme on n'en fait plus, tellement premier degré qu'on est obligés de s'incliner.

Matter of Life and Death (A) - Question de vie ou de mort (Une)

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Réalisé par : Powell (& Pressburger) (1905 - 1990)
En : 1946, Angleterre
Acteurs principaux : Kim Hunter (1922 - 2002), David Niven (1909 - 1983)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 104 mn, NB/couleur

Critique perso :

Ca commence avec un travelling de quelques années-lumières sur l'univers, la terre et tout le reste. Ca enchaîne avec un coup de foudre par ondes radio et par temps de guerre, et une mort suspendue par le fog. Après, c'est une Near Death Experience d'1h30 en direct live et en images de rêve, à laquelle ne manque que l'odeur d'oignons frits. Autour du charmant petit couple en sursis, s'affairent d'étonnants personnages : un représentant de l'au-delà amateur d'échecs, comme dans Le 7ème sceau, et un sympathique et mystérieux neurologue, observateur omniscient de son village et de l'esprit humain, comme Im-ho-tep. Ce film, c'est la matrice du fantastique métaphysique à la Solaris (qui lui a piqué quelques plans), et du mysticisme amoureux façon Pandora (qui lui en a piqué quelques autres). Bref, l'accomplissement de tout ce que j'attends du cinéma : qu'il nous donne des images d'un autre monde qui serait aussi le nôtre.

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R


Radio Days

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1987, USA
Acteurs principaux : Danny Aiello (1933 - ), Jeff Daniels (1955 - ), Mia Farrow (1945 - ), Diane Keaton (1946 - ), Tony Roberts (1939 - ), Dianne Wiest (1948 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Quand on n'aime pas la télé, la moindre des choses, c'est d'aimer la radio. La radio, c'est comme un monde parallèle où les gens sont forcément plus grands et plus beaux, puisqu'on ne les voit jamais. La radio, c'est la voix de l'enfance. D'ailleurs ce film est le seul de Woody Allen qui parle de l'enfance. C'est une chronique schizophrène qui mélange les souvenirs du monde réel et ceux de cet autre monde que la radio introduit en douce dans les maisons. Un monde multiple, où les faits divers et l'actualité sérieuse cotoient les potins mondains et les feuilletons romanesques. Mine de rien, la vie quotidienne en est toute transformée. Tata aime les chansons, maman préfère les interviews de vedettes... Ce film, c'est comme sur les ondes : il y en a pour tous les goûts...

Raging Bull

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Réalisé par : Martin Scorsese (1942 - )
En : 1980, USA
Acteurs principaux : Robert De Niro (1943 - ), Joe Pesci (1943 - )
Genre(s) : New York - New York /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 129 mn, couleur

Critique perso :

Raging bull est une bête, un taureau : c'est un boxeur -le genre poids lourd et cervelle plume. Il doit tout à ses poings : son argent, sa gloire, sa femme. Mais qui a vécu par les poings périra par les poings... Alors, parce que rien ne lui a jamais résisté, peut-être, il se laisse un jour démolir sur un ring sans réagir. Rédemption, rédemption... Un boxeur sans ses poings, ça ne peut que devenir un manager de cabaret gras et vulgaire. Qu'importe, lui, au moins, sait ce dont il est capable. De Niro, plus génial caméléon que jamais, incarne ce type à la recherche de son âme : il arriverait presque à me faire aimer la boxe, c'est dire !

Raining Stones

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Réalisé par : Ken Loach (1936 - )
En : 1993, Angleterre
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Bob est un bon bougre heureux en ménage. Il est même catho, c'est dire comme Loach a l'esprit large. Mais il manque de sous, donc de tout -sauf d'imagination. Et voilà que la fifille a besoin de se déguiser en nonne -le costume est très cher- pour sa première communion. D'où, pour assurer, un enchaînement de plans-débrouilles foireux avec son pote Tommy, de galères qui prennent l'eau et de bonne volonté embourbée au fond de divers marécages. Il a aussi l'orgueil un peu mal placé et la descente de bière un peu en pente, l'ami Bob. Mais bon, des fois, même chez Loach, le ciel est avec les hommes de bonne volonté. Un ciel pour qui la mort d'un homme -un beau salaud, of course- peut être légitime. Mine de rien, même quand ils nous font un peu rire (comme ici), ses films ne disent toujours que ça : contre ceux qui les exploitent et les écrasent, les prolos font bien de retrousser leurs manches -pour cogner !

Grapes of Wrath (The) - Raisins de la colère (Les)

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Réalisé par : John Ford (1894 - 1973)
En : 1940, USA
Acteurs principaux : John Carradine (1906 - 1988), Henry Fonda (1905 - 1982)
Genre(s) : carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 128 mn, NB

Critique perso :

Quand Tom rentre chez lui après avoir purgé 4 ans de prison, il rencontre un pasteur qui a perdu la foi, et des paysans qui ont perdu leur terre. C'est la faute aux proprios, aux patrons des proprios, aux banquiers des patrons des proprios, aux patrons des banquiers des patrons des proprios -bref, à personne. A Mme La Grande-Crise-de-29 (promise à une grande descendance). Pa' et Ma' sont réfugiés chez tontons, et ils s'apprètent à partir eux aussi. L'exode s'engage donc vers la terre promise "qui ruisselle de lait et de miel" : la Californie... Dans un tacot surchargé qui fume comme une loco, ils traversent la misère et l'injustice, l'exploitation et la suspicion. L'esprit de révolte souffle où il veut, mais il souffle fort. On dirait du Ken Loach évangélisé : Qu'elle était verte sa colère !

Ran

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Réalisé par : Akira Kurosawa (1910 - 1998)
En : 1985, Japon
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 160 mn, couleur

Critique perso :

Shakespeare était japonais, les filles du roi Lear étaient des samouraïs et Kurosawa est un grand peintre. Il nous régale ici d'un match fratricide entre porteurs de casaques jaunes, rouges et bleues. L'affrontement commence par une partie de chasse familiale qui tourne au vinaigre, se prolonge en manoeuvres de cour et intrigues d'alcôve, et s'achève par une grande baston en plein air. Kurosawa est à l'aise sur tous les terrains, car c'est toujours de guerre qu'il s'agit. Et à ces guerres-là, il n'y a que des perdants. Le film se termine avec le plan d'un joueur de flûte aveugle au bord d'un précipice, et il ne reste plus grand monde pour le retenir...

Rashômon

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Réalisé par : Akira Kurosawa (1910 - 1998)
En : 1950, Japon
Acteurs principaux : Machiko Kyô (1924 - ), Toshirô Mifune (1920 - 1997), Masayuki Mori (1911 - 1973), Takashi Shimura (1905 - 1982)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 88 mn, NB

Critique perso :

Réfugiés sous une porte de Kyoto (Rashômon, c'est la "porte des démons") pour échapper au déluge, trois hommes se racontent une histoire. Une sombre histoire, qui met en scène un couple traversant tranquillement la forêt, et le bandit bondissant qu'ils y rencontrent. L'histoire se termine mal, un procès vient d'avoir lieu. Face au tribunal invisible de l'Histoire, chacun des protagonistes donne sa version des faits. Les images, chaque fois, lui donnent raison. L'homme est mort, la femme a été violée, le bandit jugé. Mais c'est à peu près tout ce qu'il y a de sûr. Pour le reste, chacun sa vérité et honneur pour tous. L'histoire prend l'eau, comme tout le reste. Si on ne peut plus faire confiance aux images, où va-t-on ! Quant aux hommes... Un grand coup de de modernité dans les côtes, largement pompé depuis.

Rayon vert (Le)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1986, France
Acteurs principaux : Marie Rivière (1956 - ), Béatrice Romand (1952 - )
Genre(s) : Paris /en France profonde
Caractéristiques : 98 mn, couleur

Critique perso :

C'est les vacances : Rohmer, il aime bien les vacances. C'est propice à la parole et à la chair. Delphine, elle, ça dépend. Son copain l'a lachée il y a deux ans, la copine qui devait l'accompagner en Grèce vient de la lacher, elle est toute seule. Elle se fait inviter par-ci, elle s'ennuie par-là. Elle cherche la consolation dans les forces de la nature, mais la consolation n'est pas dans les forces de la nature. Elle croit pourtant aux jeux de l'amour et du hasard, mais sans concession, sans compromis. Pas de maître du jeu explicite, pour une fois, si ce n'est un joueur de cartes étourdi qui laisse traîner des indices sur son chemin -et le parrainage de Jules Verne. Le portrait gagne en liberté ce qu'il perd en maîtrise, les paroles gagnent en chair ce qu'elles oublient en style.

Rebecca

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1940, USA
Acteurs principaux : Judith Anderson (1897 - 1992), Joan Fontaine (1917 - 2013), Laurence Olivier (1907 - 1989), George Sanders (1906 - 1972)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 130 mn, NB

Critique perso :

C'est sur la French Riviera (lieu d'envoutement classique des films américains) qu'ils font connaissance. Il est anglais, veuf, très riche. Elle est jeune et innocente. Ils se marient et vont habiter dans la somptueuse demeure de Monsieur, à l'aura mystérieuse. Machine (comment s'appelle-t-elle, au fait ? personne ne l'appelle par son prénom) se retrouve à la tête d'une maison où tout est trop grand pour elle, où tout porte la griffe de Rebecca, la première épouse. Problème : comment lui faire oublier son ex ? Comment se faire aimer d'une propriété où tout -choses et êtres- est encore sous le charme de l'autre ? Comment lutter contre un fantôme qui ne se manifeste que dans les vivants ? Un drôle de cauchemar luxueux, un thriller mental au style gothique flamboyé, avec ce qu'il faut de fièvre et de secrets.

Queen Christina - Reine Christine (La)

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Réalisé par : Rouben Mamoulian (1897 - 1987)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Greta Garbo (1905 - 1990), John Gilbert (1899 - 1936), Akim Tamiroff (1899 - 1972)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

A 5 ans, elle monte sur le trône de Suède. Elle devient belle, lit Descartes, s'habille comme papa et gouverne comme lui -tout en aimant un peu moins la guerre, tout de même. Elle croit connaître les hommes, puisqu'elle leur ressemble. Mais elle n'a pas encore rencontré l'ambassadeur d'Espagne. Antonio lui parle d'abord comme un frère, puis la séduit comme un amant. Avec lui, elle se découvre des envies bizarres (se vautrer dans du raisin, par exemple). Elle devient Garbo, comme Victor/Victoria, une anti-Impératrice Rouge. Et quand, par amour, elle quitte son trône pour abdiquer -au grand désespoir de ses sujets-, on la croirait en train de descendre les escaliers de Cannes, assaillie de paparazzi. A la fin, elle bat haut la main le record du plus long plan sans cligner une paupière. Une reine, une vraie, n'a pas besoin de déguisement.

Shop Around the Corner (The) - Rendez-vous

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Réalisé par : Ernst Lubitsch (1892 - 1947)
En : 1940, USA
Acteurs principaux : Felix Bressart (1892 - 1949), James Stewart (1908 - 1997), Margaret Sullavan (1911 - 1960)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

Au coin d'une rue de Budapest, années 30 : c'est chez Matuschek, on y vend de la maroquinerie (des ceintures, des sacs à main...). Alfred, brave garçon poli, est le chef des vendeurs ; Klara, gentille fille enthousiaste, est la nouvelle vendeuse. Pourtant, ils ne s'entendent sur rien. Il y a autant de différences entre eux qu'entre une boîte à cigares et une boîte à bonbons (entre un homme et une femme, quoi). Ils n'ont pas leur langue dans leur poche mais, dans leurs poches, ils gardent précieusement les lettres enflammées qu'ils s'envoient sous pseudo (boîte à lettres numéro 237). Subtiles variations sur les intermitences de la vie sociale et le petit commerce de la vie privée, ces théâtres où tout le monde est un agent double.

Rendez-vous de juillet

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Réalisé par : Jacques Becker (1906 - 1960)
En : 1949, France
Acteurs principaux : Nicole Courcel (1930 - 2016), Daniel Gélin (1921 - 2002), Maurice Ronet (1927 - 1983), Louis Seigner (1903 - 1991)
Genre(s) : Paris /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

A la sortie de la guerre, c'est bien connu, les jeunes étaient zazous. Ca veut dire qu'ils n'avaient pas encore tombé la veste, mais qu'ils commençaient à oser se passer de cravate. Qu'ils fréquentaient des caves obscures, résonnant d'une musique nouvelle venue d'Amérique. Ca veut dire surtout qu'ils étaient comme tous les jeunes de toutes les époques : ils avaient des rêves (en gros : voyager, aimer et faire l'artiste) qui ne plaisaient pas à leurs parents... Ils vivaient en bande, ils avaient un monde à explorer et à reconstruire. C'était une génération insubmersible (cf. leur voiture). C'est un film indémodable.

Ressources humaines

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Réalisé par : Laurent Cantet (1961 - )
En : 1999, France
Acteurs principaux : Jalil Lespert (1976 - )
Genre(s) : en France profonde /pas drôle mais beau /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Un jeune cinéaste français qui se coltine le problème des 35h dans une petite usine de province, en faisant jouer des acteurs recrutés aux guichets de l'ANPE : c'était pas gagné d'avance. Et bien, c'est plus que réussi : criant de vérités jamais dites sur le monde du travail et surtout (c'est là le coeur du sujet) sur ceux à qui leurs études permettent de prétendre à une promotion sociale. Franck en fait partie : son père est ouvrier, lui porte la cravate pour faire un stage dans les bureaux. Traitre à tous, en lutte (des classes) avec lui-même, il cherche sa place. Et nous, on a trouvé un nouveau cinéaste à aimer.

Star Wars: Episode VI, Return of the Jedi - Retour du Jedi (Le)

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Réalisé par : Richard Marquand (1938 - 1987)
En : 1983, USA
Acteurs principaux : Carrie Fisher (1956 - 2016), Harrison Ford (1942 - ), Mark Hamill (1951 - )
Genre(s) : c'était demain /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /pour petits et grands enfants /épique pas toc
Caractéristiques : 135 mn, couleur

Critique perso :

D'abord : libérer Han et Leïa de la bave d'une grosse limace lubrique qui les retient prisonniers. Ensuite, recueillir les dernières paroles de son petit grand maître vénéré, avant de participer à des courses de motocyclette volante en pleine forêt. Enfin, détruire l'étoile noire nouvelle version (cf. La Guerre des étoiles : le propre des méchants, c'est qu'ils manquent d'imagination) grâce à une armée de Teddy Bears, tout en réglant son Oedipe à coup de sabre laser. Pas de tout repos, d'être un apprenti Jedi, surtout quand on n'a pas la carrure d'un Hercule. Le mythe fait un peu place à un catalogue qui se parodie lui-même. La suite va manquer de méchants. On va s'ennuyer. On regrette déjà la série...

Riff-Raff

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Réalisé par : Ken Loach (1936 - )
En : 1990, Angleterre
Acteurs principaux : Robert Carlyle (1961 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 95 mn, couleur

Critique perso :

Un chantier immobilier pourri, dans une banlieue de Londres pourrie, mené par un pourri de patron : bienvenue au joyeux pays de Margaret. On se doute bien que ceux qui travaillent là -touristes sans carte de séjour, bidouilleurs en fin de droit, déclassés de longue durée...- n'ont pas trop le choix -et qu'ils ont intérêt à fermer leur gueule. Mais toutes les Margaret du monde ne peuvent les empêcher de former un groupe d'humains -le début de l'espoir, chez Ken Loach. Steeve trouve tout de suite sa place dans cette petite communauté. Il se déniche même une copine chanteuse, et l'installe dans son squat -une île précaire de liberté dans un océan de misère. Tract terrible et joyeux contre l'horreur économique ; portrait joyeux et terrible du bordel ambiant.

Rio Bravo

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Réalisé par : Howard Hawks (1896 - 1977)
En : 1959, USA
Acteurs principaux : Walter Brennan (1894 - 1974), Angie Dickinson (1931 - ), Dean Martin (1917 - 1995), Ricky Nelson (1940 - ), John Wayne (1907 - 1979)
Genre(s) : carrément à l'ouest /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 141 mn, couleur

Critique perso :

Dans les westerns, c'est facile : le méchant, c'est celui qui tue sans raison. Le héros, il tue aussi mais il a la loi avec lui. En plus, il s'appelle souvent John Wayne. Ici, il est shérif, il doit garder en prison un méchant qui a plein de copains dans la région, avec pour adjoints un vieillard infirme et un ex-alcolo en cure de désintoxication. Un gamin joueur de guitare, aussi. Et le soutien moral d'une charmante tricheuse professionnelle avec qui il adore s'engueuler à la première occasion. Autant dire un saint bourru en santiag, surpris en plein chemin de croix dans la poussière de l'ouest. En flagrant délit de mythe.

Rocco e i suoi fratelli - Rocco et ses frères

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Réalisé par : Luchino Visconti (1906 - 1976)
En : 1960, Italie
Acteurs principaux : Claudia Cardinale (1938 - ), Nino Castelnuovo (1936 - ), Suzy Delair (1917 - ), Alain Delon (1935 - ), Annie Girardot (1931 - 2011), Roger Hanin (1925 - 2015), Renato Salvatori (1934 - 1988)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 168 mn, NB

Critique perso :

Quatre frères du sud débarquent un soir sans prévenir, avec mama et barda, à la soirée de fiançaille du cinquième frère, installé à Milan : début de l'exil. A cette époque, en Italie, le réalisme n'est déjà plus très neo, et Visconti commence à devenir ce qu'il est. Ses personnages habitent une cave, mais se promènent sur le toit des cathédrales. Parmi les cinq frères, il en pioche surtout deux : Rocco et Simone. Un saint et un salaud, le bon et la brute-truand dans la même famille. Et une femme, pour leur permettre de devenir ce qu'ils sont. Deux frères, deux boxeurs, deux anges en exil sur la terre.

King in New-York (A) - Roi à New-York

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1957, Angleterre
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

Le dernier monarque d'un royaume d'opérette -non, il n'a pas épousé Grace Kelly- destitué par une révolution, débarque fauché à New-York. Il y découvre la pub, l'info-spectacle et le lifting. Il comprend surtout qu'il n'a aucune leçon de démocratie à recevoir de la part d'un pays en pleine paranoïa MacCarthiste, qui assassine si bien ses petits Mozart... Amer plutôt que drôle, pas très vif et pas très léger, comme chargé déjà de tout ce qui sortira de pire des années à venir -comme nous le rappelleront, plus tard, The Truman Show et Lost in Translation. Ce roi déchu d'une époque bénie à la recherche de sa grandeur perdue est le seul pour lequel on voterait bien.

Roma, città aperta - Rome, ville ouverte

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Réalisé par : Roberto Rossellini (1906 - 1977)
En : 1945, Italie
Acteurs principaux : Anna Magnani (1908 - 1973), Marcello Pagliero (1907 - 1980)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Décors naturels, prises rapides, impression de vie palpitante : dans les derniers soubressauts de la guerre, Rossellini crée le cinéma moderne. Avec les modestes habitants d'un modeste immeuble romain, il fait des héros de la résistances. Il invente Anna Magnani. Non, assène-t-il : tous les italiens n'étaient pas fascistes. Pour sauver l'honneur, il y a eu des ouvriers, des enfants, des prêtres. 30 ans avant Aldo Moro, il voyait déjà ce qui pouvait rapprocher les cathos et les gauchos : leur même foi en l'humanité, pour contrer la barbarie des surhommes (qui n'y croyaient déjà plus, aux surhommes). Et il fait une fresque modeste et fervente, comme prise sur le vif et à la dérobée, devenue une étape cruciale de l'histoire du cinéma.

Ronde (La)

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Réalisé par : Max Ophüls (1902 - 1957)
En : 1950, France
Acteurs principaux : Jean-Louis Barrault (1910 - 1994), Danielle Darrieux (1917 - 2017), Daniel Gélin (1921 - 2002), Odette Joyeux (1914 - 2000), Gérard Philipe (1922 - 1959), Serge Reggiani (1922 - 2004), Simone Signoret (1921 - 1985), Simone Simon (1910 - 2005)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

Toujours Vienne, toujours 1900 (mais ça n'a aucune importance). La ronde, c'est ce jeu supide -j'te prends la main, tu m'prends la main- que les humains apprennent dans les cours d'école -un gars, une fille, un gars, une fille- et auquel ils jouent toute leur vie. Par "amour de l'art de l'amour", ils rejouent tous et toujours les mêmes scènes, inconsolables de leurs souvenirs, obsédés par le temps qui passe trop ou pas assez vite. Bref, ils ne pensent qu'à ça et le plus dur, pour eux, est de ne pas en avoir l'air. Pour faire sa typologie des prélimaires amoureux, Ophuls met en place un dispositif très artificiel, avec maître de cérémonie tireur de ficelles et passages de témoin systématiques d'un couple à l'autre. On a compris : le monde est un théâtre dont tout le monde fait mine d'être dupe...

Tarnished Angels (The) - Ronde de l'aube (La)

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Réalisé par : Douglas Sirk (1897 - 1987)
En : 1958, USA
Acteurs principaux : Rock Hudson (1925 - 1985), Dorothy Malone (1925 - 2018), Robert Stack (1919 - 2003)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /épique pas toc
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

New-Orleans, années 30. Un journaleux qui a déjà perdu quelques plumes trouve le sujet en or de son prochain papier. Il fera le portrait d'une des troupes les plus minables qui traine dans le coin pendant le carnaval : un aviateur ex-héros de guerre, une ex-fan devenue sa femme, et le mécano dévoué, ex-prétendant de Madame. Il y a un petit garçon aussi, mais on ne sait pas trop qui est son père. Il sont là pour participer à des compet' aériennes, sortes de manèges pour grandes personnes où la queue du Mickey ne vaut pourtant pas tripette. Rien que des has-been en deuil de leurs espoirs passés, fâchés avec la gloire qui leur était promise, ivres de leurs rêves brisés. Avec le journaleux, la ronde à trois devient une ronde à quatre, qui ne résoud pas pour autant la quadrature du cercle. Un petit bijou qui démontre une fois de plus que le mélo, c'est de la tragédie déguisée en farce de foire.

Purple Rose of Cairo (The) - Rose pourpre du Caire (La)

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1985, USA
Acteurs principaux : Danny Aiello (1933 - ), Jeff Daniels (1955 - ), Mia Farrow (1945 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 84 mn, couleur

Critique perso :

Qui n'a osé rencontrer personnellement, "pour de vrai", les héros de ses films fétiches ? Bon début d'idée. Et si maintenant, en plus, ces héros pouvaient sortir physiquement de l'écran, si de la salle obscure on pouvait les voir nous voir, réagir à nos réactions et improviser face aux contretemps, comme au théâtre. Ca, on n'a jamais osé l'imaginer et Woody en fait un film génial. Il transforme l'écran de cinéma en porte magique et poreuse entre deux mondes que tout oppose. Lequel est le mirroir, le leurre de l'autre ? Qui, dans chacun d'eux, tire les ficelles ? Ce conte de fée cruel est un fabuleux hommage au mythe même du cinéma, à son ambiguïté, au plaisir que nous prenons tous à nous tromper nous-mêmes en faisant mine de croire à ses histoires.

Roseaux sauvages (Les)

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Réalisé par : André Téchiné (1943 - )
En : 1994, France
Acteurs principaux : Elodie Bouchez (1973 - ), Gaël Morel (1972 - ), Stéphane Rideau (1976 - )
Genre(s) : en France profonde /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Début des années 60, début de l'été, quand la lumière commence à envahir la campagne du sud-ouest. Pourtant, pas si loin, de l'autre côté de la mer, la France est en guerre. Ca préoccupe les hommes. Et par contagion, les ados qui préparent leur bac. Les roseaux souples du titre, ce sont eux. Ils font leur début en tout. Ils sont à l'âge où ils font connaissance avec le personnage qu'ils auront à jouer le reste de leur existence, et qui ne ressemble pas forcément à ce qu'ils imaginaient quelques années, quelques mois, quelques semaines auparavant. Ils passent A travers le miroir. Ils apprennent le maniement de nouveaux sentiments et de nouveaux mots. Ils en sont tout bouleversés. Nous aussi.

Scarlet Street - Rue rouge (La)

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1945, USA
Acteurs principaux : Joan Bennett (1910 - 1990), Edward G. Robinson (1893 - 1973)
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 103 mn, NB

Critique perso :

Remake de La Chienne : dans la rue rouge, Chris Cross, comptable gris, peintre du dimanche, va en voir de toutes les couleurs. Sa femme lui donne le blues. Avec une autre, il croit voir la vie en rose. En fait, c'est clair : il est aveugle et se fait rouler comme un bleu. La vérité le rendra vert de rage... Personne n'est sympathique, dans cette histoire. La seule vraie couleur de ce film, c'est le noir de chez noir (dommage que la copie pourrie de ce DVD tranforme tout en gris quasi-uniforme).

Rumble Fish - Rusty James

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Réalisé par : Francis Ford Coppola (1939 - )
En : 1983, USA
Acteurs principaux : Nicolas Cage (1964 - ), Matt Dillon (1964 - ), Laurence Fishburne (1961 - ), Dennis Hopper (1936 - 2010), Mickey Rourke (1956 - ), Tom Waits (1949 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 94 mn, NB/couleur

Critique perso :

Un Rebel Without a Cause prend RDV avec un autre, pour une baston de parking. Il sont partis pour nous refaire le coup de West Side Story, en version expressionniste. Mais la dérive nous fait plutôt remonter aux sources d'un Gus Van Sant.. D'ailleurs, le vrai héros, c'est pas Rusty, le cogneur en bandana, c'est donc son frère, le grand Motocycle Boy, l'ex-roi du quartier. Il est de retour, justement, après quelques années d'errance, daltonien et à moitié sourd. Il ressemble à un ange en exil, à un prince déchu. En fait, le titre anglais évoque une espèce de poissons bagarreurs. L'histoire est vue depuis l'intérieur de l'aquarium, ou du dedans d'un vieux poste de télé en noir et blanc. De dedans l'enfance éternelle du souvenir.

Gold Rush (The) - Ruée vers l'or (La)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1925, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 98 mn, NB

Critique perso :

Un drôle de petit vagabond à baluchon, embarqué dans une mythique quète de l'or en Alaska. A vrai dire, on ne le verra pas beaucoup creuser ni fouiller. Le décor est surtout prétexte à ramener l'homme à sa plus simple expression, petit point noir dans un grand désert blanc où la survie au froid, à la faim et à la solitude est la principale préoccupation. Avec à peine deux cabanes, un saloon et un ours blanc, on y est, sur la banquise. Avec deux petits pains, on y est, à l'opéra. Chaplin reconstitue ainsi le rêve d'une époque, l'enfance d'un peuple, dont il est à la fois le messager et la victime. On a tous laissé un éclat de rire et une larme sur le décor d'opéra de cette banquise-là.

Règle du jeu (La)

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1939, France
Acteurs principaux : Julien Carette (1897 - 1966), Marcel Dalio (1900 - 1983), Paulette Dubost (1911 - 2011), Jean Renoir (1894 - 1979)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Au début, on est dans un reportage radiophonique en direct. On passe dans un salon bourgeois. Des fois, on se croit dans une pièce de boulevard -mais pleine de répliques dignes du meilleur théâtre classique. A d'autres moments, c'est une comédie sentimentale, une satire sociale, un drame mondain. Décidément, ce film ne respecte aucune loi de construction dramatique et d'unité de ton ! Ses multiples personnages -bien que réunis ponctuellement pour une partie de chasse- ont bien du mal à constituer une société homogène. On dirait qu'ils jouent chacun une partition différente, tout en faisant mine de tenir leur rang. C'est la veille de la guerre et chacun joue perso : voilà qui ne présage rien de bon. Quant à Renoir, acteur inattendu et chef d'orchestre virtuose de cette inquiétante cacophonie, il démontre par l'absurde que l'illusoire harmonie sociale ne tient qu'à un fil. Oeuvre de chef !

Big Heat (The) - Réglements de comptes

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Glenn Ford (1916 - 2006), Gloria Grahame (1923 - 1981), Lee Marvin (1924 - 1987)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 89 mn, NB

Critique perso :

Ca commence par la mort d'un flic qui n'a plus du tout envie de vivre, et ça se termine par celle d'une pétasse qui aurait bien mérité d'être sauvée. Le chemin entre les deux passe par le Sgt de police Bannion, brave type incorruptible que la rage peut tout de même rendre assez méchant. Surtout quand on lui tue sa femme sans le faire exprès. Dans cette histoire, tout ou presque est à double face, comme un bout de scotch qui colle aux doigts. Le pape de la pègre est fier de sa lignée respectable, les officiers de police jouent aux cartes avec les truands, et les veuves éplorées se font du fric sur la mort de leur époux. Mais chacun va finir par ressembler à ce qu'il est, et c'est pas toujours beau à voir. Il y a des films noirs qui ont une sacrée lumière intérieure.

Repulsion - Répulsion

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Réalisé par : Roman Polanski (1933 - )
En : 1965, Angleterre
Acteurs principaux : Catherine Deneuve (1943 - ), Yvonne Furneaux (1928 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

Elle s'appelle Carole, elle vit à Londres. Elle est jeune, blonde et très jolie. Mais pas causante. Le genre crustacé qui se rétracte au moindre contact avec un doigt poilu. Elle travaille dans un gynécée : un salon de beauté où des femmes s'occupent d'autres femmes. Ca lui convient visiblement mieux que de fréquenter les hommes qui se retournent en vain sur sa beauté dans la rue. Elle vit avec sa soeur, mais sa soeur a un amant qui laisse des poils dans le lavabo. Et puis, un jour, la soeur part en vacances avec l'amant et Carole se retrouve toute seule dans le grand appartement. C'est à ce moment-là que le lapin qui trainait dans le frigo commence à se réveiller. A ce moment-là aussi que les fissures du mur se mettent à s'agiter, et que les bras poilus qui se planquaient dedans se décident à sortir. A partir de là, malheur aux doigts qui oseront appuyer sur la sonnette. Elle est jeune, blonde et complètement névrosée : attention ange méchante !

Prova d'orchestra - Répétition d'orchestre

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1978, Italie
Genre(s) : en avant la musique /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 70 mn, couleur

Critique perso :

Un lieu prestigieux et chargé d'histoire. Des hommes et des femmes qui ont consacré leur vie à un grand art. Un chef esthète et inflexible. Non non, on n'entre pas pour autant dans les coulisses guindées d'un événement mondain. C'est juste la petite repet' privée d'un orchestre symphonique. Pourtant, y'a un(e) intrus(e) : une caméra de télé. Invisible, mais toujours là. Insaisissable, intrusive. Devant elle, les musiciens ne se sentent plus de joie. Chacun devient plus bavard que sa musique. Chacun a sa petite théorie pour justifier la prééminence de son instrument au sein du groupe, et ne se prive pas de la donner. On sent que c'est mal parti pour le jeu collectif. Et d'ailleurs, bientôt, la révolte gronde de derrière les pupitres. Le travail à peu près sérieux tourne au happening beatnik - à moins que le maestro ne parvienne à rétablir l'équilibre sur la balance de l'art... En mineur, pas reposant mais pas désagréable.

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Offret - Sacrifice (Le)

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Réalisé par : Andrei Tarkovsky (1932 - 1986)
En : 1986, Suède
Acteurs principaux : Erland Josephson (1923 - 2012)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /poésie en image
Caractéristiques : 149 mn, NB

Critique perso :

Voici l'homme. C'est un écrivain, un acteur, un poète, un philosophe. Un artiste, quoi. Et un père. Un nain entre les doigts de Dieu, un Dieu qui ne sait pas quoi faire de ses dix doigts. C'est un ange et une bête, un milieu entre tout et rien, comme disait l'autre. C'est le Christ et c'est Ponce Pilate. Le reste du monde, pendant ce temps, ne va pas bien. Peut-être même qu'il est déjà mort, que l'apocalypse est déjà passée par là. En désespoir de tout, l'homme n'a plus qu'à prier, et à renoncer. A tout, aussi, sauf à l'amour. Comme c'est à la fois un saint et un dingue, on ne sait pas trop s'il a sauvé le monde, ou s'il a tout crâmé pour rien -ce en quoi ce genre de films diffère sensiblement de ceux de Bruce Willis. Ce dialogue en altitude entre une grand nordiste et un grand slave est de ceux qui élèvent le regard vers le haut... très haut.

Wild at Heart - Sailor et Lula

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Réalisé par : David Lynch (1946 - )
En : 1990, USA
Acteurs principaux : Nicolas Cage (1964 - ), Willem Dafoe (1955 - ), Laura Dern (1967 - ), Freddie Jones (1927 - ), Sheryl Lee (1967 - ), John Lurie (1952 - ), Harry Dean Stanton (1926 - 2017)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 124 mn, couleur

Critique perso :

Sailor est un jeune homme à la peau de serpent, mais au sang (très) chaud. Lula est une délicieuse évaporée qui a toujours l'air d'étouffer dans ses mini-fringues. Ils brûlent rien qu'à se regarder. Leurs vieux n'aiment pas ça et, ayant crâmé plus d'un cable, leur collent quelques tueurs et mauvaises sorcières au derrière. Alors, les p'tits jeunes qui n'ont pas (non plus) froid aux yeux, font comme on fait chez eux : go west, santiags au plancher. Ce remake rock n' roll hot du Magicien d'Oz nous embarque encore au coeur des ténèbres américaines, à la rencontre des bouseux, des zombies et des fêlés. Au coeur du brasier, là où se cuisent les vieilles soupes et où se tordent les vieilles lames, là où se forgent les mythes nouveaux.

Salaire de la peur (Le)

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Réalisé par : Henri-Georges Clouzot (1907 - 1977)
En : 1953, France
Acteurs principaux : Yves Montand (1921 - 1991), Charles Vanel (1892 - 1989)
Genre(s) : les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 141 mn, NB

Critique perso :

Une petite communauté de losers de tous pays, égarés dans un trou de boue en Amérique centrale, se retrouve à glander dans le café du Marius local. Y'a même deux parigots qui y font connaissance. Ils auront tout le temps d'approfondir les présentations : les voilà embarqués (après plus d'une heure de glande, tout de même) dans un convoi exceptionnel à haut risque et haut gain potentiel -une traversée de l'enfer à 20km/h. Ce n'est pas tant la nature qu'il faut craindre, ici, que l'inhumaine industrie des hommes, leur capacité à créer des pièges plus grand qu'eux. Une histoire de mâles entre eux -des vrais, des durs, des ruisselants (de whisky, de sueur ou de pétrole, à votre goût), victimes avant l'heure de la mondialisation de la misère, celle qui mesure en dollars la valeur d'un mec.

Jalsaghar - Salon de musique (Le)

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Réalisé par : Satyajit Ray (1921 - 1992)
En : 1958, Inde
Genre(s) : en avant la musique /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Grandeur et décadence d'un aristocrate bengali en pleine déconfiture -mais avec les honneurs. Le salon de musique, c'est le joyau de son palais. Son coeur empoisonné. L'aristocrate, c'est souvent le cas, a aussi un voisin parvenu : aucune éducation, plein de sous. Lui est très fort pour gaspiller les siens en s'enivrant de fumée, de musique et d'orgueil -mais avec les honneurs, tel un Guépard ramolli. Il y a aussi là-dedans un parfum d'Autant en emporte le vent intimiste, ou de Titanic en chambre. Un Ray peut en cacher un autre. Ce serait dommage de rater ce train-là.

Salvatore Giuliano

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Réalisé par : Francesco Rosi (1922 - 2015)
En : 1962, Italie
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 123 mn, NB

Critique perso :

Salvatore Giuliano est un bandit, un autonomiste, un mafieux, un bon fils (en Sicile, tout cela est un peu mélangé). Toute sa brève -mais brillante- carrière, il l'a passée dans les 10kms qui entourent sa maison natale. Et, malgré une débauche de moyens, la police a eu toutes les peines du monde à l'y dénicher (en Sicile, ça se passe souvent comme ça). Ses méthodes sont pourtant connues au moins depuis Pépé le Moko : réseau de complicités indémêlable, corruptions, intimidations... Salvatore Giuliano, ce sont les autres qui en parlent le mieux. En fait, il n'en parlent pas avec leurs mots (en Sicile, ça ne se fait pas), mais avec leurs corps, leurs gestes et leurs gueules burinées par le soleil et la misère. Salvatore Giuliano est un aimant invisible : ce film est son portrait en pieds mais de dos, dans l'ombre, sans qu'aucun plan ne permette d'identifier son visage. Sec, brut, magnifique (en Sicile...).

Tsubaki Sanjûrô - Sanjuro

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Réalisé par : Akira Kurosawa (1910 - 1998)
En : 1962, Japon
Acteurs principaux : Toshirô Mifune (1920 - 1997)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /jeu dans le jeu /vers le soleil levant
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

Le samouraï free-lance mal léché du Garde du corps est de retour. Il traîne toujours là où il ne faut pas, en plein conciliabule de conspirateurs. Cette fois, c'est pour une histoire de corruption dont s'accusent mutuellement deux clans : celui d'un chambellan, et celui de son intendant. Mais le film est tout sauf une enquête policière. C'est plutôt une leçon de stratégie, une partie d'échecs grandeur nature, menée entre grands maîtres par apprentis interposés : d'un côté, une poignée de gamins, de l'autre une armée. Bien sûr, parce qu'il a le panache dans le sang, c'est avec les gamins que joue le samouraï. Mais, comme c'est aussi un incorrigible marginal, il est toujours à manger et à dormir quand les autres parlementent, debout quand ils se cachent, assis quand ils se précipitent au combat. Il est seul mais il a la ruse, la force des faibles. Et seuls les plus faibles et plus rusés encore (les femmes) sont capables de le désarmer. A la fin, il révèle sa vraie nature : une jolie fleur (de camélia, c'est ce que veut dire "Sanjuro") dans une peau de guerrier.

Sans toit ni loi

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 1985, France
Acteurs principaux : Sandrine Bonnaire (1967 - ), Yolande Moreau (1953 - )
Genre(s) : en France profonde /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Un sale matin, Mona est retrouvée morte de froid dans un fossé. Mona faisait la route, celle du sud, autour de Nîmes. Elle a croisé le petit monde des sédentaires du cru. Elle a partagé un peu de leur vie, leur a tendu le miroir de ce qu'ils ne sont pas, ou plus, ou n'oseront jamais être : libre... Elle les emmerde, elle n'est pas sympa, Mona. Plutôt hargneuse, rageuse : c'est que sa vie en dépend. Elle ne la préserve que tant qu'elle bouge, tant qu'elle suit la direction pointée par cette main tricottée sur son pull (la même main que dans Jacquot de Nantes, sans doute). Mona, c'est comme une nomade sans chameaux dans le désert du monde. Un faux docu qui est un vrai grand film, sur une autre façon d'être en vie, sur une autre façon de faire du cinéma.

Tian bian yi duo yun - Saveur de la pastèque (La)

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Réalisé par : Ming-liang Tsai (1957 - )
En : 2005, Taiwan
Acteurs principaux : Shiang-shyi Chen , Kang-sheng Lee (1968 - )
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 114 mn, couleur

Critique perso :

Lee est un jeune acteur porno désabusé, Chen une jeune fille romantique et solitaire. Ils vivent dans le même hôtel, mais pas dans le même monde. Depuis qu'ils se sont croisés dans d'autres films de Tsai Ming-liang, tout le monde sait qu'ils sont faits l'un pour l'autre. Mais dans les films de Tsai Ming-liang, ça peut reprendre un peu de temps. Dehors, c'est la canicule du siècle. L'eau, comme l'amour, est une denrée rare. Les postulants tourtereaux n'emploient visiblement pas la même stratégie pour s'en procurer et supporter la chaleur. Lee n'est de toute façon jamais très habillé, Chen ne sort pas trop de chez elle. Chen collectionne précautionneusemnt les bouteilles en plastique, Lee se baigne directement dans les réservoirs. Tous les deux ne demandent pas mieux que chanter sous la pluie (sous les parapluies de Cherbourg) -ce qu'ils font d'ailleurs, mais sans doute uniquement dans leurs rêves. L'amour, comme l'eau, ne se laisse pas facilement saisir. Chen a perdu la clé de sa grande valise, Lee les essaie toutes une à une patiemment. Il y a à boire et à manger, dans ce film, comme dans la pastèque. Mais en prenant son temps. Sa chair est triste, hélas.

Scandal in Paris (A) - Scandale à Paris

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Réalisé par : Douglas Sirk (1897 - 1987)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : George Sanders (1906 - 1972), Akim Tamiroff (1899 - 1972)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /la parole est d'or
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Voix off distinguée qui commente avec une brillante ironie les méfaits d'un vaurien : le procédé n'est pas complètement surprenant (c'est parce qu'on a vu avant Noblesse oblige et Barry Lyndon mais ce film-ci est plus ancien) ; il est toujours efficace. Nous voici donc partis pour la vie et les oeuvres du Lieutenant Rousseau, plus connu sous le nom de François Eugène Vidocq -qui n'était pas plus vrai que le précédent. Hollywood en fait une métaphore de l'éternel combat de l'homme contre ses propres démons (via St Georges et le dragon !)- mais sans se prendre trop au sérieux, heureusement. On soupçonne le récit, concentré sur 2 ans, d'être légèrement romancé -sans doute très en dessous de la vérité d'ailleurs ! George Sanders entame là sa brillante carrière de fripouille aristocratique. Mais, comme c'est lui le héros, il pousse pour une fois le bon goût jusqu'à s'amender in extremis pour les beaux yeux d'une marquise. On lui pardonne tout, même son honnêteté.

Foreign Affair (A) - Scandaleuse de Berlin (La)

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1948, USA
Acteurs principaux : Jean Arthur (1900 - 1991), Marlene Dietrich (1901 - 1992), Jonh Lund (1911 - 1992)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 116 mn, NB

Critique perso :

Berlin en 1945 : un peu comme un gros tas de légos dans lequel quelqu'un aurait mis un grand coup de pieds. Pas évident d'y caser une comédie. Mais tout n'est pas perdu, voici une délégation Républicaine du Congrès US qui débarque par les airs, avec pour mission de contrôler le (ou la, c'est pas très clair) moral(e) des troupes. Et, en son sein, une sénatrice de l'Iowa qui prend sa charge très à coeur, surtout depuis qu'elle est escortée d'un bel officier qui lui rappelle le pays. Côté moral(e), on ne demande pas trop leur avis aux autochtones, déjà trop heureux d'avoir survécu au gros coup de pied. Y'en a même qui sont encore debout, voire même sexy et bien habillée, et qui chante depuis toujours. Trop heureuse d'avoir pris très à coeur ses relations avec l'occupant, et particulièrement un bel officier qui n'est pas du pays. Le choc des cultures a déjà eu lieu (il a fait quelques millions de morts), il ne reste plus qu'à savoir laquelle est le côté pile, laquelle est le côté face, et de quel côté tombe la pièce quand c'est un bel officier qui la lance. Laquelle sauvera la face et le (ou la) moral(e) des troupes.

Science des rêves (La)

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Réalisé par : Michel Gondry (1963 - )
En : 2006, France
Acteurs principaux : Alain Chabat (1958 - ), Charlotte Gainsbourg (1971 - ), Gael Garcia Bernal (1978 - ), Miou-Miou (1950 - )
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Sur la scène de sa petite télé intérieure, Stéphane est un homme orchestre. Images, sons, cuisine : il sait tout faire. Dans la vraie vie, c'est pareil en un peu moins bien. Il est de retour à Paris auprès de sa maman, qui prétend lui avoir trouver un boulot "créatif" dans une boîte de calendriers. Dans ses rêves, il révolutionne le concept et subjugue ses collègues de travail. Dans la vraie vie, c'est pareil en un peu moins bien. Et puis, il croise sur son palier la charmante Stéphanie, sa voisine, sa semblable, sa soeur. Il la séduit en lui fabriquant sur mesure des machines mirobolantes. Mais on ne sait jamais trop dans quelle vie ses machines et ses charmes marchent correctement. Stéphane, il a le don d'être un magicien de lui-même : il arrive à se faire croire à peu près n'importe quoi. D'une non-histoire d'amour, il fait simplement une belle histoire. Dans la vraie vie, Michel Gondry aussi, en encore mieux.

Sciuscià

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Réalisé par : Vittorio De Sica (1902 - 1974)
En : 1946, Italie
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

Juste après Rome, ville ouverte, juste avant Le Voleur de bicyclette, juste en même temps que Paisa. Rome, qui a perdu la guerre -et tout le reste-, est devenue un repère de magouilleurs qui trafiquent leur misère avec les soldats américains. Ils sont deux amis, deux petits "shoeshine" des rues, qui ne rêvent que de cheval et de liberté. Ils ont le tort, comme tous les Olvidados du monde, de croire ce que leur racontent les adultes. Ils ont le temps d'un film pour apprendre comment fonctionne leur justice. Réquisitoire terrible et glaçant contre une société qui fait de ses petits Mozart des assassins.

Scener ur ett äktenskap - Scènes de la vie conjugale

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1975, Suède
Acteurs principaux : Bibi Andersson (1935 - ), Erland Josephson (1923 - 2012), Liv Ullmann (1939 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 167 mn, couleur

Critique perso :

Johan et Marianne, 10 ans de mariage, 2 enfants, couple modèle. Lui : parle bien, dit ne pas douter, se sent un peu enfermé. Elle : réservée, a peur de douter, ne se rend pas encore compte de son enfermement. En fait, le ver est déjà dans le fruit du paradis conjugal. A la première tentatrice venue, Johan se tire. Marianne pleure un peu, mais au fond c'est elle qui a la meilleure part. Ils se déchirent, se séparent, se revoient, se redéchirent. En fait, on ne les voit s'embrasser et se désirer qu'au plus fort de leurs scènes de ménage. Les corps ne veulent jamais la même chose que les paroles qui en sortent. Les années passent. Johan et Marianne, 10 ans de divorce, couple modèle. Un film de chambre avec vue sur les âmes par temps d'orage. Avec deux musiciens experts dans l'art du sentiment qui traverse un visage.

Salt of the Earth - Sel de la terre (Le)

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Réalisé par : Herbert J. Biberman (1900 - 1971)
En : 1954, USA
Genre(s) : pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Dans les années 70, des chanteuses MLF chez Agnès Varda rappelaient : "papa Hengel disait qu'à la maison, l'homme est le bourgeois, et la femme est le prolétariat". C'est le résumé de ce drôle d'ovni marxiste-féministe, brulôt culte et maudit -et tout sauf américain- réalisé par un arrière-cousin back-listé de Ken Loach. Il y est question d'une grève de mineurs (majoritairement mexicains) qui dure des mois, dans un bled près de la frontière dont le Shérif est un arrière-cousin de Georges Bush Jr. (avec des moustaches). Au moment où tout risque de foirer, les femmes s'en mèlent, sauvent le mouvement, l'honneur et leur dignité. Merci mesdames. Le prolétariat du prolétariat aura des lendemains qui chantent au MLF.

Senso

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Réalisé par : Luchino Visconti (1906 - 1976)
En : 1954, Italie
Acteurs principaux : Farley Granger (1925 - 2011), Christian Marquand (1927 - 2000), Alida Valli (1921 - 2006)
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 118 mn, couleur

Critique perso :

Elle adore l'opéra. Elle est belle comme une actrice, noble comme une héroïne et elle vit à Venise qui, même occupée par les autrichiens, est le plus beau décor du monde. Elle a un cousin qui résiste avec panache et un mari qui collabore avec veulerie. Autrement dit : elle est mûre à point pour un destin de Bovary de 1ère catégorie. Sûr qu'elle ne demanderait pas mieux que de s'abandonner au premier uniforme ennemi à jolie figure venu. Il vient, et il est beau. Ah l'amour... impossible, interdit si possible, c'est ce qui fait les meilleures histoires. Mais tout de même, il abuse un peu, des fois, le bel officier. Il a besoin de sous. Tout de même, il a l'art de faire avaler les couleuvres. Jusqu'au trognon, A l'opéra aussi, les (meilleures) histoires d'amour finissent mal (en général). Elle n'a pas tiré le bon rôle, elle n'a droit qu'au malheur et à l'humilation. Elle va tout perdre, elle a tout perdu. Sauf, comme les meilleures tragédiennes, l'art d'être à la hauteur de toutes les trahisons qu'elle s'est déjà faites à elle-même.

Seven Year Itch (The) - Sept ans de réflexion

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1955, USA
Acteurs principaux : Oskar Homolka (1898 - 1978), Marilyn Monroe (1926 - 1962)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

On pourrait faire une thèse sur les symboles sexuels chez Billy Wilder (ça a sans doute déjà été fait -sinon, j'ai raté ma vocation !) : mouvements involontaires du pouce, problèmes de tuyauterie et de bouteilles à déboucher, trappes cachées, démangeaisons, torticolis et courants d'air : un vrai artiste en allusions, sous-entendus et contournements de censure. Son héros préféré, l'Américain moyen, est ici encombré d'une imagination débordante et d'une bombe -pardon, d'une blonde- en voisine du dessus. En plus, il vient d'envoyer sa femme et son fils en vacances et, comme tous les Américains moyens, cultive avec soin son complexe de culpabilité. Le mythe est à portée de main, c'est beaucoup trop pour un Américain moyen.

Shichinin no samurai - Sept samouraïs (Les)

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Réalisé par : Akira Kurosawa (1910 - 1998)
En : 1954, Japon
Acteurs principaux : Toshirô Mifune (1920 - 1997), Takashi Shimura (1905 - 1982)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 160 mn, NB

Critique perso :

Pour éviter le pillage de leur future récolte, un village de paysans se résoud à embaucher des samouraïs, si possibles efficaces et bon marchés. Dans le Japon du XVIème siècle, c'est apparemment toute une histoire : ces hommes-là appartiennent à des mondes différents. Au terme d'un casting serré, sept spécimens aux pedigrees et aptitudes divers sont recrutés. La résistance s'organise avec bonne volonté (côté paysan) et compétence (côté samouraïs). Ce serait présomptueux de ma part de prétendre les connaître tous par leur nom, mais on les identifie rapidement très bien. Plus une dizaine de villageois, pas si différents de ceux de notre plus mythique village gaulois (celui qui résiste, justement). Fresque militaire épique et chronique paysanne burlesque, cette guerre à échelle humaine a le bon goût de laisser le dernier mot à la vie qui continue. Chapeau (très) bas.

Sjunde inseglet (Det) - Septième sceau (Le)

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1957, Suède
Acteurs principaux : Bibi Andersson (1935 - ), Gunnar Björnstrand (1909 - 1986), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

Ca se passe à une époque reculée, au tournant d'un millénaire, juste avant la fin du monde. La Mort fait sa tournée mais elle est provisoirement retardée par une partie d'échecs avec un chevalier de retour des croisades (Max le grand, à qui ça a dû faire drôle de se retrouver de nouveau, un millénaire plus tard, devant un type menaçant avec un capuchon noir sur la tête). Le chevalier en sursis en profite pour tenter, une dernière fois, de comprendre quelque chose au monde qui l'entoure et au silence de Dieu. Dieu, justement, il se fait aussi bruyamment attendre par des pénitents qui fuient la peste et par des soldats qui brûlent une sorcière. Mais il se fait tendrement entendre d'un troubadour en roulotte. Un film qui ose allier le symbolisme mystique, le trouble métaphysique et le burlesque de foire, sans jamais tomber dans le ridicule. Presque aussi grand que les sujets qu'il traite.

Serious Man (A)

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Réalisé par : frères Coen
En : 2009, USA
Acteurs principaux : Fred Melamed (1956 - ), Michael Stuhlbarg (1968 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 106 mn, couleur

Critique perso :

Années 50. Larry Gopnik a toujours été un serious man : bon mari, bon père, bon prof (de physique à la fac), bon soutien de famille (pour son frère largué), bon juif… bref, parfait bon américain moyen de ville moyenne. Et voilà que tout ce qu’il a patiemment construit au cours de sa bonne vie semble se dérober : sa femme se tire avec un collègue bien plus âgé, ses enfants lui échappent, ses étudiants contestent leurs notes, ses voisins se comportent bizarrement, sa santé vacille… En fait, tout devient incertain et ambigu, et même les rabbins n’y peuvent rien. Pourtant, décrypter les signes et les équations, c’est ce que la science et la religion lui ont toujours garanti. Capter les ondes du ciel, avec la Torah ou les antennes de son toit, ça a toujours semblé facile. Mais là, ça coince. Maintenant, c’est le Principe d’incertitude, qu’il enseigne dans ses cours, qui prend le dessus. On ne sait toujours pas si le chat (ou le dibbouk) de Schrödinger est mort ou vivant, c’est dire. Et de la théorie à la pratique, il y a décidément une vie. Et un film. Drôle et profond.

Sex, Lies, and Videotape - Sexe, mensonges et vidéo

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Réalisé par : Steven Soderbergh (1963 - )
En : 1989, USA
Acteurs principaux : Peter Gallagher (1955 - ), Andie MacDowell (1958 - ), James Spader (1960 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Un mari riche, beau, à qui tout réussit -même ses infidélités. Une parfaite épouse bourgeoise qui n'aime pas qu'on la touche. La soeur, artiste sur les bords, qui couche avec le mari. Un doux copain d'enfance du mari, un peu paumé, qui n'a plus envie de toucher. Le sexe, ce sont les non pratiquants qui en parlent le mieux -les autres ont mieux à faire. Ce sont les seuls, aussi, à savoir qu'ils ne vont pas bien -les autres ont autre chose à penser. Voilà un jeune cinéaste qui nous dit qu'il est temps de ne plus passer autant de temps à mater des images, et qui soigne sa névrose avec celles de ses personnages. On lui souhaite toutes les névroses de la terre.

Shanghai Gesture (The)

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Réalisé par : Josef von Sternberg (1894 - 1969)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Eric Blore (1887 - 1959), Marcel Dalio (1900 - 1983), Walter Huston (1884 - 1950), Victor Mature (1915 - 1999), Gene Tierney (1920 - 1991)
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

A l'entrée : un cerbère enturbanné à poils longs et une enseigne lumineuse ("never closes"). A l'intérieur : une foule cosmopolite agglutinée sur des paliers en cercles concentriques jusqu'à une table de casino. Bienvenue en enfer... La patronne s'apelle Mother Gin Sling's (ça aurait très bien pu être Mother Whisky Soda) et, à en juger par sa coiffure, l'intérieur de son crâne a besoin de ventilation. On mettra du temps à comprendre pourquoi elle en veut tant à sa nouvelle cliente, la distinguée Poppy, et pourquoi elle la pousse dans les coussins d'un nonchalant à tarbouche qui se fait appeler Dr. Omar. Elle mettra encore plus de temps à comprendre que ce n'était peut-être pas une si bonne idée que cela... L'histoire est tordue à souhait, les personnages retors, le décor somptueux (et vice-versa). Qu'importe la vraisemblance : même en smoking et en très bonne compagnie, on ne s'évade pas si facilement du petit enfer portatif coincé dans sa mémoire.

Siu lam juk kau - Shaolin soccer

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Réalisé par : Stephen Chow (1962 - )
En : 2001, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Stephen Chow (1962 - )
Genre(s) : animation /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pour petits et grands enfants /vers le soleil levant
Caractéristiques : 87 mn, couleur

Critique perso :

C'est une sorte de Trézeguet à moustache : un soir de finale, il a foiré le pénalty qui tue. Les supporters n'ont pas pardonné à sa jambe d'avoir flanché... Mais la défunte jambe en or s'est, semble-t-il, réincarnée quelques années plus tard dans la chaussure (pourtant pas très fraîche) d'un SDF adepte du Kung-fu. Le Kung-fu, c'est une discipline exigeante et efficace, un truc capable de changer la vie. Le seul probème, semble-t-il, c'est qu'il ne nourrit pas son homme (ni sa femme). Pourtant, avec une équipe de tocards bien initiés à ses mystères, tous les espoirs de revanche sont permis... Tex Avery s'est, semble-t-il, converti à Bouddha et réincarné quelque part en Chine à la fin du XXème siècle. Il a bien fait.

Sharasôju - Shara

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Réalisé par : Naomi Kawase (1969 - )
En : 2003, Japon
Acteurs principaux : Naomi Kawase (1969 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /poésie en image /vers le soleil levant
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Au début, ils sont deux, deux garçons qui se ressemblent et qui jouent ensemble. C'est comme dans un rêve. Ils se courent après dans le labyrinthe des rues du quartier, et tout à coup il n'y en a plus qu'un seul. C'est tout ce qu'on verra de la disparition de l'autre. Cinq ans plus tard, le rêve est passé, le fantôme hante encore. Le garçon restant a grandi, sa maman est enceinte, la voisine est jolie. Papa anime un comité pour relancer l'organisation d'une fête dans les rues du quartier, mi-carnaval mi-cérémonie ancestrale. Exorcisme et célébration. On déambule, on cause, on se prépare à la fête. On apprend un peu du passé, on prépare un peu l'avenir. En douceur et en longs plans séquences, ça heurte et ça coule, c'est fluide et ça accroche. C'est à peu près tout ce qu'il y a dans ce film et c'est énorme. La vie, l'amour, la mort et leurs labyrinthes, à l'échelle d'un quartier, d'une vie, du monde. Enorme et en douceur.

Shining (The)

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1980, USA
Acteurs principaux : Jack Nicholson (1937 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Comme dans la Nuit du chasseur, le loup, on le voit arriver de haut, et de loin. Il s'appelle Jack, écrivain, sourcils menaçants ; il vient de dégotter un petit job peinard : jouer au gardien d'hiver dans un hôtel paumé. Il y emmène sa femme et son fils. Faut bien le dire : dans ce film, il ne se passe à peu près rien. L'hôtel est un labyrinthe aux plafonds hauts, aux tapis seventies recouvrant une splendeur passée. C'est plein de vide et de musique stessante. Certes, quelques fantômes errent dans les couloirs (et dans la chambre 237). Mais c'est surtout dans le labyrinthe bas de plafond de ses pensées que Jack se perd. Une seule question demeure sans réponse : qui lui a ouvert la porte ?

Short Cuts

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Réalisé par : Robert Altman (1925 - 2006)
En : 1993, USA
Acteurs principaux : Peter Gallagher (1955 - ), Jennifer Jason Leigh (1962 - ), Jack Lemmon (1925 - 2001), Andie MacDowell (1958 - ), Frances McDormand (1957 - ), Julianne Moore (1960 - ), Tim Robbins (1958 - ), Madeleine Stowe (1958 - ), Tom Waits (1949 - )
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 187 mn, couleur

Critique perso :

Ca commence par une campagne de projection massive d'insecticide par hélicos (façon Apocalypse Now) et ça finit par un tremblement de terre. Bref, on est un peu comme dans Le Septième sceau : en sursis très provisoire de la colère du ciel. Que font les humains de L.A., en attendant ? Pas mal de bêtises. Ils s'agitent, s'énervent, vont à la pêche aux truites et aux coeurs, pleurent leurs amours perdues. Le temps de quelques heures, des secrets bien noyés referont surface, le petit Finnegan ne se réveillera pas... Altman met à nu ses personnages : depuis Nashville, on ne l'avait jamais vu aussi en forme avec autant de monde. Son incroyable montage réussit à ménager de multiples passerelles entre de multipes histoires. Plein de petites choses qui finissent par faire un grand film.

Show Boat

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Réalisé par : George Sidney (1916 - 2002)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Joe E. Brown (1892 - 1973), Ava Gardner (1922 - 1990), Agnes Moorehead (1900 - 1974)
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

Un steamboat sur le Mississipi sert de salle de spectacle flottant pour comédies musicales à volants et à frou-frou. Papa est capitaine-metteur en scène, maman gère les coulisses. La vedette a les beaux yeux d'Ava (mais la voix de quelqu'un d'autre). Un dandy errant et fauché fait semblant de se prendre de passion pour la fille du patron et tout le monde y croit, même lui. A peine débarqué dans l'histoire, il embarque avec la troupe. Dehors, un vieux black chante Ol' man river. La vie, même en volants et en frou-frou, c'est pas drôle tous les jours. Sidney, spécialiste de ballets nautiques, a bien du mal à rester à flot avec cette adaptation très décorative d'un spectacle de Broadway qui échoue à inspirer la moindre émotion. On fait pas que semblant de s'emmerder.

Angel Face - Si doux visage (Un)

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Herbert Marshall (1890 - 1966), Robert Mitchum (1917 - 1997), Jean Simmons (1929 - 2010)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Elle est jeune, belle, riche -très riche. Une enfant gâtée. Il est beau, flegmatique et pauvre -très pauvre. Un postulant au rêve américain, qu'il verrait bien sous la forme d'un petit garage rien qu'à lui. Dès la première rencontre, ils s'échangent une baffe : coup de foudre. Elle s'intéresse au piano, aux échecs et à la mécanique. Elle a des petits problèmes de famille. Elle adore foutre la merde. Il n'a que sa carrure d'athlète et sa bonne volonté. Il est un peu mou et hésitant. Il ne pas voit pas bien ce qui se cache derrière les sourires. Ils sont faits pour s'entendre, c'est-à-dire associer leurs intérêts mal compris. Manipulations, jeux de dupes et névroses tapies sous les tapis... Un grand film noir, c'est noir.

Smoking

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1993, France
Acteurs principaux : Pierre Arditi (1944 - ), Sabine Azéma (1949 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 140 mn, couleur

Critique perso :

De l'influence d'une petite clope (Smoking or No Smoking ?) -ou d'une petite parole en l'air- sur le déroulement d'une vie. Ou bien : la Théorie du Chaos appliquée au destin des hommes, dans un théâtre en plein air déguisé en campagne anglaise. 9 personnages, 2 acteurs en majesté, 3 ou 4 décors et le regard muet d'un chat égyptien sans doute échappé du Portrait de Dorian Gray : une multitude de combinaisons possibles. Pour les explorer, le récit est un sentier aux chemins qui bifurquent (et, en bonne informaticienne que je suis, j'ajouterai que l'arbre des possibles est parcouru en "profondeur d'abord"). Cette variation-ci est centrée sur un couple BCBG au bord de la névrose : Celia et Toby Teasdale. Elle a choisi l'option conformisme fleuri, lui le rôle du bougon imbibé. En embuscade : deux outsiders qui attendent que passe l'ascenceur social, façon Tout ce que le ciel permet pour Lionel Hepplewick, façon My Fair Lady pour Sylvie Bell. On suit, comme dans un feuilleton qui bafouille, les aléas de leurs amours, de leurs amitiés, de leurs projets. En fait, c'est simple : ou bien on aime, ou bien on adore.

Sogni d'oro

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Réalisé par : Nanni Moretti (1953 - )
En : 1981, Italie
Acteurs principaux : Laura Morante (1956 - ), Nanni Moretti (1953 - ), Remo Remotti (1924 - 2015)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Michele Apicella -toujours lui !- a (un peu) grandi. Il a fait un film sur la jeunesse (qui ressemble sans doute beaucoup à Ecce bombo), et est invité à en parler lors de projections publiques. Un emmerdeur a le chic d'y venir toujours lui poser la même question emmerdante (en gros : en quoi votre film emmerdant intéresse-t-il le peuple italien, le vrai ?) auquel il mettra le temps du film à répondre (en cinéma). Ca y est, donc, Michele a réalisé son rêve, il est un cinéaste, un vrai. Il vit encore avec sa maman tout en préparant son prochain film sur Freud et son complexe d'Oedipe, donc il se soigne. Il est aussi harcelé par deux frères-postulants assistants qui ne l'assistent pas beaucoup. Et enfin, il a des collègues-concurrents pas avares de compromissions qu'il peut affronter à sa guise et à armes égales (enfin presque). Il n'est jamais aussi bon qu'avec ses ennemis (lui-même et les autres), Michele, et qu'avec sa meilleure arme (en cinéma)…

Törst - Soif (La) / Fontaine d'Arethuse (La)

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1949, Suède
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 83 mn, NB

Critique perso :

C'est l'histoire d'un couple qui n'arrive pas à vivre au présent : chacun ressasse dans son coin ses souvenirs avec d'autres - pas particulièrement reluisants pourtant, les souvenirs - et les échanges entre eux ressemblent plus à des monologues alternés qu'à de vrais dialogues. Le huis clos d'une chambre d'hotel ou d'un compartiment de train ne fait rien pour arranger les choses. Malgré tout, ils reconnaissent eux-mêmes qu'ils préfèrent vivre dans l'enfer du couple que dans celui de la solitude. Elles sont insupportables et touchantes, ces petites marionnettes perdues dans leurs désirs, comme de perpétuels insatisfaits qui meurent de soif au bord d'une rivière.

Touch of Evil - Soif du mal (La)

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Réalisé par : Orson Welles (1915 - 1985)
En : 1958, USA
Acteurs principaux : Marlene Dietrich (1901 - 1992), Charlton Heston (1924 - 2008), Janet Leigh (1927 - 2004), Mercedes McCambridge (1916 - 2004), Akim Tamiroff (1899 - 1972), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Ca se passe quelque part sur la frontière entre le bien et le mal, le vrai et le faux, le noir et le blanc, le nord et le sud. Une bombe explose dans une voiture en marche. Deux flics sont sur les dents : le modèle mexicain : incorruptible, athlétique, jeune marié. Et le modèle américain : adipeux-avachi, ex-alcoolo reconverti dans les sucreries, qui ne croit qu'aux intuitions que lui donne sa jambe malade. Et Janet Leigh qui, décidément, a des problèmes dans les motels. Et Marlene Detriech qui, décidément, a tout compris aux hommes depuis toujours. Le premier plan (environ 3mn) est mythique. Mais le reste le vaut largement, avec tous ces cadrages impossibles, à hauteur de géant ou de ver de terre. Décidément un chef d'oeuvre.

Solyaris - Solaris

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Réalisé par : Andrei Tarkovsky (1932 - 1986)
En : 1972, Russie
Acteurs principaux : Donatas Banionis (1924 - 2014)
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique /poésie en image
Caractéristiques : 165 mn, NB/couleur

Critique perso :

Dans un futur indéterminé (sans doute lointain), l'homme est resté le même : avide de connaissances sur les autres, ignorant de lui-même. Il cherche à établir le Contact avec une mystérieuse planète-cerveau qui n'en fait qu'à sa tête : Solaris. Le docteur Kris Kelvin est envoyé en reconnaissance. Il ne fera face qu'à ses souvenirs, à sa mauvaise conscience et à ses doutes - à tout ce qui est indestructible en lui. L'expérience scientifique tourne donc au voyage intérieur, le récit de science fiction au parcours philosophique et spirituel (puisque l'intérieur et l'extérieur s'échangent et se répondent), capté par une caméra majestueuse. Pour faire progresser le genre humain Tarkovsky croit visiblement plus à l'art (peinture, littérature) qu'à la science, plus à l'amour et au pardon qu'à la technique. A la famille, aussi. Pas si loin que cela de 2001, l'Odyssée de l'espace (qui a peut-être bien pompé son dénouement, le bébé-planète, dans le bouquin à l'origine de Solaris) dans le domaine du Grand art mis au service d'un Grand Mystère.

Soylent Green - Soleil vert

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Réalisé par : Richard Fleischer (1916 - 2006)
En : 1973, USA
Acteurs principaux : Joseph Cotten (1905 - 1994), Charlton Heston (1924 - 2008), Edward G. Robinson (1893 - 1973)
Genre(s) : c'était demain /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 97 mn, couleur

Critique perso :

New-York 2022, version trash : surpollution, surpopulation, décadence généralisée. Quelques nantis occupent les apparts de luxe (blonde comprise dans le loyer), une multitude de gueux squattent les rues. Si besoin, les émeutiers se ramassent à la pelleteuse. Au milieu : les flics. Ils jouissent de leur présomption d'impunité pour améliorer l'ordinaire. Faut dire : pas fameux, l'ordinaire, quand le mieux qu'on puisse espérer est un "soleil vert" de plus, sorte de barre de céréales énergétique -mais c'est pas des céréales. Un des anciens patrons de l'usine est mort. Nous suivons l'enquête nonchalente du flic préposé à l'affaire, et la descente aux enfers climatisés du recyclage universel de son vieil adjoint. Quelques scènes mémorables, une atmosphère délétère : un drôle de film du futur qui ressemble au passé -à moins que ça ne soit le contraire.

Höstsonaten - Sonate d'automne

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Réalisé par : Ingmar Bergman (1918 - 2007)
En : 1978, Suède
Acteurs principaux : Ingrid Bergman (1915 - 1982), Gunnar Björnstrand (1909 - 1986), Erland Josephson (1923 - 2012), Liv Ullmann (1939 - )
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 89 mn, couleur

Critique perso :

C'est l'histoire d'une mère qui n'a jamais supporté d'avoir des enfants moins brillants qu'elle. C'est l'histoire d'une fille qui n'a jamais supporté d'avoir une mère plus brillante qu'elle. La mère est une pianiste de renommée mondiale, toujours en tournée planétaire. La fille est une modeste journaliste et l'épouse d'un pasteur -gentil le pasteur. Il y a aussi une autre fille, clouée sur un fauteuil roulant, le corps tordu d'une douleur qu'elle a bien du mal à formuler. On est dans la maison du pasteur. La mère et la fille, toujours en représentation d'elles-mêmes, sont sur-cadrées par les cloisons de la maison, dont toutes les pièces finissent par ressembler à une scène de théâtre. Elles se parent de couleurs complémentaires. La nuit blanche-règlement de comptes peut commencer. La rencontre des deux grands Bergman de l'histoire du cinéma fait de sombres et éclatantes étincelles.

Sol del membrillo (El) - Songe de la lumière (Le)

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Réalisé par : Victor Erice (1940 - )
En : 1992, Espagne
Genre(s) : culte ou my(s)tique /docu (plus ou moins fiction) /poésie en image
Caractéristiques : 133 mn, couleur

Critique perso :

Le héros de ce film est un cognassier, un drôle d'arbre qui donne des coings, ces espèces de gros citrons pas très bons mais qui font de bonnes confitures. Un cognassier dans un jardin, qui prend la pose pour un peintre. Et le peintre, c'est Antonio Lopez, artiste géomètre. Sa technique à lui consiste à tendre des fils, poser des marques, mesurer, quadriller. Il regarde beaucoup et il écoute aussi pas mal ce que les autres lui disent. A son vieux pote grande perche, il dit qu'il va baisser la ligne d'horizon. A une chinoise amatrice d'art, il détaille la fonction de sa petite installation. A sa femme -peintre aussi-, il raconte ses rêves. A côté, des maçons polonais montent un mur. Tout ça, ça fait des humains qui se coltinent avec la nature. Pas morte du tout, la nature, même si c'est ce que le tableau est censé représenter : la lumière change et le cognassier fait des caprices, il penche, ses fruits tombent. Pas si simple de faire le portrait d'un arbre, et le portrait d'un homme, et le portrait d'un film. Ce serait comme le making of d'un tableau qui n'existe pas, comme le souvenir d'un beau geste inutile.

Duck Soup - Soupe au canard (La)

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Réalisé par : Leo McCarey (1898 - 1969)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Louis Calhern (1895 - 1956), Margaret Dumont (1889 - 1965), Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961), Zeppo Marx (1901 - 1979)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 70 mn, NB

Critique perso :

Ca commence avec une riche rombière qui réalise notre voeux le plus secret : imposer Groucho à la tête de l'Etat. Ca continue avec un chef d'Etat voisin qui doit faire face à notre pire cauchemar : confier à Harpo et Chico une mission délicate... On passe les détails (dommage, c'est ce qu'il y a de meilleur, les détails), tout finit comme prévu : une guerre stupide et abracadabrant-gigantesque entre les deux Etats. Entre-temps, une leçon fondamentale : nous sommes tous des Groucho Marx. On est dans un autre monde possible, affranchi de la logique et du sérieux. Dans ce monde possible-là, l'année 1933 restera un excellent cru.

Suspicion - Soupçons

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1941, USA
Acteurs principaux : Joan Fontaine (1917 - 2013), Cary Grant (1904 - 1986)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

Tout commence dans un train : début de la romance. Tout continue dans un décor de cottage anglais avec vent dans les chapeaux, chevaux et bal du soir : mariage. Elle s'appelle Lina, il s'appelle Johnnie. Mais, à partir de là, on n'est plus dans le même film. Lina, qui ne voit pas bien de près sans ses lunettes, commence tout de même à trouver que son cher époux exagère. Est-il irresponsable, menteur, voleur, escroc voire plus (si affinités monétaires) ? La maison de Lina -et sa vie- ressemble de plus en plus à une toile d'araignée de lumières et d'ombres. Un tournage en sentiments subjectifs, avec dénouement final trop beau (comme Johnnie) pour être honnête.

Akitsu onsen - Source thermale d'Akitsu (La)

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Réalisé par : Kiju Yoshida (1933 - )
En : 1962, Japon
Acteurs principaux : Mariko Okada (1933 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pas drôle mais beau /vers le soleil levant
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

Dans le Japon de 1945, c'est pas la joie. Shûsaku, survivant déprimé et tuberculeux, est décidé à faire de lui-même une victime collatérale de plus. Il trouve un endroit charmant pour ça : une charmante auberge au bord d'une source thermale. Mais la fille de la maison est aussi charmante et le voilà requinqué. Ce sera son havre, son refuge intermittent en cas de coups de cafard pendant les 17 ans qui viennent. Elle, ce sera sa maîtresse à temps très partiel, pendant à peu près la même période. L'homme vit dans le béton, la femme est une source. L'homme est veule, la femme ne sait qu'attendre, se sacrifier et pleurer. Et pas qu'au Japon de l'après-guerre. En fait, les vrais héros de l'histoire sont Eros et Thanatos, qui jonglent avec les destins de chacun, comme se tressent et se courent après les deux magnifiques thèmes musicaux du film. Sublime mélo, beau comme du Sirk et triste comme du Ophüls.

Spartacus

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1960, USA
Acteurs principaux : Tony Curtis (1925 - 2010), Kirk Douglas (1916 - ), John Ireland (1914 - 1992), Charles Laughton (1899 - 1962), Laurence Olivier (1907 - 1989), Jean Simmons (1929 - 2010), Peter Ustinov (1921 - 2004)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /à l'antique /épique pas toc
Caractéristiques : 184 mn, couleur

Critique perso :

Il nait dans une famille modeste, au-delà de la Méditerranée, pendant l'occupation romaine. Pas mal d'années dans l'ombre avant de se faire remarquer. Une parole de liberté. Il trainera des foules derrière lui et mourra crucifié. Non non, ce n'est pas lui, c'est Spartacus : faut s'attendre à un peu plus de sang parce qu'il est d'abord esclave, puis apprenti gladiateur. Un professionnel de la guerre, formé à la meilleure école : celle de la haine et de l'oppression. Tellement bon qu'il réussit à retourner le fer contre ses exploiteurs -ces romains corrompus, débauchés et sans scrupules, évidemment. Il sera pourtant vaincu par de plus grands barbares encore : ceux qui bataillent au Sénat avec leur langue. Parce que ce pouvoir là est encore plus redoutable. Haute tenue pour un péplum.

Spider-man

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Réalisé par : Sam Raimi (1959 - )
En : 2002, USA
Acteurs principaux : Willem Dafoe (1955 - ), Kirsten Dunst (1982 - ), Tobey Maguire (1975 - ), Cliff Robertson (1923 - 2011)
Genre(s) : New York - New York /animation /conte de fées relooké /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 121 mn, couleur

Critique perso :

A priori, c'était pas trop mon style (j'avais acheté le DVD pour mon neveu, mais il l'avait déjà...). Mais cette n-ème variation cinématographique sur le thème du super-héros pourrait bien, finalement, être un peu moins gratuite que beaucoup d'autres. La métamorphose de Peter Parker en Spider-man est clairement une métaphore de l'adolescence. Les difficultés qu'il rencontre sont celles de son entrée dans le monde des adultes, et rendent sa maladresse touchante. La morale (avec le pouvoir, viennent les responsabilités) n'est pas bouleversante ; on la trouvait déjà dans Qu'elle était verte ma vallée. Mais le film raconte surtout les difficultés d'un jeune homme à "tisser des liens" (sociaux) avec ses semblables et à se sentir solidaire de leur monde. New York, on commence à le savoir, se prète merveilleusement bien au paradoxal rêve aérien de ce petit animal humain, trop humain...

Magnificent Ambersons (The) - Splendeur des Amberson (La)

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Réalisé par : Orson Welles (1915 - 1985)
En : 1942, USA
Acteurs principaux : Anne Baxter (1923 - 1985), Joseph Cotten (1905 - 1994), Tim Holt (1918 - 1973), Agnes Moorehead (1900 - 1974)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /vive la (critique) sociale ! /épique pas toc
Caractéristiques : 88 mn, NB

Critique perso :

Les Amberson sont les rois de leur quartier. Ils vivent dans une maison qui ressemble à une cathédrale gothique. Mais, dès le début du film, leur splendeur s'écrit déjà au passé antérieur : le père a été riche, la fille capricieuse. Elle a préféré à son fiancé fantasque un mari à tête de comptable. Leur fils est devenu le vieux con le plus jeune de ville. Le récit au présent se focalise sur sa confrontation avec l'ex-fiancé fantasque, de retour au pays, en passe de devenir le vieux monsieur le plus jeune de la ville. On dirait la vieille histoire du chêne et du roseau, dans la tempête de l'histoire. Les personnages de cette histoire entretiennent d'ailleurs tous avec un grand raffinement l'art de se gâcher mutuellement la vie -et de rater la leur. Les acteurs sont suivis à la culotte, par une caméra à hauteur de nombril. Tourné par Welles (Mr. Amberson, c'est lui ?), relifté par Wise : on dirait un grand fim aux ailes coupées.

Stardust Memories

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1980, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Marie-Christine Barrault (1944 - ), Charlotte Rampling (1946 - ), Tony Roberts (1939 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Sandy Bates, clnéaste américain, la quarantaine. Fut drôle en début de carrière, mais plus au mieux de sa forme. Assailli par les chasseurs d'autographes et les groupies amoureuses, traqué par les fans, les exégètes et les extras-terrestres, il déprime sec (et pas toujours sec, d'ailleurs). Il ne sait plus où donner de la tête et du désir. Il a pourtant toujours excellent goût dans le choix de ses muses-actrices (même s'il a décidément un faible pour les névrosées), mais elles n'ont pas toujours le bon goût d'avaler tous ses atermoiements. Alors, il se verrait bien jouer son propre rôle dans son propre film (même si le seul qui lui plairait vraiment, c'est celui de Dieu). Il imagine un truc un peu surréaliste, sous influence italienne années 60. Pas du tout indigne du maestro du genre, sur le mode désespérément drôle et drôlement désespéré.

Stavisky...

stavisky.jpg

Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1974, France
Acteurs principaux : Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Charles Boyer (1899 - 1978), Gérard Depardieu (1948 - ), Anny Duperey (1947 - ), Michael Lonsdale (1931 - ), François Périer (1919 - 2002), Claude Rich (1929 - 2017)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Nom : Stavisky, prénom : Affaire… En général, on en a vaguement entendu parler, mais de là à savoir exactement de quoi il s’agit… D’ailleurs, même à la fin du film, c’est pas sûr qu’on en sache beaucoup plus. Récap : en 1934, un escroc multicarte meurt dans des circonstances pas claires, ce qui provoque des émeutes et fait tomber un gouvernement. Resnais se concentre sur les derniers mois de la vie du bonhomme et lance le compte-à-rebours de sa mort annoncée. Ce qui l’intéresse, c’est l’agent multiple : français de l’étranger, juif à un moment où c’était pas hyper recommandé, dépressif enjoué, comédien en perpétuelle quête d’un nouveau rôle, arnaqueur multirécidiviste fidèle en amitié (et en amour). Insaisissable, comme l’argent qui apparemment lui file entre les phalanges. Comme le montage, qui joue à saute-mouton avec le temps. Stavisky, c’est une sorte de catalyseur et de révélateur d’une période passablement agitée (Trotsky fait un caméo dans le film). Un mystère, un oignon dont on n’atteindra jamais vraiment le coeur. Un homme-film.

Strada (La)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1954, Italie
Acteurs principaux : Richard Basehart (1914 - 1984), Giulietta Masina (1920 - 1994), Antony Quinn (1915 - 2001)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Gelsomina est une simplette aux grands yeux vendue par sa mère à Zampano, artiste de foire misérable. Sa petite vie sera tiraillée entre cette brute qui n'en finira jamais de briser des chaînes devant le maigre public des villages italiens qu'ils traversent, et "le fou", un funambule au costume d'ange - entre la terre et le ciel, en somme. La route, c'est autant les kilomètres avalés par leur roulotte à moteur que l'espace qui reste à parcourir à ces êtres pour se rencontrer un jour. Aux dépens de sa vie et avec ses faibles moyens (en gros : trois plans de tomate et un air de trompette), Gelsomina réussira à faire germer un embryon d'âme dans la grande carcasse solitaire du colosse aux chevilles d'argile. Les coulisses amères du cirque de la vie, le plus petit et le plus misérable, donc le plus sublime.

Stromboli

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Réalisé par : Roberto Rossellini (1906 - 1977)
En : 1949, Italie
Acteurs principaux : Ingrid Bergman (1915 - 1982)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 107 mn, NB

Critique perso :

Karen est très belle. Enfermée dans un camp de prisonniers, à la fin de la guerre, elle joue sa vie sur un coup de dé. Pas le droit d'émigrer en Argentine ? Elle épouse donc le bon gars qui la drague, de l'autre côté des barbelés, et le suit à Stromboli. Sauf que Stromboli, c'est tout sauf une retraite paisible. C'est une île et un volcan. A Stromboli la vie est rude, la nature sauvage, les traces humaines toujours menacées et provisoires. Les seules ressources y sont la pêche aux thons (qui donne lieu à une séquence documentaire mémorable) et ce qu'envoie la famille partie en Amérique. A Stromboli, la vertu essentielle est la modestie. Pas le fort de Karen, d'autant que son bon gars de mari se révèle tout juste un bon gars. Elle déprime sec. Elle vivra sa leçon de dépouillement comme un chemin de croix. Pour nous faire croire que la fin et un happy end, il faudra rien moins qu'un miracle (comme dans Voyage en Italie). Le cinéma, de toute façon, peut nous faire croire à tout.

Vertigo - Sueurs froides

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1958, USA
Acteurs principaux : Kim Novak (1933 - ), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 128 mn, couleur

Critique perso :

Une version possible : un homme est obsédé par une femme, parce qu'elle ressemble à une autre, une qui l'avait fait tourner en rond et en bourrique dans les rues de San Francisco avant de se suicider (parce qu'elle-même était obsédée par une autre femme morte un siècle auparavant). Une autre version (pas plus simple) : les trois femmes n'en font qu'une, ou peut-être deux. Une autre : c'est l'homme qui a tout inventé - ou tout rêvé (comme dans Laura), ou tout mis en scène... Vertige de l'amour et de la culpabilité, spirale du temps et du désir : bienvenue au pays des fantasmes de Mr. Hitchcock ! On y tutoie des abîmes dangereux et sublimes, souvent blondes : très très haut dans mon Panthéon personnel.

On the Waterfront - Sur les quais

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Réalisé par : Elia Kazan (1909 - 2003)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : Marlon Brando (1924 - 2004), Karl Malden (1912 - 2009), Eva Marie Saint (1924 - )
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Sur les quais de la Nouvelle Amsterdam, y'a des dockers qui triment. Y'en a d'autres qui commandent. Et y'a ceux qui encaissent.
Dans les rues de la Nouvelle Amsterdam, y'a des dockers qui trainent. Y'en a qu'on retrouve morts et personne sait pourquoi. Y'a aussi un curé qui voudrait bien savoir. Pourquoi.
Sur les toits de la Nouvelle Amsterdam, y'a des pigeons qu'attendent qu'un docker les nourisse. Ou bien qu'on les libère.
Et puis, sur les quais de la Nouvelle Amsterdam, y'a Terry le beau gosse, jeune retraité des rings. C'est l'frère d'un magouilleur, mais il a le coeur pur. La conscience pas tranquille.
Terry, le gentil traitre...

Design for Living - Sérénade à trois

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Réalisé par : Ernst Lubitsch (1892 - 1947)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Gary Cooper (1901 - 1961), Miriam Hopkins (1902 - 1972), Edward Everett Horton (1886 - 1970), Frederic March (1897 - 1975)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Un beau jour, quelque part entre la Riviera et Paris (c'est-à-dire quelque part sur le chemin du Paradis), elle pénètre dans un compartiment de train (et sans doute dans les rêves) de deux charmants messieurs endormis. Elle les dessine et s'endort à son tour. Sans doute pour qu'ils puissent entrer dans ses rêves à elle. Tout est contagieux, dans ce film ; le sommeil, le bonheur, le succès. L'amour, bien sûr. Mais à trois, forcément, dans trois pays différents, ça complique un peu la vie. Et tout le reste... Ils ne pensent qu'à ça mais n'en parlent jamais -enfin si, en fait, tout le temps, mais en parlant d'autre chose. Pour se donner le change, ils se fixent des règles -gentlemen agreement- qu'ils s'empressent de ne pas respecter. Rien à faire : les objets, les choses, les lieux, leur parlent toujours de la même chose. De ce dont ils ne veulent pas parler, bien sûr. Ce remake par anticipation de Jules et Jim -la tragédie en moins- est du genre à donner envie de se compliquer la vie.

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T


Tacones lejanos - Talons aiguilles

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Réalisé par : Pedro Almodovar (1949 - )
En : 1991, Espagne
Acteurs principaux : Victoria Abril (1959 - ), Féodor Atkine (1948 - ), Javier Bardem (1969 - ), Miguel Bosé (1956 - ), Marisa Paredes (1946 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

J'ai une théorie sur Almodovar : il me semble que ses personnages sont toujours travaillés par l'idée d'être quelqu'un d'autre. Aucun de ses films ne l'illustre mieux que celui-ci. Voici donc : une fille qui a toujours envié sa mère artiste (la mère lui a refait le coup de Sonate d'automne), un travesti compatissant, un juge qui joue à être son propre indic (et encore, je ne vous dit pas tout), et un mort qui aimait les femmes et que peu de monde regrette. Enfermés dans leur rôle, dans leur tête ou en prison, ceux-là ne sont à l'aise qu'en changeant d'identité par le travestissement, l'art et la dissimulation (et le sacrifice, aussi !). L'émotion, les couleurs et la musique sont aussi de la partie, comme pour un magnifique feu d'artifices tragique.

Blechtrommel (Die) - Tambour (Le)

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Réalisé par : Volker Schlöndorff (1939 - )
En : 1979, Allemagne
Acteurs principaux : Daniel Olbrychski (1945 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /entre Berlin et Moscou /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 142 mn, couleur

Critique perso :

Oskar, comme tous les hommes de sa famille, a toujours adoré vivre dans les jupes de sa mère. Il est blond comme son père polonais, têtu comme son père allemand. A 3 ans, il décide d'arrêter une fois pour toute de grandir, et se consacre à plein temps à son tambour. Cette audacieuse initiative lui permet de traverser les années 30-40 incognito, libre dans sa tête dans son corps d'enfant, tambour éternellement mineur. Oskar, c'est un peu une vigie qui n'arrête pas de sonner l'alerte, mais que personne n'écoute. C'est un grand homme qui veut rester petit dans un pays qui, lui, se trouve trop petit pour ses grandes ambitions. C'est comme l'Allemagne qui se projetterait dans une chambre noire : à l'envers, en miniature, mais terriblement ressemblante.

Cha no aji - Taste of Tea (The)

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Réalisé par : Katsuhito Ishii (1966 - )
En : 2004, Japon
Acteurs principaux : Tadanobu Asano (1973 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /poésie en image /vers le soleil levant
Caractéristiques : 143 mn, couleur

Critique perso :

Une petite famille japonaise typique, juste un peu plus cinglée sur les bords que la moyenne. Papa est thérapeute-hypnotiseur, maman dessine des mangas, comme son beau-père (à qui il commence à manquer quelques cases). Grand-frère a des soucis de coeur et de vélo, petite-soeur des problèmes d'(alter)-ego encombrant. J'oubliais le frère de maman, adepte zen de rencontres en tous genres. Et le frère de papa, dandy snob qui, heureusement pour lui, n'a jamais peur de se couvrir de ridicule. Tous apprennent à vivre avec leurs démons, à cohabiter avec pas mal de fantômes. Tous avancent, avec armes et bagages, en équilibre toujours précaire, à la recherche de leur sens du mouvement idéal. Et ils le trouvent. Et le film trouve et invente sans arrêt le sien. Et il est juste, heureusement, beaucoup plus brillant que la moyenne.

Jamaica Inn - Taverne de la Jamaïque (La)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1939, Angleterre
Acteurs principaux : Leslie Banks (1890 - 1952), Charles Laughton (1899 - 1962), Maureen O'Hara (1920 - 2015)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Dans la famille Hitchcock, cette oeuvre-là est un peu un enfant caché. Une histoire de naufrageurs située au XIXème siècle, un film en costumes avec un gang à trognes, des bagarres à mains nues, des carrioles, des chevaux et des maquettes de bateaux en pleine tempête dans un verre d’eau… mais avec aussi, en contrebande comme il se doit, pas mal de hitchcockeries déjà bien identifiées : le gentil couple-malgré-lui qui se forme dans la fuite, les agents doubles, l’art de se jeter dans la gueule du loup (et d’en ressortir), le climax qui donne vertige… et, évidemment, quelques excellents acteurs anglais en flagrant délit de cabotinage. Une dernière anglaiserie avant de passer à Hollywood.

Taxi pour Tobrouk (Un)

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Réalisé par : Denys de la Patellière (1921 - 2013)
En : 1960, France
Acteurs principaux : Charles Aznavour (1924 - ), Maurice Biraud (1922 - 1982), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

4 hommes dans un désert, à la recherche d'une guerre perdue ; 4 français de partout, mais du bon côté. Un intrus allemand permet d'importer le conflit dans la troupe, et de faire de sa jeep un terrain d'opération militaire, un café du commerce, une arène et un théâtre. La patrouille perdue apprend à connaître Le Salaire de la peur. Le Sahara fournit les ennuis, l'armée fournit les boîtes de conserve, Audiard fournit les cartouches. Ca manque un peu de femmes, donc de subtilité. Mais c'est du gaulois pure sueur, de l'anar pure gouaille, du solide en grains (de sable).

Modern Times - Temps modernes (Les)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1936, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977), Paulette Goddard (1911 - 1990)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Avec sa clairvoyance prophétique habituelle, Charlie Chaplin résume dans ce film les impasses du capitalisme mises à jour par la Grande Crise de 1929. Et il le fait avec ses tripes, avec son ventre. L'obsession du ventre est un leitmotiv de ses personnages ; la crise économique l'exacerbe : entre ceux qui meurent de faim et ceux qui, se mettant au service des machines, se font avaler, la marge est étroite. La fuite et l'improvisation sont les seules chances qui restent à Charlot. Ce petit bonhomme égaré dans l'écosystème urbain où il tente de survivre, transformé en machine à consommer et à produire, est notre frère pour toujours...

Advise & Consent - Tempête à Washington

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1962, USA
Acteurs principaux : Henry Fonda (1905 - 1982), Charles Laughton (1899 - 1962), Peter Lawford (1923 - 1984), Walter Pidgeon (1897 - 1884), Gene Tierney (1920 - 1991)
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 142 mn, NB

Critique perso :

Emoi à Washington : le Président vient de nommer un nouveau secrétaire d'Etat sans consulter personne. Le Sénat doit valider. L'heureux nominé a apparemment tout pour inspirer confiance : quand il était jeune, il a été Young Mr. Lincoln. Enfin, dans l'histoire, il est plutôt suspecté d'avoir fréquenté des communistes -vous imaginez l'horreur. D'où : commission d'enquête, tractations, appel à témoins. Deux camps s'affrontent : celui de la "majorité", tiraillé de contradictions internes (très plurielle, en fait), et celui de "l'opposition", mené par le sénateur Cooley, vieux renard des tribunes depuis au moins 2000 ans (cf. Spartacus). Cela nous vaut une petite visite guidée des coulisses du pouvoir, en passant par les sous-sols de la politique et les égouts des luttes d'influence. Il semble, hélas, parfois, que le service de l'Etat importe un peu moins que les ambitions perso, et la vérité que les effets de manche. Heureusement, c'est pas chez nous que ça se passerait comme ça.

Terrazza (La) - Terrasse (La)

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Réalisé par : Ettore Scola (1931 - 2016)
En : 1980, Italie
Acteurs principaux : Vittorio Gassman (1922 - 2000), Marcello Mastroianni (1924 - 1996), Serge Reggiani (1922 - 2004), Remo Remotti (1924 - 2015), Ugo Tognazzi (1922 - 1990), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 124 mn, couleur

Critique perso :

Un grand buffet avec des pâtes et des haricots, sur une grande terrasse romaine. Les convives sont nombreux, intelligents, énervés. En majorité : des intellos-bobos, caviar-cocos. Ils bossent dans la culture politique, ou dans la politique culturelle. Ils ont tout vu, tout lu, tout connu, ils se sont tant aimé. Il y a Enrico, qui n'arrive pas à écrire le scénario du film en 5 sketchs, qui pourtant se déroule devant nous. Luigi et Amedeo, qui n'arrivent pas à retenir leur femme, qui pourtant leur doit tout. Sergio, qui n'arrive pas à retenir le semblant de vie qu'il a pourtant sauvé de la guerre. Et Mario qui, en amour comme en politique, n'arrive clairement pas à écrire des textes clairs. Des mâles drôlement tragiques, tragiquement drôles. On a beau les voir de plusieurs point de vue, sous plusieurs angles : ils sont toujours aussi las, lâches et fuyants. Portrait de l'artiste en hommes vieillissants.

Testament des Dr. Mabuse (Das) - Testament du Dr. Mabuse (Le)

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1933, Allemagne
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 122 mn, NB

Critique perso :

Du fin fond de son asile à la Caligari, un homme tire les ficelles du crime. Un homme invisible, une voix derrière un rideau, un metteur en scène de la terreur. L'inspecteur Lohmann lui sacrifie sa vie privée. Lui qui, pourtant, a su dénicher M, le meurtrier solitaire, il doit faire face cette fois à un pervers plus grand et plus insaisissable encore : un idéologue aux mains propres, un texte et une voix qui tuent. Racket, noyautage de l'Etat, suppression des gêneurs et stratégie de la peur : le Mein Kampf de Mabuse est en effet appliqué à la lettre par ses héritiers. Même mort, il hypnotise encore. Il hypnotise toujours...

Tema - Thème (Le)

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Réalisé par : Gleb Panfilov (1934 - )
En : 1979, Russie
Acteurs principaux : Inna Churikova (1943 - ), Mikhail Ulyanov (1927 - 2007)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 99 mn, couleur

Critique perso :

Kim Yesenin est un écrivain russe. Donc torturé, concerné, engagé, arrogant, chiant. Normalement, il vit à Moscou, mais là il est en tournée en province (comme on ne doit plus dire), accompagné d'un confrère encore pire que lui et d'une jeune maîtresse pas passionnante (et apparemment pas non plus très passionnée). Il s'incruste dans la visite guidée d'un musée local. La guide est jolie, voilà que la province l'intéresse finalement plus que prévu. Il retrouve la fille dans un dîner le soir, il essaie de lui faire le coup du grand écrivain russe : passionné, passionnant, possessif, arrogant, chiant. Elle ne marche pas. Elle a pourtant été amoureuse de lui, quand elle avait 10 ans. Mais maintenant, elle préfère l'authentique. Elle ne s'intéresse plus qu’à un poète-paysan du terroir local, un artiste un vrai, brut et inconnu, mort et oublié de tous si elle n'était pas là. Et voilà de quoi relancer la machine du grand écrivain russe. Amoureux, concerné, inspiré, torturé, vain. Engagé, passionné, jaloux, arrogant, chiant.

Tè nel deserto (Il) - Thé au Sahara (Un)

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Réalisé par : Bernardo Bertolucci (1940 - )
En : 1990, Italie
Acteurs principaux : John Malkovich (1953 - ), Debra Winger (1955 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 138 mn, couleur

Critique perso :

Ca commence dans le New-York des années folles, ça se termine dans les dunes du Sahara. Y paraît que ce serait l'histoire d'un couple qui se noie dans les sables. En fait non, c'est l'histoire d'une femme qui tente la traversée de son désert intérieur. A la rame, en solitaire. Comme dans l'appart' désert du Dernier tango à Paris. De mari en amants, sur des terres de plus en plus arides, sauvages, étrangères, elle devient de plus en plus aride, sauvage, étrangère à elle-même. On ne sait pas trop si on la plaint ou si on l'envie. C'est comme un voyage dans le temps, aussi, ou une expédition à la recherche d'une source perdue. Pour voir ce qu'il reste quand la civilisation a sombré : de la sensualité, du soleil et du désespoir.

Teorema - Théorème

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Réalisé par : Pier Paolo Pasolini (1922 - 1975)
En : 1968, Italie
Acteurs principaux : Massimo Girotti (1918 - 2003), Silvana Mangano (1930 - 1989), Terence Stamp (1939 - ), Anne Wiazemsky (1947 - 2017)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /poésie en image /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 98 mn, NB/couleur

Critique perso :

Hypothèse : une famille bourgeoise (bonne comprise).
1ère partie. Un télégramme : "Arrive demain". Un type est là, effectivement. Beau comme un ange, lit Rimbaud. En moins de 3/4 d'heure, il s'est fait toute la famille (bonne comprise) - enfin, c'est plutôt les autres qui lui sautent dessus, d'ailleurs.
2ème partie. Un autre télégramme, Il part. Les autres n'ont plus qu'à devenir ce qu'ils sont : saint, artiste ou débauché, ce qui bien sûr revient au même, pour Pasolini. Bon, on n'a sans doute pas appris les maths dans les mêmes écoles, mais il faut reconnaître que sa démonstration est claire et tranchante : un petit coup de grâce et hop, c'est toute la "petite bourgeoisie" (comme on disait à l'époque) qui explose.

Thérèse Raquin

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1953, France
Acteurs principaux : Roland Lesaffre (1927 - 2009), Simone Signoret (1921 - 1985), Raf Vallone (1916 - 2002)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 102 mn, NB

Critique perso :

Avant même le drame, elle est déjà tout en noir et pleine d'épingles, Thérèse, comme un papillon dans la vitrine de sa boutique de tissus. Un mari toujours au lit (mais uniquement pour dormir ou se faire soigner), une belle-mère comme on les craint toujours sur le dos : on la plaint, Thérèse. Alors, le collègue italien à biscottos, on le voit arriver comme les petits chevaux auxquels le mari ne cesse de jouer : avec ses gros sabots. Le drame est sur les rails... Pas très nouveau, pas très étonnant : un médiocre drame de la médiocrité. Une espèce de ressucé de la Bête humaine plein d'humains très bêtes. Sans oublier le matelot, qui sonne toujours deux fois. Zola a sans doute vu pire. On a vu mieux mais ça n'a rien de déshonorant.

Wo hu cang long - Tigre et dragon

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Réalisé par : Ang Lee (1954 - )
En : 2000, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Chen Chang (1976 - ), Yun-Fat Chow (1955 - ), Michelle Yeoh (1962 - ), Zhang Ziyi (1979 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Dans la Chine ancienne, deux valeureux combattants (est-ce lui le tigre, est-ce elle le dragon ? nous ne le saurons pas) s'aiment en secret au moins depuis Conficius. Il lui confie sa Destinée -une épée- pour la remettre à un notable qui se la fait voler illico par un voleur qui vole sur les toits. L'enquête commence. Le jour : visites de courtoisie diplomatiques et exquise politesse. La nuit : ballet d'armes et combats très singuliers -et élégants : il y a toujours au moins une dame concernée. Ca ressemble un peu à nos contes de fées (honneur, loyauté et amour courtois), avec tout ce qu'on attend de l'exotisme oriental (costumes somptueux et combats d'écoles entre grands maîtres très très sages) et tout ce qu'il faut de moyens hollywoodiens. En plus, souvent, la poésie résiste encore...

Tirez sur le pianiste

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1960, France
Acteurs principaux : Charles Aznavour (1924 - ), Marie Dubois (1937 - 2014)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

Au début, un type poursuivi, de nuit, par des malfrats, s'arrête 5mn pour papoter joies matrimoniales avec un inconnu qui lui a tendu la main. Le polar prend, déjà, le chemin des écoliers. Et puis, le type repart dare-dare aller plutôt emmerder son frangin. Le frangin est, comme le héros de Detour, pianiste de bistrot. Mais, lui, c'est aux autres qu'il porte malheur. Aux femmes surtout. Le film sera l'occasion de faire le tri entre les vrais et les faux frères (les vrais Saroyan Brothers s'appellent Edouard, Richard, Chico et Fido...), mais contribuera pas mal à embrouiller les genres : il entretient l'art subtil de filmer les choses sérieuses comme des conneries, et les conneries comme des choses sérieuses. Tarentino l'a sûrement regardé en boucle, et c'est impossible de le lui reprocher.

Titanic

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Réalisé par : James Cameron (1954 - )
En : 1997, USA
Acteurs principaux : Kathy Bates (1948 - ), Leonardo DiCaprio (1974 - ), Gloria Stuart (1910 - 2010), David Warner (1941 - ), Kate Winslet (1975 - ), Billy Zane (1966 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro /épique pas toc
Caractéristiques : 194 mn, couleur

Critique perso :

Il m'arrive d'avoir des faiblesses et des fautes de goût. J'avoue donc : j'aime beaucoup ce film. Parce que c'est gros comme un immeuble et sans complexe, comme Autant en emporte le vent (vers lequel ça lorgne pas mal). Parce qu'ils sont jeunes et beaux, et caricaturaux à souhait. Parce que la vieille dame a été la fiancée de l'Homme invisible. Parce que la métaphore féministe, aussi, est énorme : c'est le symbole du machisme le plus brutal et le plus attardé qui sombre avec tant de fracas et de victimes (mais quand on aime, on ne compte pas). Parce que, même en sachant tout à l'avance, on arrive encore à se laisser surprendre. Parce que c'est du faux bâti sur du vrai bâti sur de l'imposture. Parce que c'est du cinéma grandeur artifice.

To Be or Not to Be

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Réalisé par : Ernst Lubitsch (1892 - 1947)
En : 1942, USA
Acteurs principaux : Felix Bressart (1892 - 1949), Carole Lombard (1908 - 1942), Robert Stack (1919 - 2003), Henry Victor (1892 - 1945)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /jeu dans le jeu /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

Comment peut-on être nazi, telle est la question ?! Et en 42, il y avait de quoi se la poser... Là où Lubitsch est gonflé, c'est qu'il traite en comédie un thème pareil. Là où il est carrément génial, c'est qu'il choisit pour héros une troupe de comédiens plus familiers des répliques de Shakespeare que des méthodes d'interrogatoire du contre espionnage. Mais tant qu'à se jeter dans la gueule de la Gestapo, autant se déguiser en loup ! Et pour démasquer des imposteurs, rien ne vaut une plus grande imposture encore (ça pourraît bien être, d'ailleurs, une excellente définition du théâtre). Tout cela nous vaut une perle quasi-unique (avec Le Dictateur, bien sûr) : un film de propagande hilarant.

Play It Again, Sam - Tombe les filles et tais-toi

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Réalisé par : Herbert Ross (1927 - 2001)
En : 1972, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Diane Keaton (1946 - ), Tony Roberts (1939 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Allan (pas si) Felix (que ça) est de ceux qui rêvent de faire de leur vie un remake de Casablanca. Au moment où commence le film, il est en pleine déconfiture sentimentale, En fait, vu qu'il foire tout ce qu'il entreprend, il est plutôt bien parti pour suivre l'exemple de Nick (celui de Casablanca, justement) . Ses meilleurs amis, les Christie's, jouent au coach en essayant de lui refiler toutes les célibataires névrosées de Manhattan qu'ils connaissent (y'a le choix, pourtant). Mais Allan a un gros problème : son sur-ça (c'est-à-dire à la fois son ça et son surmoi freudiens) a la tête et la voix de Bogart et c'est pas commode tous les jours. Ecrit (pour le théâtre) et joué par Woody, mais officiellement réalisé par un obscur tâcheron : ça aurait presque pu être un pré-make de La Rose pourpre du Caire. Pas si mal pour un brouillon par procuration.

Toni

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1935, France
Acteurs principaux : Charles Blavette (1902 - 1967)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /heurs et malheurs à deux /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 81 mn, NB

Critique perso :

Arrivée d'un train dans une gare de Provence (La Ciotat ? Peut-être...) : ça parle espagnol, ça chante italien, c'est plein d'étrangers qui viennent prendre le pain -et les femmes- des français. Parmi eux : Toni (qui a pourtant déjà un accent marseillais d'au moins trois générations). Et, effectivement, en matière de femmes, les choses sont assez rondement menées : il séduit Marie, sa logeuse mais préfère Josefa qui lui fait la coup de la guêpe dans le cou. Mais Fernand, le méchant cadre de la carrière de pierres qui l'emploie, l'épouse avant lui, et du coup lui épouse Maris. Après, ça tourne de plus en plus mal, avec cette espèce de fatalité tranquille qui a l'air de pousser là-bas aussi bien que les olives. Le ton, semi ethno-documentaire, fait l'effet de s'inventer en route, avec une maladresse qui a l'air toute naturelle. Avec ses ouvriers et ses paysans en première ligne, c'est du proto-Ken Loach-sur garrigue, autrement dit du pré-Guédiguian.

Tontons flingueurs (Les)

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Réalisé par : Georges Lautner (1926 - 2013)
En : 1963, France
Acteurs principaux : Francis Blanche (1919 - 1974), Bernard Blier (1916 - 1989), Jean Lefebvre (1919 - 2004), Claude Rich (1929 - 2017), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

J'avais un copain à qui ce film tenait lieu d'alcotest. Dans son état normal, il connaissait toutes les répliques par coeur. Sinon, il évaluait l'état de sa mémoire en commençant la récitation et en voyant jusqu'où il arrivait à tenir... Moi, je m'arrête tout de suite (mais je ne l'ai vu que 3 fois (et je ne suis jamais bourrée)). Au fond, c'est quoi, ce film ? Des hommes entre eux : plus très jeunes, plus très beaux, tendance bedaine ou calvitie. Ils ne disent à peu près rien d'autre que "t'ar ta gueule à la récré", mais en dialecte Audiard, ce qui change tout. Des machos à l'ancienne, face au mystère d'une jeune fille des sixties. Ce film, c'est la dernière excuse bafouillante des ours d'antan dans un monde qui n'est plus le leur -la dernière génération avant Simone de Beauvoir.

Toto le héros

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Réalisé par : Jaco van Dormael (1957 - )
En : 1991, Belgique
Acteurs principaux : Michel Bouquet (1925 - ), Bouli Lanners (1965 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Au moment de sa sortie (j'étais jeune), j'avais adoré. Evidemment, maintenant que je vois les sources (Boulevard du Crépuscule, Sueurs froides, Le Mépris entre autres, et quelques poèmes) et les coutures (tout arrive 2 fois, comme dans Little Big Man), ça m'impressionne moins. N'empêche, l'idée de départ est formidable : le héros, Toto von Chickensoup, belge pur frites, est persuadé d'avoir été échangé à sa naissance, et d'avoir donc vécu une vie qui n'était pas faite pour lui. Il a le complexe de l'imposteur à l'envers, il se sent déguisé malgré lui en type banal. Il faut dire que son horloge interne s'est arrêtée quand il avait sept ans, pour le punir d'avoir un peu trop aimé sa grande soeur. Cette histoire d'une vie sans histoire - et sans vie - a le charme et la maladresse d'un conte pour ceux qui n'ont jamais appris à faire la différence entre leurs rêves et leurs souvenirs.

Toto, che visse due volte - Toto, qui vécut deux fois

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Réalisé par : Cipri et Maresco
En : 1998, Italie
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

Dans un inquiétant village cramé de soleil, apparemment oublié du reste du monde et du temps et bizarrement couillu, vit une bande particulièrement gratinée de tarés désargentés. Leurs principaux soucis, dans l'ordre : baiser des femmes, à défaut des hommes, à défaut des animaux, à défaut des anges, à défaut se masturber en groupe, à défaut se masturber tout seul. Les seules alternatives envisageables semblent être de devenir parrain ou de devenir saint dans une des deux institutions locales disponibles (au même visage), l'Eglise et la Mafia. Dans un tel environnent tout peut arriver, comme par exemple désirer une pute barbue, disputer du fromage aux rats ou une bague à son amant mort, ressusciter après avoir été dissout dans l'acide. L'image et les réalisateurs ont clairement pris un gros coup de soleil, là est leur génie.

Touchez pas au grisbi

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Réalisé par : Jacques Becker (1906 - 1960)
En : 1954, France
Acteurs principaux : Jean Gabin (1904 - 1976), Jeanne Moreau (1928 - 2017), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Si Pépé le Moko avait survécu et était rentré à Paris, il se serait sans doute appelé Max. Il aurait pris un peu de bouteille et aurait continué à régner sur son petit monde : des gars du milieu -pourtant pas loin du bout du rouleau, mais avec de beaux restes-, et des mômes enjoleuses qui savent lever la jambe. Il aurait parlé le pigalais, fréquenté le restau des copains, le cabaret des copines. Et il aurait connu Riton, l'ami de 20 ans, le seul à qui on fait confiance pour la chasse au grisbi -non, ce n'est pas un ours brun mais il attire les mouches, les renards et les abeilles. Un patriarche qui a de la classe, des débuttants prometteurs (une certaine Moreau, un certain Ventura), une belle histoire d'amitié virile et pudique.

Band Wagon (the) - Tous en scène

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Réalisé par : Vincente Minnelli (1903 - 1986)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Fred Astaire (1899 - 1987), Cyd Charisse (1921 - 2008), Oscar Levant (1906 - 1972)
Genre(s) : New York - New York /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Un certain M. Truffaut (ou son double de cinéma) dit quelque part qu'un film est comme un train dans la nuit. Un "musical" à l'américaine, c'est pareil : ça embarque tout un tas de monde pour on ne sait trop où, et ça y va à toute vitesse. Des fois, ça fait rire en voulant impressionner, des fois ça impressionne en voulant faire rire. Des fois, ça déraille. Des associations de talents les plus hétéroclites peuvent y réussir à s'entendre, ou bien exploser, et les cabots les plus incompatibles devenir inséparables (enfin, c'est un "musical", tout de même, pas la vraie vie). L'art d'attraper la chance et la grâce, c'est un bricolage de pros. Et quand ça rend heureux, on se fiche de savoir si c'est notre double de spectateur ou dans la vraie vie.

Tout le monde il est beau tout le monde il est gentil

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Réalisé par : Jean Yanne (1933 - 2003)
En : 1972, France
Acteurs principaux : Bernard Blier (1916 - 1989), Jean-Roger Caussimon (1918 - 1985), Jacques François (1920 - 2003), Daniel Prévost (1939 - ), Michel Serrault (1928 - 2007), Marina Vlady (1938 - ), Jean Yanne (1933 - 2003)
Genre(s) : en avant la musique /nanar pur sucre /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Christian Gerber, sorte de Régis Debray populo qui, après avoir couru les maquis sud-américains pour interviewer des guerilleros barbus, retrouve à Paris son poste de journaliste-radio. Les années 70 battent leur plein de kitchitude. Le gadget du moment, c'est ce truc avec deux boules en plastique au bout d'une ficelle, qu'il faut faire se cogner entre elles le plus longtemps possible. Hair (le spectacle) fait un tabac, la Superstar du moment (sur les ondes de la radio, au moins) s'appelle Jésus-Christ. C'en est trop pour Gerber, libertaire dans l'âme (qu'il n'a pas) et mauvais esprit sur pattes (d'eph). Il se fait virer, puis, bientôt (opportunisme aidant), promu et, enfin (intégrité aidant), crucifié sur l'autel d'une société aux valeurs Kleenex. Une grosse farce narcissique, assez gonflée (à l'air du temps).

Streetcar Named Desire (A) - Tramway nommé désir (Un)

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Réalisé par : Elia Kazan (1909 - 2003)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Marlon Brando (1924 - 2004), Kim Hunter (1922 - 2002), Vivien Leigh (1913 - 1967), Karl Malden (1912 - 2009)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 122 mn, NB

Critique perso :

Blanche, délicate petite chose, échoue un jour à La Nouvelle Orléans, chez sa soeur enceinte. Elle doit cohabiter avec le mari de la soeur, un ouvrier brut(e) de décoffrage qui a visiblement un fort mauvais tailleur (il n'arrête pas de déchirer ses marcels) et n'utilise apparemment pas beaucoup de déodorant pour atténuer l'effet de son abondante sueur. Mais beau comme Brando. Ca se flaire, ça se renifle, façon minauderies ou façon ours, c'est finalement à peu près la même chose. Ca sent le fauve et le renfermé, dans ce film là. Tout le monde y est comme embarrassé ou dépassé par son propre corps. Léger et doux comme du béton armé brut de décoffrage.

Baara - Travail (Le)

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Réalisé par : Souleymane Cissé (1940 - )
En : 1978, Mali
Acteurs principaux : Balla Keita
Genre(s) : portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

La Ligne générale suit le destin d'un pousseur de charriots des rues de Bamako. Exploité par des pauvres qui ne peuvent pas payer leur course, il se fait embaucher par un ingénieur plein de bonne volonté, avant de finir manipulé par un patron pas étouffé par les scrupules. Le fond du tableau est une fresque ambitieuse sur la circulation de l'argent dans toutes les couches de la société, et sur ce qui préoccupe tout le monde : travailler pour manger, manger pour travailler. L'Afrique aussi sait ce que signifie le pouvoir du capital et l'aliénation des masses. Heureusement, l'Afrique aussi a son Ken Loach.

Travaux, on sait quand ça commence...

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Réalisé par : Brigitte Roüan (1946 - )
En : 2005, France
Acteurs principaux : Carole Bouquet (1957 - ), Marcial Di Fonzo Bo (1968 - )
Genre(s) : Paris /conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Mme Chantal est une grande avocate de la cause des sans-papiers. Le genre bobo, gauche-guacamol (son truc, c'est plutôt les sud-américains). Quand Mme Chantal plaide, elle se transforme en sorcière bien-aimante : irrésistible. Chez elle, elle met ses convictions en pratique. Puisqu'un petit ravalement d'intérieur est nécessaire, autant employer les hommes sans papiers (et sans qualités -surtout pour le travail manuel) qu'elle défend devant les tribunaux. Mais là, le charme opère à l'envers : Mme Chantal a l'art de transformer tous ses employés en empotés façon Impossibles M. Bébé. Luxe, calme et volupté valent bien un petit chaos d'appartement. Difficile de faire plus bidonnant sur la crise des logements parisiens.

Traversée de Paris (La)

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Réalisé par : Claude Autant-Lara (1901 - 2000)
En : 1956, France
Acteurs principaux : Bourvil (1917 - 1970), Jean Gabin (1904 - 1976), Jacques Marin (1919 - 2001), Louis de Funès (1914 - 1983)
Genre(s) : Paris /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

Paris, quelque part entre l’arrivée des troupes allemandes et la libération. Les gens font mine de vivre comme si de rien n’était, mais en fait rien ne va. Tout le monde se suspecte et s’observe, le moindre morceau de savon est une denrée rare, les rognons un plat de luxe. Dans un café à l’ambiance lourde, un pauvre type en embauche un autre à la nuit tombée, pour transporter des grosses valises à pieds, d’Austerlitz à Montmartre. Des valises pleines de morceaux d’un cochon tout juste égorgé dans une cave -autant dire de l’or, mais de l’or qui a une odeur. Une odeur qui attire les chiens. Les chiens de toutes sortes et de toutes espèces… Cette longue nuit où il se passe des trucs pas très clairs, c’est comme une métonymie de l’occupation toute entière. Une sale période qui révèle le côté obscur de ceux qui la traversent. Une nuit qui manque singulièrement de héros, mais pas complètement de braves types.

Tricheurs (Les)

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1958, France
Acteurs principaux : Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Roland Lesaffre (1927 - 2009), Jacques Marin (1919 - 2001), Laurent Terzieff (1935 - 2010)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

A la fin des années 50, déjà, les djeun's, comme on ne le disait pas encore, posaient problème. Toujours à traîner dans les cafés, à boire et à draguer, au lieu d'avoir envie de bosser comme tout le monde. Parfois, ils faisaient des boums dans le château de leurs parents toujours absents, et manifestaient leur révolte en vidant la cave et en couchant avec n'importe qui dans le lit des parents toujours absents -l'horreur. En ce temps-là, déjà, venir de la banlieue était infamant, mais parce que ça voulait dire à l'époque porter une cravate et crêcher à Neuilly -l'horreur. Décidément, il y avait bien quelque chose de pourri au royaume du cinéma français : ces jeunes-là ont déjà mille ans, ils n'ont pas l'air de croire à leur cynisme. On ne prédit aucun avenir intéressant aux acteurs : à part au second rôle à longue figure, qui s'empressera de fuir cette galère au théâtre, et à un quasi-figurant à grandes oreilles qui ne tardera pas à passer à l'ennemi, dans le camp de la jeunesse qui se filme elle-même. Le film d'un vieux ronchon donneur de leçons.

Triporteur (Le)

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Réalisé par : Jacques Pinoteau (1923 - 2017)
En : 1957, France
Acteurs principaux : Jean-Claude Brialy (1933 - 2007), Darry Cowl (1925 - 2006)
Genre(s) : en France profonde /nanar pur sucre
Caractéristiques : 93 mn, couleur

Critique perso :

Pour célébrer l'accession de son équipe favorite à la finale d'une coupe quelconque (il s'agit de foot, bien sûr), un supporter à lunettes et à pédales enfourche son triporteur (sorte de kiosque à glace à roulettes -mais sans glace), bien décidé à traverser les profondeurs de la France profonde. On sous-estime malheureusement trop souvent l'épaisseur de la couche (géologique) de la France profonde -surtout là où le soleil tape un peu trop fort sur la tête des habitants (cf. un célèbre gendarme qui en a été victime). Personnages débiles, scénario nul filmé avec les pieds : du pur nectar de navet, à peine sauvé par quelques éclairs burlesques et quelques réjouissantes bafouillaginations.

Trois couleurs : blanc

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1994, France
Acteurs principaux : Julie Delpy (1969 - ), Zbigniew Zamachowski (1961 - )
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Coiffeur pour dames polonaises archi-diplômé, Karol est devenu mari impuissant en France. Déchu, abandonné, il ne réussit à regagner son pays que d'un cheveu, caché dans une valise (c'était juste avant qu'on se rende compte que l'homme est devenu une marchandise...). Il se refait une santé et une fortune avec les moyens pas très nets du bord, et trouve un moyen pas très propre de faire revenir sa chère ex-épouse française chez lui (question de vie ou de mort). Il s'agit d'une histoire de couple mais aussi, bien sur, des relations entre l'est et l'ouest. Dans la trilogie, ce film-là est le plus politique. C'est aussi le plus drôle, ironique et grinçant. Epais et froid comme de la neige.

Trois couleurs : bleu

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1993, France
Acteurs principaux : Juliette Binoche (1964 - ), Hugues Quester (1948 - ), Philippe Volter (1959 - 2005)
Genre(s) : Paris /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Le temps de quelques plans presque abstraits, Julie perd son mari et sa fille dans un accident de voiture. Elle n'arrive pas à vouloir mourir : elle va donc devoir réapprendre à vivre. A écouter, à aimer. Tout recommencer. En laissant venir, d'abord, et presque malgré elle (c'est en refusant de signer une pétition qu'elle se fait une amie). Puis de façon plus active, en ouvrant les yeux et les oreilles pour sortir de son bocal. A quoi sert la liberté de ne rien faire, de pouvoir vivre en autiste ? D'habiter un aquarium ? Pas grand chose... Ce film est le premier volet d'une double trilogie : bleu-blanc-rouge/liberté-égalité-fraternité. Il n'y a que Kieslowski pour imaginer de jouer ainsi en même temps avec des couleurs et des valeurs. Pour faire de la psychologie, de la morale et de la politique tout ensemble. Il n'y a surtout que lui pour le réussir aussi bien.

Trois couleurs : rouge

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1994, France
Acteurs principaux : Irène Jacob (1966 - ), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 99 mn, couleur

Critique perso :

Voici le testament d'un type qui voudrait bien encore croire à l'être humain avant de partir. Et en voici trois spécimens, aux liens mystérieux dans l'espace et le temps : deux d'entre eux sont voisins et se croisent sans cesse sans se connaître, deux semblent vivre les mêmes événements, à 30 ans de distance. Il y a celle qui est encore capable d'agir et celui qui se contente d'écouter. Ca parle de la fraternité entre les humains, de tout ce qui les relie illusoirement (le téléphone, les situations sociales) et de tout ce qui les rapproche plus qu'ils ne le savent eux-mêmes (une multitude de signes, d'objets, de lieux, la musique et les chiens, aussi...). Ca dit que l'être peut succéder au paraître et que l'amour peut succéder au jugement. Y'aurait pas un certain très très vieux barbu (celui qui a attendu Charlon Heston sur la montagne ?) qui aurait essayé de dire ça, aussi, il y a longtemps, en deux volumes pas mal diffusés depuis (hypothèse : et si ce film évoquait justement le passage entre les deux Testaments...) ? L'oeuvre d'un poète-géomètre-philosophe-théologien qui pense en images.

Three Days of the Condor - Trois jours du Condor (Les)

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Réalisé par : Sydney Pollack (1934 - 2008)
En : 1975, USA
Acteurs principaux : Faye Dunaway (1941 - ), Robert Redford (1936 - ), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

C'est un agent de la CIA version bobo-cool, qui vient au boulot en motocyclette et qui sait lire - pas trop comme James Bond, donc. Son boulot, c'est même de lire des romans toute la journée, pour y dénicher des histoires qui pourraient provenir -ou être destinées à- d'autres agents comme lui. Faut vraiment être scénariste à la CIA pour inventer un truc pareil. Le pire, c'est que c'est à cause de ça que tous ses collègues se font zigouiller. Dans le genre polar-politique-parano des années 70, le film se pose là. Mais quand il commence à évoquer le pétrole du Moyen-Orient, on tend l'oreille. A croire que Pollack a trouvé son scénario en lisant les journaux des années 90. En voyant qu'il a logé son noeud de vipères dans une des deux grandes tours qui pavoisaient alors au sud de Manhattan, on se dit même qu'il a sacrément bien visé, le bougre. Au bout du compte, on est tout à fait convaincu qu'inventer la réalité, c'est un boulot dangereux.

Trois places pour le 26

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1988, France
Acteurs principaux : Françoise Fabian (1932 - ), Catriona MacColl (1954 - ), Mathilda May (1965 - ), Yves Montand (1921 - 1991)
Genre(s) : en France profonde /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 106 mn, couleur

Critique perso :

M. Yves Montand himself se paie un petit flash-back sur son début de carrière, dans un musical autobiographique monté à Marseille, sa ville d'enfance. Il en profite pour chercher à retrouver son amour de jeunesse, trouve sans le chercher un amour de vieillesse, avant de découvrir que l'une est la fille de l'autre -voire pire. Il y a du lemon incest dans le pot aux roses. Le spectacle lui-même a l'air pas mal, mais la vie autour semble s'être figée dans les années 60-70 et la musique -hélas- engluée dans les harmonies de synthétiseurs. Le film n'arrête pas de chercher à se trouver beau dans tous les miroirs du passé (et d'essayer de se reconnaître en Tous en scène, par exemple), en retard d'un TGV sur son époque. Montand lui-même a l'air un peu trop vieux pour jouer son propre rôle (de père un peu indigne). Comme testament, ça reste malgré tout largement au-dessus du minimum notarial.

Third Man (The) - Troisième homme (Le)

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Réalisé par : Carol Reed (1906 - 1976)
En : 1949, Angleterre
Acteurs principaux : Joseph Cotten (1905 - 1994), Trevor Howard (1913 - 1988), Alida Valli (1921 - 2006), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 104 mn, NB

Critique perso :

Les ruines de Vienne après la deuxième guerre, un air de cythare et un train qui entre en gare. En descend un candide écrivain américain, à la recherche d'un ami qui lui a promis du travail. L'ami est mort, l'officier anglais qui régit les lieux n'est guère accueillant, les comparses qui suivent l'enterrement n'inspirent pas la sympathie, sauf une très belle femme... Bref, que de très bonnes raisons de ne surtout pas s'attarder en ville. Il reste, il ose même aller mettre le nez dans les égouts du passé. Mensonges, trafics, chantages, trahisons, manipulations, guerre de l'ombre et de la lumière, distorsion des valeurs : on aura droit à tout. D'ailleurs, tout est tellement sens dessus-desous qu'il n'y a pas moyen de mettre la caméra à l'horizontale. Le temps d'une scène de 10 mn et d'une réplique d'anthologie sur les coucous suisses (de son invention, paraît-il), Orson Welles incarne à jamais la séduction et le cynisme absolu du mal.

Tron

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Réalisé par : Steven Lisberger (1951 - )
En : 1982, USA
Acteurs principaux : Jeff Bridges (1949 - ), David Warner (1941 - )
Genre(s) : animation /c'était demain /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 96 mn, couleur

Critique perso :

Tron, c'est un Voyage fantastique sous influence Star Wars à l'intérieur de HAL. On y suit Flynn, informaticien-donc-génial, passé de l'autre côté de l'interface graphique, faire connaissance avec la virtualité réelle. Transformé en avatar à son image, il se retrouve condamné à combattre les algorithmes-gladiateurs qu'il a lui-même conçus, afin de neutraliser le Great Master Control, un ex-programme d'échecs qui a buggé mégalo. Bon, pour les explications sur l'architecture de Von Neumann, je conseille plutôt mon poly de cours. Mais aucun informaticien -et aucun spectateur- ne peut être insensible à la poésie d'une discussion -forcément un peu binaire- avec un bit errant, ou aux éclairs bleutés d'une donnée en transit dans les mornes plaines numériques.

Sud pralad - Tropical Malady

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Réalisé par : Apichatpong Weerasethakul (1970 - )
En : 2004, Thaïlande
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /poésie en image /vers le soleil levant
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Il fait chaud et humide, c'est plein d'herbes et de silences. Il y a des hommes, deux surtout. A moins que ce ne soient deux animaux. Y'en a un qui porte un uniforme de militaire et l'autre, une peau de tigre -mais dans l'autre histoire seulement. En fait, il y a deux histoires différentes qui se suivent. Qui d'ailleurs n'en sont pas vraiment. Qui peut-être n'en font qu'une. On ne sait pas trop laquelle est la cause, ou la conséquence, ou la métaphore de l'autre. Pourtant c'est très simple. Ils s'aiment, c'est tout. Dans une vie, c'est dans un village, au bord de la forêt. En douceur, en famille, en silence. Dans une autre vie, c'est dans la jungle. Avec du sang, de la boue, et de drôles de bruits. C'est comme un trip calme, un jeu de fauve et de souris en mode contemplatif. Tranquille et beau comme un amour rêvé. Beau et tranquille comme un rêve qui vit.

Truman Show (The)

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Réalisé par : Peter Weir (1944 - )
En : 1998, USA
Acteurs principaux : Jim Carrey (1962 - ), Ed Harris (1950 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Tru(e)man Burbank, héros malgré lui, 24h/24, d'un reality show dont il est le seul candide, vit dans un total false world. Comme le personnage de La Vie est belle, c'est un explorateur qui n'est jamais parti de chez lui. C'est un prisonnier volontaire. C'est un clown parfaitement conditionné pour jouer son rôle, dans le scénario qu'on a écrit pour lui. C'est une marionnette dans les mains d'un réalisateur mégalo qui ne s'est jamais remis d'avoir vu Persona et Blade Runner. Bref, c'est un parfait américain, gentil, poli, honnête. Quand il atteint les frontières de son univers de poche, il donne tout à coup raison aux croyances moyennageuses sur les bords du monde, et au couvercle de Beaudelaire. Le film aurait pu s'appeler Imitation of Life, mais le titre était déjà pris.

Tresor of Sierra Madre (The) - Trésor de la Siarra Madre (Le)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1948, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Tim Holt (1918 - 1973), John Huston (1906 - 1987), Walter Huston (1884 - 1950)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /épique pas toc
Caractéristiques : 126 mn, NB

Critique perso :

Disons pour simplifier qu'on aurait affaire à une relecture post-western un peu trash et très ironique du "laboureur et ses enfants" : une histoire de glandus au bout du rouleau qui s'improvisent chercheurs d'or au Mexique, à la suite d'un vieux briscard. Ils ont été chauffés à blanc par la misère, mais c'est une fois le filon déniché que le plus dur commence. Ils doivent patauger dans la boue sous un soleil de plomb, rester discrets, planquer leur récolte, se méfier de tout le monde. Ils sont quatre, comme les trois mousquetaires, mais avec des armes à feu et des bandits à sombreros aux trousses. Et puis, à force de fouiller la terre, ils se creusent en eux-mêmes d'insondables boyeux creux. Ils pillent si bien qu'ils se retrouvent avec l'âme toute rabottée : à la fin, on a l'impression de voir les leur toute nues (et celle de Bogart est pas belle à voir). Il y a des hommes qui ne valent sans doute pas leur pesant de pépites. Le film, oui.

Twin Peaks: Fire Walk with Me - Twin Peaks - les 7 derniers jours de Laura Palmer

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Réalisé par : David Lynch (1946 - )
En : 1992, USA
Acteurs principaux : Sheryl Lee (1967 - ), David Lynch (1946 - ), Kyle MacLachlan (1959 - ), Harry Dean Stanton (1926 - 2017)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 135 mn, couleur

Critique perso :

Evidemment, avant le film il y a eu la série, qui raconte ce qui se passe après. Alors, dès le début, le rouge est mis. C'est comme si le compte à rebours était enclenché, la bombe à retardement amorcée, mais au ralenti. Pourtant, filmer le destin en marche ne suffit pas, il faut aussi en montrer les esprits maléfiques et les demi-Dieux, les démiurges et les oracles. Or, les oracles ne sont pas fameux, on prédit qu'une jeune fille sera sacrifiée. Que d'ailleurs, c'est déjà fait, et qu'en plus la jeune fille est de toute façon pervertie jusqu'au trognon. Le FBI est sur le coup, avant même qu'il se soit passé quelque chose. Lynch inaugure ici son costume de grand chamane de l'inconscient, et s'offre une apparition en personnage aussi sourd qu'Homère était aveugle. Twin Peaks -le film-, c'est un peu l'Olympe assassiné par le soap opéra, et brillamment repêché par le cinéma.

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U


Killing (The) - Ultime razzia

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1956, USA
Acteurs principaux : Elisha Cook Jr. (1903 - 1995), Sterling Hayden (1916 - 1986), Marie Windsor (1919 - 2000)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 85 mn, NB

Critique perso :

Un casse, une bande, un leader. Une garce. Tous avec les gueules de l'emploi. Des solos d'honnêtes travailleurs, des duos de comploteurs, des chorus de maniganceurs. Des masques et des guns. Tous de parfaits artisans cambrioleurs. Une caméra qui traverse les murs, fait des rosaces dans le temps et l'espace, perce les contre-jours et les arrière-pensées. Et une voix off de contremaître à chronomètre. Tous les pions du grand jeu sont à leur place. Le plan était parfait, la mécanique capable de fonctionner même avec quelques éléments défaillants. Mais ce serait compter sans un grand architecte ironique qui, sans doute après avoir trop regardé Le Trésor de la Sierra Madre, a décidé de faire du destin son arme favorite. Et qui a bien raison de croire au sien.

One, Two, Three - Un, deux, trois

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : James Cagney (1899 - 1986)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 115 mn, NB

Critique perso :

Allons droit au but : il ne s'agit pas ici de football mais de comédie et de politique. Le film a été tourné à Berlin en 1961 (au coeur de l'action). La guerre y est froide, mais pas l'atmosphère. On ne savait rien, encore, du politiquement correct : les allemands coté ouest sont bien sûr tous d'anciens nazis, ceux de l'est récitent leur catéchisme communiste, les russes de service sortent tout droit de Ninotchka, la jeune première américaine est une écervelée (elle s'appelle Scarlett et vient d'Atlanta, c'est tout dire !). Au milieu du foutoir, droit dans ses bottes, s'ébat le représentant de Coca Cola himself, plus truand encore que les autres (on l'a reconnu, c'est James Cagney : dans les années 20, il ne vendait pas que du coca !), metteur en scène survolté d'intrigues de plus en plus tarabiscotées. En débit de paroles à la seconde et de gags à la minute, ce film est peut-être bien, effectivement, champion du monde.

Univers de Jacques Demy (L')

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Réalisé par : Agnès Varda (1928 - )
En : 1995, France
Genre(s) : docu (plus ou moins fiction) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 90 mn, NB/couleur

Critique perso :

Dans le monde merveilleux de Jacquot de Nantes, on croise des princesses et des putains, des camionneurs et des saltimbanques qui, des fois, sont les mêmes personnes. Agnès, elle, s'est choisie le double rôle de la marraine-marketing, de l'enchantée enchanteresse, et elle nous fait la visite guidée des coulisses de son grand homme. Elle ouvre le grand livre de ses images, où chaque chapitre serait une oeuvre, mais dans un savant désordre. Ca passe du coq à Peau d'âne, de ville en ville et de port en port. Surtout pas une thèse, plutôt un hommage malicieux et complice. Cette grande dame-là connaît visiblement l'art de recevoir et de donner plein d'amour, et le plus grand art encore de rendre son don contagieux.

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V


Vacances de M. Hulot (Les)

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Réalisé par : Jacques Tati (1909 - 1982)
En : 1953, France
Acteurs principaux : Jacques Tati (1909 - 1982)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 114 mn, NB

Critique perso :

Pour ses vacances, M. Hulot choisit les plages de St Marc, ce qui prouve déjà qu'il a très bon goût. Quand il débarque avec sa pipe, son épuisette et sa distraction, ça fait comme un courant d'air (très frais) dans la petite communauté de "l'hôtel de la plage". Avec lui, les multiples rituels banals du quotidien de ces vacanciers deviennent d'improbables aventures, de palpitantes épopées minuscules. Ce gars-là nous fait voir (et entendre) le monde autrement, nous lui en serons éternellement reconnaissante.

Vals Im Bashir - Valse avec Bachir

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Réalisé par : Ari Folman (1963 - )
En : 2008, Israël
Genre(s) : animation /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /docu (plus ou moins fiction) /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Un homme raconte à un autre le cauchemar qui l'obsède depuis qu'il est rentré de guerre. L'autre aussi est rentré de guerre, mais ses souvenirs y sont restés. Il se lance dans une enquête pour les retrouver. Il va effectivement en dénicher quelques morceaux, bien planqués, et pas que des bons... La guerre, c'est celle menée par les israéliens sur le territoire libanais en 1982. L'autre, celui qui ne se souvient plus qu'il y était, c'est le réalisateur. Le mauvais cauchemar qui rôde à l'horizon, c'est le massacre des camps de Chabra et Chatila. Et puisque tout est affaire de reconstitution, puisque interviews, expériences remémorées et fantasmes se mélangent, c'est (presque) uniquement par le dessin d'animation que l'enquête sera menée. Donc rien n'est réel, tout est vrai. La peur, visiblement, n'est pas inventée, elle infuse tous les plans, comme ce jaune-soleil qui fait mal aux yeux dans toutes les images de guerre. Et rien de mieux que ces musiques décalées pour rendre le drôle de sentiment d'hébétude qui a l'air de prendre possession des soldats au combat -ou du souvenir qu'ils en ont. Une expérience sensorielle et mémorielle aussi forte qu'une plongée en apnée, aussi belle que du cinéma.

King of Comedy (The) - Valse des pantins (La)

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Réalisé par : Martin Scorsese (1942 - )
En : 1983, USA
Acteurs principaux : Robert De Niro (1943 - ), Jerry Lewis (1926 - 2017)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 109 mn, couleur

Critique perso :

Années 80, New-York, USA. Le culte aux alouettes du moment, c'est le talk-show télé mâtiné de stand-up. Son pape s'appelle Jerry, son plus fidèle adepte Rupert Pu(m)pkin. Rupert est un fan fou furieux, à tendances monomaniaques insistantes. Imposteur chieur, mythomane insupportable et content de lui, génial peut-être. Il rêve d'être Jerry à la place de Jerry. Et pour cela, il bosse dur : il s'entraine à faire la bise à Liza, à rire au bon moment aux blagues de ses invités, à affronter avec sérénité les applaudissements les plus déchainés... seul, au fond de sa cave, telle une citrouille qui croit se transformer elle-même en carrosse. Or, il ne faut jamais contrarier une citrouille mythomane, ça la rend capable de réussir... Portrait amer des enfants perdus de la télé, New-York, années 80, et partout ailleurs depuis.

Valseuses (Les)

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Réalisé par : Bertrand Blier (1939 - )
En : 1974, France
Acteurs principaux : Gérard Depardieu (1948 - ), Patrick Dewaere (1947 - 1982), Isabelle Huppert (1953 - ), Miou-Miou (1950 - ), Jeanne Moreau (1928 - 2017)
Genre(s) : la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

C'est l'hisoire de deux petits mecs, joués par deux petits jeunes inconnus (un certain Dewaere et un certain Depardieu) qui mènent une enquète sur le plaisir féminin et emmerdent le monde. C'est une espèce de road-movie à la française, plein de mots qu'on n'avait jamais entendus avant au cinéma et de rencontres incongrues, au bord des routes, sur une plage, dans un train et une multitude de chambres. C'est l'invention d'un style, la caricature d'une époque, la provocation d'un langage, la fureur d'une liberté hautement revendiquée. Les acteurs, le genre et les fringues ont vielli depuis, l'énergie de leur jeunesse est restée sur l'écran.

Vampyr

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Réalisé par : Carl Theodor Dreyer (1889 - 1968)
En : 1932, Danemark
Acteurs principaux : Maurice Schutz (1866 - 1955)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /poésie en image
Caractéristiques : 75 mn, NB

Critique perso :

Un jeune homme ahuri à la recherche d’aventure arrive dans l’endroit idéal pour en trouver : un village sous l’emprise d’un(e) vampire… Ici, les humains et les fantômes se ressemblent comme deux gouttes de poison, les rêves et la réalité se confondent, les vivants et les ombres se mêlent et se mélangent. Le film lui-même est comme dans les limbes entre le cinéma muet (intertitres, quasiment aucun autre son autre que les voix) et le cinéma parlant, dans les gris, envahi par un mal à l’état brumeux. Dans les limbes entre la vie et la mort, on y assiste même à l’enterrement du jeune ahuri depuis l’au-delà, en caméra subjective. Un film magique, digne d'un sorcier revenu des limbes.

Van Gogh

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Réalisé par : Maurice Pialat (1925 - 2003)
En : 1991, France
Acteurs principaux : Jacques Dutronc (1943 - ), Elsa Zylberstein (1968 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 158 mn, couleur

Critique perso :

Un type descend d'un train, va se faire soigner chez un docteur, mange et dort dans une auberge à 3 sous. Il a le dos courbé et l'air de se foutre de tout. Il enfile des canons avec les paysans du coin. Ce qui fait drôle, c'est quand on le voit peindre dans les champs les tableaux les plus chers du monde, et que les autres l'appellent Van Gogh sans avoir l'air de comprendre ce qu'ils disent. Les femmes l'aiment, les hommes le supportent plus difficilement, font mine de s'intéresser à sa peinture. L'étrangeté du monde est dans ses toiles, son étrangeté au monde est dans son regard -celui de Jacques Dutronc dont l'ironie muette et l'inquiétant détachement donnent le vertige. Ce type là n'est pas doué pour le bonheur, juste pour en donner aux autres. Du très très grand art...

I Walked with a Zombie - Vaudou

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Réalisé par : Jacques Tourneur (1904 - 1977)
En : 1943, USA
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /poésie en image
Caractéristiques : 69 mn, NB

Critique perso :

Betsy est infirmière. Belle et dévouée, par déformation professionnelle. Elle se voit confier une étrange mission dans les antilles. Il s'agit d'aller soigner l'épouse d'un certain Mr. Holland, propriétaire terrien désabusé. La malade est belle, mais son cas clinique assez désespéré : bien que déjà morte, elle n'arrête pas de sortir de son lit. Zombie, qu'ils disent par là-bas. C'est malheureusement une maladie très répandue de nos jours. Les tams tams grondent beaucoup, mais pas autant que les coeurs, dans la grande maison Holland. Un St Sébastien criblé de flèches, dernier vestige d'un bateau négrier, nargue tout le monde dans la cour... Ambiance et symbolique lourdes, donc, pour ce Jane Eyre (ou Rebecca) des tropiques, enivrant comme un Ti-punch.

Veer-Zaara

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Réalisé par : Yash Chopra (1932 - 2012)
En : 2004, Inde
Acteurs principaux : Amitabh Bachchan (1942 - ), Shahrukh Khan (1965 - ), Anupam Kher (1955 - ), Rani Mukherjee (1978 - ), Preity Zinta (1974 - )
Genre(s) : Bollywooderie /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 192 mn, couleur

Critique perso :

Veer c'est lui, Zaara c'est elle. Ils sont faits l'un pour l'autre depuis l'éternité, mais les hasards de l'Histoire l'ont fait, lui, indien indouiste, et elle, musulmane pakistanaise. Il se sont rencontré à 20m au dessus du sol. Ils se sont échangé un peu de leur temps et beaucoup de leurs sourires (pas de baisers, c'est interdit par le protocole). Se sont raconté leur vie qui commençait... Mais tout ça, c'est du passé. Aujourd'hui, Veer est en fait le prisonnier numéro 786 (un numéro saint, semble-t-il) d'une sombre geôle. Il n'a parlé à personne depuis 22 ans. Montagu et Capulet ne sont pas dans le coup, mais ils ont des dignes héritiers. Il faudrait au moins un ange pour le sortir de là. Comme les amants de Pandora, Veer-et-Zaara s'aiment pour l'éternité -sauf que la leur dure plus que le temps d'une étincelle. Made in Bollywood, first class.

One-Eyed Jacks - Vengeance aux deux visages (La)

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Réalisé par : Marlon Brando (1924 - 2004)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : Marlon Brando (1924 - 2004), Elisha Cook Jr. (1903 - 1995), Karl Malden (1912 - 2009)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /carrément à l'ouest
Caractéristiques : 141 mn, couleur

Critique perso :

Depuis une fuite au Mexique qui a mal tourné, Dad et Kid, pilleurs de banques récidivistes, sont fachés à mort. 5 ans passent ; leur vie change, leur rancoeur demeure. Ils se retrouvent en Californie, au bord de la mer, avec quelques comparses. Ils s'observent de biais. Ils mentent beaucoup. Ils n'arrêtent pas de se dire les uns aux autres "I'll be (right) back" et "wait a minute". Il y a ceux qui tiennent parole, et il y a les autres. Il y d'étranges non-dits, aussi (que sont devenus les deux sacs d'or de la première partie ?). Mais il paraît que le film durait initialement 5h et a été coupé à la tronçonneuse. Ca donne un drôle de western maso et oedipien, un peu languissant, avec un Marlon (acteur) qui en fait le minimum. Juste assez pour suggérer l'éternel retour du refoulé

Finyé - Vent (Le)

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Réalisé par : Souleymane Cissé (1940 - )
En : 1982, Mali
Acteurs principaux : Balla Keita
Genre(s) : portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Jours du bac à Bamako. Révisions de dernières minutes, joints, musique et amourettes, comme pour presque tous les lycéens du monde (non, non, pas pour moi !). Conciliabules, ambiance fébrile, suspicions sur les résultats. Le gouverneur militaire a trois femmes, des grosses lunettes orange et du souci à se faire. Non seulement ses femmes se crèpent les tresses, mais le vent de la connaissance et celui de la révolte se liguent contre ses méthodes douteuses et musclées. Pire : sa propre fille se joint aux rebelles. Version black en vraie V.O. de Hair (moins les chansons), façon naturalisme magique, poétique et politique. Très gonflé, très étonnant, très bien !

Young Mr. Lincoln - Vers sa destinée

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Réalisé par : John Ford (1894 - 1973)
En : 1939, USA
Acteurs principaux : Henry Fonda (1905 - 1982)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Tout grand homme a d'abord été petit. Lincoln, il avait un peu d'avance sur les autres : c'était un homme grand. Honnête et malin, aussi. D'abord apprenti politicien, puis avocat débutant, il fait ici son stage de légende en devenir, d'homme au milieu des hommes. La justice est là pour révéler le Juste : c'est lors de son premier procès, dans le pire moment d'accablement, qu'il commence à ressembler à sa future statue. Après, il se tient debout et force tout le monde à lever la tête. Du haut de ses jambes interminables, il est à la hauteur de son destin. Portrait en (pas si) grandes pompes de Saint Abraham par maître John : ce que la terre d'Amérique peut produire de mieux.

Vedovo (Il) - Veuf (Le)

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Réalisé par : Dino Risi (1916 - 2008)
En : 1959, Italie
Acteurs principaux : Alberto Sordi (1920 - 2003)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Alberto, le veuf du titre, n'est en fait pas en mal de femmes. La vraie -l'officielle- est riche, brillante et cynique, et en a marre de payer avec sa fortune perso les pots cassés de ses projets foireux. L'autre -l'officieuse- est jeune, jolie et pauvre, et voudrait bien bénéficier (encore plus) des potentiels bénéfices desdits projets. La femme et l'argent, donc, les deux pôles de la vie d'Alberto (et pas que), dans une histoire de vases communicants avec dérivations multiples. Précisons au passage que le bonhomme est chef d'une petite entreprise de fabrications d'ascenseurs -ce qui montre bien son ambition (d'ascension) sociale- mais que ces derniers ont la fâcheuse habitude de causer de fâcheux accidents, ce qui l'empêche de payer ses ouvriers en grève, mais pas de promouvoir son douteux ingénieur en chef. Ce qui l'oblige, aussi, à avoir recours à divers subterfuges pour remettre la machine en marche... C'est un peu toute l'Italie qui est en panne dans ce film -à part son cinéma (surtout ses comédies sociales), qui commençait alors une fulgurante ascension dans l'estime des cinéphiles.

Victor/Victoria

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Réalisé par : Blake Edwards (1922 - 2010)
En : 1982, USA
Acteurs principaux : Julie Andrews (1935 - ), James Garner (1928 - 2014)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 129 mn, couleur

Critique perso :

Se faire passer, le temps d'un numéro de music-hall, pour un homme qui se ferait passer pour une femme : voilà la géniale idée soufflée à Victoria, artiste lyrique fauchée, par un impressario vieillissant, sans emploi, plaqué et homosexuel. Chiche ! D'autant que ce jeu des apparences devient vite un brillant prétexte pour faire émerger la bissexualité qui sommeille en chacun de nous. A l'image des personnages du film, le Paris d'avant guerre qui sert de décor à l'histoire est un réjouissant labyrinthe de faux-semblants. Blake Edwards se régale (et nous avec !), mélange les genres et les sexes, et offre à sa chère Julie Andrews son plus beau rôle.

Videodrome

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Réalisé par : David Cronenberg (1943 - )
En : 1983, Canada
Acteurs principaux : James Woods (1947 - )
Genre(s) : c'était demain /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 87 mn, couleur

Critique perso :

Videodrome est un programme télé qui vise tout ce qu'il y a de plus bas chez les spectateurs. En gros, pour ce qu'on peut en voir : des nanas à moitié à poil qui se font gentiment torturer, mutiler, assassiner. Ca coûte pas cher, c'est excitant, ça pourrait rapporter gros à Max et à sa chaîne de troisième sous-sol, exactement ce qu'il cherche. Videodrome est un programme télé qui rend con et accro. On y goûte en faisant mine d'être dégoûté, on y revient, on n'en sort pas. Du trash-reality show avant l'heure, une espèce de Goulag de la tentation. Videodrome est un programme télé qui rend fou. Ca rentre par les yeux, ça dérègle les sens, ça modifie le corps. Avec ça, le mythe de la fiction catharique, c'est vraiment de la bonne blague. Attention, Videodrome is watching you, tous les soirs à 20h30.

Ensayo de un crimen - Vie criminelle d'Archibald de la Cruz (La)

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Réalisé par : Luis Bunuel (1900 - 1983)
En : 1955, Mexique
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 91 mn, NB

Critique perso :

Derrière son air de dandy distingué, Archibald est un petit garçon. Un petit garçon attaché de façon fétichiste à sa boîte à musique et persuadé que souhaiter la mort de quelqu'un suffit à le tuer. Pour faire face à l'irruption du désir dans sa vie, cette mythologie d'enfant gâté n'est pas le bagage idéal. Déconcerté par la proximité du sexe et de la mort, il devient un serial killer mental ayant bien du mal à distinguer ses fantasmes de ses actes. Bunuel filme les ravages de la culpabilité dans l'éducation bourgeoise comme un grand jeu pervers et raffiné...

Saikaku ichidai onna - Vie d'O'Haru, femme galante

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Réalisé par : Kenji Mizoguchi (1898 - 1956)
En : 1952, Japon
Acteurs principaux : Toshirô Mifune (1920 - 1997), Takashi Shimura (1905 - 1982), Kinuyo Tanaka (1910 - 1977)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /vers le soleil levant /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

Dame O'Haru naît en plein coeur du Japon médiéval, dans une noble famille. Manque de bol : elle naît femme, et cela seul suffira à son éternel malheur. A croire qu'elle l'a bien cherché : elle est trop belle, trop gentille, trop aimante, trop soumise. Les étapes de son chemin de croix se confondent avec chacun des hommes qu'elle a connus, qu'ils soient père, amants, maris ou maquereaux (ce qui de toute façon revient au même) : rien que des brutes, avec plus ou moins de savoir-vivre. Chaque plan du film rend sensible son enfermement, réduit son espace vital, la met en cage. Trop belle, trop gentille, trop aimante, trop soumise. Trop bon.

Vita difficile (Una) - Vie difficile (Une)

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Réalisé par : Dino Risi (1916 - 2008)
En : 1961, Italie
Acteurs principaux : Franco Fabrizi (1926 - 1995), Lea Massari (1933 - ), Alberto Sordi (1920 - 2003)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 118 mn, NB

Critique perso :

Silvio est un brave garçon. Pendant la guerre, il fait le bon choix : il se retrouve dans le camp des anti-fascistes et se terre bravement dans un moulin abandonné pendant des mois, aux bons soins d’Elena, paysanne locale qui a tué à sa place un méchant nazi. Reconnaissant, il embarque Elena à la fin de la guerre partager sa vie de journaliste romain intègre et misérable. Brave garçon il est, brave garçon il restera. Il consacre sa vie à dénoncer les puissants, même si les puissants le sont souvent plus que lui. Accessoirement, il passe aussi sa vie à reconquérir Elena, pas sûre, elle, d’avoir fait le bon choix, et plus prompte aux accommodements avec les transformations de l’Italie de l’époque. Une Italie décidément pas trop faite pour les braves garçons. Le film est, lui, infiniment drôle et cruel, pied de nez aux puissants et hommage désabusé aux braves garçons dépassés par les événements. Du tout meilleur choix !

It's a Wonderful Life - Vie est belle (La)

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Réalisé par : Frank Capra (1897 - 1991)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : Lionel Barrymore (1878 - 1954), Gloria Grahame (1923 - 1981), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 130 mn, NB

Critique perso :

A quoi ça pourrait ressembler, un saint américain ? L'hypothèse George Bailey est ce qu'on propose de mieux sur le marché. Tout petit déjà, il sauve son frère et un petit commerce de la noyade. Il nourrit toute sa vie des ambitions de grand explorateur, sans jamais quitter son village natal. Il devient un père de famille fidèle et honnète, tout en exerçant la profession de banquier sympa. Tant de contradictions refoulées le mènent bientôt au bord de la dépression, et là il faut quand même qu'un ange stagiaire s'y colle pour le sauver du suicide. En lui montrant -sublime trouvaille- que le monde tourne nettement plus rond avec lui que sans. Quand le conte de Noël rencontre la mauvaise conscience américaine et que Capra s'en mèle, ça devient du grand art.

Vie est un roman (La)

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1983, France
Acteurs principaux : Fanny Ardant (1949 - ), Pierre Arditi (1944 - ), Sabine Azéma (1949 - ), André Dussolier (1946 - ), Vittorio Gassman (1922 - 2000), Ruggero Raimondi (1941 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

C'est un beau roman, c'est trois belles histoires. Ca se passe dans un drôle de chateau hybride, hanté par un drôle d'esprit appelé Utopie -celui qui pousse les grandes personnes à vouloir redevenir des enfants... La première histoire est une utopie 1920, menée par un étrange Comte venu d'East-Europa. La deuxième est une utopie d'aujourd'hui : un colloque, genre stage MGEN pour profs zèlés en vacances. La troisième -la seule qui ne fait de mal à personne- est une utopie de toujours, avec chevalier, dragon et princesse. Le tout fait forcément un film hybride, qui en plus fait feu de tous arts en mêlant la BD et la comédie musicale, l'architecture et le conte de fée. Ma conclusion perso : pour faire le bonheur des autres, mieux vaut miser sur l'art, les beaux romans et les belles histoires.

Vie ne me fait pas peur (La)

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Réalisé par : Noémie Lvovsky (1964 - )
En : 1999, France
Acteurs principaux : Jean-Luc Bideau (1940 - ), Nelly Borgeaud (1931 - ), Valeria Bruni Tedeschi (1961 - ), Daniel Ceccaldi (1927 - 2003), Emmanuelle Devos (1964 - ), Julie-Marie Parmentier (1981 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Elles sont quatre copines de lycée, pour la vie évidemment. A cet âge-là, tout ce qu'on dit est fait pour qu'on y croie soi-même, comme le titre performatif le laisse entendre. Elles voudraient bien, donc, ne pas craindre ce qui les attend dans la vie, elles en attendent beaucoup, mais ne savent pas quoi. C'est long, la salle d'attente des années lycées. Les parents n'y comprennent pas grand chose, les garçons sont mignons mais un peu cloches, les hommes sont un peu trop vieux, la musique est trop forte. En quelques mois, quelques années, elles vont apprendre à faire connaissance avec elles-mêmes. Noémie en a visiblement été si marquée que, plus tard, elle aura encore envie d'y retourner, pour n'y pas changer grand chose. C'est là sans doute, qu'elle a trouvé la recette de ses meilleurs films à venir.

Private Life of Henry VIII (The) - Vie privée d'Henry VIII (La)

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Réalisé par : Alexander Korda (1893 - 1956)
En : 1933, USA
Acteurs principaux : Robert Donat (1905 - 1958), Charles Laughton (1899 - 1962)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

L'Angleterre du XVIème siècle, rubrique people. Le roi est un gros lard libidineux, genre Laughton vieux -pourtant, il est encore assez jeune. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il ne brille guère par sa lucidité matrimoniale : il lui faudra 6 mariages et quelques enterrements pour venir à bout de sa libido. La première femme nous est épargnée, pas la deuxième, décapitée le jour du mariage avec la 3ème. Dans le tableau de chasse, il y aura aussi une princesse de Clève (mais les français savent bien qu'elle ne se marie pas par amour). La leçon de politique est plutôt sommaire, mais la tentative d'auto-absolution (c'est la faute des femmes s'il est si seul, finalement) presque touchante (bel exploit de l'acteur).

Vie rêvée des anges (La)

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Réalisé par : Erick Zonca (1956 - )
En : 1998, France
Acteurs principaux : Elodie Bouchez (1973 - ), Grégoire Colin (1975 - ), Natacha Régnier (1974 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /en France profonde /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

Celle qui croyait aux autres, celle qui n'y croyait pas... Isa la brune est douée pour les contacts et la débrouille joyeuse. Elle fait la route, déniche des petits boulots et ouvre toutes les portes avec son sourire. Marie, elle, est une boule d'énergie contractée, un hérisson blond qui ne sait pas comment exprimer sa révolte. Elles vont vivre ensemble le temps d'un hiver dans le Grand Nord (à Lille...). Ce film, c'est comme un gros bloc de vie brute qui nous tombe dessus. Les actrices sont extra. Elles expérimentent dans leur corps la lutte des classes et le cheminement spirituel. Deux anges passent...

Ville est tranquille (La)

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Réalisé par : Robert Guédiguian (1953 - )
En : 2000, France
Acteurs principaux : Ariane Ascaride (1954 - ), Jean-Pierre Darroussin (1953 - ), Gérard Meylan (1952 - ), Julie-Marie Parmentier (1981 - )
Genre(s) : en France profonde /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 89 mn, couleur

Critique perso :

La ville, c'est Marseille. Et tranquille, ce n'est pas précisément l'adjectif qui surgit spontanément quand on pense à elle. Et pour cause ! S'y croisent des politiciens corrompus, des retraités mafieux, des petits postulants fascistes, un tueur à gages, quelques prostituées junkies et des ouvriers en rupture de travail ou de syndicats... La faune, a priori, n'y est donc pas particulièrement attrayante. Sauf que, sauf que, ce sont les mêmes, ou leurs très proches, qui sont aussi capables d'expérimenter le sacrifice maternel, l'accueil de l'étranger, l'ouverture à l'art des plus démunis et l'indéfectible fidélités des anciennes amours... Ironique et contradictoire, ce portrait collectif s'impose par sa complexité, son énergie désespérée et son humanité.

Vincent, François, Paul et les autres

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Réalisé par : Claude Sautet (1924 - 2000)
En : 1974, France
Acteurs principaux : Stéphane Audran (1932 - 2018), Gérard Depardieu (1948 - ), Marie Dubois (1937 - 2014), Yves Montand (1921 - 1991), Michel Piccoli (1925 - ), Serge Reggiani (1922 - 2004)
Genre(s) : portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 109 mn, couleur

Critique perso :

Ce film, c'est les années 70 (post crise pétrolière) de la classe moyenne à lui tout seul. Pas de message révolutionnaire là-dedans, pourtant. Juste que les meilleurs copains sont ceux avec qui on joue au foot dans un pré le dimanche. Que les trucs essentiels ne se disent que devant un verre au bistrot ou un gigot à découper. Qu'à la quarantaine passée, la vie commence à sentir le roussi. Qu'il n'est pas rare de connaître des problèmes d'argent, de perdre quelques femmes et quelques illusions, et de commencer à camoufler les pépins de santé qui pointent. Ce film n'a pas mal vieilli, bien au contraire : en le voyant, je retrouve mes parents (côtés militants en moins) rajeunis. S'ils sont encore vivants pour toujours, c'est grâce à M. Sautet.

Sono otoko, kyobo ni tsuki - Violent cop

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Réalisé par : Takeshi Kitano (1947 - )
En : 1989, Japon
Acteurs principaux : Takeshi Kitano (1947 - ), Susumu Terajima (1963 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Une histoire de petits délinquants et de grands dealers. L'affrontement d'un policier autiste, en guerre contre tout le monde, et d'un tueur sadique. La confrontation entre des yakusas pourris et des flics pourris. La violence anonyme de la ville, la froideur de la nuit. Des corps et des murs. Une histoire de douleurs muettes, aussi, de coups de poing et de coups de feu. Pour respirer (un peu) : la mer, et Chagall (mais pas plus de 2mn). Très prometteur et aussi noir que son humour, c'est dire.

Visiteurs du soir (Les)

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1942, France
Acteurs principaux : Arletty (1898 - 1992), Jules Berry (1883 - 1951), Alain Cuny (1908 - 1994), Marie Déa (1912 - 1992), Marcel Herrand (1897 - 1953), Fernand Ledoux (1897 - 1993)
Genre(s) : conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

On est au temps (et dans les terres) des très riches heures du duc de Berry, la paix n'a que trop duré. Pour éviter aux hommes d'être heureux trop longtemps, le Diable a parfois envie d'ajouter son grain de fiel à l'histoire. Deux de ses envoyés arrivent donc sur Terre. Il y a Gilles, musicien mélancolique, parfois hélas un peu attiré par le côté lumineux de la Force. Et il y a Dominique, dont on se demande si les autres l'apprécient plus en homme ou en femme (et si il/elle eut jamais un coeur). Ils sont là pour faire des ravages, ils en font. Pourtant, s'ils utilisent les mêmes mots, leurs yeux ne disent pas toujours la même chose. En fait, Gilles se met même à croire un peu trop à son propre jeu avec Aaaannne. Alors, le Diable lui-même vient remettre un peu de (dés)ordre dans tout cela. Le film est un rien pompeux et solennel. On ne sait trop si c'est le coeur de la France sous occupation qu'il a voulu faire battre, à la fin, mais au moins a-t-il donné naissance à une belle statue palpitante, une certaine idée du cinéma français.

Vitelloni (I)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1953, Italie
Acteurs principaux : Franco Fabrizi (1926 - 1995), Alberto Sordi (1920 - 2003), Leopoldo Trieste (1907 - 2003)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 104 mn, NB

Critique perso :

20 ans avant, le petit garçon de Amarcord avait déjà la trentaine. En fait, ils sont 5 mais parlent d'une seule voix (off) ; ce sont des vitelloni, c'est-à-dire des glandus, des bons-à-rien -poil dans la main. Ils habitent en couple avec leur mamma, ou leur papa, ou les deux. Ils font de grands projets en arpentant les pavés. Leur chef, c'est Faustau, celui qui plait aux dames. Plus intrépide que les autres, il tente le coup de se marier et, même, de travailler. Mais, pour vendre de la pacotille religieuse, il se fait la tête de El et on a décidément du mal à lui faire confiance. Les autres se contentent d'être des piliers de fêtes, blasés d'avance de la catastrophe tranquille de leur vie qui s'annonce. C'est pas drôle tous les jours, la Dolce vita de province.

Vivement dimanche !

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1983, France
Acteurs principaux : Fanny Ardant (1949 - ), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Des meurtres à la pelle, un suspect tout trouvé, sa brune secrétaire qui mène l'enquête. La ville, la nuit, la pluie, le mystère pour rire. Truffaut s'amuse. C'est comme s'il récapitulait tous ses films : les détectives privés de Baisers volés, l'ascenseur de la Peau douce, l'imperméable de La Femme d'à côté, le théâtre du Dernier métro... et un Homme qui aimait (trop) les femmes. C'est comme s'il faisait des clins d'oeil : à maître Hitchcock, à maître Hawks, à L'Ange bleu et aux Sentiers de la gloire. Et c'est comme si, aussi, il rendait hommage à la langue française, en casant dans les dialogues le plus grand nombre possible d'expressions idiomatiques. Et il s'en va (c'est son dernier film) dans un sourire.

Ikiru - Vivre

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Réalisé par : Akira Kurosawa (1910 - 1998)
En : 1952, Japon
Acteurs principaux : Takashi Shimura (1905 - 1982)
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine /vers le soleil levant /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 143 mn, NB

Critique perso :

On s'est tous posé la question : qu'est-ce qu'on ferait si on savait n'avoir plus que quelques mois à vivre ? Réponse nippone en 3 leçons : s'amuser, tenter une rencontre, agir. Comme ça, ça a l'air facile mais quand on a enterré sa femme et qu'on s'est déjà enterré soi-même sous la paperasserie pendant 30 ans, tout est à réapprendre. Et un film là-dessus, c'est encore plus dur à réussir : éviter le mélo, préserver le silence et le mystère, privilégier la délicatesse... Mais la morale est claire : un type à l'enterrrement duquel l'ambiance monte à mesure que les réserves de saké baissent n'a certainement pas raté sa vie !

Voce della luna (La)

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1990, Italie
Acteurs principaux : Roberto Benigni (1952 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Un poète à lunettes rondes et aux yeux en soucoupes entend la lune lui parler. Sa vie (ou sa mémoire ou son imagination ?) est peuplée de gens bizarres : un vieux con parano, des madonnes, des Cendrillon, des hommes pas à la hauteur, le roi et la reine des gnocchis (qui président à l'élection de Miss Farine), des cerbères policiers à poils longs, des jeunes qui aiment Michael Jackson (entre autres). La cacophonie règne. Sa vie (ou sa mémoire ou son imagination ?) est pleine de ronds, de trous, de trappes, de puits et de passages ovoides (quasiment un par plan) : c'est comme si la lune faisait des petit(e)s. Et quand, à la fin, trois frangins allumés finissent par la décrocher (la lune), cela n'étonne personne. La télé essaie bien de l'interviewer, mais, heureusement, elle ne parle qu'au poète. Elle lui conseille de faire silence -ce que Fellini, hélas, s'empresse de faire.

Ladri di biciclette - Voleur de bicyclette (Le)

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Réalisé par : Vittorio De Sica (1902 - 1974)
En : 1948, Italie
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

Ce film est, quelques années après Rome, ville ouverte, le deuxième manifeste du néoréalisme italien, qui consista à sortir des caméras en plein air pour filmer la dignité des exclus et des perdants. Ricci, donc, est de ceux-là. Pas du genre causant. Au début, pourtant, il dégotte un bon boulot qui consiste à placarder des affiches de Gilda sur les murs de Rome. Mais, dès le premier jour, il se fait voler son indispensable outil de travail : sa bicyclette. Faire un chef d'oeuvre avec ça n'était pas gagné d'avance (j'en sais quelque chose : je viens de me faire voler mon vélo, aussi !). Mais Ricci a un fils aussi craquant que le Kid de Charlot. Mais il est brave et courageux, et la société cruelle. Mais les plus désespérés sont les plans les plus beaux.

Hitch-Hiker (The) - Voyage de la peur (Le)

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Réalisé par : Ida Lupino (1918 - 1995)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Edmond O'Brien (1915 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 71 mn, NB

Critique perso :

Deux potes en vadrouille (soit disant qu'ils vont à la pêche) en prennent un troisième en stop. Mauvaise pioche : le gars en question est un tueur en série pervers. En plus, il a la tête de l'emploi (il est très moche et très malheureux) et ne dort que d'un oeil (l'autre est toujours ouvert, comme celui du spectateur). Il a juste besoin de se faire conduire à l'autre bout du pays, de l'autre côté du désert. D'autres hommes (des flics) ne vont pas tarder à être à leur trousse. Ce road-huis-clos-movie où la tension monte aussi vite que la température est l'oeuvre d'une des (très) rare réalisatrice d'Hollywood. Elle s'amuse à mettre trois hommes dans une voiture, quelques autres en décor, et les regarde apprendre à se détester. Ils font ça très bien. Elle aussi.

Viaggio in Italia - Voyage en Italie

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Réalisé par : Roberto Rossellini (1906 - 1977)
En : 1953, Italie
Acteurs principaux : Ingrid Bergman (1915 - 1982), George Sanders (1906 - 1972)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 79 mn, NB

Critique perso :

L'homme (se réveillant dans la voiture) : "Where are we ?". La femme (au volant) : "I don't know exactly !". Tout est dit. Où sont-ils, effectivement ? Quelque part en Italie, quelque part dans leur vie, à côté de leurs pompes anglaises. Le prétexte du voyage, c'est la vente d'un héritage. Le résultat, c'est la confrontation avec eux-mêmes, face à face. La femme en profite pour visiter les musées et les rues de Naples. L'homme tente un séjour à Capri. Leur couple, c'est fini. Pas à la hauteur de ceux qui gisent encore sous les cendres de Pompei. Et pourtant, le Vésuve fume encore... Voyager en Italie, c'est prendre l'éternité en pleine tronche. Le film est un hybride de parcours initiatique et de documentaire sur la vie à deux. Un alliage étrange qui fait des étincelles, la rencontre inoubliable de l'eau et du feu.

Fantastic Voyage - Voyage fantastique (Le)

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Réalisé par : Richard Fleischer (1916 - 2006)
En : 1966, USA
Acteurs principaux : Stephen Boyd (1931 - 1977), Arthur Kennedy (1914 - 1990), Edmond O'Brien (1915 - 1985), Donald Pleasence (1919 - 1995), Raquel Welch (1940 - )
Genre(s) : c'était demain /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Pour une opération chirurgicale délicate, trois types sérieux et une assistante blonde sont réunis dans un petit sous-marin et, réduits à la taille d'atomes de ciron, expédiés à la seringue dans un corps humain. Transformés en nanotechnologies vivantes, ils explorent donc les mystères de l'organisme par l'intérieur. Brillante idée, propice à un dialogue surréaliste (du genre : "la troisième veine à gauche, c'est le coeur" ou, côté labo, "silence, ils sont dans l'oreille !"), à un cours de bio rigolo et, surtout, à des décors en piscine psychédéliques et inédits. Dans le rôle des ennemis de l'intérieur, les anticorps ou les globules blancs (même quand ils sont en papier collant ou en coton hydrophile) renouvellent avantageusement les panoplies d'aliens habituels. Ca ressemble un peu au voyage de Tintin sur la lune, en plus liquide et plus flashi. Sinon, peu de vertige métaphysique mais un indice tout de même : le méchant, c'est celui qui n'a pas lu Pascal.

Tôkyô monogatari - Voyage à Tokyo

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Réalisé par : Yasujirô Ozu (1903 - 1963)
En : 1953, Japon
Acteurs principaux : Setsuko Hara (1920 - 2015), Chishû Ryû (1904 - 1993)
Genre(s) : pauvre espèce humaine /vers le soleil levant
Caractéristiques : 135 mn, NB

Critique perso :

C'est un vieux couple qui vit dans une petite ville de province. ils ont l'air doux et gentils, ils ont l'air d'avoir eu une vie belle et modeste. Cinq enfants, si j'ai bien compté, un qui est mort pendant la guerre, deux qui vivent à Tokyo. Ils se font une joie d'aller leur rendre une petite visite. Les enfants ont un peu de mal à partager cette joie… Un petit tour et puis s'en vont, c'est à peu près le seul pitch du film. Et c'est pourtant le film d'Ozu qui concentre et synthétise le mieux tous les éléments de son cinéma : les liens familiaux qui enferment et qui libèrent en même temps, les parents qui encombrent et les enfants qui déçoivent, les transmissions qui prennent des chemins détournés, les discussions qui ne disent rien et les silences qui disent tout, les gênes qui viennent de ce qu'on ne voudrait pas gêner, les confidences aux copains qui échappent devant un comptoir de saké, les choses et les gens qui cherchent leur bonne place dans le monde, la vie et la mort et le temps qui filent et qui échappent toujours… Un vieux couple et l'histoire de toute l'humanité…

Two for the Road - Voyage à deux

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Réalisé par : Stanley Donen (1924 - )
En : 1967, USA
Acteurs principaux : Claude Dauphin (1903 - 1978), Albert Finney (1936 - ), Olga Georges-Picot (1940 - 1997), Audrey Hepburn (1929 - 1993)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Il faut une épidémie de varicelle et pas mal de hasards pour que Mark et Joanna se retrouvent à faire un bout de chemin ensemble (et en France). Après, ils ne peuvent plus s'empêcher de repasser toujours par les mêmes routes. Au cours de leurs vacances successives, toutes mélangées au présent de la mémoire, on voit défiler les panneaux indicateurs de leur histoire, les bornes kilométriques de leurs souvenirs. Au fil du temps, les marques de voiture et les brushing gagnent en standing (c'est comme ça qu'on arrive à s'y retrouver) ce qu'ils perdent en insouciance. L'architecte fait des lignes de plus en plus droites. La choriste fait de moins en moins entendre le son de son rire. Ils finissent même, bien sûr, par franchir les feux rouges et les lignes jaunes (qui, d'ailleurs, en France, sont blanches). Avec un sujet pareil, facile de filer loin la métaphore. Pas si facile de ne jamais quitter la route des souvenirs universellement partagés.

Peeping Tom - Voyeur (Le)

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Réalisé par : Powell (& Pressburger) (1905 - 1990)
En : 1960, Angleterre
Acteurs principaux : Karlheinz Böhm (1928 - 2014), Moira Shearer (1926 - 2006)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 101 mn, NB

Critique perso :

Mark l'égorgeur vit à Londres, dans les années 60. Il est photographe et apprenti cinéaste, il a un vague accent prussien. Peut-être un ancêtre qui s'appelait M du côté de Berlin. Comme le caméraman de King Kong, il a une prédilection pour le filmage de la femelle hurlante de type homo sapiens. Comme le proprio dérangé de Psychose, il a la pulsion scopique au bout du couteau. Alors, pour combiner les deux, il a mis un couteau au bout de son pied de caméra. C'est un serial-matteur du type le plus dangereux. Comme tous les cinéphiles compulsifs, c'est aussi un petit garçon qui n'a jamais grandi, un taré au doux regard qui tue. Cette enquête sur le visage de la terreur, miroir déformant, baroque et glaçant, fait l'effet d'un coup de projecteur dans l'âme. Comme si l'oeil était dans la caméra et nous regardait.

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W


Wallace & Gromit

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Réalisé par : studios Aardman
En : 1995, Angleterre
Genre(s) : animation /du rire aux larmes (et retour) /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 83 mn, couleur

Critique perso :

C'est le couple le plus totally british du cinéma : un célibataire, aventurier pantouflard et excentrique, et son chien technico-intello -on ne sait pas trop lequel est le maître de l'autre. Ils sont spécialisés dans la conception/réalisation de machines extravagantes et néanmoins parfaitement opérationnelles : fusée lunaire à pédale, pantalon mécanique, canon à porridge, tricotteuse à moutons... L'attirail de James Bond au service de la plus royale banalité. Ils ne parlent pas beaucoup et leurs motivations sont parfois obscures : en gros, ils se compliquent la vie pour se la rendre plus facile. Et ils adorent le fromage, ce qui excuse et justifie tout. Les acteurs sont épatants, ils sont en pâte à modeler. Il se pourrait bien que ceux qui tirent les ficelles (enfin, qui tordent le caoutchou) soient, eux-aussi, de géniaux créateurs.

Wallace & Gromit in The Curse of the Were-Rabbit - Wallace & Gromit et le Mystère du lapin-garou

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Réalisé par : studios Aardman
En : 2005, Angleterre
Genre(s) : jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pour petits et grands enfants /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Ca se passe dans une petite communauté de la campagne anglaise, qui ne vit que pour son prestigieux concours annuel de grosses légumes. Cette année, la récolte miraculeuse semble menacée par une attaque coordonnée de hordes de lapins affamés. Heureusement, Wallace & Gromit, inventeurs omni-compétents, veillent. Mais ce serait négliger un peu vite que, derrière le moindre sujet vivant de sa Gracieuse Majesté, sommeille un Mr. Hyde-Hulk ou un Jack-Dorian Gray Kong, animal à poils longs et à idées courtes, éventreur (de citrouilles) et trucideur (de carottes). Après avoir acclimaté la haute technologie et le film noir à la mortelle banalité des provinces britishs, voilà que Wallace et son chien laissent le thriller envahir leur potager, et le monstre végétarien dévoiler la monstruosité carnivore de ses concitoyens. Les anglais ont trouvé le(s) superhéro(s) en pantoufles à la hauteur de leur flegme immortel.

Trouble in Mind - Wanda's cafe

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Réalisé par : Alan Rudolf (1943 - )
En : 1985, USA
Acteurs principaux : Geneviève Bujold (1942 - ), Keith Carradine (1949 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 107 mn, couleur

Critique perso :

On dirait un vieux film noir -peut-être même un western- vaguement modernisé et relooké... Dans le saloon de Wanda -le genre revenu de tout-, donc, on trouve un ancien flic -le genre arrivé de nulle part- et un jeune couple -le genre à trainer partout. Un peu d'amour, un peu de trafic, un peu d'embrouille et le destin s'emballe une fois de plus pour ceux-là. Ils donnent l'impression de vivre une histoire écrite pour d'autres, de faire et refaire des gestes ancestraux presque malgré eux. La routine des tragédies humaines, quoi...

West Side Story

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Réalisé par : Robert Wise (1914 - 2005)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : George Chakiris (1934 - ), Natalie Wood (1938 - 1981)
Genre(s) : New York - New York /conte de fées relooké /en avant la musique
Caractéristiques : 145 mn, couleur

Critique perso :

Et si l'inconscient était structuré comme une ville !? (à moins que cela ne soit le contraire). Sur les balcons et les terrasses : les rêves d'amour et d'intégration, l'Amérique quoi. Dans les sous-sols, les règlements de comptes sordides. Le reste pour guetter la bande d'en face -les autres. Et surtout, surtout, gaspiller son énergie en chantant sa révolte et en dansant sa vie. D'ailleurs, c'est drôle, on ne peut presque pas s'empêcher de chanter avec eux, tellement on connaît tout par coeur. Shakespeare en a fait un remake par anticipation, situé à Vérone, mais nettement moins pêchu.

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Y


Yeux sans visage (Les)

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Réalisé par : Georges Franju (1912 - 1987)
En : 1959, France
Acteurs principaux : Charles Blavette (1902 - 1967), Claude Brasseur (1936 - ), Pierre Brasseur (1905 - 1972), Alida Valli (1921 - 2006)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 88 mn, NB

Critique perso :

Des jeunes filles disparaissent autour de Paris. Quand on les retrouve, elles sont affreusement défigurées. Un grand chirurgien mondain reconnaît pourtant l'une d'elle comme sa fille. Mais la vérité pourrait bien être un peu plus complexe et plus tordue. Dans son antre, après avoir passé plein de portes et monté plein d'escalier, notre Dr. Moreau de banlieue cache d'horribles secrets. Une poupée de porcelaine vivante, une secrétaire-rabatteuse en 2CV, un savant fou et un chenil : ces personnages sortent tout droit du cinéma expressionniste muet - ou de Frankenstein. Le film, lui, est de ceux qui va voir ce qu'il y a derrière les faces et les façades lisses. Il est plein de bruits et de douleurs, et de poésie noire.

Yi Yi

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Réalisé par : Edward Yang (1947 - 2007)
En : 2000, Taiwan
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914) /vers le soleil levant
Caractéristiques : 170 mn, couleur

Critique perso :

Il y a des films qui nous rappellent qu'on a des membres de sa famille qui vivent aux antipodes - que peut-être, même, c'est nous qui y vivons. Toutes les étapes d'une vie en un peu moins de 3h : les apprentissages, les découvertes, les déceptions, les compromis, les détours capricieux du destin qui jamais, pourtant, ne repasse deux fois exactement au même endroit. Et tout ça, dans quelques jours de la vie de N.J., cadre dans une société d'informatique qui ne se porte pas très bien (ni le cadre ni la société, d'ailleurs). La technique ne peut rien contre la mélancolie des hommes -sauf quand elle donne naissance à un cinéma aussi sublime.

Yol

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Réalisé par : Yilmaz Güney (1937 - 1984)
En : 1982, Turquie
Genre(s) : pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 114 mn, couleur

Critique perso :

Portrait de quelques prisonniers turcs dans les années 80, le temps d'une permission. On en suit surtout cinq, que l'on reconnaît à la forme de leur moustache. Taciturnes, la mémoire lourde. Ils ne quittent leur geôle que pour constater que c'est leur pays tout entier qui est devenu une prison. Ils sont sans cesse contrôlés, fouillés ; l'armée est partout. Chacun doit se coltiner sa petite tragédie portative. Et pas facile de compter sur les autres, quand tout le monde a la tradition et l'honneur particulièrement chatouilleux. Contre la chappe de honte et de vengeance qui pèse sur ses compatriotes, le réalisateur plaide le pardon et la compassion. Portrait de la Turquie vue du trou, par un de ses artistes emprisonné. Un regard d'homme libre.

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Z


Zabriskie Point

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Réalisé par : Michelangelo Antonioni (1912 - 2007)
En : 1970, USA
Acteurs principaux : Rod Taylor (1930 - 2015)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Zabriskie Point, c’est un coin paumé de la Vallée de la Mort, en Californie. Du désert jaune à perte de vue, un infini de sable gratiné au soleil. C’est là que se retrouvent Mark, étudiant contestataire et emprunteur d’avion occasionnel (pseudo Karl Marx, pour les flics) et Daria, employée-modèle-voire plus d’un entrepreneur audacieux (promoteur d’une station balnéaire en plein désert - une mauvaise interprétation de ces paradis artificiels dont parlent ses contemporains, sans doute). Ils y font l’amour-pas la guerre, en rêvant y être rejoints par tous ceux qui ont aussi jeté la clé (de leur maison bleue). Bon, très bien mais ça s’appelle pas Vallée de la Mort pour rien et le road-trip-psychédélique movie ne se terminera pas très bien pour Mark. Daria, elle, enverrait bien tout valser (son patron et toutes ses babioles capitalistes avec) dans un feu d’artifice Pink Floyd final. Antonioni, lui, a 58 ans mais il se verrait bien à la pointe de la contestation hippie. Toujours dans les bon plans, les bons coups et les bons coins, Michelangelo !

Zatôichi

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Réalisé par : Takeshi Kitano (1947 - )
En : 2003, Japon
Acteurs principaux : Tadanobu Asano (1973 - ), Takeshi Kitano (1947 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /conte de fées relooké /en avant la musique /vers le soleil levant
Caractéristiques : 116 mn, couleur

Critique perso :

On reprend un peu l'histoire là où Ran et Sept samouraïs l'avaient laissée. Voici Zatôichi, mass(acr)eur ambulant, artiste du découpage au sabre, justicier vagabond. Il est aveugle mais il a des yeux partout : il sent à travers les murs, entend à travers la matière, et même, des fois, lit à travers les pensées. Au rythme sonore des saisons, il va de ville en ville et de bar en tripot, réconfortant par ci, zigouillant par là. Comme un certain Garde du corps, il ne suit que son bon plaisir, semant des fleurs de sang sur son passage. La mise en scène synestésique est un régal pour les sens, le montage, tranché fin, a des éclaboussures temporelles saisissantes. A voir, même les yeux (grands) fermés.

Zelig

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1983, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Mia Farrow (1945 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 79 mn, NB/couleur

Critique perso :

Incroyable : le seul film où Woody change de lunettes ! Faut dire, on le reconnaîtrait trop vite. Faut dire, c'est pas lui du tout, c'est Léonard Zelig, figure oubliée de l'entre-deux guerres, que nous présente ce fort instuctif documentaire. Zelig, c'est l'homme caméléon, le "conformiste outrancier" que son extrême désir de se fondre dans la foule (gros parmi les gros, noir parmi les noirs, docteur parmi les docteurs...) finit par l'en faire sortir (de la foule). Les français trouvent qu'il est le symbole de n'importe quoi (et ils ont bien raison !). Dans des documents d'archives (presque) authentiques, on le voit faire la bise à Josephine Baker, semer la pagaille sur le balcon du pape Pie XI et dans le dos d'Hitler au congrès de Munich... Pour ce qui est des commentateurs contemporains, c'est le plus beau casting qu'on puisse trouver : Susan Sontag, Saul Bellow, Bruno Bettleheim, etc. ! Zelig, l'homme qui est tous les autres, est le plus grand des artistes et ce film-là est le plus jubilatoire que je connaisse.

Alexis Zorbas - Zorba le Grec

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Réalisé par : Michael Cocoyannis (1922 - 2011)
En : 1964, Grèce
Acteurs principaux : Alan Bates (1934 - 2003), Irene Papas (1926 - ), Antony Quinn (1915 - 2001)
Genre(s) : pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 142 mn, NB

Critique perso :

Un scribouillard coincé et en panne rencontre un Grec exubérant -Zorba- et l'embarque illico dans sa propriété familiale, dans l'espoir qu'il l'aide à remonter la pente. Il y pleut beaucoup, les autochtones sont très accueillants bien qu'ils s'entretuent un peu, les femmes sont belles mais en noir -mais belles. Traine même là-bas une vieille putain française qui a dû faire toutes les guerres. C'est la Crète, avant l'Euro. Zorba est son prophète, son maître Yoda shooté à l'Ouzo. Le voyage initiatique attendu fait un peu du sur-place et se termine en catastrophe joyeuse -ce qui le sauve in extremis. Enervant et attachant comme un Antony Quinn déchaîné.

Zéro de conduite

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Réalisé par : Jean Vigo (1905 - 1934)
En : 1933, France
Acteurs principaux : Jean Dasté (1904 - 1994)
Genre(s) : poésie en image /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 41 mn, NB

Critique perso :

D'abord, c'est des bruits, des gestes. Des gamins dans un train. Puis d'autres, sur le quai. Ambiance rentrée des classes dans un pensionnat pour garçons en province, début XXème siècle. Les petits anges ont un corps. Le surveillant Huguet est un bon bougre : il a vu tous les Charlot. Et le réalisateur, lui, tous les Bunuel qu'il a pu. Le surveillant général n'a pas l'art des réveils en douceur. Le principal n'est peut-être pas à la hauteur de sa tâche. Les pensionnaires les plus hardis -ceux qui fument dans les toilettes, bien sûr- fomentent un complot. Le plan inclut la plus belle bataille de pollochons du cinéma, la plus réjouissante émeute jamais filmée. Récit d'anti-apprentissage sulfureux (à l'époque) et poétique (même maintenant) et étonnant (pour toujours).

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1-9


2001: A Space Odyssey - 2001, l'Odyssée de l'espace

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Réalisé par : Stanley Kubrick (1928 - 1999)
En : 1968, USA
Acteurs principaux : Gary Lockwood (1937 - )
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique
Caractéristiques : 139 mn, couleur

Critique perso :

Accrochez vos ceintures : voici l'histoire de l'humanité depuis ses commencements, en deux temps trois tableaux. Dans le premier, on voit des singes qui se tiennent debout faire joujou avec des os (pour le meilleur et pour le pire). Dans le deuxième, quelques milliers d''années plus tard, l'homme fait toujours joujou, mais avec (ou contre) une machine intelligente (pour le meilleur et pour le pire). Dans le troisième, ça se complique : le temps et l'espace ne fonctionnent plus vraiment pareil, à moins que ce ne soit la conscience qui ait encore muté. A moins que d'invisibles tireurs de ficelles ne s'amusent... A chaque fois, un gros caillou parallélépipédique, comme posé là par un Grand Poucet à l"échelle de l'univers, semble montrer la voie à suivre. A chaque fois, la mobilité et le meurtre se raffinent. Ce jeu de piste de l'âme à la recherche de ses origines (ça ne s'appelle pas pour rien une Odyssée) est beau et mystérieux comme le testament qu''on voudrait transmettre aux étoiles.

2046

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Réalisé par : Kar-wai Wong (1958 - )
En : 2004, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Chen Chang (1976 - ), Carina Lau (1964 - ), Tony Leung Chiu Wai (1962 - ), Gong Li (1965 - ), Faye Wong (1969 - ), Zhang Ziyi (1979 - )
Genre(s) : c'était demain /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /poésie en image /vers le soleil levant
Caractéristiques : 129 mn, NB/couleur

Critique perso :

Cette fausse suite d'In the mood for love prolonge en fait tout autant Nos années sauvages. On y retrouve brièvement Lulu -alias Mimi- et surtout M. Chow qui s'est laissé pousser la moustache. Il écrit des romans de science fiction érotiques, invite des filles chez lui et croise la route de trois femmes sublimes et impossibles qui ont toutes quelque chose en elles de Mme Su (ses robes, son nom, son imagination, allez savoir...). Mais, avec elles, il ne parle qu'argent ou départs. Répétitions, incantations. 2046, c'est le pays d'où l'on ne revient jamais, la chambre où le temps s'est arrêté, la date vers laquelle les trains du futur filent sans fin. Un film-univers peuplé d'hommes désenchantés et d'androïdes à émotions différées, en rouge et vert comme l'impossible réunion des contraires, en spirales ovoïdes comme l'impossible retour du temps perdu. Personne n'avait aussi bien fantas-filmé les femmes depuis Sternberg, autant aimé leurs jambes depuis Truffaut ni traqué aussi délicatement leurs larmes depuis Almodovar.

25th Hour - 24 heures avant la nuit

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Réalisé par : Spike Lee (1957 - )
En : 2002, USA
Acteurs principaux : Edward Norton (1969 - ), Barry Pepper (1970 - ), Philip Seymour Hoffman (1967 - 2014)
Genre(s) : New York - New York /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 135 mn, couleur

Critique perso :

Monty, ex-dealer flambloyant dénoncé aux stup', a 24h de liberté devant lui. Après, il aura droit à 7 ans de réfexion derrière les barreaux. Il lui reste une copine magnifique, un père, un chien, des chefs. Quelques comptes à régler, avec les autres et avec lui-même. Ses deux principaux potes d'enfance s'en sont apparemment mieux sortis, mais ils se cognent aussi à leurs propres lignes blanches. Pas de Place au soleil pour tout le monde. Petits arrangements avec la tentation. Transgressions et conséquences. New-York, amputée de ses tours, a la même gueule de bois que ses héros. Après la flambe, retour à (Ground) Zero. Premier grand film post-trauma, sur les erreurs d'aiguillage et les aubes amères.

3 1/2

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Réalisé par : Chauveau, Holveck & Tellier
En : 2014, France
Acteurs principaux : Dominique Tellier (1963 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 90 mn, NB

Critique perso :

Hum, là j'avoue, j'ai un peu de mal à prétendre à l'objectivité. Non, c'est pas tout à fait un hasard si l'acteur-scénariste-co-réalisateur-monteur (sous pseudo) et homme à tout faire de l'affaire porte le même nom que moi. Et même, que c'est pas le seul à porter ce nom-là dans la distribution. En plus, on dirait qu'il s'est amusé, pour l'occasion, à réinventer l'histoire de quelqu'un d'autre que je connais aussi très bien, et même d'encore un peu plus près (désolée, pas possible d'en dire plus..!). En gros, le film un road movie paresseux : l'histoire de Stanislas, un mec qui lit 3 bouquins en même temps -voire un peu plus- et mène une vie un peu compliquée -voire un peu plus. Il est chargé par son boss de trimballer un bizarre instrument indien à 3 octaves -voire un peu plus- à 30km de là, et n'est pas pressé d'y arriver. Stanislas, il est super bon pour se faire inviter, désirer, servir... toujours en douceur et sans s'énerver. Il peut être très chiant, pédant et lâche -voire un peu plus- mais aussi plus innocent et naïf qu'il en a l'air. En fait, il est comme tout le monde, Stanislas, il rêve d'une vie qui soit aussi, encore, toujours un peu plus... A voir gratos ici !

Three Ages - 3 âges (Les)

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Réalisé par : Buster Keaton (1895 - 1966)
En : 1923, USA
Acteurs principaux : Buster Keaton (1895 - 1966)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /à l'antique
Caractéristiques : 63 mn, NB

Critique perso :

L'éternel masculin existe habituellement en 2 modèles : l'éternel soupirant et l'éternel emmerdeur. Pour rendre hommage à l'éternel féminin, l'éternel masculin n'a jamais reculé devant les moyens : plus fort, plus vite, plus riche... sera le vainqueur (l'essentiel, en la matière, n'est pas de participer). L'éternelle histoire de cette rivalité est hoquetée en 3 époques, façon Intolérance romantique et rigolo : un très lointain (et très approximatif) âge de pierre, un pittoresque empire romain, une ère nébuleuse et néanmoins contemporaine. Les costumes changent, les hommes restent. Et ça essaie de nous faire croire que les hisoires d'amour finissent bien, en général.

317ème section (La)

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Réalisé par : Pierre Schoendoerffer (1928 - 2012)
En : 1965, France
Acteurs principaux : Bruno Cremer (1929 - 2010), Jacques Perrin (1941 - )
Genre(s) : pauvre espèce humaine /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

La 317ème section était affectée au nord de l'Indochine : 4 français de métropole, des français du Laos. Des militaires dont l'armée n'a pas tout à fait réussi à effacer la personnalité. En 1954, alors que des négociations s'engagent à Genève -entre les politiques- elle reçoit l'ordre d'abandonner sa caserne et de se replier vers le sud. C'est cette marche forcée dans la jungle, à travers les villages terrorisés et les rivières en crue, que l'on suit. La traque, la peur, la fatigue. La mort qui rode. L'orgueil des combats. Des méthodes de commandos mobiles -mais à ce jeu-là, les adversaires invisibles sont pas mauvais, non plus. Une petite guerre inutile de plus, sauvée de l'oubli par un beau film tragique.

39 Steps (The) - 39 marches (Les)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1935, Angleterre
Acteurs principaux : Madeleine Carroll (1906 - 1987), Robert Donat (1905 - 1958)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 86 mn, NB

Critique perso :

Un type dont on ne sait rien accueille chez lui une inconnue et, parce qu'elle lui raconte une histoire d'espions à dormir debout, la laisse coucher dans son lit. Au matin, comme la fille a un poignard dans le dos, le type se croit obligé d'aller en Ecosse, pour aller dire il ne sait pas vraiment quoi à il ne sait pas vraiment qui (il n'est pas exclu, d'ailleurs, qu'il ait tout rêvé). Le début et la fin évoquent L'Homme qui en savait trop, le milieu est un pré-make de La Mort aux trousses, c'est-à-dire la traversée somnambulique (mais pleine d'énergie) d'une histoire dont l'enjeu se modifie en permanence. Quelque chose comme la quête éperdue de la mémoire perdue des origines de la quête (tout Hitch, déjà, quoi).

400 coups (Les)

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1959, France
Acteurs principaux : Jean-Pierre Léaud (1944 - ), Claire Maurier (1929 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pas drôle mais beau /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Avant, Truffaut, c'était le nom d'un jeune critique de cinéma très vache. Après, il est devenu... lui-même. Derrière le polémiste plein de morgue, on a vu Jean-Pierre Léaud, son double rajeuni, en sauvageon désemparé. Une mère trop absente, un père -adoptif- trop gentil. La Ruée vers l'or, Balzac et Monika lui tiennent lieu d'éducation -ou plutôt, lui sauvent la vie. Derrière le donneur de leçon, on a vu le meilleur peintre de l'enfance depuis Zéro de conduite et Allemagne année zéro, et le plus beau portrait de Paris à 1,20m du sol. On a croisé le regard d'Antoine Doinel qui avait vu la mer pour la première fois, et on lui a souri. Nouvelle vague, annnée zéro.

55 Days at Peking - 55 jours de Pékin (Les)

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Réalisé par : Nicholas Ray (1911 - 1979)
En : 1963, USA
Acteurs principaux : Ava Gardner (1922 - 1990), Charlton Heston (1924 - 2008), John Ireland (1914 - 1992), David Niven (1909 - 1983)
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 150 mn, couleur

Critique perso :

1900, en plein coeur de Pékin, là où la Citée Interdite (ah! la cruauté exotique de ses princes perfides) fait face à l'enclave occidentale (ah! le raffinement érudit de ses sages ambassadeurs). Les esprits s'échauffent, les boxers sont lâchés. Bientôt, c'est Shanghai Gesture contre Fort Alamo. Heureusement, la cavalerie est déjà arrivée sans qu'on l'ait sonnée. 55 jours de siège, c'est le temps qu'il faudra à cette grande brute de Charlton Heston pour regretter de ne pas avoir un coeur, et à cette grande garce d'Ava Gardner pour croire qu'elle en a retrouvé un. Ce western shop suey pas avare sur les feux d'artifices traîne une réputation qui n'est pas à la hauteur de son film.

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1963, Italie
Acteurs principaux : Anouk Aimée (1932 - ), Claudia Cardinale (1938 - ), Marcello Mastroianni (1924 - 1996)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /poésie en image
Caractéristiques : 138 mn, NB

Critique perso :

En rêve il étouffe, s'asphixie, s'échappe par le haut, s'écrase dans la mer. Dans la vraie vie, c'est un réalisateur célèbre en cure dans une ville d'eau, incognito. Chapeau, lunettes noires, courtisans, toute la panoplie. Il prépare un film avec un astronef, mais ça a l'air d'avoir du mal à décoller. C'est pourtant pas comme l'imagination, qui s'emballe vite. C'est pas non plus faute d'être bien entouré. Une maîtresse, des ex, des peut-être. Et (Allo chérie bobo !) une épouse dévouée, jamais très loin. Plein de muses, de fées ou de sorcières. Abracadabra, a(sa)ni(sa)ma(sa) ! Et v'là l'enfance qui débarque. Des fois, c'est les fantasmes qui prennent le relai. Le théâtre d'un esprit ressemble parfois à un drôle de cirque. Drôle de M. (dé)loyal. En tout cas, capable du genre de films qui fait décoller les âmes. Et s'échapper par le haut, avec ou sans astronef.

8 femmes

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Réalisé par : François Ozon (1967 - )
En : 2002, France
Acteurs principaux : Fanny Ardant (1949 - ), Emmanuelle Béart (1963 - ), Danielle Darrieux (1917 - 2017), Catherine Deneuve (1943 - ), Isabelle Huppert (1953 - ), Ludivine Sagnier (1979 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Dans la grande-famille-du-cinéma-français, on demande la grand-mère, la mère, sa (trop-)belle-soeur-rivale, sa soeur-pas-belle, ses filles, et quelques bonnes à tout faire qui attendent leur tour de casting. Dans le rôle du (grand-)père-parrain absent (assassiné ?), on prendra Cukor, Sirk, Demy et Truffaut... Rien que du beau monde. Lourd héritage pour un petit jeune. Il fait jouer ces dames au Cluedo, donc, en mode immersion totale. En grandes pros, elles bluffent et se donnent mutuellement des leçons de comédie, mais c'est en débutantes qu'elles poussent chacune une petite chansonnette. Pour le plaisir d'entendre les pires vacheries dans les plus belles bouches.


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