On serait à l'âge d'or du cinéma français. On aurait réuni un casting de rêve et on s'amuserait à imaginer le générique parfait : Molière au scénario, Bruegel aux décors et aux costumes, Rembrandt à la lumière... Voilà qui nous orienterait vers le XVIIème siècle, et vers les Flandres. Pourquoi pas une histoire de troupe espagnole à la mode Velasquez, qui prendrait ses quartiers dans une toile de Vermeer, par exemple : choc des cultures et guerre des parures. Luxe, ripaille et volupté. Un peu de féminisme dans le tableau, tout de même, pour montrer que c'était pas rigolo tous les jours. Mais on arriverait encore à croire à la paix des peuples. Cinq ans plus tard, certes, on n'y croirait plus : cette histoire d'occupation libératrice, non, ça ne serait plus possible. Mais là, elle arrive à nous rendre inguérissablement nostalgique d'un l'âge d'or qui n'a jamais existé.
Les gosses, ça tombe toujours du ciel quand on ne s'y attend pas. C'est ce qu'a l'air de se dire une triste fille-mère, à la sortie de l'hospice où elle vient d'accoucher. C'est ce que se disent, ensuite, deux voleurs de voiture mal inspirés. C'est ce que se dit, enfin, un petit homme à moustaches et à grandes chaussures. Le petit de la fille-mère devient donc le petit du petit homme. Bientôt, il a acquis ses bonnes manières : il sait semer les policiers et faire cuire les pancakes. Il est presque aussi bon comédien que lui. Le petit homme, ça lui donne des ailes. Après, pour relancer l'histoire, d'autres personnages tombent du ciel : des travailleurs sociaux, une gentille marraine, une ange coquine. Premier long métrage venu de la galaxie Chaplin. Une bonne étoile, à suivre.
C'est deux potes de lycée qui font Les 400 coups. Quand ils grimpent sur le même vélo, ils semblent ne former qu'un seul corps : deux petites têtes, quatre grandes jambes. Mais pour aller où ? Au bahut ils sèchent, rackettent, glandouillent, mal partis pour devenir pas grand chose. Pour jouer aux durs, ils se mettent à la boxe. Le plus doué n'est pas forcément celui qu'on croit (comme Rocco). A leur âge, tous les chemins ont l'air ouverts. Ils sont tous, aussi, durs et cruels. A coup d'ellipses fulgurantes et d'éclats de rire noirs, Kitano fait le portrait de sa jeunesse et des vies qu'il a grillées. Coup de bol, il lui en est restée une pour faire l'artiste.
Dans une île lointaine, une peuplade humaine survit sur une petite portion de territoire. Le reste est isolé par un haut mur et il s'y passe de drôles de choses. Le roi de ce monde perdu primitif s'appelle Kong : 6m de force brute et d'instincts à l'état pur. Des fois qu'on n'aurait pas compris, il est précisé que l'île a la forme d'un crâne... Les petits blancs qui y débarquent apportent avec eux les atouts de la civilisation occidentale : des armes lourdes, une caméra et une blonde. Avec elle, Kong va apprendre à jouer à la poupée Barbie, et à faire son plus beau sourire... Après, il est presque impossible d'ignorer qu'il finira sa vie dans une autre jungle (celle de New-York), au sommet de l'Empire State Building (où on peut encore se faire photographier en sa compagnie), avec toute notre sympathie. C'était au temps béni où les effets spéciaux n'étaient pas encore ennemis de la poésie et de l'émotion.
Il y a 9 ans, comme l'apprend la fille qu'ils n'ont pas eu ensemble, Rahul et Anjali étaient les meilleurs amis du monde (mais c'était toujours elle qui gagnait au basket). Et puis, maman est arrivée. Et puis, la fifille est née et maman est morte (je ne révèle aucun secret, c'est au début). Il serait temps de retrouver la trace d'Anjali... Ca tombe bien : elle s'est laissée pousser les cheveux et, de garçon manquée, est devenue une fille très réussie. Avant de se marier, elle doit s'occuper toute seule d'une centaine de gamins dans un camp de vacances... Moitié "college movie", moitié film de colo : le public visé est plutôt jeune. Habilement construit, c'est un plaidoyer sympatoche pour la diversité des sentiments (amour-amitié, relations triangulaires) qui s'arrête juste au seuil de plus grandes audaces (le réalisateur serait un peu gay que ça n'étonnerait personne). Sympa-pa-toc, donc.