Les 775 films en DVD d'Isabelle
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film(s) dont dont le titre courant en français commence par la lettre 'T'

42 réponses classées par ordre alphabétique


Tacones lejanos - Talons aiguilles

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Réalisé par : Pedro Almodovar (1949 - )
En : 1991, Espagne
Acteurs principaux : Victoria Abril (1959 - ), Féodor Atkine (1948 - ), Javier Bardem (1969 - ), Miguel Bosé (1956 - ), Marisa Paredes (1946 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

J'ai une théorie sur Almodovar : il me semble que ses personnages sont toujours travaillés par l'idée d'être quelqu'un d'autre. Aucun de ses films ne l'illustre mieux que celui-ci. Voici donc : une fille qui a toujours envié sa mère artiste (la mère lui a refait le coup de Sonate d'automne), un travesti compatissant, un juge qui joue à être son propre indic (et encore, je ne vous dit pas tout), et un mort qui aimait les femmes et que peu de monde regrette. Enfermés dans leur rôle, dans leur tête ou en prison, ceux-là ne sont à l'aise qu'en changeant d'identité par le travestissement, l'art et la dissimulation (et le sacrifice, aussi !). L'émotion, les couleurs et la musique sont aussi de la partie, comme pour un magnifique feu d'artifices tragique.

Blechtrommel (Die) - Tambour (Le)

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Réalisé par : Volker Schlöndorff (1939 - )
En : 1979, Allemagne
Acteurs principaux : Daniel Olbrychski (1945 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /entre Berlin et Moscou /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 142 mn, couleur

Critique perso :

Oskar, comme tous les hommes de sa famille, a toujours adoré vivre dans les jupes de sa mère. Il est blond comme son père polonais, têtu comme son père allemand. A 3 ans, il décide d'arrêter une fois pour toute de grandir, et se consacre à plein temps à son tambour. Cette audacieuse initiative lui permet de traverser les années 30-40 incognito, libre dans sa tête dans son corps d'enfant, tambour éternellement mineur. Oskar, c'est un peu une vigie qui n'arrête pas de sonner l'alerte, mais que personne n'écoute. C'est un grand homme qui veut rester petit dans un pays qui, lui, se trouve trop petit pour ses grandes ambitions. C'est comme l'Allemagne qui se projetterait dans une chambre noire : à l'envers, en miniature, mais terriblement ressemblante.

Cha no aji - Taste of Tea (The)

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Réalisé par : Katsuhito Ishii (1966 - )
En : 2004, Japon
Acteurs principaux : Tadanobu Asano (1973 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /poésie en image /vers le soleil levant
Caractéristiques : 143 mn, couleur

Critique perso :

Une petite famille japonaise typique, juste un peu plus cinglée sur les bords que la moyenne. Papa est thérapeute-hypnotiseur, maman dessine des mangas, comme son beau-père (à qui il commence à manquer quelques cases). Grand-frère a des soucis de coeur et de vélo, petite-soeur des problèmes d'(alter)-ego encombrant. J'oubliais le frère de maman, adepte zen de rencontres en tous genres. Et le frère de papa, dandy snob qui, heureusement pour lui, n'a jamais peur de se couvrir de ridicule. Tous apprennent à vivre avec leurs démons, à cohabiter avec pas mal de fantômes. Tous avancent, avec armes et bagages, en équilibre toujours précaire, à la recherche de leur sens du mouvement idéal. Et ils le trouvent. Et le film trouve et invente sans arrêt le sien. Et il est juste, heureusement, beaucoup plus brillant que la moyenne.

Jamaica Inn - Taverne de la Jamaïque (La)

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Réalisé par : Alfred Hitchcock (1899 - 1980)
En : 1939, Angleterre
Acteurs principaux : Leslie Banks (1890 - 1952), Charles Laughton (1899 - 1962), Maureen O'Hara (1920 - 2015)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Dans la famille Hitchcock, cette oeuvre-là est un peu un enfant caché. Une histoire de naufrageurs située au XIXème siècle, un film en costumes avec un gang à trognes, des bagarres à mains nues, des carrioles, des chevaux et des maquettes de bateaux en pleine tempête dans un verre d’eau… mais avec aussi, en contrebande comme il se doit, pas mal de hitchcockeries déjà bien identifiées : le gentil couple-malgré-lui qui se forme dans la fuite, les agents doubles, l’art de se jeter dans la gueule du loup (et d’en ressortir), le climax qui donne vertige… et, évidemment, quelques excellents acteurs anglais en flagrant délit de cabotinage. Une dernière anglaiserie avant de passer à Hollywood.

Taxi pour Tobrouk (Un)

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Réalisé par : Denys de la Patellière (1921 - 2013)
En : 1960, France
Acteurs principaux : Charles Aznavour (1924 - ), Maurice Biraud (1922 - 1982), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

4 hommes dans un désert, à la recherche d'une guerre perdue ; 4 français de partout, mais du bon côté. Un intrus allemand permet d'importer le conflit dans la troupe, et de faire de sa jeep un terrain d'opération militaire, un café du commerce, une arène et un théâtre. La patrouille perdue apprend à connaître Le Salaire de la peur. Le Sahara fournit les ennuis, l'armée fournit les boîtes de conserve, Audiard fournit les cartouches. Ca manque un peu de femmes, donc de subtilité. Mais c'est du gaulois pure sueur, de l'anar pure gouaille, du solide en grains (de sable).

Modern Times - Temps modernes (Les)

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Réalisé par : Charles Chaplin (1889 - 1977)
En : 1936, USA
Acteurs principaux : Charles Chaplin (1889 - 1977), Paulette Goddard (1911 - 1990)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Avec sa clairvoyance prophétique habituelle, Charlie Chaplin résume dans ce film les impasses du capitalisme mises à jour par la Grande Crise de 1929. Et il le fait avec ses tripes, avec son ventre. L'obsession du ventre est un leitmotiv de ses personnages ; la crise économique l'exacerbe : entre ceux qui meurent de faim et ceux qui, se mettant au service des machines, se font avaler, la marge est étroite. La fuite et l'improvisation sont les seules chances qui restent à Charlot. Ce petit bonhomme égaré dans l'écosystème urbain où il tente de survivre, transformé en machine à consommer et à produire, est notre frère pour toujours...

Advise & Consent - Tempête à Washington

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1962, USA
Acteurs principaux : Henry Fonda (1905 - 1982), Charles Laughton (1899 - 1962), Peter Lawford (1923 - 1984), Walter Pidgeon (1897 - 1884), Gene Tierney (1920 - 1991)
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 142 mn, NB

Critique perso :

Emoi à Washington : le Président vient de nommer un nouveau secrétaire d'Etat sans consulter personne. Le Sénat doit valider. L'heureux nominé a apparemment tout pour inspirer confiance : quand il était jeune, il a été Young Mr. Lincoln. Enfin, dans l'histoire, il est plutôt suspecté d'avoir fréquenté des communistes -vous imaginez l'horreur. D'où : commission d'enquête, tractations, appel à témoins. Deux camps s'affrontent : celui de la "majorité", tiraillé de contradictions internes (très plurielle, en fait), et celui de "l'opposition", mené par le sénateur Cooley, vieux renard des tribunes depuis au moins 2000 ans (cf. Spartacus). Cela nous vaut une petite visite guidée des coulisses du pouvoir, en passant par les sous-sols de la politique et les égouts des luttes d'influence. Il semble, hélas, parfois, que le service de l'Etat importe un peu moins que les ambitions perso, et la vérité que les effets de manche. Heureusement, c'est pas chez nous que ça se passerait comme ça.

Terrazza (La) - Terrasse (La)

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Réalisé par : Ettore Scola (1931 - 2016)
En : 1980, Italie
Acteurs principaux : Vittorio Gassman (1922 - 2000), Marcello Mastroianni (1924 - 1996), Serge Reggiani (1922 - 2004), Remo Remotti (1924 - 2015), Ugo Tognazzi (1922 - 1990), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 124 mn, couleur

Critique perso :

Un grand buffet avec des pâtes et des haricots, sur une grande terrasse romaine. Les convives sont nombreux, intelligents, énervés. En majorité : des intellos-bobos, caviar-cocos. Ils bossent dans la culture politique, ou dans la politique culturelle. Ils ont tout vu, tout lu, tout connu, ils se sont tant aimé. Il y a Enrico, qui n'arrive pas à écrire le scénario du film en 5 sketchs, qui pourtant se déroule devant nous. Luigi et Amedeo, qui n'arrivent pas à retenir leur femme, qui pourtant leur doit tout. Sergio, qui n'arrive pas à retenir le semblant de vie qu'il a pourtant sauvé de la guerre. Et Mario qui, en amour comme en politique, n'arrive clairement pas à écrire des textes clairs. Des mâles drôlement tragiques, tragiquement drôles. On a beau les voir de plusieurs point de vue, sous plusieurs angles : ils sont toujours aussi las, lâches et fuyants. Portrait de l'artiste en hommes vieillissants.

Testament des Dr. Mabuse (Das) - Testament du Dr. Mabuse (Le)

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Réalisé par : Fritz Lang (1890 - 1976)
En : 1933, Allemagne
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 122 mn, NB

Critique perso :

Du fin fond de son asile à la Caligari, un homme tire les ficelles du crime. Un homme invisible, une voix derrière un rideau, un metteur en scène de la terreur. L'inspecteur Lohmann lui sacrifie sa vie privée. Lui qui, pourtant, a su dénicher M, le meurtrier solitaire, il doit faire face cette fois à un pervers plus grand et plus insaisissable encore : un idéologue aux mains propres, un texte et une voix qui tuent. Racket, noyautage de l'Etat, suppression des gêneurs et stratégie de la peur : le Mein Kampf de Mabuse est en effet appliqué à la lettre par ses héritiers. Même mort, il hypnotise encore. Il hypnotise toujours...

Tema - Thème (Le)

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Réalisé par : Gleb Panfilov (1934 - )
En : 1979, Russie
Acteurs principaux : Inna Churikova (1943 - ), Mikhail Ulyanov (1927 - 2007)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 99 mn, couleur

Critique perso :

Kim Yesenin est un écrivain russe. Donc torturé, concerné, engagé, arrogant, chiant. Normalement, il vit à Moscou, mais là il est en tournée en province (comme on ne doit plus dire), accompagné d'un confrère encore pire que lui et d'une jeune maîtresse pas passionnante (et apparemment pas non plus très passionnée). Il s'incruste dans la visite guidée d'un musée local. La guide est jolie, voilà que la province l'intéresse finalement plus que prévu. Il retrouve la fille dans un dîner le soir, il essaie de lui faire le coup du grand écrivain russe : passionné, passionnant, possessif, arrogant, chiant. Elle ne marche pas. Elle a pourtant été amoureuse de lui, quand elle avait 10 ans. Mais maintenant, elle préfère l'authentique. Elle ne s'intéresse plus qu’à un poète-paysan du terroir local, un artiste un vrai, brut et inconnu, mort et oublié de tous si elle n'était pas là. Et voilà de quoi relancer la machine du grand écrivain russe. Amoureux, concerné, inspiré, torturé, vain. Engagé, passionné, jaloux, arrogant, chiant.

Tè nel deserto (Il) - Thé au Sahara (Un)

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Réalisé par : Bernardo Bertolucci (1940 - )
En : 1990, Italie
Acteurs principaux : John Malkovich (1953 - ), Debra Winger (1955 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 138 mn, couleur

Critique perso :

Ca commence dans le New-York des années folles, ça se termine dans les dunes du Sahara. Y paraît que ce serait l'histoire d'un couple qui se noie dans les sables. En fait non, c'est l'histoire d'une femme qui tente la traversée de son désert intérieur. A la rame, en solitaire. Comme dans l'appart' désert du Dernier tango à Paris. De mari en amants, sur des terres de plus en plus arides, sauvages, étrangères, elle devient de plus en plus aride, sauvage, étrangère à elle-même. On ne sait pas trop si on la plaint ou si on l'envie. C'est comme un voyage dans le temps, aussi, ou une expédition à la recherche d'une source perdue. Pour voir ce qu'il reste quand la civilisation a sombré : de la sensualité, du soleil et du désespoir.

Teorema - Théorème

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Réalisé par : Pier Paolo Pasolini (1922 - 1975)
En : 1968, Italie
Acteurs principaux : Massimo Girotti (1918 - 2003), Silvana Mangano (1930 - 1989), Terence Stamp (1939 - ), Anne Wiazemsky (1947 - 2017)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /poésie en image /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 98 mn, NB/couleur

Critique perso :

Hypothèse : une famille bourgeoise (bonne comprise).
1ère partie. Un télégramme : "Arrive demain". Un type est là, effectivement. Beau comme un ange, lit Rimbaud. En moins de 3/4 d'heure, il s'est fait toute la famille (bonne comprise) - enfin, c'est plutôt les autres qui lui sautent dessus, d'ailleurs.
2ème partie. Un autre télégramme, Il part. Les autres n'ont plus qu'à devenir ce qu'ils sont : saint, artiste ou débauché, ce qui bien sûr revient au même, pour Pasolini. Bon, on n'a sans doute pas appris les maths dans les mêmes écoles, mais il faut reconnaître que sa démonstration est claire et tranchante : un petit coup de grâce et hop, c'est toute la "petite bourgeoisie" (comme on disait à l'époque) qui explose.

Thérèse Raquin

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1953, France
Acteurs principaux : Roland Lesaffre (1927 - 2009), Simone Signoret (1921 - 1985), Raf Vallone (1916 - 2002)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 102 mn, NB

Critique perso :

Avant même le drame, elle est déjà tout en noir et pleine d'épingles, Thérèse, comme un papillon dans la vitrine de sa boutique de tissus. Un mari toujours au lit (mais uniquement pour dormir ou se faire soigner), une belle-mère comme on les craint toujours sur le dos : on la plaint, Thérèse. Alors, le collègue italien à biscottos, on le voit arriver comme les petits chevaux auxquels le mari ne cesse de jouer : avec ses gros sabots. Le drame est sur les rails... Pas très nouveau, pas très étonnant : un médiocre drame de la médiocrité. Une espèce de ressucé de la Bête humaine plein d'humains très bêtes. Sans oublier le matelot, qui sonne toujours deux fois. Zola a sans doute vu pire. On a vu mieux mais ça n'a rien de déshonorant.

Wo hu cang long - Tigre et dragon

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Réalisé par : Ang Lee (1954 - )
En : 2000, Chine-Hong-Kong
Acteurs principaux : Chen Chang (1976 - ), Yun-Fat Chow (1955 - ), Michelle Yeoh (1962 - ), Zhang Ziyi (1979 - )
Genre(s) : conte de fées relooké /du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /vers le soleil levant /épique pas toc
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Dans la Chine ancienne, deux valeureux combattants (est-ce lui le tigre, est-ce elle le dragon ? nous ne le saurons pas) s'aiment en secret au moins depuis Conficius. Il lui confie sa Destinée -une épée- pour la remettre à un notable qui se la fait voler illico par un voleur qui vole sur les toits. L'enquête commence. Le jour : visites de courtoisie diplomatiques et exquise politesse. La nuit : ballet d'armes et combats très singuliers -et élégants : il y a toujours au moins une dame concernée. Ca ressemble un peu à nos contes de fées (honneur, loyauté et amour courtois), avec tout ce qu'on attend de l'exotisme oriental (costumes somptueux et combats d'écoles entre grands maîtres très très sages) et tout ce qu'il faut de moyens hollywoodiens. En plus, souvent, la poésie résiste encore...

Tirez sur le pianiste

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1960, France
Acteurs principaux : Charles Aznavour (1924 - ), Marie Dubois (1937 - 2014)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

Au début, un type poursuivi, de nuit, par des malfrats, s'arrête 5mn pour papoter joies matrimoniales avec un inconnu qui lui a tendu la main. Le polar prend, déjà, le chemin des écoliers. Et puis, le type repart dare-dare aller plutôt emmerder son frangin. Le frangin est, comme le héros de Detour, pianiste de bistrot. Mais, lui, c'est aux autres qu'il porte malheur. Aux femmes surtout. Le film sera l'occasion de faire le tri entre les vrais et les faux frères (les vrais Saroyan Brothers s'appellent Edouard, Richard, Chico et Fido...), mais contribuera pas mal à embrouiller les genres : il entretient l'art subtil de filmer les choses sérieuses comme des conneries, et les conneries comme des choses sérieuses. Tarentino l'a sûrement regardé en boucle, et c'est impossible de le lui reprocher.

Titanic

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Réalisé par : James Cameron (1954 - )
En : 1997, USA
Acteurs principaux : Kathy Bates (1948 - ), Leonardo DiCaprio (1974 - ), Gloria Stuart (1910 - 2010), David Warner (1941 - ), Kate Winslet (1975 - ), Billy Zane (1966 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /les chocottes à zéro /épique pas toc
Caractéristiques : 194 mn, couleur

Critique perso :

Il m'arrive d'avoir des faiblesses et des fautes de goût. J'avoue donc : j'aime beaucoup ce film. Parce que c'est gros comme un immeuble et sans complexe, comme Autant en emporte le vent (vers lequel ça lorgne pas mal). Parce qu'ils sont jeunes et beaux, et caricaturaux à souhait. Parce que la vieille dame a été la fiancée de l'Homme invisible. Parce que la métaphore féministe, aussi, est énorme : c'est le symbole du machisme le plus brutal et le plus attardé qui sombre avec tant de fracas et de victimes (mais quand on aime, on ne compte pas). Parce que, même en sachant tout à l'avance, on arrive encore à se laisser surprendre. Parce que c'est du faux bâti sur du vrai bâti sur de l'imposture. Parce que c'est du cinéma grandeur artifice.

To Be or Not to Be

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Réalisé par : Ernst Lubitsch (1892 - 1947)
En : 1942, USA
Acteurs principaux : Felix Bressart (1892 - 1949), Carole Lombard (1908 - 1942), Robert Stack (1919 - 2003), Henry Victor (1892 - 1945)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /jeu dans le jeu /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

Comment peut-on être nazi, telle est la question ?! Et en 42, il y avait de quoi se la poser... Là où Lubitsch est gonflé, c'est qu'il traite en comédie un thème pareil. Là où il est carrément génial, c'est qu'il choisit pour héros une troupe de comédiens plus familiers des répliques de Shakespeare que des méthodes d'interrogatoire du contre espionnage. Mais tant qu'à se jeter dans la gueule de la Gestapo, autant se déguiser en loup ! Et pour démasquer des imposteurs, rien ne vaut une plus grande imposture encore (ça pourraît bien être, d'ailleurs, une excellente définition du théâtre). Tout cela nous vaut une perle quasi-unique (avec Le Dictateur, bien sûr) : un film de propagande hilarant.

Play It Again, Sam - Tombe les filles et tais-toi

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Réalisé par : Herbert Ross (1927 - 2001)
En : 1972, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Diane Keaton (1946 - ), Tony Roberts (1939 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Allan (pas si) Felix (que ça) est de ceux qui rêvent de faire de leur vie un remake de Casablanca. Au moment où commence le film, il est en pleine déconfiture sentimentale, En fait, vu qu'il foire tout ce qu'il entreprend, il est plutôt bien parti pour suivre l'exemple de Nick (celui de Casablanca, justement) . Ses meilleurs amis, les Christie's, jouent au coach en essayant de lui refiler toutes les célibataires névrosées de Manhattan qu'ils connaissent (y'a le choix, pourtant). Mais Allan a un gros problème : son sur-ça (c'est-à-dire à la fois son ça et son surmoi freudiens) a la tête et la voix de Bogart et c'est pas commode tous les jours. Ecrit (pour le théâtre) et joué par Woody, mais officiellement réalisé par un obscur tâcheron : ça aurait presque pu être un pré-make de La Rose pourpre du Caire. Pas si mal pour un brouillon par procuration.

Toni

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Réalisé par : Jean Renoir (1894 - 1979)
En : 1935, France
Acteurs principaux : Charles Blavette (1902 - 1967)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /en France profonde /heurs et malheurs à deux /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 81 mn, NB

Critique perso :

Arrivée d'un train dans une gare de Provence (La Ciotat ? Peut-être...) : ça parle espagnol, ça chante italien, c'est plein d'étrangers qui viennent prendre le pain -et les femmes- des français. Parmi eux : Toni (qui a pourtant déjà un accent marseillais d'au moins trois générations). Et, effectivement, en matière de femmes, les choses sont assez rondement menées : il séduit Marie, sa logeuse mais préfère Josefa qui lui fait la coup de la guêpe dans le cou. Mais Fernand, le méchant cadre de la carrière de pierres qui l'emploie, l'épouse avant lui, et du coup lui épouse Maris. Après, ça tourne de plus en plus mal, avec cette espèce de fatalité tranquille qui a l'air de pousser là-bas aussi bien que les olives. Le ton, semi ethno-documentaire, fait l'effet de s'inventer en route, avec une maladresse qui a l'air toute naturelle. Avec ses ouvriers et ses paysans en première ligne, c'est du proto-Ken Loach-sur garrigue, autrement dit du pré-Guédiguian.

Tontons flingueurs (Les)

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Réalisé par : Georges Lautner (1926 - 2013)
En : 1963, France
Acteurs principaux : Francis Blanche (1919 - 1974), Bernard Blier (1916 - 1989), Jean Lefebvre (1919 - 2004), Claude Rich (1929 - 2017), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

J'avais un copain à qui ce film tenait lieu d'alcotest. Dans son état normal, il connaissait toutes les répliques par coeur. Sinon, il évaluait l'état de sa mémoire en commençant la récitation et en voyant jusqu'où il arrivait à tenir... Moi, je m'arrête tout de suite (mais je ne l'ai vu que 3 fois (et je ne suis jamais bourrée)). Au fond, c'est quoi, ce film ? Des hommes entre eux : plus très jeunes, plus très beaux, tendance bedaine ou calvitie. Ils ne disent à peu près rien d'autre que "t'ar ta gueule à la récré", mais en dialecte Audiard, ce qui change tout. Des machos à l'ancienne, face au mystère d'une jeune fille des sixties. Ce film, c'est la dernière excuse bafouillante des ours d'antan dans un monde qui n'est plus le leur -la dernière génération avant Simone de Beauvoir.

Toto le héros

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Réalisé par : Jaco van Dormael (1957 - )
En : 1991, Belgique
Acteurs principaux : Michel Bouquet (1925 - ), Bouli Lanners (1965 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Au moment de sa sortie (j'étais jeune), j'avais adoré. Evidemment, maintenant que je vois les sources (Boulevard du Crépuscule, Sueurs froides, Le Mépris entre autres, et quelques poèmes) et les coutures (tout arrive 2 fois, comme dans Little Big Man), ça m'impressionne moins. N'empêche, l'idée de départ est formidable : le héros, Toto von Chickensoup, belge pur frites, est persuadé d'avoir été échangé à sa naissance, et d'avoir donc vécu une vie qui n'était pas faite pour lui. Il a le complexe de l'imposteur à l'envers, il se sent déguisé malgré lui en type banal. Il faut dire que son horloge interne s'est arrêtée quand il avait sept ans, pour le punir d'avoir un peu trop aimé sa grande soeur. Cette histoire d'une vie sans histoire - et sans vie - a le charme et la maladresse d'un conte pour ceux qui n'ont jamais appris à faire la différence entre leurs rêves et leurs souvenirs.

Toto, che visse due volte - Toto, qui vécut deux fois

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Réalisé par : Cipri et Maresco
En : 1998, Italie
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 93 mn, NB

Critique perso :

Dans un inquiétant village cramé de soleil, apparemment oublié du reste du monde et du temps et bizarrement couillu, vit une bande particulièrement gratinée de tarés désargentés. Leurs principaux soucis, dans l'ordre : baiser des femmes, à défaut des hommes, à défaut des animaux, à défaut des anges, à défaut se masturber en groupe, à défaut se masturber tout seul. Les seules alternatives envisageables semblent être de devenir parrain ou de devenir saint dans une des deux institutions locales disponibles (au même visage), l'Eglise et la Mafia. Dans un tel environnent tout peut arriver, comme par exemple désirer une pute barbue, disputer du fromage aux rats ou une bague à son amant mort, ressusciter après avoir été dissout dans l'acide. L'image et les réalisateurs ont clairement pris un gros coup de soleil, là est leur génie.

Touchez pas au grisbi

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Réalisé par : Jacques Becker (1906 - 1960)
En : 1954, France
Acteurs principaux : Jean Gabin (1904 - 1976), Jeanne Moreau (1928 - 2017), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Si Pépé le Moko avait survécu et était rentré à Paris, il se serait sans doute appelé Max. Il aurait pris un peu de bouteille et aurait continué à régner sur son petit monde : des gars du milieu -pourtant pas loin du bout du rouleau, mais avec de beaux restes-, et des mômes enjoleuses qui savent lever la jambe. Il aurait parlé le pigalais, fréquenté le restau des copains, le cabaret des copines. Et il aurait connu Riton, l'ami de 20 ans, le seul à qui on fait confiance pour la chasse au grisbi -non, ce n'est pas un ours brun mais il attire les mouches, les renards et les abeilles. Un patriarche qui a de la classe, des débuttants prometteurs (une certaine Moreau, un certain Ventura), une belle histoire d'amitié virile et pudique.

Band Wagon (the) - Tous en scène

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Réalisé par : Vincente Minnelli (1903 - 1986)
En : 1953, USA
Acteurs principaux : Fred Astaire (1899 - 1987), Cyd Charisse (1921 - 2008), Oscar Levant (1906 - 1972)
Genre(s) : New York - New York /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Un certain M. Truffaut (ou son double de cinéma) dit quelque part qu'un film est comme un train dans la nuit. Un "musical" à l'américaine, c'est pareil : ça embarque tout un tas de monde pour on ne sait trop où, et ça y va à toute vitesse. Des fois, ça fait rire en voulant impressionner, des fois ça impressionne en voulant faire rire. Des fois, ça déraille. Des associations de talents les plus hétéroclites peuvent y réussir à s'entendre, ou bien exploser, et les cabots les plus incompatibles devenir inséparables (enfin, c'est un "musical", tout de même, pas la vraie vie). L'art d'attraper la chance et la grâce, c'est un bricolage de pros. Et quand ça rend heureux, on se fiche de savoir si c'est notre double de spectateur ou dans la vraie vie.

Tout le monde il est beau tout le monde il est gentil

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Réalisé par : Jean Yanne (1933 - 2003)
En : 1972, France
Acteurs principaux : Bernard Blier (1916 - 1989), Jean-Roger Caussimon (1918 - 1985), Jacques François (1920 - 2003), Daniel Prévost (1939 - ), Michel Serrault (1928 - 2007), Marina Vlady (1938 - ), Jean Yanne (1933 - 2003)
Genre(s) : en avant la musique /nanar pur sucre /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Christian Gerber, sorte de Régis Debray populo qui, après avoir couru les maquis sud-américains pour interviewer des guerilleros barbus, retrouve à Paris son poste de journaliste-radio. Les années 70 battent leur plein de kitchitude. Le gadget du moment, c'est ce truc avec deux boules en plastique au bout d'une ficelle, qu'il faut faire se cogner entre elles le plus longtemps possible. Hair (le spectacle) fait un tabac, la Superstar du moment (sur les ondes de la radio, au moins) s'appelle Jésus-Christ. C'en est trop pour Gerber, libertaire dans l'âme (qu'il n'a pas) et mauvais esprit sur pattes (d'eph). Il se fait virer, puis, bientôt (opportunisme aidant), promu et, enfin (intégrité aidant), crucifié sur l'autel d'une société aux valeurs Kleenex. Une grosse farce narcissique, assez gonflée (à l'air du temps).

Streetcar Named Desire (A) - Tramway nommé désir (Un)

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Réalisé par : Elia Kazan (1909 - 2003)
En : 1951, USA
Acteurs principaux : Marlon Brando (1924 - 2004), Kim Hunter (1922 - 2002), Vivien Leigh (1913 - 1967), Karl Malden (1912 - 2009)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 122 mn, NB

Critique perso :

Blanche, délicate petite chose, échoue un jour à La Nouvelle Orléans, chez sa soeur enceinte. Elle doit cohabiter avec le mari de la soeur, un ouvrier brut(e) de décoffrage qui a visiblement un fort mauvais tailleur (il n'arrête pas de déchirer ses marcels) et n'utilise apparemment pas beaucoup de déodorant pour atténuer l'effet de son abondante sueur. Mais beau comme Brando. Ca se flaire, ça se renifle, façon minauderies ou façon ours, c'est finalement à peu près la même chose. Ca sent le fauve et le renfermé, dans ce film là. Tout le monde y est comme embarrassé ou dépassé par son propre corps. Léger et doux comme du béton armé brut de décoffrage.

Baara - Travail (Le)

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Réalisé par : Souleymane Cissé (1940 - )
En : 1978, Mali
Acteurs principaux : Balla Keita
Genre(s) : portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

La Ligne générale suit le destin d'un pousseur de charriots des rues de Bamako. Exploité par des pauvres qui ne peuvent pas payer leur course, il se fait embaucher par un ingénieur plein de bonne volonté, avant de finir manipulé par un patron pas étouffé par les scrupules. Le fond du tableau est une fresque ambitieuse sur la circulation de l'argent dans toutes les couches de la société, et sur ce qui préoccupe tout le monde : travailler pour manger, manger pour travailler. L'Afrique aussi sait ce que signifie le pouvoir du capital et l'aliénation des masses. Heureusement, l'Afrique aussi a son Ken Loach.

Travaux, on sait quand ça commence...

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Réalisé par : Brigitte Roüan (1946 - )
En : 2005, France
Acteurs principaux : Carole Bouquet (1957 - ), Marcial Di Fonzo Bo (1968 - )
Genre(s) : Paris /conte de fées relooké /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Mme Chantal est une grande avocate de la cause des sans-papiers. Le genre bobo, gauche-guacamol (son truc, c'est plutôt les sud-américains). Quand Mme Chantal plaide, elle se transforme en sorcière bien-aimante : irrésistible. Chez elle, elle met ses convictions en pratique. Puisqu'un petit ravalement d'intérieur est nécessaire, autant employer les hommes sans papiers (et sans qualités -surtout pour le travail manuel) qu'elle défend devant les tribunaux. Mais là, le charme opère à l'envers : Mme Chantal a l'art de transformer tous ses employés en empotés façon Impossibles M. Bébé. Luxe, calme et volupté valent bien un petit chaos d'appartement. Difficile de faire plus bidonnant sur la crise des logements parisiens.

Traversée de Paris (La)

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Réalisé par : Claude Autant-Lara (1901 - 2000)
En : 1956, France
Acteurs principaux : Bourvil (1917 - 1970), Jean Gabin (1904 - 1976), Jacques Marin (1919 - 2001), Louis de Funès (1914 - 1983)
Genre(s) : Paris /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 80 mn, NB

Critique perso :

Paris, quelque part entre l’arrivée des troupes allemandes et la libération. Les gens font mine de vivre comme si de rien n’était, mais en fait rien ne va. Tout le monde se suspecte et s’observe, le moindre morceau de savon est une denrée rare, les rognons un plat de luxe. Dans un café à l’ambiance lourde, un pauvre type en embauche un autre à la nuit tombée, pour transporter des grosses valises à pieds, d’Austerlitz à Montmartre. Des valises pleines de morceaux d’un cochon tout juste égorgé dans une cave -autant dire de l’or, mais de l’or qui a une odeur. Une odeur qui attire les chiens. Les chiens de toutes sortes et de toutes espèces… Cette longue nuit où il se passe des trucs pas très clairs, c’est comme une métonymie de l’occupation toute entière. Une sale période qui révèle le côté obscur de ceux qui la traversent. Une nuit qui manque singulièrement de héros, mais pas complètement de braves types.

Tricheurs (Les)

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1958, France
Acteurs principaux : Jean-Paul Belmondo (1933 - ), Roland Lesaffre (1927 - 2009), Jacques Marin (1919 - 2001), Laurent Terzieff (1935 - 2010)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 120 mn, NB

Critique perso :

A la fin des années 50, déjà, les djeun's, comme on ne le disait pas encore, posaient problème. Toujours à traîner dans les cafés, à boire et à draguer, au lieu d'avoir envie de bosser comme tout le monde. Parfois, ils faisaient des boums dans le château de leurs parents toujours absents, et manifestaient leur révolte en vidant la cave et en couchant avec n'importe qui dans le lit des parents toujours absents -l'horreur. En ce temps-là, déjà, venir de la banlieue était infamant, mais parce que ça voulait dire à l'époque porter une cravate et crêcher à Neuilly -l'horreur. Décidément, il y avait bien quelque chose de pourri au royaume du cinéma français : ces jeunes-là ont déjà mille ans, ils n'ont pas l'air de croire à leur cynisme. On ne prédit aucun avenir intéressant aux acteurs : à part au second rôle à longue figure, qui s'empressera de fuir cette galère au théâtre, et à un quasi-figurant à grandes oreilles qui ne tardera pas à passer à l'ennemi, dans le camp de la jeunesse qui se filme elle-même. Le film d'un vieux ronchon donneur de leçons.

Triporteur (Le)

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Réalisé par : Jacques Pinoteau (1923 - 2017)
En : 1957, France
Acteurs principaux : Jean-Claude Brialy (1933 - 2007), Darry Cowl (1925 - 2006)
Genre(s) : en France profonde /nanar pur sucre
Caractéristiques : 93 mn, couleur

Critique perso :

Pour célébrer l'accession de son équipe favorite à la finale d'une coupe quelconque (il s'agit de foot, bien sûr), un supporter à lunettes et à pédales enfourche son triporteur (sorte de kiosque à glace à roulettes -mais sans glace), bien décidé à traverser les profondeurs de la France profonde. On sous-estime malheureusement trop souvent l'épaisseur de la couche (géologique) de la France profonde -surtout là où le soleil tape un peu trop fort sur la tête des habitants (cf. un célèbre gendarme qui en a été victime). Personnages débiles, scénario nul filmé avec les pieds : du pur nectar de navet, à peine sauvé par quelques éclairs burlesques et quelques réjouissantes bafouillaginations.

Trois couleurs : blanc

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1994, France
Acteurs principaux : Julie Delpy (1969 - ), Zbigniew Zamachowski (1961 - )
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 91 mn, couleur

Critique perso :

Coiffeur pour dames polonaises archi-diplômé, Karol est devenu mari impuissant en France. Déchu, abandonné, il ne réussit à regagner son pays que d'un cheveu, caché dans une valise (c'était juste avant qu'on se rende compte que l'homme est devenu une marchandise...). Il se refait une santé et une fortune avec les moyens pas très nets du bord, et trouve un moyen pas très propre de faire revenir sa chère ex-épouse française chez lui (question de vie ou de mort). Il s'agit d'une histoire de couple mais aussi, bien sur, des relations entre l'est et l'ouest. Dans la trilogie, ce film-là est le plus politique. C'est aussi le plus drôle, ironique et grinçant. Epais et froid comme de la neige.

Trois couleurs : bleu

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1993, France
Acteurs principaux : Juliette Binoche (1964 - ), Hugues Quester (1948 - ), Philippe Volter (1959 - 2005)
Genre(s) : Paris /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Le temps de quelques plans presque abstraits, Julie perd son mari et sa fille dans un accident de voiture. Elle n'arrive pas à vouloir mourir : elle va donc devoir réapprendre à vivre. A écouter, à aimer. Tout recommencer. En laissant venir, d'abord, et presque malgré elle (c'est en refusant de signer une pétition qu'elle se fait une amie). Puis de façon plus active, en ouvrant les yeux et les oreilles pour sortir de son bocal. A quoi sert la liberté de ne rien faire, de pouvoir vivre en autiste ? D'habiter un aquarium ? Pas grand chose... Ce film est le premier volet d'une double trilogie : bleu-blanc-rouge/liberté-égalité-fraternité. Il n'y a que Kieslowski pour imaginer de jouer ainsi en même temps avec des couleurs et des valeurs. Pour faire de la psychologie, de la morale et de la politique tout ensemble. Il n'y a surtout que lui pour le réussir aussi bien.

Trois couleurs : rouge

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Réalisé par : Krzysztof Kieslowski (1941 - 1996)
En : 1994, France
Acteurs principaux : Irène Jacob (1966 - ), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 99 mn, couleur

Critique perso :

Voici le testament d'un type qui voudrait bien encore croire à l'être humain avant de partir. Et en voici trois spécimens, aux liens mystérieux dans l'espace et le temps : deux d'entre eux sont voisins et se croisent sans cesse sans se connaître, deux semblent vivre les mêmes événements, à 30 ans de distance. Il y a celle qui est encore capable d'agir et celui qui se contente d'écouter. Ca parle de la fraternité entre les humains, de tout ce qui les relie illusoirement (le téléphone, les situations sociales) et de tout ce qui les rapproche plus qu'ils ne le savent eux-mêmes (une multitude de signes, d'objets, de lieux, la musique et les chiens, aussi...). Ca dit que l'être peut succéder au paraître et que l'amour peut succéder au jugement. Y'aurait pas un certain très très vieux barbu (celui qui a attendu Charlon Heston sur la montagne ?) qui aurait essayé de dire ça, aussi, il y a longtemps, en deux volumes pas mal diffusés depuis (hypothèse : et si ce film évoquait justement le passage entre les deux Testaments...) ? L'oeuvre d'un poète-géomètre-philosophe-théologien qui pense en images.

Three Days of the Condor - Trois jours du Condor (Les)

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Réalisé par : Sydney Pollack (1934 - 2008)
En : 1975, USA
Acteurs principaux : Faye Dunaway (1941 - ), Robert Redford (1936 - ), Max von Sydow (1929 - )
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

C'est un agent de la CIA version bobo-cool, qui vient au boulot en motocyclette et qui sait lire - pas trop comme James Bond, donc. Son boulot, c'est même de lire des romans toute la journée, pour y dénicher des histoires qui pourraient provenir -ou être destinées à- d'autres agents comme lui. Faut vraiment être scénariste à la CIA pour inventer un truc pareil. Le pire, c'est que c'est à cause de ça que tous ses collègues se font zigouiller. Dans le genre polar-politique-parano des années 70, le film se pose là. Mais quand il commence à évoquer le pétrole du Moyen-Orient, on tend l'oreille. A croire que Pollack a trouvé son scénario en lisant les journaux des années 90. En voyant qu'il a logé son noeud de vipères dans une des deux grandes tours qui pavoisaient alors au sud de Manhattan, on se dit même qu'il a sacrément bien visé, le bougre. Au bout du compte, on est tout à fait convaincu qu'inventer la réalité, c'est un boulot dangereux.

Trois places pour le 26

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1988, France
Acteurs principaux : Françoise Fabian (1932 - ), Catriona MacColl (1954 - ), Mathilda May (1965 - ), Yves Montand (1921 - 1991)
Genre(s) : en France profonde /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 106 mn, couleur

Critique perso :

M. Yves Montand himself se paie un petit flash-back sur son début de carrière, dans un musical autobiographique monté à Marseille, sa ville d'enfance. Il en profite pour chercher à retrouver son amour de jeunesse, trouve sans le chercher un amour de vieillesse, avant de découvrir que l'une est la fille de l'autre -voire pire. Il y a du lemon incest dans le pot aux roses. Le spectacle lui-même a l'air pas mal, mais la vie autour semble s'être figée dans les années 60-70 et la musique -hélas- engluée dans les harmonies de synthétiseurs. Le film n'arrête pas de chercher à se trouver beau dans tous les miroirs du passé (et d'essayer de se reconnaître en Tous en scène, par exemple), en retard d'un TGV sur son époque. Montand lui-même a l'air un peu trop vieux pour jouer son propre rôle (de père un peu indigne). Comme testament, ça reste malgré tout largement au-dessus du minimum notarial.

Third Man (The) - Troisième homme (Le)

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Réalisé par : Carol Reed (1906 - 1976)
En : 1949, Angleterre
Acteurs principaux : Joseph Cotten (1905 - 1994), Trevor Howard (1913 - 1988), Alida Valli (1921 - 2006), Orson Welles (1915 - 1985)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /entre Berlin et Moscou /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 104 mn, NB

Critique perso :

Les ruines de Vienne après la deuxième guerre, un air de cythare et un train qui entre en gare. En descend un candide écrivain américain, à la recherche d'un ami qui lui a promis du travail. L'ami est mort, l'officier anglais qui régit les lieux n'est guère accueillant, les comparses qui suivent l'enterrement n'inspirent pas la sympathie, sauf une très belle femme... Bref, que de très bonnes raisons de ne surtout pas s'attarder en ville. Il reste, il ose même aller mettre le nez dans les égouts du passé. Mensonges, trafics, chantages, trahisons, manipulations, guerre de l'ombre et de la lumière, distorsion des valeurs : on aura droit à tout. D'ailleurs, tout est tellement sens dessus-desous qu'il n'y a pas moyen de mettre la caméra à l'horizontale. Le temps d'une scène de 10 mn et d'une réplique d'anthologie sur les coucous suisses (de son invention, paraît-il), Orson Welles incarne à jamais la séduction et le cynisme absolu du mal.

Tron

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Réalisé par : Steven Lisberger (1951 - )
En : 1982, USA
Acteurs principaux : Jeff Bridges (1949 - ), David Warner (1941 - )
Genre(s) : animation /c'était demain /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 96 mn, couleur

Critique perso :

Tron, c'est un Voyage fantastique sous influence Star Wars à l'intérieur de HAL. On y suit Flynn, informaticien-donc-génial, passé de l'autre côté de l'interface graphique, faire connaissance avec la virtualité réelle. Transformé en avatar à son image, il se retrouve condamné à combattre les algorithmes-gladiateurs qu'il a lui-même conçus, afin de neutraliser le Great Master Control, un ex-programme d'échecs qui a buggé mégalo. Bon, pour les explications sur l'architecture de Von Neumann, je conseille plutôt mon poly de cours. Mais aucun informaticien -et aucun spectateur- ne peut être insensible à la poésie d'une discussion -forcément un peu binaire- avec un bit errant, ou aux éclairs bleutés d'une donnée en transit dans les mornes plaines numériques.

Sud pralad - Tropical Malady

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Réalisé par : Apichatpong Weerasethakul (1970 - )
En : 2004, Thaïlande
Genre(s) : culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /poésie en image /vers le soleil levant
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Il fait chaud et humide, c'est plein d'herbes et de silences. Il y a des hommes, deux surtout. A moins que ce ne soient deux animaux. Y'en a un qui porte un uniforme de militaire et l'autre, une peau de tigre -mais dans l'autre histoire seulement. En fait, il y a deux histoires différentes qui se suivent. Qui d'ailleurs n'en sont pas vraiment. Qui peut-être n'en font qu'une. On ne sait pas trop laquelle est la cause, ou la conséquence, ou la métaphore de l'autre. Pourtant c'est très simple. Ils s'aiment, c'est tout. Dans une vie, c'est dans un village, au bord de la forêt. En douceur, en famille, en silence. Dans une autre vie, c'est dans la jungle. Avec du sang, de la boue, et de drôles de bruits. C'est comme un trip calme, un jeu de fauve et de souris en mode contemplatif. Tranquille et beau comme un amour rêvé. Beau et tranquille comme un rêve qui vit.

Truman Show (The)

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Réalisé par : Peter Weir (1944 - )
En : 1998, USA
Acteurs principaux : Jim Carrey (1962 - ), Ed Harris (1950 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Tru(e)man Burbank, héros malgré lui, 24h/24, d'un reality show dont il est le seul candide, vit dans un total false world. Comme le personnage de La Vie est belle, c'est un explorateur qui n'est jamais parti de chez lui. C'est un prisonnier volontaire. C'est un clown parfaitement conditionné pour jouer son rôle, dans le scénario qu'on a écrit pour lui. C'est une marionnette dans les mains d'un réalisateur mégalo qui ne s'est jamais remis d'avoir vu Persona et Blade Runner. Bref, c'est un parfait américain, gentil, poli, honnête. Quand il atteint les frontières de son univers de poche, il donne tout à coup raison aux croyances moyennageuses sur les bords du monde, et au couvercle de Beaudelaire. Le film aurait pu s'appeler Imitation of Life, mais le titre était déjà pris.

Tresor of Sierra Madre (The) - Trésor de la Siarra Madre (Le)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1948, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Tim Holt (1918 - 1973), John Huston (1906 - 1987), Walter Huston (1884 - 1950)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /pauvre espèce humaine /épique pas toc
Caractéristiques : 126 mn, NB

Critique perso :

Disons pour simplifier qu'on aurait affaire à une relecture post-western un peu trash et très ironique du "laboureur et ses enfants" : une histoire de glandus au bout du rouleau qui s'improvisent chercheurs d'or au Mexique, à la suite d'un vieux briscard. Ils ont été chauffés à blanc par la misère, mais c'est une fois le filon déniché que le plus dur commence. Ils doivent patauger dans la boue sous un soleil de plomb, rester discrets, planquer leur récolte, se méfier de tout le monde. Ils sont quatre, comme les trois mousquetaires, mais avec des armes à feu et des bandits à sombreros aux trousses. Et puis, à force de fouiller la terre, ils se creusent en eux-mêmes d'insondables boyeux creux. Ils pillent si bien qu'ils se retrouvent avec l'âme toute rabottée : à la fin, on a l'impression de voir les leur toute nues (et celle de Bogart est pas belle à voir). Il y a des hommes qui ne valent sans doute pas leur pesant de pépites. Le film, oui.

Twin Peaks: Fire Walk with Me - Twin Peaks - les 7 derniers jours de Laura Palmer

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Réalisé par : David Lynch (1946 - )
En : 1992, USA
Acteurs principaux : Sheryl Lee (1967 - ), David Lynch (1946 - ), Kyle MacLachlan (1959 - ), Harry Dean Stanton (1926 - 2017)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /les chocottes à zéro /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 135 mn, couleur

Critique perso :

Evidemment, avant le film il y a eu la série, qui raconte ce qui se passe après. Alors, dès le début, le rouge est mis. C'est comme si le compte à rebours était enclenché, la bombe à retardement amorcée, mais au ralenti. Pourtant, filmer le destin en marche ne suffit pas, il faut aussi en montrer les esprits maléfiques et les demi-Dieux, les démiurges et les oracles. Or, les oracles ne sont pas fameux, on prédit qu'une jeune fille sera sacrifiée. Que d'ailleurs, c'est déjà fait, et qu'en plus la jeune fille est de toute façon pervertie jusqu'au trognon. Le FBI est sur le coup, avant même qu'il se soit passé quelque chose. Lynch inaugure ici son costume de grand chamane de l'inconscient, et s'offre une apparition en personnage aussi sourd qu'Homère était aveugle. Twin Peaks -le film-, c'est un peu l'Olympe assassiné par le soap opéra, et brillamment repêché par le cinéma.

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