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film(s) relevant du genre : la parole est d'or

53 réponses classées par dates


Animal Crackers - Explorateur en folie (L')

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Réalisé par : Victor Heerman (1893 - 1977)
En : 1930, USA
Acteurs principaux : Margaret Dumont (1889 - 1965), Groucho Marx (1890 - 1977), Harpo Marx (1888 - 1964), Chico Marx (1887 - 1961), Zeppo Marx (1901 - 1979)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 97 mn, NB

Critique perso :

Réception chez Mrs Rittenhouse, tenue de (non) rigueur exigée. Il y a là un grand professeur qui ne dit jamais rien, un petit escroc qui démasque les imposteurs et un grand explorateur qui n'arrête pas de dire le contraire de ce qu'il dit. Il prétend entre autres revenir d'Afrique, où il a croisé des ours polaires et débusqué un éléphant dans son pyjama... Il y a là aussi un tableau pompier représentant un cavalier "après la chasse" : apparemment un chef d'oeuvre insurpassable, dont deux des invités ont réalisé une copie supérieure à l'original, qui passent tous entre pas mal de mains. Bref, c'est du théâtre de l'absurde en concentré énergétique, du délire acoustico-visuel en décors de carton pâte, de la plongée en apnée dans les vertiges de l'artifice. Supérieur à l'original qu'il est, sans aucun doute.

Drôle de drame

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1937, France
Acteurs principaux : Pierre Alcover (1893 - 1957), Jean-Pierre Aumont (1911 - 2001), Jean-Louis Barrault (1910 - 1994), Louis Jouvet (1887 - 1951), Françoise Rosay (1891 - 1974), Michel Simon (1895 - 1975)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pour petits et grands enfants
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Drôle de drame, bazar bizarre (si si, cousin, vous l'avez dit !), craquante confiserie classique... Dans un drôle de pays qui prétend être l'Angleterre (mais sans cette langue barbare qui s'y pratique) évoluent de drôles de gens qui prétendent ne pas être ce qu'ils sont (ou le contraire). Qu'ils s'affichent comme pasteur, scientifique excentrique, policier ou serial-(butchers)-killer, ils ont toujours une identité de rechange en cas de besoin. Le meilleur alibi des tordus est la bienséance sociale -surtout en Angleterre, vraie ou fausse. Une seule chose est sûre : tous coupables ! A un petit détail près tout de même : pas moyen de dénicher le moindre cadavre -mais ce n'est pas faute d'essayer, ni d'y penser. A force de se cacher dans le double-fond de leurs arrières-pensées, ces pantins pas malins finissent par ne plus trop savoir où ils en sont. L'intrigue est donc impossible à résumer, tant mieux !

Stage Door - Pension d'artistes

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Réalisé par : Gregory La Cava (1892 - 1952)
En : 1937, USA
Acteurs principaux : Katharine Hepburn (1907 - 2003), Adolphe Menjou (1890 - 1963), Ann Miller (1923 - 2004), Ginger Rogers (1911 - 1995)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 92 mn, NB

Critique perso :

Ouvrez bien les oreilles : distribution gratuite de vacheries jubilatoires à la mitraillette ! On est entre filles pas nunuches, dans une pension pour postulantes comédiennes fauchées pas sûres d'avoir une carrière devant -ou derrière- elles. Débarque là-dedans une gosse de riches qui fait un caprice : Miss Katharine Hepburn herself. Bon, nous on se doute qu'elle va finir par assurer sur les planches, mais a priori il y a du boulot : il lui faudra éviter quelques pièges et quelques producteurs intéressés. Il lui reste surtout à apprendre la grande loi des artistes : il faut souffrir pour être bonne ! Drôle mais pas dupe, péchu et amer : un excellent film injustement oublié.

Hôtel du Nord

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1938, Allemagne
Acteurs principaux : Annabella (1909 - 1996), Arletty (1898 - 1992), Jean-Pierre Aumont (1911 - 2001), Bernard Blier (1916 - 1989), Paulette Dubost (1911 - 2011), Louis Jouvet (1887 - 1951), François Périer (1919 - 2002)
Genre(s) : Paris /culte ou my(s)tique /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 95 mn, NB

Critique perso :

Encore un mythe qui passe de justesse la barre du potable à sauver. C'est un film choral, comme on ne le disait pas encore alors. Le décor : un hôtel au coeur de Paris, avec vue sur le canal St Martin et pittoresque à tous les étages. Les personnages principaux : Paris canaille, et Paris populo. Les histoires : des maris, des femmes, des amants, et quelques coups de feu. Celle qui est mise au premier plan (une histoire de petit couple tellement jeune, beau et amoureux que c'en est désespérant -c'est eux qui le pensent !) est de loin la plus tarte et la plus barbante. Heureusement, il y a quelques briscards, pas encore si vieux que ça, qui sauvent la mise. Ils s'incrustent, forcent un peu les portes de la fiction, changent l'atmosphère à force de brasser de l'air. Ils sont les seuls à parler parisien comme aucun parisien n'a jamais parlé. Les seuls à être dignes du mythe qu'ils ont créé.

Philadelphia Story (The) - Indiscrétions

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Réalisé par : George Cukor (1899 - 1983)
En : 1940, USA
Acteurs principaux : Cary Grant (1904 - 1986), Katharine Hepburn (1907 - 2003), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or
Caractéristiques : 112 mn, NB

Critique perso :

Philadelphia, le berceau de la démocratie en Amérique. Un palais luxueux, écuries et argenterie comprises. Une déesse (aux pieds d'argile), trois prétendants au trône : l'ex, le fiancé et le journaleux. Autour de la piscine, ces enfants de l'Olympe débattent de l'aristocratie des âmes. En gros, ça consisterait non pas à être sans défauts, mais à avoir des défauts dignes de soi. Ainsi le fiancé, parvenu, a l'art de se rendre odieux, tout en étant toujours irréprochable. L'ex, lui, bien que violent, absent ou en pyjamas, est irrésistible. Et le journaleux douteux n'est jamais aussi charmant que quand il est bourré. C'est ça la classe, ça ne s'achète pas. Ne pas exclure une éventuelle lecture politique, mais ça n'empêche pas de rigoler. Et le tout grâce à quoi ? Au champagne, bien sûr !

To Be or Not to Be

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Réalisé par : Ernst Lubitsch (1892 - 1947)
En : 1942, USA
Acteurs principaux : Felix Bressart (1892 - 1949), Carole Lombard (1908 - 1942), Robert Stack (1919 - 2003), Henry Victor (1892 - 1945)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /jeu dans le jeu /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 99 mn, NB

Critique perso :

Comment peut-on être nazi, telle est la question ?! Et en 42, il y avait de quoi se la poser... Là où Lubitsch est gonflé, c'est qu'il traite en comédie un thème pareil. Là où il est carrément génial, c'est qu'il choisit pour héros une troupe de comédiens plus familiers des répliques de Shakespeare que des méthodes d'interrogatoire du contre espionnage. Mais tant qu'à se jeter dans la gueule de la Gestapo, autant se déguiser en loup ! Et pour démasquer des imposteurs, rien ne vaut une plus grande imposture encore (ça pourraît bien être, d'ailleurs, une excellente définition du théâtre). Tout cela nous vaut une perle quasi-unique (avec Le Dictateur, bien sûr) : un film de propagande hilarant.

Laura

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1944, USA
Acteurs principaux : Judith Anderson (1897 - 1992), Dana Andrews (1909 - 1992), Vincent Price (1911 - 1993), Gene Tierney (1920 - 1991)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /culte ou my(s)tique /la parole est d'or /les chocottes à zéro
Caractéristiques : 88 mn, NB

Critique perso :

Le Lieutenant-détective McPherson -type homme d'action taciturne-, rend visite au chroniqueur mondain Waldo Lydecker -type homme de lettres fielleux-, dans sa baignoire. Et sourit. La guerre du carnet de notes contre la machine à écrire commence. L'enquête porte sur le meurtre d'une certaine Laura, avec qui Waldo a joué à Pygmalion. Il y a aussi Shelby, qui était son ex-futur potentiel époux. Elle valait le coup, Laura, à en juger par son portrait dans le salon, qui a l'air d'aimanter tous les hommes qui passent à proximité (en le regardant, ils finissent tous par se servir un whisky). Une femme de rêve, un rêve de femme, une musique entêtante qui s'insinue partout. Le temps s'inverse, se retourne et n'en finit pas de ne pas s'arrêter : on appelle ça un classique.

Enfants du paradis (Les)

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Réalisé par : Marcel Carné (1906 - 1996)
En : 1945, France
Acteurs principaux : Arletty (1898 - 1992), Jean-Louis Barrault (1910 - 1994), Pierre Brasseur (1905 - 1972), Maria Casares (1922 - 1996), Marcel Herrand (1897 - 1953), Pierre Renoir (1885 - 1952), Maurice Schutz (1866 - 1955)
Genre(s) : Paris /culte ou my(s)tique /du Moyen-Age à 1914 /la parole est d'or /poésie en image
Caractéristiques : 190 mn, NB

Critique perso :

Au siècle avant-dernier, quand la télé n'existait pas encore, les artistes de théâtre et de cabaret étaient les rois des Boulevards parisiens. Voici une femme et trois hommes qui sortent de la foule anonyme : un acteur sûr de lui, un aristocrate sûr de sa fortune, un mime-poète sûr de rien. Elle préfère le poète, bien sûr. Mais Paris (réinventé par Prévert) s'en mèle et la vie sépare ceux qui s'aiment. Car l'amour des uns fait le malheur des autres. Pour de mystérieuses raisons (c'était un de mes sujets de dissert' au lycée), les histoires d'amour impossible sont celles qui nous touchent le plus... A force d'art et de poésie, ce film envoie direct ceux qui le regardent au paradis des spectateurs.

Scandal in Paris (A) - Scandale à Paris

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Réalisé par : Douglas Sirk (1897 - 1987)
En : 1946, USA
Acteurs principaux : George Sanders (1906 - 1972), Akim Tamiroff (1899 - 1972)
Genre(s) : Paris /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /du Moyen-Age à 1914 /la parole est d'or
Caractéristiques : 100 mn, NB

Critique perso :

Voix off distinguée qui commente avec une brillante ironie les méfaits d'un vaurien : le procédé n'est pas complètement surprenant (c'est parce qu'on a vu avant Noblesse oblige et Barry Lyndon mais ce film-ci est plus ancien) ; il est toujours efficace. Nous voici donc partis pour la vie et les oeuvres du Lieutenant Rousseau, plus connu sous le nom de François Eugène Vidocq -qui n'était pas plus vrai que le précédent. Hollywood en fait une métaphore de l'éternel combat de l'homme contre ses propres démons (via St Georges et le dragon !)- mais sans se prendre trop au sérieux, heureusement. On soupçonne le récit, concentré sur 2 ans, d'être légèrement romancé -sans doute très en dessous de la vérité d'ailleurs ! George Sanders entame là sa brillante carrière de fripouille aristocratique. Mais, comme c'est lui le héros, il pousse pour une fois le bon goût jusqu'à s'amender in extremis pour les beaux yeux d'une marquise. On lui pardonne tout, même son honnêteté.

Kind Hearts and Coronets - Noblesse oblige

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Réalisé par : Robert Hamer (1911 - 1963)
En : 1949, Angleterre
Acteurs principaux : Joan Greenwood (1921 - 1987), Alec Guinness (1914 - 2000), Dennis Price (1915 - 1973)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 103 mn, NB

Critique perso :

La quintessence du British sense of humor ! Sic Alec Guinness, avant de se prendre pour Obi-Wan Kenobi, était l'acteur emblématique du genre. Ici, il incarne à lui tout seul les huit victimes successives d'un sérial killer aux manières de gentleman. Il faut dire que ce dernier tue pour la bonne cause : celle de sa maman, née noble mais rejetée par sa famille après une mésalliance, et pour récupérer un titre de noblesse qu'il estime devoir lui revenir. Sur les inconvénients de prendre un peu trop au sérieux les codes de l'aristocratie britannique et la perversion qu'ils recellent, on n'a guère fait mieux, have we ?

All about Eve - Eve

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1950, USA
Acteurs principaux : Anne Baxter (1923 - 1985), Bette Davis (1908 - 1989), Marilyn Monroe (1926 - 1962), George Sanders (1906 - 1972)
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 138 mn, NB

Critique perso :

Eve, jeune et charmante actrice, reçoit un prix d'interprétation au milieu de VIP en pingouins. Applaudissements, remerciements. Flash-back : moins d'un an avant, Eve (la même), dans le rôle de la fan anonyme faisant (pour de vrai) le pied de grue à la sortie des théâtres. Que s'est-il passé entre les deux ? Bette Davis, dans le rôle d'une célèbre actrice vieillissante et capricieuse (qui, bizarrement, lui va comme ses gants), arrivera dans l'intervalle à se rendre plus sympathique que l'onctueuse Eve, c'est dire. Mankiewicz prouve par l'exemple que manipulations, faux-semblants et mises en scènes sont les clés d'un spectacle réussi. Impeccable leçon de misanthropie (voire de misogynie) et de cynisme, pour ne plus jamais regarder les cérémonies des Oscar, César, Molière et patapon de la même façon.

5 Fingers - Affaire Cicéron (L')

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Danielle Darrieux (1917 - 2017), James Mason (1909 - 1984)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, NB

Critique perso :

Ankara (Turquie), pendant la dernière guerre. Le terrain est neutre : les ambassadeurs des deux camps s'observent et cohabitent, tout en prenant grand soin de ne surtout pas se croiser au détour d'un couloir. Une comtesse ruinée cotoie les uns et les autres. Son ex-majordome, désormais valet de chambre de l'ambassadeur anglais, fricotte contre finances avec l'ennemi allemand. Pas d'effets de suspens, ici : nous savons tout de tous, ce qui n'est le cas de personne d'autre. Nous sommes les seuls à pouvoir évaluer le subtil réseau de relations et de dépendances, d'asservissements et de soumissions, qui lie les personnages les uns aux autres. Nous serons aux premières loges de la déconfiture ironique de chacun. Le meilleur film d'espionnage que je connaisse, en forme de grand jeu de dupes à qui perd gagne... et où tout le monde perd, bien sûr...

Deadline - U.S.A - Bas les masques

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Réalisé par : Richard Brooks (1912 - 1992)
En : 1952, USA
Acteurs principaux : Ethel Barrymore (1879 - 1959), Humphrey Bogart (1899 - 1957), Kim Hunter (1922 - 2002)
Genre(s) : New York - New York /cadavre(s) dans le(s) placard(s) /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 87 mn, NB

Critique perso :

Le compte à rebours a commencé pour Ed, rédacteur en chef super-compétent du « Day », quotidien new yorkais sous pression. Avec ses journalistes, il a des plusieurs affaires sur le feu, Ed : une sombre histoire de politicien véreux, celle d’une jeune fille retrouvée nue et noyée dans son manteau de fourrure. Et quelques autres, comme d’hab. Il a aussi une ex-femme désabusée, sur le point de refaire sa vie sans lui. Et là-dessus, les filles indignes du fondateur du journal veulent revendre le titre à la concurrence pour le liquider. Un vrai emploi du temps de super-héros. Un vrai film de super héros de la démocratie avec des vrais gens dedans.

Barefoot Contessa (The) - Comtesse aux pieds nus (La)

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Réalisé par : Joseph L. Mankiewicz (1909 - 1993)
En : 1954, USA
Acteurs principaux : Humphrey Bogart (1899 - 1957), Ava Gardner (1922 - 1990), Edmond O'Brien (1915 - 1985)
Genre(s) : Los Angeles & Hollywood /conte de fées relooké /culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /la parole est d'or /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 125 mn, couleur

Critique perso :

Comme toujours avec Mankiewicz, c'est un film sur la duplicité. Mais la duplicité sincère, la duplicité comme fidélité à ses origines. Ava Gardner, au top de sa beauté, y est une danseuse de cabaret espagnole devenue star hollywoodienne. Elle parvient sans mal à nous faire croire à cette histoire de Cendrillon qui ne renonce pas totalement à ses haillons, et poussera le paradoxe jusqu'à tromper son mari par amour pour lui. Son histoire nous est racontée en flash-back par plusieurs personnes qui assistent à son enterrement (on se doute donc que ça ne finira pas très bien). Un conte de fées spéculaire et désenchanté avec Bogart dans le rôle de la marraine, ça ne se refuse pas !

Anatomy of a Murder - Autopsie d'un meurtre

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1959, USA
Acteurs principaux : Ben Gazzara (1930 - 2012), Lee Remick (1935 - 1991), George C. Scott (1927 - 1999), James Stewart (1908 - 1997)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 160 mn, NB

Critique perso :

Paul Biegler est un pêcheur à la ligne assez performant -et un avocat occasionnel pas mauvais non plus. Alors, quand une certaine Laura vient lui demander très gentiment de défendre son cher assassin de mari, il flaire le gros poisson. Le mari est coupable, personne (même pas lui) ne le conteste, mais était-il responsable au moment des faits ? Ca, ça se discute. Et les américains ne discutent jamais aussi bien que dans une cour d'assise. Paul est assez bon pour diriger les projecteurs de la procédure là où il faut, pour coacher son casting de témoins et pauffiner leur texte sans avoir l'air d'y toucher (la clé de l'affaire, c'était à prévoir, est dans la culotte de Laura). Preminger aussi.

Année dernière à Marienbad (L')

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1961, France
Acteurs principaux : Delphine Seyrig (1932 - 1990)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pas drôle mais beau
Caractéristiques : 94 mn, NB

Critique perso :

Au jeu de Marienbad, quand on connaît le truc et qu'on joue en premier, on est sûr de gagner. Mais les humains, on ne sait jamais trop à quel jeu ils jouent. Ces pingouins en cage dans un chateau, par exemple, qu'est-ce qu'ils font à ne jamais rien faire ? Et ce type, là, toujours en train d'essayer de parler à cette statue de chair en forme de Delphine Seyring, qu'est-ce qu'il cherche ? A la faire descendre de son piedestal ? A l'emmener dans les limbes ? A la piéger dans sa toile d'araignée de mots ? A l'hypnotiser pour qu'elle retrouve la mémoire ? A réveiller la somnambule qui sommeille en elle ? Petit jeu de cache-cache en labyrinthe mental. Petite leçon de jubilation gelée.

Cave se rebiffe (Le)

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Réalisé par : Gilles Grangier (1911 - 1996)
En : 1961, France
Acteurs principaux : Maurice Biraud (1922 - 1982), Bernard Blier (1916 - 1989), Jean Gabin (1904 - 1976), Françoise Rosay (1891 - 1974)
Genre(s) : Paris /du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or
Caractéristiques : 98 mn, NB

Critique perso :

Le titre est devenu quasi-incompréhensible aux oreilles contemporaines. En traduction d'aujourd'hui, ça donnerait à peu près "Revenge of the gros naze". Le milieu, c'est celui des arnaqueurs d'opérette à prétentions aristocratiques. Le naze, c'est le brave artisan consciencieux qui fera le boulot pour leur poche. La combine, c'est une affaire de fausse monnaie un peu trop grosse pour eux... Alors, pour tenir le choc, ils font appel à l'ex-pape du domaine, un certain "Dabe", que seule une revanche perso parvient à faire sortir de son paradis fiscal. Le reste importe bien moins que les tronches enfarinés de la bande, et que les mots qu'Audiard leur fait dire. Ce qui est bien, dans ce genre de ciné à l'ancienne, c'est que les vrais cons et les faux culs sont faciles à distinguer des honnêtes crapules compétentes. Et la fausse subversion finale ne surprendra personne : "in the baba" qu'ils l'auront, les tontons monnayeurs !

One, Two, Three - Un, deux, trois

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Réalisé par : Billy Wilder (1906 - 2002)
En : 1961, USA
Acteurs principaux : James Cagney (1899 - 1986)
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /entre Berlin et Moscou /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 115 mn, NB

Critique perso :

Allons droit au but : il ne s'agit pas ici de football mais de comédie et de politique. Le film a été tourné à Berlin en 1961 (au coeur de l'action). La guerre y est froide, mais pas l'atmosphère. On ne savait rien, encore, du politiquement correct : les allemands coté ouest sont bien sûr tous d'anciens nazis, ceux de l'est récitent leur catéchisme communiste, les russes de service sortent tout droit de Ninotchka, la jeune première américaine est une écervelée (elle s'appelle Scarlett et vient d'Atlanta, c'est tout dire !). Au milieu du foutoir, droit dans ses bottes, s'ébat le représentant de Coca Cola himself, plus truand encore que les autres (on l'a reconnu, c'est James Cagney : dans les années 20, il ne vendait pas que du coca !), metteur en scène survolté d'intrigues de plus en plus tarabiscotées. En débit de paroles à la seconde et de gags à la minute, ce film est peut-être bien, effectivement, champion du monde.

Advise & Consent - Tempête à Washington

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Réalisé par : Otto Preminger (1906 - 1986)
En : 1962, USA
Acteurs principaux : Henry Fonda (1905 - 1982), Charles Laughton (1899 - 1962), Peter Lawford (1923 - 1984), Walter Pidgeon (1897 - 1884), Gene Tierney (1920 - 1991)
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 142 mn, NB

Critique perso :

Emoi à Washington : le Président vient de nommer un nouveau secrétaire d'Etat sans consulter personne. Le Sénat doit valider. L'heureux nominé a apparemment tout pour inspirer confiance : quand il était jeune, il a été Young Mr. Lincoln. Enfin, dans l'histoire, il est plutôt suspecté d'avoir fréquenté des communistes -vous imaginez l'horreur. D'où : commission d'enquête, tractations, appel à témoins. Deux camps s'affrontent : celui de la "majorité", tiraillé de contradictions internes (très plurielle, en fait), et celui de "l'opposition", mené par le sénateur Cooley, vieux renard des tribunes depuis au moins 2000 ans (cf. Spartacus). Cela nous vaut une petite visite guidée des coulisses du pouvoir, en passant par les sous-sols de la politique et les égouts des luttes d'influence. Il semble, hélas, parfois, que le service de l'Etat importe un peu moins que les ambitions perso, et la vérité que les effets de manche. Heureusement, c'est pas chez nous que ça se passerait comme ça.

Tontons flingueurs (Les)

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Réalisé par : Georges Lautner (1926 - 2013)
En : 1963, France
Acteurs principaux : Francis Blanche (1919 - 1974), Bernard Blier (1916 - 1989), Jean Lefebvre (1919 - 2004), Claude Rich (1929 - 2017), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or
Caractéristiques : 105 mn, NB

Critique perso :

J'avais un copain à qui ce film tenait lieu d'alcotest. Dans son état normal, il connaissait toutes les répliques par coeur. Sinon, il évaluait l'état de sa mémoire en commençant la récitation et en voyant jusqu'où il arrivait à tenir... Moi, je m'arrête tout de suite (mais je ne l'ai vu que 3 fois (et je ne suis jamais bourrée)). Au fond, c'est quoi, ce film ? Des hommes entre eux : plus très jeunes, plus très beaux, tendance bedaine ou calvitie. Ils ne disent à peu près rien d'autre que "t'ar ta gueule à la récré", mais en dialecte Audiard, ce qui change tout. Des machos à l'ancienne, face au mystère d'une jeune fille des sixties. Ce film, c'est la dernière excuse bafouillante des ours d'antan dans un monde qui n'est plus le leur -la dernière génération avant Simone de Beauvoir.

My Fair Lady - My fair Lady

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Réalisé par : George Cukor (1899 - 1983)
En : 1964, USA
Acteurs principaux : Rex Harrison (1908 - 1990), Audrey Hepburn (1929 - 1993)
Genre(s) : en avant la musique /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 170 mn, couleur

Critique perso :

Suite à un pari stupide, le professeur Higgins (bien aspirer le "H") décide de faire sauter toutes les classes (sociales) en 6 mois à son élève-cobaye Eliza Doolittle -fleuriste de rue. Comment s'y prend-il ? Facile : la spécialité du professeur Higgins, c'est la phonétique. Or, l'habit ne fait peut-être pas le moine, mais l'habit + l'accent des beaux quartiers et la langue chatiée fait facilement la lady ! Mais changer de langage, c'est changer d'identité (les écrivains le savent bien). Eliza Doalot l'apprend vite, tandis que l'ignoble Higgins doit apprendre, lui, que l'être humain parlant est doué d'un peu plus d'autonomie et de sensibilité que le perroquet. Suprêmement méchant, profond et allègre.

Night of the Iguana (The) - Nuit de l'iguane (La)

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Réalisé par : John Huston (1906 - 1987)
En : 1964, USA
Acteurs principaux : Richard Burton (1925 - 1984), Ava Gardner (1922 - 1990), Deborah Kerr (1921 - 2007), Sue Lyon (1946 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 125 mn, NB

Critique perso :

Un ex-pasteur douteux et fiévreux, reconverti en guide touristique pour américaines friquées, embarque sa fournée de vieilles demoiselles sans avenir dans un cul de sac mexicain. Sur place, il y a tout de même trois femmes fréquentables, aussi dangereuses les unes que les autres : une petite allumeuse, l'hôtelière en chaleur et une espèce de sainte mendiante. Une bête étrange est tapie dans l'ombre, pendant que les humains passent la nuit à causer. Ils ont l'inquiétude métaphysique bavarde, ça se faisait beaucoup à l'époque. Mais ils sont tous au bout de leurs rouleaux. Ils sont au paradis et trop fatigués pour en profiter, il y fait plus chaud que prévu. Un film sur l'honneur des vaincus qui survivent au désastre de leur vie.

Collectionneuse (La)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1967, France
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 89 mn, couleur

Critique perso :

Un dandy XIXème, un esthète XVIIIème et une pétasse XXème siècle passent l'été ensemble dans une villa du sud qui appartient à un vague ami commun. Comme ils n'ont rien d'autres à glander, nos squatters de luxe s'inventent des intrigues à la hauteur de l'opinion qu'ils ont d'eux-mêmes. A l'image : rien, ou presque. De la lumière et des jeunes gens en maillot de bain. En voix off : Adrien l'esthète commente les courses, avec une préciosité et une finesse dignes de son maître en mauvaise foi : Rousseau. Evidemment, Haydé, la fille, coupe Louise Brooks, focalise son attention. Où l'on mesure l'impuissance des mots d'homme face un corps de femme. Où l'on mesure que le cinéma, ça peut être aussi beau et subtil que la littérature Grand Siècle.

Armée des ombres (L')

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Réalisé par : Jean-Pierre Melville (1917 - 1973)
En : 1969, France
Acteurs principaux : Jean-Pierre Cassel (1932 - 2007), Claude Mann (1940 - ), Paul Meurisse (1912 - 1979), Simone Signoret (1921 - 1985), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /la parole est d'or /pas drôle mais beau /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 136 mn, couleur

Critique perso :

C'était pendant la guerre -la dernière, jusqu'à nouvel ordre. Ils étaient français et engagés dans la seule armée digne de ce nom -celle de l'ombre. Ce sont des héros mutiques, pas causants, pas tendres, pas gentils. Des héros, quoi. Clandestins dans leur propre pays, dans leur propre vie. Leur grand chef est un grand mathématicien-épistémologue (ce qui n'est pas pour me déplaire). On le voit faire un tour à Londres, le temps de prendre les conseils et la médaille d'un grand type à petite moustache, et d'aller voir Autant en emporte le vent. Le reste du temps, c'est la guerre. Des nerfs, surtout, parce que c'est le nerf de la guerre. Il y a des morts -beaucoup- et presqu'aucune larme. Le film est sec et glacé, à son image. Chaleureux aussi, à la leur.

Ma nuit chez Maud

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1969, France
Acteurs principaux : Marie-Christine Barrault (1944 - ), Françoise Fabian (1932 - ), Jean-Louis Trintignant (1930 - )
Genre(s) : culte ou my(s)tique /en France profonde /la parole est d'or
Caractéristiques : 110 mn, NB

Critique perso :

Jean-Louis est ingénieur depuis peu chez Michelin, à Clermont. Célibataire, il va à la messe et y remarque Françoise. Puis il croise un ancien camarade de lycée devenu prof de philo, qui l'introduit chez Maud le soir de Noël. La nuit sera animée, mais par les esprits plus que par les corps : restés seuls, Maud et Jean-Louis se font des confidences sur le pari de Pascal, dissertent sur le hasard des rencontres et la nécessité d'aimer -et se quittent au matin. Jean-Louis hésite. Entre Maud la brune libre penseuse et Françoise la blonde pieuse, sa dialectique balance. Grand film d'action sur la parole et l'engagement, comme tous les Rohmer, chaudement recommandé à tous ceux pour qui les vies de l'esprit et du coeur sont une grande aventure.

Genou de Claire (Le)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1970, France
Acteurs principaux : Jean-Claude Brialy (1933 - 2007), Fabrice Luchini (1951 - ), Béatrice Romand (1952 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 105 mn, couleur

Critique perso :

Xavier se marie dans un mois : par amour raisonné ou raison amoureuse, c'est pas très clair. En attendant, il est en vacances au bord du lac de Genève, loin de sa fiancée mais tout près de charmantes voisines -dont une vieille copine écrivaine qui adore mettre en scène le désir des autres. Ils se racontent leurs histoires, ça leur donne envie d'en vivre. Et comme les voisines, bien que souvent en maillot de bain, se révèlent assez fuyantes, Xavier se fixe un objectif raisonnable : un genou. Par désir raisonné ou raison désirante, c'est pas très clair. Au jeu dont il est le héros, Xavier ne sait pas lui-même quel est son personnage. Mais quel genou !

Valseuses (Les)

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Réalisé par : Bertrand Blier (1939 - )
En : 1974, France
Acteurs principaux : Gérard Depardieu (1948 - ), Patrick Dewaere (1947 - 1982), Isabelle Huppert (1953 - ), Miou-Miou (1950 - ), Jeanne Moreau (1928 - 2017)
Genre(s) : la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

C'est l'hisoire de deux petits mecs, joués par deux petits jeunes inconnus (un certain Dewaere et un certain Depardieu) qui mènent une enquète sur le plaisir féminin et emmerdent le monde. C'est une espèce de road-movie à la française, plein de mots qu'on n'avait jamais entendus avant au cinéma et de rencontres incongrues, au bord des routes, sur une plage, dans un train et une multitude de chambres. C'est l'invention d'un style, la caricature d'une époque, la provocation d'un langage, la fureur d'une liberté hautement revendiquée. Les acteurs, le genre et les fringues ont vielli depuis, l'énergie de leur jeunesse est restée sur l'écran.

Homme qui aimait les femmes (L')

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Réalisé par : François Truffaut (1932 - 1984)
En : 1977, France
Acteurs principaux : Nathalie Baye (1948 - ), Nelly Borgeaud (1931 - ), Leslie Caron (1931 - ), Charles Denner (1929 - 1995), Brigitte Fossey (1946 - )
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Avec son air sérieux et sombre, on lui donnerait le mariage sans cérémonie. Erreur : c'est un homme à femmes. Toutes, il les aime toutes, les grandes tiges et les petites pommes, les plantes exotiques et les fleurs vénéneuses. Avec une sérieuse préférence, tout de même, pour le modèle tradi, jupes courtes et talons hauts. Et une sérieuse fixette sur ce qu'il y a entre les deux : les jambes. Ingénieur en aérodynamisme, c'est un expert pour le jeu, la glisse, l'esquive. C'est aussi un hommes à livres, comme Antoine Doinel et quelques autres de la même famille, un collectionneur d'histoires, un épingleur de personnages, prêt à tout pour mettre du roman dans sa vie. Si vous êtes comme lui, ne me téléphonez pas !

Providence

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1977, France
Acteurs principaux : Dirk Bogarde (1921 - 1999), Ellen Burstyn (1932 - ), John Gielgud (1904 - 2000), David Warner (1941 - )
Genre(s) : jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 110 mn, couleur

Critique perso :

Jours étranges. Pendant qu'une épidémie d'hommes-loups semble couver, un avocat grand bourgeois -et très britannique- s'acharne à encourager l'idylle fantomatique de son épouse avec le jeune homme vaguement hippy qu'il a échoué à faire condamner. Ils ont tous l'air de s'ennuyer, ou de ne pas savoir ce qu'ils font là. Chronique d'un changement d'époque ? Oui mais en fait, non, tout ça c'est rien que dans la tête bien imbibée d'un vieil écrivain malade -mais toujours très britannique- pendant une nuit d'insomnie. Il a des comptes à régler et les idées pas très claires, ce qui explique sans doute les incongruités de son scénario balbutiant. Et comme il vit à Providence, sa magnifique propriété, pas étonnant qu'il se prenne pour un démiurge. Chronique d'une fin de vie annoncée ? Oui mais en fait non, c'est encore un peu plus compliqué que ça, mais on laisse le suspens aux néophytes. En fait, de toute façon, c'est tout ça en même temps, et plus encore. Une superposition de banalités, conventions et lieux (plus ou moins) communs, qui finit par donner de la profondeur à la surface des choses.

Prova d'orchestra - Répétition d'orchestre

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Réalisé par : Federico Fellini (1920 - 1993)
En : 1978, Italie
Genre(s) : en avant la musique /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 70 mn, couleur

Critique perso :

Un lieu prestigieux et chargé d'histoire. Des hommes et des femmes qui ont consacré leur vie à un grand art. Un chef esthète et inflexible. Non non, on n'entre pas pour autant dans les coulisses guindées d'un événement mondain. C'est juste la petite repet' privée d'un orchestre symphonique. Pourtant, y'a un(e) intrus(e) : une caméra de télé. Invisible, mais toujours là. Insaisissable, intrusive. Devant elle, les musiciens ne se sentent plus de joie. Chacun devient plus bavard que sa musique. Chacun a sa petite théorie pour justifier la prééminence de son instrument au sein du groupe, et ne se prive pas de la donner. On sent que c'est mal parti pour le jeu collectif. Et d'ailleurs, bientôt, la révolte gronde de derrière les pupitres. Le travail à peu près sérieux tourne au happening beatnik - à moins que le maestro ne parvienne à rétablir l'équilibre sur la balance de l'art... En mineur, pas reposant mais pas désagréable.

Manhattan

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1979, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Diane Keaton (1946 - ), Meryl Streep (1949 - )
Genre(s) : New York - New York /culte ou my(s)tique /du rire aux larmes (et retour) /en avant la musique /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or
Caractéristiques : 96 mn, NB

Critique perso :

New York, mode d'emploi. Son aède s'appelle Isaac. Il a une ex-femme qui a viré lesbienne, une petite-amie-trop-bien-mais-trop-jeune-pour-lui, et une attirance poussée pour la maîtresse de son meilleur pote, une cérébrale presque aussi tourmentée que lui. Tous, cela va sans dire, artistes-intellos-bobos très intelligents, très cultivés et très malheureux. Grâce à ce sublime hypocondriaque, la carte du tendre du XXème siècle a pris la forme des rues de Manhattan. Mais c'est une carte en 3D, avec ses tours, son parc, ses ponts et ses cafés. Et une quatrième dimension pour la vie de l'esprit, les cinémas et les musées. Un petit univers en entier dans une grosse pomme, le paradis des vers de terre qui ont la tête dans les étoiles. Et la BO de la ville est du Gershwin forever.

Tema - Thème (Le)

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Réalisé par : Gleb Panfilov (1934 - )
En : 1979, Russie
Acteurs principaux : Inna Churikova (1943 - ), Mikhail Ulyanov (1927 - 2007)
Genre(s) : entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 99 mn, couleur

Critique perso :

Kim Yesenin est un écrivain russe. Donc torturé, concerné, engagé, arrogant, chiant. Normalement, il vit à Moscou, mais là il est en tournée en province (comme on ne doit plus dire), accompagné d'un confrère encore pire que lui et d'une jeune maîtresse pas passionnante (et apparemment pas non plus très passionnée). Il s'incruste dans la visite guidée d'un musée local. La guide est jolie, voilà que la province l'intéresse finalement plus que prévu. Il retrouve la fille dans un dîner le soir, il essaie de lui faire le coup du grand écrivain russe : passionné, passionnant, possessif, arrogant, chiant. Elle ne marche pas. Elle a pourtant été amoureuse de lui, quand elle avait 10 ans. Mais maintenant, elle préfère l'authentique. Elle ne s'intéresse plus qu’à un poète-paysan du terroir local, un artiste un vrai, brut et inconnu, mort et oublié de tous si elle n'était pas là. Et voilà de quoi relancer la machine du grand écrivain russe. Amoureux, concerné, inspiré, torturé, vain. Engagé, passionné, jaloux, arrogant, chiant.

Mon oncle d'Amérique

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Réalisé par : Alain Resnais (1922 - 2014)
En : 1980, France
Acteurs principaux : Pierre Arditi (1944 - ), Nelly Borgeaud (1931 - ), Jean Dasté (1904 - 1994), Gérard Depardieu (1948 - ), Marie Dubois (1937 - 2014), Nicole Garcia (1946 - ), Roger Pierre (1923 - 2010), Brigitte Roüan (1946 - )
Genre(s) : la parole est d'or /pauvre espèce humaine /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 120 mn, couleur

Critique perso :

Deux modes de discours en parrallèle : d'un côté, une petite conf scientifique du professeur Laborit sur l'évolution des espèces, la vie sur Terre et l'interprétation des comportements (des souris et des hommes). De l'autre, une fiction qui entremèle les destins de trois personnages aussi dissemblables par leur origine que comparables par leurs difficultés à vivre. Ces trois-là ont nourri de nobles ambitions, ont été bien partis pour les accomplir. Mais ils finissent tous par nager un peu dans un costume trop grand pour eux, et auncun oncle d'Amérique ne vient les sauver du naufrage. Le discours scientifique distancié, comme mode d'emploi ironique de la comédie humaine. Le romanesque, comme horizon de l'observation objective (des souris et des hommes). A apprécier avec tous ses yeux, toutes ses oreilles et tous ses cerveaux.

Naissance du jour (La)

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Réalisé par : Jacques Demy (1931 - 1990)
En : 1980, France
Acteurs principaux : Danièle Delorme (1926 - 2015), Dominique Sanda (1948 - ), Jean Sorel (1934 - )
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 90 mn, couleur

Critique perso :

Se sentant sur la fin de sa vie, une dame qui s'appelle Colette se sent assez sage comme ça pour se permettre de faire poireauter dans son potager son gentil voisin trop jeune pour elle. Vial, le voisin, a toujours quelque chose à tripotter entre les mains, mais manque un peu de belles paroles en l'air. Colette, elle, a le stylo et le caractère bien trempés et comme elle sait s'en servir, c'est elle qui mène la danse (qu'elle ne danse plus, justement) en observant et manipulant tout ce beau monde de loin. Et puisqu'elle décide aussi du temps qu'il fait, elle décrète que son automne à elle vaudra bien une naissance... Un joli miroir plein de mots et de lumière pour Agnès, qui le lui rendra bien.

Garde à vue

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Réalisé par : Claude Miller (1942 - 2012)
En : 1981, France
Acteurs principaux : Guy Marchand (1937 - ), Romy Schneider (1938 - 1982), Michel Serrault (1928 - 2007), Lino Ventura (1919 - 1987)
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /en France profonde /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 86 mn, couleur

Critique perso :

Bienvenue au réveillon du commissariat. Oui, il fait froid dehors. C'est glauque, c'est la province, quoi. Il ne manque rien, même pas le sapin de Noël à guirlandes. Le champagne, les petits fours et les noeuds papillons, c'est au rez-de-chaussée. Non, désolé, vous vous allez à l'étage, dans le bureau de l'inspecteur Gallien. Oui, c'est pour un interrogatoire. Oui, ça peut durer longtemps... Alors comme ça, vous êtes notaire de province. Et vous avez tué et violé deux petites filles... Non ? Peut-être ? Peut-être pas ? Comment ça, c'est la faute à votre dame !? Ca ne se dit pas, ces choses-là. Pas mal, la dame, d'ailleurs. Une belle silhouette de mante-religieuse. Et ça cause, et ça cause. Bon, ben moi je crois que je préfère aller me recoucher.

Draughtsman's Contract (The) - Meurtre dans un jardin anglais

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Réalisé par : Peter Greenaway (1942 - )
En : 1982, Angleterre
Acteurs principaux : Anthony Higgins (1947 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914) /vive la (critique) sociale !
Caractéristiques : 103 mn, couleur

Critique perso :

Au début, les joueurs décident de la règle du jeu et la signent devant témoin. L'équipe du château joue en blanc, le visiteur extérieur (un artiste bien conscient de sa valeur) en noir. Au milieu du film, ils changent de côté, de maillots et même de règles... Le terrain est une belle propriété, l'époque la fin du XVIIIème siècle anglais. Il est, officiellement, question de dessiner le château sous tous ses angles, tout en profitant de la châtelaine par tous les bouts. Mais, à force de dessiner ce qu'il a devant les yeux, notre challenger finit par capter ce qu'il ne devrait pas : ce qui est là et ce qui est caché, et le temps qui passe. En fait, il invente la caméra à 12 images par semaine. Pour autant, ce n'est pas toujours lui qui évalue le mieux les coups à l'avance. Pour son premier film, l'esthète Greenaway soigne tout : le scénario brillamment tarabiscoté, les dialogues subtilement enluminés, les costumes soigneusement asticotés et les cadres bien sûr, savamment géométrisés (il a même fait les dessins lui-même). Il donne cette impression de maîtrise suprème qu'il refuse à son personnage. Mauvais joueur, mais excellent cinéaste !

Pauline à la plage

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1983, France
Acteurs principaux : Féodor Atkine (1948 - ), Arielle Dombasle (1958 - ), Pascal Greggory (1954 - ), Amanda Langlet (1967 - )
Genre(s) : heurs et malheurs à deux /la parole est d'or
Caractéristiques : 94 mn, couleur

Critique perso :

Le titre fleure bon le "Martine au parc" de mon enfance. Le cadre : petite disponibilité estivale, comme dans La Collectionneuse ou Le Rayon vert. Les personnages : deux cousines en vacances, et leurs prétendants. Le décor : une grande plage normande, deux résidences secondaires. Les couleurs : primaires. Le sujet : l'amour. Côté femmes, on a le modèle ingénue en maillot de bain, et une poupée qui se voudrait passionnée. Côté hommes, un nomade opportuniste et un romantique ténébreux. En guest stars : un dragueur des sables et la marchande de cacahuètes. Au court d'un banquet initial, chacun choisit son rôle, définit son personnage. Puis essaie de le tenir, et d'influencer le jeu des autres. Au gré des rencontres et des rendez-vous, les double-jeu se révèlent... La morale : en matière d'amour, tout le monde se raconte des histoires ; chacun sa vérité.

Nuits de la pleine lune (Les)

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1984, France
Acteurs principaux : Tchéky Karyo (1953 - ), Fabrice Luchini (1951 - ), Pascale Ogier (1958 - 1984)
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 100 mn, couleur

Critique perso :

Louise vit en banlieue avec Rémi. Mais Louise habite aussi Paris, et sort avec Octave, qu'elle adore tout en se refusant à lui. Elle aime aussi aller danser dans des soirées ; elle se laisse draguer par Damien. Les soirs où elle préfère être seule, c'est parce qu'elle n'a réussi à débaucher personne au téléphone. Elle ne sait pas ce qu'elle veut, Louise ? Si, elle sait très bien : elle veut autre chose, pour s'assurer qu'elle a bien ce qu'elle a. Elle veut être libre. En fait, Louise, d'abord, elle fait. Après, elle raisonne. Et elle s'explique si bien qu'elle arrive à se croire elle-même (mais être libre, c'est vouloir ce que l'on peut et pas pouvoir ce que l'on veut, disait Jean-Paul). Et la lune, là-dedans ? C'est peut-être la vraie cause de tout, mais on ne le saura jamais.

Déclin de l'empire américain (Le)

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Réalisé par : Denys Arcand (1941 - )
En : 1986, Canada
Acteurs principaux : Dorothée Berryman (1948 - ), Pierre Curzi (1946 - ), Rémy Girard (1950 - ), Yves Jacques (1956 - ), Dominique Michel (1932 - ), Louise Portal (1950 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 101 mn, couleur

Critique perso :

Quand un universitaire rencontre un autre universitaire, ils se racontent des histoires... de cul (d'ailleurs, c'est clair, ils ne pensent qu'à ça). Il y a 4 hommes (côté cuisine) et 4 femmes (côté salle de gym). Quand ils se rejoignent, ça ne fait pas exactement 4 couples : les histoires d'amour, c'est toujours beaucoup plus compliqué. Ils ont tout vu, tout pensé, tout vécu. Ils jouissent beaucoup de l'art de la parole, même s'il leur arrive parfois de se rappeler que c'est aussi une arme avec laquelle on peut faire mal. Le film est comme eux : brillant, drôle et amer, plein de la mélancolie de ceux qui ont lu tous les livres. Rendez-vous dans 15 ans pour voir comment on peut vieillir avec de tels bagages.

Himmel über Berlin (Der) - Ailes du désir (Les)

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Réalisé par : Wim Wenders (1945 - )
En : 1987, Allemagne
Acteurs principaux : Solveig Dommartin (1961 - 2007), Peter Falk (1927 - 2011), Bruno Ganz (1941 - ), Otto Sander (1941 - 2013)
Genre(s) : culte ou my(s)tique /entre Berlin et Moscou /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914) /poésie en image
Caractéristiques : 127 mn, NB/couleur

Critique perso :

Les anges sont parmi nous. Invisibles (sauf aux enfants), ils voient tout, entendent toutes nos pensées, traversent les murs (même celui de Berlin, alors bien debout !) et ne peuvent (presque) rien pour influencer le cours du monde et le destin des hommes -commes les artistes, peut-être. Ils nous plaignent et nous envient parfois, nous pauvres mortels, d'avoir des sens et des émotions. Alors certains franchissent la barrière (des espèces) pour apprendre à vivre vraiment... Ce magnifique poème visuel, ode incantatoire à l'humanité, à l'amour et à ceux qui en témoignent dans leur art, est là pour nous rappeler encore et encore la dureté et la beauté du monde.

Dangerous Liaisons - Liaisons dangereuses (Les)

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Réalisé par : Stephen Frears (1941 - )
En : 1988, USA
Acteurs principaux : Glenn Close (1947 - ), John Malkovich (1953 - ), Michelle Pfeiffer (1958 - ), Uma Thurman (1970 - )
Genre(s) : du Moyen-Age à 1914 /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 119 mn, couleur

Critique perso :

Ce sont des experts en cruauté, des docteurs ès alcôves, des professionnels du coeur humain. Ils s'appellent Valmont et Merteuil, respectivement Vicomte et Marquise de. Ils ont compris avant tout le monde que le pouvoir repose sur le contrôle de la circulation de l'information (à l'époque : la correspondance). Ils sont persuadés de reigner sur leurs propres sentiments mais c'est à force de se mentir à eux-mêmes. Ils sont pervers, raffinés, libertins. Extrêmement brillants. Ils se lancent des défis absurdes, dans le seul but de faire souffrir. Ils y arrivent souvent. Ils vivent dans le plaisir et sont malheureux comme des chiens. Le film n'est pas complètement à la hauteur du livre, mais quelque chose de la fine fleur de l'esprit français y passe malgré tout.

Conte de printemps

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1990, France
Acteurs principaux : Hugues Quester (1948 - )
Genre(s) : Paris /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 108 mn, couleur

Critique perso :

Tiens, une femme qui pense. Parler, ça, oui, elles ont toujours su faire, chez Rohmer. Mais penser comme une philosophe qu'elle est, en citant Kant et Hegel, c'est plus rare. En plus, Jeanne est jeune et jolie, momentanément éloignée de chez elle et de son copain officiel. Libre quoi, à tout point de vue. A une soirée emmerdante, elle sympathise avec une autre égarée qui tient beacoup à lui faire rencontrer son père. Il faut attendre pas mal pour voir venir le climax du film : le temps de compter jusqu'à trois, Jeanne va vivre un petit, tout petit moment d'égarement. Il y a une histoire de collier, aussi, dont on ne sait pas ce qu'il est devenu. Perdu, volé ou caché, c'est les trois options possibles. Et c'est à peu près tout. Trois fois rien. Ca ne fait pas un pitch très sexy mais ça sufit à faire un film. Jeune et joli, éloigné de tout. Libre quoi.

Miller's Crossing

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Réalisé par : frères Coen
En : 1990, USA
Acteurs principaux : Gabriel Byrne (1950 - ), Albert Finney (1936 - ), Marcia Gay Harden (1959 - ), John Turturro (1957 - )
Genre(s) : cadavre(s) dans le(s) placard(s) /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 115 mn, couleur

Critique perso :

Chicago, la Prohibition. Deux bandes rivales, des alliés douteux, des politiciens véreux, une poule et un conseiller des princes très écouté : Tom. Ses faiblesses : les courses, le whisky et son grand coeur d'artichaud. Ses armes : savoir très bien encaisser les coups de poing et savoir encore mieux convaincre ses interlocuteurs qu'il est plus intelligent qu'eux. Face aux mitraillettes, il s'en sort pas mal, le beau Tom, sauf à la fin où il se trouve réduit à la dernière extrémité : tirer un coup de feu sur un de ses semblables... On est dans le rêve d'un grand ado retors et malicieux qui aurait trop regardé "les incorruptibles" et on aime ça !

Conte d'hiver

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1992, France
Genre(s) : culte ou my(s)tique /la parole est d'or
Caractéristiques : 114 mn, couleur

Critique perso :

Convoquer la réminiscence selon Platon, la révélation chrétienne, Shakespeare et le pari de Pascal (à la manière de Ma nuit chez Maud) pour parler des amours d'une coiffeuse : gonflé le Rohmer ! En prime : son plus beau portrait de femme modeste depuis Le Rayon vert. Ce conte-là est celui que je préfère ; parce que derrière une réalité un peu triviale, il traque le mythe antique universel : la nostalgie du paradis perdu et l'espérance en un avenir qui réconcilierait avec ses souvenirs. La grâce embusquée derrière le pilier des églises n'attend pas seulement les coiffeuses et les poètes : des fois, elle touche des films entiers.

Husbands and Wives - Maris et femmes

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Réalisé par : Woody Allen (1935 - )
En : 1992, USA
Acteurs principaux : Woody Allen (1935 - ), Judy Davis (1955 - ), Mia Farrow (1945 - ), Sydney Pollack (1934 - 2008)
Genre(s) : New York - New York /du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 108 mn, couleur

Critique perso :

Woody en mode autofiction, play and play again. Ca se gâte dans son couple, il se rattrappe comme il peut, caméra au poing, poing à la caméra, devant et derrière. Il se dédouble en deux couples amis qui forment les deux piliers du récit : le premier a décidé de se séparer, l'autre va apparemment plutôt bien. Moins de deux heures plus tard, ils ont échangé leurs maillots comme des joueurs de foot... Le film orchestre leur errance, en serrant au plus près leur corps qui fait le contraire de ce qu'ils disent avec pourtant plein de conviction et de rationnalité apparente. Le spectateur est aussi invité aux séances psy de tout ce beau monde et se régale de tant de mauvaise foi. On rit de se voir si vil dans son miroir.

Much Ado About Nothing - Beaucoup de bruit pour rien

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Réalisé par : Kenneth Branagh (1960 - )
En : 1993, Angleterre
Acteurs principaux : Kate Beckinsale (1973 - ), Kenneth Branagh (1960 - ), Michael Keaton (1951 - ), Keanu Reeves (1964 - ), Emma Thompson (1959 - ), Denzel Washington (1954 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 111 mn, couleur

Critique perso :

Ca ressemble à la Toscane -ou au Paradis, ce qui est à peu près pareil. Mais c'est trop tard : les humains ont déjà appris à parler, pour s'aimer ou pour se tromper. Les hommes reviennent de guerre, de la gloire plein les poches. Les femmes les attendent -plus ou moins-, des fleurs plein les bras. Ils se parlent, ils jouent à jouer, à s'aimer et à se tromper. Ils en font toute une histoire, ils n'ont que ça à faire. Les acteurs, eux, jouent à jouer à jouer et à se faire prendre au jeu avec délices. "Shakespeare, Shakespeare..." c'était pas le nom d'un scénariste de Howard Hawks, ça ? Ah non ! Plutôt de Mankiewicz et de Wise -entre autres. Une espèce d'ancêtre commun, de nègre universel à tous les peintres de la tragédie de l'existence, et de la comédie du bonheur.

Comment je me suis disputé... (ma vie sexuelle)

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Réalisé par : Arnaud Desplechin (1960 - )
En : 1996, France
Acteurs principaux : Mathieu Amalric (1965 - ), Jeanne Balibar (1968 - ), Marion Cotillard (1975 - ), Marianne Denicourt (1966 - ), Emmanuelle Devos (1964 - ), Chiara Mastroianni (1972 - ), Denis Podalydès (1963 - ), Emmanuel Salinger (1964 - ), Thibauld de Montalembert (1962 - )
Genre(s) : Paris /la parole est d'or /portrait d'époque (après 1914)
Caractéristiques : 178 mn, couleur

Critique perso :

Dans mon album de famille de cinéma, mes grands-parents habitaient le village de Jour de fête. Mes parents ont bien connu Vincent, François, Paul et les autres. Et moi, j'ai fait mes études avec les zigottos de ce film, du genre à se nourrir de mots et à ne jamais s'arrêter de penser. On a fréquenté les mêmes librairies, discuté des heures dans les mêmes cafés, arpenté les mêmes rues et les mêmes allées des mêmes parcs parisiens. Et nul doute que si j'avais croisé Mathieu Amalric, normalien philosophe "nul avec les filles", je l'aurais trouvé craquant (comme 3 des filles du film). Le montage, brillant, multiplie les effets de mémoire. Et une voix off très littéraire (on la croirait sortie de chez Mme de la Fayette - ou de chez La Collectionneuse) parvient à donner une dimension épique et romanesque au quotidien de ces jeunes gens. Notre vie était donc si passionnante et on ne le savait pas !

Conte d'été

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1996, France
Acteurs principaux : Amanda Langlet (1967 - ), Melvil Poupaud (1973 - )
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or
Caractéristiques : 113 mn, couleur

Critique perso :

Quelques jours de vacances en Bretagne avec Gaspard -et sa guitare. Gaspard est seul, Gaspard mange à la crêperie du "clair de lune", Gaspard cherche sa copine-en-quelque-sorte sur la plage de St Lunaire (faut-il y voir une clé ?). Il fait la connaissance d'une crêpière-ethnologue, puis d'une flibustière court-vêtue (mais avec des principes), avant de retrouver sa copine-en-quelque-sorte, une blonde soi-disant surdouée (pas au volet, en tout cas). Son problème, à Gaspard, c'est qu'il ne sait pas dire non aux filles, et qu'il adore se faire balader. Un indécis professionnel qui va où le conduit le hasard. La mer efface sur le sable les pas des jeunes gens désunis, mais pas la mémoire de leurs conversations.

Conte d'automne

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Réalisé par : Eric Rohmer (1920 - 2010)
En : 1998, France
Acteurs principaux : Marie Rivière (1956 - ), Béatrice Romand (1952 - ), Didier Sandre (1946 - )
Genre(s) : en France profonde /la parole est d'or
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

Opération : remarions la vigneronne (Magali, 45 a., veuve, 2gds. enfants, etc.). Deux anges-coquines s'y collent : Rosine, la copine du fils et Isabelle, l'amie d'enfance. Pas de concurrence -elles prennent l'initiative chacune de leur côté- mais quelques arrières-pensées qui trainent peut-être (elles seraient pas un peu agents doubles, des fois ?). Machinations, complots, intrigues : tous les moyens sont bons et surtout, comme toujours chez Rohmer, tout est matière à commentaires et analyses en direct, dans un flux continu de paroles. Les vendanges sont bonnes et le cru vieillit très bien.

Esquive (L')

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Réalisé par : Abdellatif Kechiche (1960 - )
En : 2003, France
Acteurs principaux : Sara Forestier (1986 - )
Genre(s) : en France profonde /heurs et malheurs à deux /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 117 mn, couleur

Critique perso :

Des têtes d'ados dans un décor de barres d'immeubles : une banlieue anonyme, ailleurs, à côté (où sont les voitures qui brûlent ?). Les têtes parlent, beaucoup, très vite, toutes en même temps, avec de drôles de mots. Elles ont toujours quelque chose à négocier, des intrigues compliquées à mener. Lydia, Rachid et Frida, eux, utilisent comme ils peuvent les mots de Marivaux : ils répètent Les jeux du kif et du hasard (un truc de ouf qui embrouille grave). Krimo voudrait bien faire partie de la bande, changer de costume, toucher la main de Lydia. Mais sa prof de français n'est pas très encourageante. Dans le langage de sa tribu, elle lui dit qu'il devrait sortir de lui-même, que le bonheur, ça se travaille. Il est long, le chemin jusqu'à lui-même. Le mode d'emploi, il est peut-être bien écrit dans la langue de Marivaux. Pas sûr que tout le monde arrive à le décoder.

Invasions barbares (Les)

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Réalisé par : Denys Arcand (1941 - )
En : 2003, Canada
Acteurs principaux : Dorothée Berryman (1948 - ), Marie-Josée Croze (1970 - ), Pierre Curzi (1946 - ), Rémy Girard (1950 - ), Yves Jacques (1956 - ), Dominique Michel (1932 - ), Louise Portal (1950 - ), Stéphane Rousseau (1966 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 112 mn, couleur

Critique perso :

Rémi (celui qui était le plus vivant dans le Déclin de l'empire américain) est très malade. Il n'y aurait pas grand monde à son chevet si son fils ne s'y collait, finalement. Alors, revoilà la troupe réunie de nouveau : les hommes ont perdu des cheveux, tous ont gagné des rides et des souvenirs. Ils parlent toujours autant de sexe, mais pratiquent un peu moins. Côté langue par contre, ils n'ont rien perdu de leur verve. Ils ont vu passer l'esprit du temps, à défaut d'avoir pu influer sur son souffle. Comme Rémi, ils ont un peu raté leur vie, alors pour la mort ils s'appliquent. Quant à Denis Arcand, toujours aussi à l'aise dans les portraits d'époque, il ose parier sur un humanisme plus nourri de dollars que de culture.

Is the Man Who Is Tall Happy ? - Conversation animée avec Noam Chomsky

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Réalisé par : Michel Gondry (1963 - )
En : 2013, USA
Genre(s) : animation /docu (plus ou moins fiction) /jeu dans le jeu /la parole est d'or
Caractéristiques : 85 mn, couleur

Critique perso :

Un cinéaste-bricolo-geek interviewe une star intello-linguiste, en fait un film avec quelques crayons feutres, et crée un genre à lui tout seul : quelque chose comme le docu-essai d’animation. La bouille vieillissante de Chomsky est bien là, parfois, derrière, mais devant ce sont des idées, des concepts, des objets, des exemples, tout un théâtre de la pensée qui s’anime pour nous. Ils (les concepts) débattent, se confrontent, se mélangent, font la farandole et saluent à la fin, comme les vrais personnages d'un film qu'ils sont ici, Il est question des langues et du langage, de syntaxe (la spécialité du bonhomme), de sémantique, de cognition, d’épistémologie, d’histoire des sciences, de méthodologie de la recherche, des difficultés de l’interaction (ça, c’est plutôt la contribution spécifique de Gondry), bref, c'est exactement tout ce que j’adore et c'est passionnant ! En mots (écrits), en paroles (dites), en images (vues), un vrai feu d’artifices de l’esprit pour l’esprit.

3 1/2

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Réalisé par : Chauveau, Holveck & Tellier
En : 2014, France
Acteurs principaux : Dominique Tellier (1963 - )
Genre(s) : du rire aux larmes (et retour) /jeu dans le jeu /la parole est d'or /pauvre espèce humaine
Caractéristiques : 90 mn, NB

Critique perso :

Hum, là j'avoue, j'ai un peu de mal à prétendre à l'objectivité. Non, c'est pas tout à fait un hasard si l'acteur-scénariste-co-réalisateur-monteur (sous pseudo) et homme à tout faire de l'affaire porte le même nom que moi. Et même, que c'est pas le seul à porter ce nom-là dans la distribution. En plus, on dirait qu'il s'est amusé, pour l'occasion, à réinventer l'histoire de quelqu'un d'autre que je connais aussi très bien, et même d'encore un peu plus près (désolée, pas possible d'en dire plus..!). En gros, le film un road movie paresseux : l'histoire de Stanislas, un mec qui lit 3 bouquins en même temps -voire un peu plus- et mène une vie un peu compliquée -voire un peu plus. Il est chargé par son boss de trimballer un bizarre instrument indien à 3 octaves -voire un peu plus- à 30km de là, et n'est pas pressé d'y arriver. Stanislas, il est super bon pour se faire inviter, désirer, servir... toujours en douceur et sans s'énerver. Il peut être très chiant, pédant et lâche -voire un peu plus- mais aussi plus innocent et naïf qu'il en a l'air. En fait, il est comme tout le monde, Stanislas, il rêve d'une vie qui soit aussi, encore, toujours un peu plus... A voir gratos ici !

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