On n'a pas été introduits dans les formes mais, visiblement, ils sont amants (il n'y a pas d'amour, il n'y a que des preuves d'amour...). Ils font aussi partie du grand monde -celui dans lequel ça ne se fait pas de se plaindre. Alors, quand elle sent qu'il s'éloigne, elle le quitte. C'est son genre. En fait, elle enrage et ne veut que sa perte. Mais il faudra y mettre les formes. Son atout, c'est qu'elle a l'art de bien parler, c'est-à-dire de ne rien dire qui la compromette tout en incitant les autres à agir dans le sens contraire à ce qu'elle semble dire -trop forte, quoi. Elle a quelques marionnettes en réserve, elle s'en sert. Mais dans le coeur des marionnettes, il se passe parfois des choses imprévisibles -et invisible. Et la grâce descend parfois par les fils les plus embrouillés, comme une flamme brûlante qui prendrait, pour tromper son (grand) monde, les formes les plus hiératiques et les plus épurées. Il n'y a pas de grâce, il n'y a que des preuves de grâce.
Une paire d'yeux sur un champ de course. Des mains qui ne font pas ce qu'elles ont l'air de faire. Un corps qui ne fait rien comme on dirait qu'il fait. Il est de l'élite des bandits en douce. C 'est un artiste, un aristocrate du vol sans préavis et sans violence, un magicien de l'entourloupe. Il n'a de compte à rendre à personne, même pas à sa mère, même pas au policier qui le traque. Même pas à ses amis, même pas à celle que son coeur traque sans le savoir. Même pas à son âme qu'il ignore. Il embrouille, il manipule, il ne sait que leurrer les corps et dérober les choses. Il ne sait que se tromper lui-même. Comme la grâce, en somme, qui finit fatalement par lui tomber dessus.