Beaucoup de bruits (à sa sortie) pour pas grand chose... Pas facile de faire un film de plus avec cette histoire-là. Avec cet homme-là. Scorcese s'y colle. Ses héros sont souvent des Christ, mais son Christ n'est pas un héros. Un peu de provoc facile (Jésus potentiellement adultère), quelques belles idées (Judas l'ami fidèle, comme chez Borgès, les romains descendant l'escalier d'Odessa en plein souk de Jérusalem), quelques fautes de goût aussi (Jean-Baptiste en gourou beatnik, Jésus qui s'arrache le coeur à main nue au milieu du ventre). Mais surtout, un message ambigu : ce Christ est un marginal épileptique, qui passe des paroles d'amour aux actes de guerre sans jamais cesser de répéter qu'il n'est sûr de rien, qu'il ne sait pas ce que Dieu attend de lui. C'est le doute fait chair, et l'Histoire n'a pas besoin de lui. Là est le vrai scandale, plus que ce rêve fait, le temps d'un envoutement sur la croix, de ne pas être Lui. Mélange, étrange parfois, de réalisme post-Persona et de conte oriental qui finit mal -mais on s'en doutait un peu.
Ca se passe au XIXème siècle en Nouvelle-Zélande. Quand les frèles corps d'Ada et de sa petite fille débarquent sur une plage, aux portes d'une forêt sauvage, pour un mariage arrangé, on ne donne pas cher de leurs peaux douces. D'autant qu'Ada est muette et qu'on la sépare tout de suite de son piano, sa voix, son âme, qui échoue par marchandage chez un voisin analphabète. Alors, il va lui falloir tout reconquérir : son indépendance, son art, sa vie, au prix de quelques sacrifices. Elle a tout à apprendre mais c'est elle qui donne les leçons et c'est ça qui la sauve. L'art et de la barbarie, les corps et la nature enfermés dans un bocal : c'est la recette de la passion.