On en prend d'autres (actrices, décor, réalisateur), et on recommence -en moins bien. Dans ce quasi remake paresseux du numero uno, Antonio, seul pilier encore en place est passé de la gendarmerie à la police municipale. Il a perdu (un peu) en prestige, quoique -toujours un bel uniforme et rien d'autre à glander que regarder passer les filles. Innovations : on est passé à la couleur, on a déménagé en Sicile, au bord de la mer, dans le village natal du héros et on lui a déniché un frangin prêtre, histoire de bien clarifier les enjeux dramatiques et moraux de l'affaire. Sinon, la typologie féminine ne s'est guère nuancée (bigotte coincée ou dévergondée affriolante, à votre guise, on n'a rien d'autre en rayon) et la subtilité du scénario pas des masses enrichie (plutôt l'une ? non plutôt l'autre !). Plus grand chose à croûter sur ces pains-là...
Le Cid, quand on est français, on connaît : on sait qu'il cause l'alexandrin couramment, qu'il souffre de cruels dilemmes incurables et on se souvient vaguement d'une querelle avec trois unités. C'était qui, celles-là, déjà ? Bizarre, il n'en est pas question ici. Pourtant il a du coeur, aussi, ce Rodrigue. Il aime aussi une Chimène, et tout irait pour le mieux si les beaux-pères ne s'avisaient de gâcher la fête. Le tout est traité en peplum tardif, dans un Moyen-âge ibérique pré-jihadique sous influence shakespearienne. Pas sûr que Gérard Philippe y retrouve son pourpoint. La morale est claire : ô rage, ô désespoir, le pouvoir et l'héroïsme vont rarement ensemble. Le Cid a choisi son camp, mais il n'aura droit qu'à une victoire post-mortem. Mais aux âmes bien nées, la gloire peut bien attendre le nombre des années.
Au début : bandes d'actu d'époque, qui commentent la triomphale visite de courtoisie du Fuhrer au Duce. On se croirait dans un remake pas drôle de To Be or Not to Be ou du Dictateur. Puis : début d'une journée pas comme les autres pour Antonietta, une ménagère romaine de moins de 50 ans -mais avec 6 gamins et 2 000 ans de machisme sur le dos. Sa marmaille et son mari s'en vont faire le salut fasciste au camarade visteur, en compagnie de la totalité de leur immeuble. Tous ? Non, un homme est resté là, aussi, dans l'appartement d'en face, au milieu de ses livres, dans un autre monde. Grâce à un oiseau en cage, à une concierge à moustache et à quelques malentendus, Antonietta et Gabriel s'échangent quelques mots, et même un peu plus, et même ce qu'ils n'ont pas, sur fond de discours militaires et de musique martiale. A peine une étincelle, le temps de croire que Trois Mousquetaires peuvent quelque chose contre deux tyrans. Rien, mais qui sauve l'honneur. Rien, mais qui change la vie.
PS : Honte aux DVDs René Chateau, qui ne proposent que la VF, et même pas avec la voix de Mastroianni !