A Londres, la nuit, se promènent de drôles d'oiseaux. Ce M. Verloc, par exemple : il fuit tellement la lumière qu'il vient de saboter l'éclairage public ; il fuit tellement la lumière qu'il vit dans un cinéma. M. Verloc a une épouse, aussi, qui ne se doute de rien, et un enquêteur de Scottland Yard aux fesses qui, lui, a les plus noirs soupçons. Derrière l'écran (de son cinéma et de ses nuits blanches), devant un étrange aquarium (qui en anticipe un autre), se trament de sombres complots. Il s'agit cette fois de faire exploser une bombe en plein coeur de Londres (décidément très en avance, les gars). Une histoire à tiroirs et à double fonds, qui permet à Hitchcok d'aiguiser ses meilleurs crayons : le suspense des comptes à rebours, la victime innocente, la surprise du destin qui abolit les surprises... Sans oublier les oiseaux, qui n'y sont pour rien et qui se vengeront.
On pourrait faire une thèse sur les symboles sexuels chez
Billy Wilder (ça a sans doute déjà été fait -sinon, j'ai raté ma vocation !) : mouvements involontaires du pouce, problèmes de tuyauterie et de bouteilles à déboucher, trappes cachées, démangeaisons, torticolis et courants d'air : un vrai artiste en allusions, sous-entendus et contournements de censure. Son héros préféré, l'Américain moyen, est ici encombré d'une imagination débordante et d'une bombe -pardon, d'une blonde- en voisine du dessus. En plus, il vient d'envoyer sa femme et son fils en vacances et, comme tous les Américains moyens, cultive avec soin son complexe de culpabilité. Le mythe est à portée de main, c'est beaucoup trop pour un Américain moyen.