Deux jeunes gens : un fils à papa et un fils de rien, pauvre mais ambitieux, payé par le papa de l'autre pour ramener le fiston à la maison. Une fille, un bateau, l'Italie. L'ombre d'un désir mimétique qui passe entre les deux hommes. Alors qu'ils sont seuls au milieu de l'océan, l'un tuera l'autre pour prendre sa place. Traqué, inquiet, il devra affronter les conséquences de son acte et lutter contre les effluves du remort. Un scénario de film noir tourné au grand air dans la lumière d'Italie. Alain Delon est beau et pervers à souhait dans ce polar solaire.
Le générique est très beau : un homme en noir avance, seul, dans le magnifique décor tout en pavés, escaliers et colonnades de l'architecture vaticane. Une fourmi traverse l'éternité. Stephen Fermoyle, donc, est prêtre. Formé à Rome mais américain de coeur et irlandais d'origine, carrure d'athlète, intelligence de compétition. C'est un spécialiste de l'histoire de la réforme. Ca tombe bien, le monde bouge : on le voit au turbin des âmes en divers points du monde occidental, entre les deux guerres mondiales. On suit ses problèmes de conscience et ses intéractions avec le monde des hommes. Sérieux comme un pape (qu'il n'est pas), un peu trop poli et honnête (pour le devenir), il croise la route de beaucoup de puissants et de gros cons, de femmes idéales et de filles perdues. Il résiste à la tentation d'épouser Romy Schneider, ce qui prouve la force de sa vocation. Une grande fresque en rouge et noir, plus politique (façon Tempête à Washington) que spirituelle (façon Dix commandements). Assez impressionnante au bout du compte.
Ludwig est un prince charmant parfait : jeune, beau, intelligent et amateur d'art, que rêver de plus. Sa cousine, c'est Sissi et c'est encore Romy qui s'y colle. Le décor et les costumes sont donc ceux d'un conte de fées. Mais il y a des toujours des vers qui se cachent dans les meilleurs fruits. Cette Sissi-là n'est pas la même que l'autre, elle ne croit pas aux princes charmants, elle vient de l'autre côté du miroir. Et le frère de Ludwig, il est encore plus beau que lui mais pas extrêmement équilibré. Et puis, il va trop loin dans les belles idées, ce prince-là : soutenir Wagner (ce débauché), construire des châteaux (immenses, somptueux et vides) en Baviève... En fait, il aime décidément trop les belles choses (et les beaux jeunes hommes) pour être honnête. C'est comme un long long opéra, filmé au ralenti, sur la décomposition d'un empire, d'une famille, d'un homme.
Bienvenue au réveillon du commissariat. Oui, il fait froid dehors. C'est glauque, c'est la province, quoi. Il ne manque rien, même pas le sapin de Noël à guirlandes. Le champagne, les petits fours et les noeuds papillons, c'est au rez-de-chaussée. Non, désolé, vous vous allez à l'étage, dans le bureau de l'inspecteur Gallien. Oui, c'est pour un interrogatoire. Oui, ça peut durer longtemps... Alors comme ça, vous êtes notaire de province. Et vous avez tué et violé deux petites filles... Non ? Peut-être ? Peut-être pas ? Comment ça, c'est la faute à votre dame !? Ca ne se dit pas, ces choses-là. Pas mal, la dame, d'ailleurs. Une belle silhouette de mante-religieuse. Et ça cause, et ça cause. Bon, ben moi je crois que je préfère aller me recoucher.